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Full text of "Suite du Répertoire du Théâtre français, avec un choix des pièces de plusieurs autres théâtres"

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m 


J 


SUITE 
DV  RÉPERTOIRE 


on 


THÉATHE  FRANÇAIS. 


12.    * 


à 


SENUS, 

IMPRIMERIE    DE  TREMBLAY. 


F*HBt*d  in    Francs, 


SUITE 

DU  RÉPERTOIRE 

THÉÂTRE  FRANÇAIS, 

4TEC  VK  CHOIX  DES   PIECBS  DE  PLUSIEUES  ÀVIHES 
TflÉATAES  f  ÀEBANGÉES  ET  MISES  EN  OUDRE 

PAR  M.  LEPEIMTRE; 

Il  fUicinÛES  DE  NOTICES  SUR  I.ES  AUTEURS  ;  LE  TOUT 
TXBJOHé  PAR  VUE  TABLE  CÉMlÊRALE. 

GRANDS-OPÉRAS.— TOME.   I. 


A  PARIS, 

CHEZ  M"^  YEUVE  DABO, 

^  U  LIBRAIMB  STÉRéOTYPE  ,   RUE  UAUTEFEUII'Ï'*  ,    »•    »    • 

iBaa, 


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n 


PRÉCIS 

HISTORIQUE  ET  LITTÉRAIRE 
SUR   L'OPÉRA. 

Lfe  considérations  morales  sou,  lesquelles  le 
theulre,  en  général,  peut  être  envisagé 
^Xent  prendre  encore  une  nouvelle  £ 
«on  les  applique  à  l'Opéra  en  particulier. 
»e  tous  les  genres  de  spectacles ,  c'est  à  coup 
Sûr  ce  u.  qu.  a  eu  le  plus  d'influence  sur 
h  c.T.lisat.on,  les  mœurs  et  la  morale  pu- 
bbque.  Un  moraUste  sévère  en  conda«ae»it 
certainement  l'introduction  parmi  nous 
comme  n'ayant  pas  peu  contHlmé  i  la  pro^ 
pagahon  de  tontes  les  Idées  de  Tolupt*!  dfe 

dansfe  siècle  où  nous  vivons ,  et  qui,  influant 
directemeat  et  indirectement  sur  la  conduite 
des  wdmdus,  deviennent  des  causes  plus  ou 
mo.Ds  efficientes  des  révolutions  poUtiques  et 
moralesqu,  troublent  les  sociétés  ou  cl^ngeÔt 
«  Kice  des  empires.  ® 


a  PAÉCIS    HISTORIQUE 

tacle  impossible  à  jirstifier  en  bonne  morale. 
Mais ,  sans  nous  élever  à  des  considérations 
ri  hautes ,  nous  ferons  observer  seulement  , 
que  9  si  aucune  intention  politique  n'a  présidé 
à  riiistitution  de  l'Opéra  chez  les  peuples  uao- 
demeS)  et  particulièrement  en  France,  il 
n'en  a  pas  moins  servi  par  la  suite  à  un  but 
politique,  à  celui  de  détourner  l'attention  des 
peuples  9  et  de  diminuerl'énergie  des  individus 
dont  les  gouvernemens  ont  pu  redouter  l'ex- 
plosion. Boileau ,  vigoureux  déprcciateur  de 
FOpéra ,  n'y  a  vu  qu'une  école  de  mollesse 
et  de  corruption  qui  le  lui  a  fait  caractériser 
ainsi  dans  sa  satire  X  ,  lorsqu'il  dit  à  Al« 
xîppe: 

Par  toi-même  bîemôt  eondoite  a  l'Opènr  J 

De  quel  ahr  peiujes-m  que  ta  sainte  Terra 

D'an  spectacle  encbdnteur  ia  pompe  harmonieuse , 

Ces  daiiset , -cesbéros  à  toîx iaxarienie : 

Entendra  ces  discoors  sur  l'amour  seal  roalans,  ' 

Ces  doocereot  Renands ,  ces  insensés  Bolan'ds^ 

Saura  d'eax  qa'à  Tamonr  comme  aa  seul  Dieu  sopr^e. 

On  doit  immoler  tout ,  insqu'â  la  vertu  même  ; 

Qu'on  ne  saurait  trop  tôt  se  laisser  enflammer; 

Qà'on  n'a  reçu  du  ciel  un  cœnr  que  pour  aimer;  ('J 

Et  tons  ces  lieux  communs  de  morale  lubrique 

Que  LuUi  mehanflà  des  «ons  de  «a  musique  ?i  ^ 

C)  Maximes  ibrt  ordinaires  dans  les  opérai  de  Quinanlt. 


L'abbé  Poullo  a  dît,  «  que  l'Opéra  était 
^  plos  spécialement  la  réuoioii  de  ces  arts 

•  îareutés  pour  servir  le  luxe  et  la  mollesse, 

•  de  CCS  talens  malheureux  destinés  à  rallu- 
>  mer  dans  les  cœurs  le  feu  des  passions  par 

•  l*eacbantement  de  tous  les  sens...  » 

Mais  Mercier  a  été  plus  loin;  il  a. supposé 
que  la  protection  que  les  gouYcmemens  ont 
^^rdée  jusqu'à  présent  à  ce  spectacle  en 
fnoce,  cachait  une  intention  politique  et  un 
to>  par  suite  duquel  tous  les  inconTéniens , 
^  le  poète  a  fait  un  tableau  si  piquant,  se 
Nuisent  à  peu  de  chose,  en  comparaison  de 
l'utilité  que  ces  zoêmes  gouvememens  en  re^ 
tireat.  a  L*Opéra  »  a  dit  Fauteur  du  Tableau 
^  Paris  «  est  entretenu  à  grands  frais  pour 
»  efféminer  le  courage^  fondre  ies  têtes  fortes 

•  de  la  nation  dans  le  creuset  de  la  voluptéi^ 

•  et  les  couler  en  mollesse.  » 

*l%ré  ce  que  le  poète.  Je  prédicateur  et  le- 
Philosophe  ont  pu  dire,  on  soutient  l'Opéra,  et 
^  l'eutretiendru  encore  loQg-teois  1^  grands 
('^;  et  le  gouremement  regarde  même 
«Wûmede  sa  gloire  de  le  soutenir.  Il  est  difficile 
dapprécieraujustecequelamorale  y  perd; 
«^  bien  certainement  les  ar^  y  g^?^^^  * 
Jttsaiplus,  si  l'effet  qu'il  peut  P'f^^**^^!,  «« 
^«oûammer  les  senr  dé  la  jeunes^  5  on  oe 


4  PBÉeiS   BISTOBIQUB 

peut  pas  dîrfe  positivement  qu*il  pervertît  son 
cœur  ou  égare  son  esprit  :  il  ne  parle  qu'au:r 
yeux  et  aux  oreilles^  et  ces  maximes  Jubrî—. 
t}ues,  que  lui  reproche  Boileau,  font  peu 
d'effet,  vu  quW  ne  les  comprend  pas  et 
qu'elles  sont  perdues  dans  la  musique  et  dans 
*ie  chant. 

Enûn,  nous  dirons  de  l'Opéra  ce  que  noud 
avons  dit  du  Théâtre  en  général ,  qu'il  est 
plutôt  un  résuHat  de  la  civilisation  qu'une 
cause  de  corruption. 

Laissant  de  côté  toutes  les  réflexions  mo- 
rales auxquelles  il  donnerait  lieu ,  et  qui  se-r 
raient  ici  complètement  inutiles  ^  ne  nous 
occupons  que  de  ce  qu'il  est  et  de  ce  qu'il  a 
été. 

On  peut  définir  l'Opéra  comme  l'a  fait 
La  Harpe  :  «  Une  espèce  particulière  de  draine 
»  formé  de  la  réunion  de  la  poésie  et  de  la 
»  musique ,  mais  de  façon  que  la  première  , 
»  étant  très  -  subordonnée ,  renonce  à  plu« 
»  sieurs  de  ses  avantages  pour  laissera  l'autre 
))  tous  les  sieils.  »  Ou  bien  c'est  un  drame 
comique,  tragique,  ou  pastoral,  oùl'actioD^  le 
sentiment  et  les  idées  se  chantent,  et  qui , 
pour  produire  l'illusion  sur  la  scène ,  a  tou* 
jours  besoin  du  secours  de  la  musique,  queV- 
quefgis  de  la  peinture  et  souvent  de  la  danse. 


Cesl   itfi  spectacle  5  comme  l'a  dk  Yol^ 
taire  : 

où  les  beaux  vers ,  k  danse ,  la  mnsiqoe, 
I/art  de  tromper  les  yeux  par  les  couleurs  y 
L'art  plus  heureux  de  séduire  les  cœurs , 
De  cent  plabirs  font  un  plaisir  unique. 

Pans  ce  composé  tout  est  meusionge  ;  mais» 
tout  est  d'accord,  et  cet  accord  en  fait  la  ve- 
nté. La  musique  y  fait  principalement  le 
charme  du  merveilleux^  et  le  merveilleux  y 
fait  la  vraisemblance  de  la  musique  :  c'est  un 
monde  nouveau^  où  il  nous  transpoirte  ;  c^est 
(â  nature  enchantée  qu'il  nous  r«présepte. 

Une  iatrigue  nette  et  facile  à  dénouer  ;  des 
caractères  simples;  des  incidens  qui  naissent 
d'eux-mêmes ,  des  tableaux  variés  ;  des  pas- 
•ions  tantôt  douces  et  tantôt  violentes  9  mais 
dont  l'accès  est  passagper;  un  intérêt  vif  et 
V>uchaat,  mais  qui,  par  intervalles,  laisse  resr 
pirer  l'ame  ;  voilà  les  sujets  q^ui  conviennent 
^u  4ramç  lyrique.  U  faut  tout  y  effleurer  et 
se  don&er  de  garde  d'y  rien  approfondir.  Le 
poète  qui  ne  peut  peindre  qu'à  grands  traits , 
et  qui  ne  sait  qu'approfondir,  n'est  pas  pro- 
pre à  rOpéra.  La  passion,  presque  unique, 
qui  doit  y  être  traitée,  c'est  Fanaour.  H  ^st 
l^resque  aussi  imposs^ïlc  de  fajireunbQn  Opéra 

I. 


&  PfticiS  B19T0l»QVC 

sang  amour  >  qiiè  de  faire  de  bonnes  lois  sans 
religion. 

L'Opéra  peut  embrasser  des  sujets  de  trois 
genres  dififêrens  :  le  tragique,  le  comique  ,  et 
le  pastoral  ;  mais  jamais  ce  qu'on  appelle  le 
dramaturge. 

Dans  la  tragédie  lyrique,  le  poète  doit  s'at- 
tacher plus  à  faire  illusion  aux  sens  qu'à  Te»- 
prit ,  et  chercher  plutôt  à  produire  un  spec5- 
tacle  enchanteur  qu'une  action  où  la  Yraisenl- 
blance  soit  fidèlement  observée.  îl  8*affraflchîtr 
des  lois  rigoureuses  de  la  tragédie ,  et  s'il  ai 
quelque  ^gard  aux  unités  d'îhtérêt  et  d'ac- 
tion ,  îl  viole  sans    scrupule  les  unités   de 
tems  et  de  lieu,  les  sacrifiant  aux  charmes  de 
kl  variété  et  du  merveilleux.  Ses  héros  sont 
plus  grands  que  nature  :  ce  sont  des  dieux  , 
ou  des  hommes  en  commerce  avec  eux,  et 
qui  participent  de  leur  puissance.  Ils  fran- 
chissent les  barrières  de  l'Olympe;  ils  pénètrent 
les  abîmes  de  Tenfer.  A  leur  voix  la  nature 
s'ébranle  ,  les  élémens  obéissent  ;  l'univerà 
leur  est  soumis.  Cependant,  quelque  effet  que 
produisent  sur  les  sens  l'appareil  pompeux  et 
la  diversité  des  décorations  ,  le  poëte  doit 
encore  plus  s'attacher  à  produire,  dans  les 
spectateurs ,  l'intérêt  du  sentiment. 
'  Alais  la  tragédie  lyrique,  quoi  qu'on  puisse 


IT  LITTBRAIRB. 

£te,  ne  peut  pas  être  assimUée  à  la  tragéij 

Ofdioalre.   Ces  deux  genres  de  drames  o 

sao5  don  te  des  rapports  bien  prochains;  ma 

ils  ont  encore  plus  de  différences  essentielle 

etceseraît  tout-à-fait  au  détriment  de  l'un  et  i 

l'autre ,  qu'on  chercherait  à  les  confondre.  1 

^édie  déclamée  est  une  imitation  bien  pi 

fidèle  de  la  nature  que  la  tragédie  notée,  l 

çectacle  où  l'on  va  chercher  le  plaisir  d 

sens  ayant   tout  autre,  ne  peut  produire  1 

Blêmes  effets*  que  celui  qui  ne  promet  abs 

hmcnt  d'autres  plaisirs  que  ceux  de  l'ame 

ûeYesprit  :  un  spectacle  où  tous  les  objets  < 

teir,  ti(us  les  tableaux  delà  volupté  sont  étal 

*iû8  cesse  à  nos  yeux  et  à  notre  imagination, 

peut  être  de  la  même  espèce  que  celui  qui 

cwmaît  d'aiîtres  moyens  d'émotion  que  la  U 

wuret  la  pitié.  Cette  illusion  soutenue  quepi 

duitlatragédiebienjouéenepeutjamaissetrc 

Yw  à  rOpéra ,  où  les  accessoires',  qui  ne  se 

<IQe  l'assemblage  de  toutes  les  séductions  ( 

•ensj  font  à  tout  moment  oublier  le  drai 

«t  la  musique,  et  blessent  trop  notre  rai^ 

pour  que  notre-  ame  soii  intéressée.  On  ce 

Yieodra  que  l'Opéra  serait  la  plupart  du  te 

1?*^  de  chose  sans  la  danse  :  or  ^  il  ne  peu 

a?oir  de  tragédie  là  où  il  y  a  des  danses  vob 


8  PBEGIS   BISTOftiQIJB 

tueuses.  Enfin  9  jan>aîs  la  tragédie  ohaqtée  ne 
poyrra  produire  l'effet  de  la  tragédie  déçlaoïée. 

En  Tain  on  chercherait  à  comparer  notre 
tragédie  lyrique  aux  tragédies  grepqMf^  qui 
étaient  déclamées  sur  une  espèce   de  réçî- 
fati  f  qu'on  nommait  mélopée ,  et  qui  avaient  des 
phœurSt  Nous  ayons  déjà  donné  ^  dan^  nos^ 
Considérations   sur  le  Théâire ,    î^s  calsoua 
pour  lesquelles  notre  système  théâtral  s'éloi- 
gnait de  celui  des  anciens  ,  et  c'est  en  consé- 
quence de  ces  raisons  mêmes  que  l'art  de  la 
tragédie  a  été  porté  beaucoup  plu3  loin  parm| 
pous  que  chez  ew^.  Il  est  donc  impossible  de 
confondre  notrç   opéra   et  la  tragédie  des. 
Athéniens  en  une  seule  et  même  chose. 

Le  théâtre  lyrique  peut  aussi  s'approprier 
le  genre  cooïique,  c'est^-à-dire ,  ks  pièces  de 
caractère,  d'intrigue  et  de  sentiment.  L^  co- 
mique dé  caractère  peut  être  d'une  ressource 
infiniei  pour  ce  théâtre.  Il  fournit  aux  poëtes 
vm  moyeAdé  sortir  de  la  monotoiiie  étemelle 
dfiS' expressions  fades  et  des  seo^îmcois  douce-, 
reux.  4ai  caractérisent  la  majeure  partie  de 
nos  opéDas.  Cependant  ce  genre  est  le  moin^ 
cultivé  au  grand  Opéra  ,  et  nous  n'ayons 
qu'un  très-petit  nombre  de  pièces  où  il  do- 
mine ;  telle  est,  par  exemple  9  la  joUe  comé- 
die des  Prétendus  de  Rochon  ;  telles  sont  l^s^ 


ET   LITTEBIIBB.  9 

pièces  de  la  Caravanne,  de  Panurgg^  et  quel- 
ques autres.  Les  comédies  lyriques  ont,  en 
quelque  sorte  ^  été  abandonnées  à  l'opéra- 
comique. 

Un  genre  qui  est  plus   abondant  dans  le 
ttéâlre  lyrique  c*jBSt  la  pastorale.  Plusieurs  de 
nos  poètes    s'y    sont  exercés  avec  succès, 
comme  Lamotte  et  Eoy  ;  Quinault  lui-même 
a  pris  souvent  le  ton  de  la  pastorale.  Le  fa- 
meux Devin  du  Village  dé  J.-J  Rousseau , 
est  une  très-jolie  pastorale.  Les  sujets  cham- 
pêtre font  plaisir  par  les  tableaux  naïfs  qu'ils 
noM^ présentent,  et  sont  les  plus  susceptibles 
d*ane  musique  gracieuse  pat  les  images  rian- 
tes dont  ils  sont  om^.  L'amour  pastoral  a 
je  ne  sais  quel  charme  ravissant  que  l'amou^ 
citadin  est  bien  éloigné  de  connaître ,  il  est  ac- 
compagné de  là  candeur,  de  l'aménité,  de 
la  simplicité  entièrement  inconnues  à  celui-ci. 
C'est  parmi  les  bergers  que  l'amour  est  vrai- 
ment un  enfant,  simple  comme  la  nature  qui 
^e  produit  :  il  plaît  sans  fard  et  sans  déguise- 
D^ent  ;  il  blesse  sans  cruauté  ;  il  attache  sans 
^\o\ftnce.  Pourtant  ce  genre  n*est  plus  ac- 
cueilli aujourdtiuî ,  il  paraît  trop  fade  et  trop 
tt^otiotone  à  une  génération  blasée ,  qui  ne 
▼eut  que  des  sensations  fortes ,  nouvelles,  et 
tiui  demande  à  être  fortement  remuée  par 


i 


des  peintures  sombres  et  des  actions  peu  com^ 
munes.  Kien  n*est  plus  opposé  au  genre  pas — 
toralquele  genre  rom«intique9  ()ui  a  déjà  t^ 
plus  grande  faveur  chez  nous.  On  ne  lit  plu'3 
les  Bergeries  de  Uacan,  encore  moins  cclic3 
de  Fontenelle ,  et  pas  même  celles  de  Léo- 
nard. Florian  est  tout-à-fait  passé  de  mode  , 
et  n'a  plus  d'imitateurs. 

Après  avoir  parlé  du  poëme ,  et  de  ce  qui  le 
constitue,  nous  allons  tracer  Thistoire  de 
l'Opéra  Français  aussi  succinctement  que 
possible. 

he  cardinal  Mazarinayait  tenté  d'introduire 
rOpéra  à  Paris,  Aèâ  164^,  où  il  fit  réprésenter 
8a  Festa  Théâtrale,  et  le  succès  qu'eut,  ea 
1647,  Orphée  et  Euridice  ,  autre  pièce  ita- 
lienne, fit  souhaiter  qu'on  donnât  de  pareils 
ouvrages  dans  notre  langue  ;  Y  Andromède  de 
Corneille,  jouée  avec  des  machines  et  des 
chants ,  en  1647  >  était  déjà  une  espèce  d'O- 
péra ,  ainsi  que  la  plupart  des  ballets  de  Ben- 
serade ,  où  Louis  XIV  commença  à  danser 
en  i65i ,  car  on  regardait  comme  très-ordi- 
naire alors,  que  le  Roi  lui-même  dansât  sur 
le  théâtre  de  sa  cour.  L'abbé  Perrin  entreprit 
enfin  de  surmonter  tous  les  obstacles ,  et  d'é« 
tablir  solidement  un  Opéra  français.  Il  fut  le 
premier  qui  hasarda  des  paroles  françaises ,  à 
la  vérité  fort  mauraises,  mais  qui  réussirent 


ET  LITT^EÀIEB.  11 

pmnrtaot  assez  bien  lorsqu'elles  eurent  été 
mises  en  musique  par  l'organiste  Cambert. 
C«tle  pièce  est  la  pastorale  de  Pomone,  qu'on 
représenta  pour  la  première  fois  à  Issy ,  près 
de  Paris  9  sans  danses  et  sans  machines.  £lle 
était  bien  informe  ,  mais  on  ne  s'y  connaissait 
^ères  à  cette  époque,  et  elle  fut  si  généra- 
lonent  applaudie ,  que  le  cardinal  en  fit  don- 
ner plusieurs  représentations  devant  le  roi  ^ 
cDcore  mineur  9  et  devant  toute  la  cour.  Deut 
ans  après  ces  deux  auteurs  donnèrent  >^mra^  / 
mais  dans  l'intenralle  des  deux  pièces  ^  Ma- 
zarin  fit  jouer  un  opéra  de  son  pays ,  intitulé 
Etcoie  Amante»  Ainsi,  il  protégeait  tout-à-la- 
fob  rOpéra  français  et  l*Opéra  italien  :  il 
voulait  absolument  rendre  la  nation  française 
diantante  :  il  s'en  trouvait  si  bien  I  G*était, 
selon  lui ,  un  moyen  de  faire  payer  les  Pari- 
siens :  Ils  content  ia  can^onnetta ,  disait-il  9 
il*  pagaront. 

Le  marqua  de  Sourdac,  doué  du  génie  du 
machiniste,  se  concerta  ayec  Pcrrîn  et  Cam- 
bert,  et  donna  la  Toison  d'or,  pièce  d'un 
genre  extraordinaire  qu'il  fit  d'abord  jouer 
dans  son  château  de  Neubourg  en  Normandie; 
c'est  donc  yéritablement  lui  qui  naturalisa 
l'opéra  en  France.  ' 

Perrin  obtint  enfin,  le  a8  juin  1669,  ^^* 


l!l  PRéCIS    HÎSTOIIQIIE 

lettres -patentes  «  portant  permîssioo  d'élaV 
9  blîr^  enlûYillede  Pairie  et  autres  duroyauiae^ 
n  des  académies  de  musique  pour  chanter  en 
1»  public  des  pièces  de  théâtre^  comme  il  se  pra- 
»  tique  en  Italie ,  en  Allemagne  et  en  Angle- 
»  terre ,  et  ce  ^  pendant  l'espace  de  douze 
»  années,  a 

Voilà  donc  la  date  précise  de  rinstitution 
de  rOpéra  en  France.  Les  trois  associés^ 
ne  pouvant  suffire  seuls  à  la  dépense  exces- 
eîye  d*un  pareil  établissement,  s'adjoi- 
gnirent un  siéur  Champerariy  bailleur  de 
fonds  ;  ils  firent  venir  du  Languedoc  les  plus 
habiles  musiciens  qu'ils  tirèrent  des  églises 
cathédrales;  de  sorte  .que  ce  fut  le  saoré  qui 
fournit  des  moyçns  d'établir  le  profane.  Oq 
commença  les  répétitions  dans  la  grande 
^alle  de  l* hôtel  de  Nevers,  Après  ces  prépa- 
Rétifs,  un  théâtre  fut  dressé  dans  le  jeu  de 
paume  de  la  rue  Mazarine  vis-à-  vis  de  la  ruç 
Guénégaud,  et  au  mois  de  mars  1671  on  y 
joua  différentes  pièces  lyriques,  parmi  les- 
quelles était  Pomone.  Mais  Lully ,  ayant  ob- 
tenu en  mai  167a  de  nouvelles  lettres-patentes 
en  forme  d'édit  supprimant  le  privilège  de 
Perrinetporlant  permission  de  tenir  Académie 
royale  (/^ma^iÊ^^^^,  en  fit  construire  un  nouveau 
théâtre  dans  .la  rue  de  Vauglrard,  par  les 
soins  de  Yigarani ,  machiniste  du  roi,  qu'il 


Bt  XKTTiftÂIRB.  l5 

assoeia  pcàir dix  années  à  un  tiers  du  profit, 
et  9  donna^  le  i5  novembre, -les  fêtes  de 
f  Amour  et  fU  Bacchus,  Après  la  mort  de 
Molière,  le  roi  donna  â  «Lnlli  la  salle  du  Pa-^ 
hin-Royal.  L'assooiadondeQuînaull,  arec  ce 
^lèbre  musieien,  donna  un  grand  éclat  à 
l'Opéra  ;  et  ce  n'est  que  depuis  cela  qu'il  de- 
vînt d'une  grâmde  importance.  Auparavant  la 
poésie  de  tous  les  opéras  français  était  on  ne 
peut  plus  mauvaise  ;  ce  ftit  réellement  Qui- 
nanlt  qui  la  tira  de  la  barbarie  pour  la  porter 
à  saperfecdon.  Il  fut  le  €omeille  du  théâtre 
l^ïîque;  îl  en  fut  aussi  le  Racine.  En  s'écar- 
tant  du  goât,  de  la  forme  et  de  la  coupe  or- 
dindircsdes  opéras  italiens,  il  créa  un  nouveau 
igenre,  conforme  à  l'esprit  et  au  goût  de  l;a 
nation.  Il  imagina  des  actions  tragiques  liées 
à  des  danses,  au  mouvement  des  machines  et 
vtsSL  ohangemens  de  décorations.  Tout  ce  que 
la  passion  de  l'amour  peut  fournir  de  vivacité, 
de  tendresse  et  d'e:spressions  fortes  dèsen- 
timens;  tout  ce  que  la  mythologie  offre  de 
ifi^veiUeux  fut  employé  par  ce  grand  pi>ëte 
dans  les  immortelles  compositions  lyriques  où 
il  est  resté  sans  égal.  Cependant  on  a  été 
long-tems  avant  de  lui  rendre  justice,  et  il 
n'y  a  pas^atre  vingts  ans  qu'on  ne  le  regardait 
pas  comme  un.poëte  au-dessus  du  coounun. 

Grands  Opéras,   j.  a 


i 


i4  pjrécis  HISTORIQUE 

Luiij  qui,  au  contraire ,  passait  dans  son 
êlède  pour  un  grand  musicien ,  serait  bi^n 
peu  de  chose  aujourd'hui  que  Tart  de  la  tnu-> 
Àîque  est  poussé  si  loin;  il  ne  dut  de  grands 
«uccès  qu*à  la  nouveauté  de  Tharmonie  ita— 
lienne  que  Ton  ne  connaissait  point  encore  en 
France,  aussi  Boileau  lui  dit^il  avec  beau- 
coup de  finesse.  «  Non-seulenient  tous  êtes  le^ 
»  premier  des  musiciens ,  mais  tous  êtes  le 
»  seul,  n  11  faut  dire  pourtant  qu'il  eut  le  grand 
mérite  de  trourer  des  chants  tout-à-fait  ana- 
logue à  ia  langue  française.  La  partie  du  ré-, 
xitatif  surtout    était  celle  où  il  excellait.  Il 
rayait  en  faire  une  déclamation  naturelle, 
«impie,  et  remplie  de  grâce  et  d'expression 
presque  toujours  noble,  quelquefois  sublime^ 
mais  trop  souvent  monotone.  Il  s'en  fallait  de 
beaucoup  que  toutes  ses  symphonies  eussent 
la  même  beauté;  tous  les  grands  airs,  ainsi 
que  les  ouvertures,  lorsqu'on  les  consulte 
encore   aujourd'hui  ,    semblent  jetés   dans 
le  même  moule;  à  le  bien  prendre,  il  n'a 
proprement  fait  qu'un  seul  de  chacun  de  ce» 
airs  dans  chaque  genre.  Avec  tout  cela  il 
éclipsa  Qoinault;  mais  s'il  eut  de  son  vi- 
vant ,  une  réputation  qui  ne  lui  a  guère  sur- 
vécu ;  celle  du  poëte ,  au  contraire  ne  brilla 
que  long-tems  après  sa  mort. 


I  ET  lITTilÂIlB.  Ï5 

Après  la  inort  de  LuUy,  TOpëra  passa  à 
k(a  de  ses  fils  qui  j  reaoncèrent ,  faute  d'à* 
Toir  les  talens  de  leur  père.  Depuis  il  fut 
tn^té  comme  une  espèce  de  ferme  à  l'instar 
de  celle  du  tabac,  et  fut  abandonné  à  des  di* 
lecteurs  ayides,  qui  s'enrichirent  et  le  lais- 
sèreot  dépérir.  Pendant  l'administration  de 
ces  hommes  Ineptes  et  cupides  9  le  spectacle 
ÎQt  mal  entretentl  et  le  public  mid  ser?i. 

De  tous  les  poètes  qui  ont  travaillé  pour  ce 
^tre)  les  seuls  qui  méritent  considération 
wnt,  depqis  Qiiinau.lt  :  Lamotte^  Danchet»  Roy» 
ï^uk,  Fontenelle,  Lafond,  Labruère,  Mon-' 
^îfs  Pellegrins  Cahusac,  Bernard,  J.-/.- 
ïoiwieatt,  Marmontel,  Sedaine^Du  Roilet,  De^ 
bustier j  M oUne,  Gaillards  Rochon,  Mo^ 
^^i  Esménard,  et  MM.  de  Jouy,  Baour^ 
^ormian,Guy  9  eio,  '■ 

^  musiciens  qui  se  sont  les  plus  distîn- 
sués  dans  les  grands  opéras  sont:  Lulfy, 
Cmpra,  Destouches,  Mouret,,  Rameau, 
Uondonvltle,  Rebel,  Francœur,  Rayer,  Dau- 
^Çne,  Rousseau,  Lenwine,  Monsigny , 
Oluck^  Pkcinif  Sacchlrù,  Grétry^  Mozart, 
Bsydn,  Paësiello,  Mehul,  et  MM.  Kreutzer, 
Spont'mlf  Persuls,  Lesueur,  Berton,  Ché-' 
'•«A/ni, et  autres. 

Wiotte  créa  deux  genres  nouTeaux  dans 


iB  PEÉCIS   BUSTOâlQtB 

rOpéra:  le  ballet  et  la  pastorale.  SDïiTri<?inp/k4^ 
i^ô^ar/*,  et  son /m^  sont  des  modèles  dans  ce» 
deux  genres.  Roy  et  Danchet  furent  peut-êtro 
les  auteurs  les  plus  féconds  en  opéras  qui  alen« 
jamais  paru  :  le  premier  tout  seul  en  adonnô 
près  de  trente;  mais  sur  ce  nombre  il  n'y  a  guèio 
queSémiramis,  les  Élémens  et  Callirfwé  qui 
puissent  rester  au  théâtre,  si  on  leur  fesait  une 
nouvelle  musique.  On  les  trouvera  dans  noter© 
collection  avec  l*Hé$ione  de  Danchet,  le  seul 
9péra  de  cet  auteur  qui  soit  resté, 
,  En  1753,  Rameau  parut  et  donna  Hippolyt^ 
et  Jricie,  qui  fut  bientôt  suivi  des  Indes  ga-^ 
luntes.  Alors  s'opéra  en  France  une  révolu- 
tion dans  la  musique.   Rameau,  musîcîea 
de  génie,  élève  sublime   varié  et  fécond, 
éclaira  la  Jïiation  par  ses  compositions.  Mais 
les  vieillards  attachés  à  l'ancien  genre ,  et  le» 
musiciens  ignorans  aimèrent  mieux  déclamer 
contre  le  goût  nouveau  que  de  le  suivre-  N'en 
est-il  pas  toujours  de  môme  dans  tous  les 
tems,  non-seulement  en  musique,  mais  eu 
bien  d'autres  choses  ? 

L'époque  où  éclata  la  dispute  des  deux 
musiques,  succéda  de  bien  près  à  celle  des 
querelles  théologiques  relatives  à  la  ùuile 
unlgenitus;  et  heureusement  qu'il  n'en  coûU 


pas  une  gouUe  de  «aog  :  il  n'y  eut  que  de$ 

flou  d'encre  de  répandus.  Ce  ne  fut  qu'une 

^lierre  civile  de  musiciens  dont  les  plus  habiles 

&feot  pATtugés.  Ils  formèrent  en  France  dedx 

partis  Twleaas  et  extrêmes  :  l'ancienne  et  k 

nouvelle  musique  lurent  pour  chacun  d'eux 

ape  e»pèoe  de  relig^îon,  pour  laquelle  à  la  vé<^ 

litéy  ik  ne  prirent  pas  les  armes;  mats  qui 

fal  l'objet  des  eontroverses  et  des  disputa  les 

plus  animées  qui  puissent  aroir  lien  sans 

combat.  Ainsi ,  de  tout  tems  >  il  y  a  tckijours 

en  quelque  chose  qui  a  divisé  les  espritsi 

lieareuxies  hommes»  lorque  dans  leurs  di8Sens« 

sion^  il  ne  s'agît  ni  de  la  liberté  politique,  ni 

de  la  croyance  religieuse.  Les  conruisions  de 

Saûnt-Siédard,  et  les  querelles  des  jansénistes 

^des  molinlstes  succédèrent  à  celles  sur  l'CK 

péra  et  auraient  pu  devenir  plus  dangereuses  : 

puûs  le  siècle  était  trop  civilisé  pour  voir  se 

jrenoureler  les  tems  de  la  ligue  ou  même  de 

h  fr^[ide. 

La  liaison  qui  se  forma  entre  Rameau  et 
Çdiqsacy  fit  triompher  le  musicien  qui  crut 
avw  trouvé  en  celui-ci  un  nouveau  QuiaauU; 
Cahusac  fut  toujours  très-loin  de  ce  graùd 
"poëte:  mais  pourtant  il  est  juste  de  dire  qu'il 
lot  ramena  le  merveilleux  sur  la  scène  ly- 
rique >  et  (pi'ii  sut  Mer  les  divçrtissemens  ^ 

2* 


iS  PKiciS  IlISTOftlQVB 

l'action  principale  d'une  manier^  si  intime  , 
que  l'un  ne  put  plus  subsister  sansTautre. 

Quarante  ans  après,  une  noufelle  guerre, 
ciylle  troubla  l'empire  de  Poljmnie^  et  la  ca- 
pitale et  la  province  se  divisèrent  entre  Pio-r 
cini  et  Gluck.  Ces  débats  ne  furent  pas  plos- 
«anglans  que  les  premiers  j  quoique  les  par-^ 
tisans  de  l'un  et  de  l'autre  fussent  près  d'en 
venir  aux  mains  ;  leurs  fureurs  s'évaporèrent 
,dans  une  foule  de  pamphlets  et  d'épigrammes» 
Piccini  l'a  emporté  sur  Gluck  sans  le  faire 
tout-à-fait  oublier;  et  le  musicien  allemand 
avait  certainement  un  grand  mérite,  puis? 
qu'il  compta  J-.J.-Aousseau  parmi  ses  en-? 
ibousiasies* 

L'anarchie  dans  laquelle  avait  toujours  été 
l'Opéra  en  France,  depuis-f(â  naissance,  cessa 
enfin ,  et  le  roi  Louis  XV,  se  déclara  protec- 
tecteur  de  l'Académie  royale  de  musique. 
L'administration  en  fut  donnée  au  prévôt  dea 
marchands  sous  l'autorité  d'un  ministre 
d'État,  qui  d'abord  fut  M.  d'Argenson  ;  et  cet 
ordre  de  chose  dura  jusqu'à  la  révolution  de 
1789.  Après  cela  l'Opéra,  regardé  comme  un 
établissement  national,  fut  entretenu  aux 
frais  de  tous  les  gouvernemens  quelconques 
qui  se  succédèrent  en  France.  Buonaparte  fut 
le  premier  qui  le  mit  sous  les  ordres  d'un 


ET  KITTiftÂlBB.  1^ 

directeur.  M.  Picard  est  le  premier ^  oomme 
•0  sait^  qui  ait  exercé  cet  emploi. 

C'est  certainement  un  spectacle  très-dls- 
peadieux,  et -qui  coûte  beaucoup  plus  qu'il  né 
rapporte;  mais  il  est  indispensable  non-seu* 
kment  aux  progrès,  mais  à  l'existence  des 
beaux  arts,  tels  que  ceux  de  musique,  des  dé^' 
cors  et  des  machines.  En  outre,  il  fait  Tirre 
des  milliers  d'indiridus,  considération  non 
nuttns  importante. 

On  ne  doit  pas  s^attendre  à  trouver  dans  la 
partie  de  nôtre  collection,  qui  contient  les 
drames  lyriques,  toutes  les  pièces  qui  sont 
lestées  au  répertoire  de  rrAcamdéie  royale  de 
musique.  Elles  sont  en  grand  nombre,  mtfis' 
les  trois  quarts  ne  se  soutiennent  que  par  la^* 
musique  :  c'«st  la  seule  raison  qui  les  a  £rit' 
rqiaraitre  sur  la  scène^  Nous  ne  pcmVons  donc 
reproduire  que  {les  opéras  où  Fon  troure  un; 
certain  mérite  littéraire ,  et  qui  puissent  snp* 
porter  la  lecture.  Il  en  est  une  foule  que  nous' 
avons  laissés  décote,  parce  qu'ils  ne  portent- 
point  le  cachet^  du  talent  dramatique,  que> 
l'action  en  est  languissante,  ou  le  style  éii- 
ble,  prosaïque  et  lâche.  TeUsontpar  exemple , 
Aiceste  où  Durollet  ne  s'est  montré  qu'un 
froid  imitateur  de  Quinault ,  et  un  traducteur 
encore  plus  froid  d'Euripide;  Orphée  tra- 


90i  PBiei»  filSTO&IQVB 

duotîea  pâle  de  ritaliea  où  Toa  aé  trouve  au-* 
cune  action,  et  qui  o*a  serri  qii'À  assurer  la 
célébrHéjde:  Gluck  :  Tarage  cet  opéra  fî^aeux> 
et  par  le  nom  de  Beaumarchais ,  et  par  les? 
allusioos  politiques  et  philosophiques  dont  il 
^t  plein;  mais  qui,  par  l'iQYraîsem1;xlanpQ  de 
L'intrigue,  la  bsurbarie  d^  sjtjle  et  l'absiirdito 
choquante  des  caractères,  doit  être  regardé. 
comme  uae  des  plus  plates  rapsodiosqui'soîeat 
sorties  de    iaplume  d^un  écrivî^in,  et  qqi 
prouve  avec  une  grande  évidencerimpuissance 
poétl(^ue,  tragique    et  lyrique  de  .Tauteur 
du  Mariage  de  Figaro. 

Après  eeliQ  nous  pourrions  encore  citer  una 
infinité  d'aulres  opéras  que  Ton  joue  souvent, 
Dciats  qiH  n'ooonpent  aucune  pkice  dans  la  lit^ 
térature,.  et  qu'on  n*a  réimprimés  que  pour  l'a-» 
sage  des  acteurs,  et  pour  qu'ils  puissent  j  ap- 
prendre leurs  rôles.  Nous  avons  donc -réduit 
à  tm  très^^tit  nombre  les  pièces  du  théâtre 
lyriques  qufe  nous  avons  ^t  entrer  dans  ce 
recueil  \  mais  en  y  rassemblant  aiiisi  TéUte  de 
ce  que  nos  poètes  oitt  composé  dans  ce 
genre  'j  nous  croyons  avoir  reiîdu  un  service 
à  la  littérature  et  fait  plaisir  à  tous  les  ama-« 
teurs  de  t^art  dramatique  qui  ont  pu  s'é- 
tonner que  les  éditeurs  du  premier  Réper-v 


ET  I.1TTÂA11BB.  SI 

Vohne  n'j  aieat  point  fait  entrer  cette  partie  du 
'Qièîitcfe  français.      ^ 

Si  l'on  nous  fesaît  observer  que  les  pièces 
jouées  à  l'Opéra  ne  font  point  partie  du 
Théâtre-Françals ,  nous  répondrions  que  cela 
est  yral,  si  Ton  entend  par  cette  dénomination 
l^ensemble  de  toutes  les  pièces  jouées  sur  le 
tbcâtre  rojal  qui  porte  ce  nom,  et  qui  est  éta- 
Ui  maintenant  rue  de  Richelieu  ;  mais  que 
lions  devons  appliquer  à  ces  mots  la  signifia 
catioa  littéraire  qu'ils  doirent  aToir,  c'est-â- 
fc»qu'ib  doivent  être  employés  pour  ex- 
primer l'ensemble  de  toutes  les  bonnes  pièces 
to'tes  dans  notre  langue,  et  représentées 
sur  tous  nos  théâtres  quelconques.  Le  théâtre 
Français  enfin,  comme  le  théâtre  Anglais,  le 
ihiàtre  Italien,  le  théâtre  AUemand  et  le 
^^re  Espagnol  se  compose  de  tragédies,  de 
comédies, de  drames  déclamés  ;  de  tragédies, 
drames,  comédies  et  pastorales  lyriques ,  d'o- 
péras-oomiques  et  de  Vaudevilles.  Une  bran- 
che de  littérature  qui  doit  son  éclat  à  un  poète 
tel  queQuinault,  doit  trouver  sa  place  dans 
uue  collection  dramatique  telle  quç  ceUe-ci<  . 


ALCESTE, 

LE  TRIOMPHE  D'ALCIDE, 

TRiGÉDIE-LYRIQUE  EN  CWQ  ACTES; 

PAR  QUINAULT/ 

UTOUCh£e  PÂA  MjLllMORTSL.; 

*«ïttei^ ,  ponr  la  première  fois,  aa  moii  de  jad- 
'*f  i6|;4,  et  remise  au  théâtre  en  1 7  Sg ,  et  le  i5  no- 

▼eabro  1757. 


^el 


j 


SECONDE  NOTICE 

SUB  QUIKAULT. 

Lb  lecteur  trouyera  une  première  notice 
sur  Quinault  dans  le  tome  a  des  Comédies 
en  vers 9  ou  tome  9  des  Comédies  du  second 
ordre  de  l'ancien  Répertoire;  maîs^  tu  qull 
n'y  est  point  considéré  comme  poète  lyri- 
que, nous  allons  ajouter  ici  tout  ce  qui  le 
regarde  sous  ce  rapport. 

Lorsque  Boileau  disait  tant  de  mal  de  Qui- 
nault dans  ses  satires  9  c'est  que  oelui-ci 
n'ayait  point  encore  fait  d'opéras.  «  Il  était 
>  fort  feune,  et  moi  aussi,  dit-il  0  dans  une 
prè&ce  de  ses  œuyres^  «lorsque  fécriyais 
»  contre  lui  ;  il  n'ayait  pas  fait  alors  la  plu- 
»  part  des  onyrages  qui  lui  ont  acquis  depuis 
»  une  juste  réputation.  » 

Cependant  Boileau,  quoique  réconcilie  de 
)K)nne  l^eure   ayec  Quinault,  ne  l'apprécia 
jamais  bien;  il  y  a  plus  même,  il  blâmait  le 
^    genre  de  l'opéra.  x 

I       Ces  doooeteiix  Rttiaodfe ,  tel  ioieiisés  Rdands, 


Et  tout  ce»  liccR  conoiiir^  de  morale  kMqae 
Que  Lolli  rédbioflb  des  aoos  de  sa  nitisiciae. 
Grands  Opéras.  l.  3 


a^  SECONDE  VOTIGE 

Mais  Boileau  consenra  toujours  un  peu  de; 
fiel  contre  lui,  et  cela,  a-t-on  dit,  parce  qu^ 
le  poëte  lyrique  eut  le  bonheur  de  réussir 
dans  les  louanges  qu'il  donna  à  Lonîs  XIV 
dans  ses  prologues,  tandis  que  le  satirique  , 
invité  par  ce  monarque  à  en  faire  nrv  ^ 
échoua  si  complètement,  qii'aucon  com- 
positeur ne  put  mettre  ce  dialogue  en  musi- 
que. Il  n'était  pas  plus  propre  au  genre  ly- 
rique, qu'au  genre  pindarique,  n'ayant  ni 
inspiration  ni  chaleur  d'ame.  Cependant  les 
prologues  de  Quinault  ne  sont  plus  lus  à 
cause  de  leur  monotone  continuité  d'adulation. 

Mais  autant  Quinauh  fut  rabaissé  par 
Boileau,  autant  il  a  été  élevé  par  Voltaire. 
Il  y  a  un  juste  milieu  à  prendre  entre  les 
infustes  critiques  du  législateur  du  parnasse 
français  ;  et  les  éloges  outrés  du  plus  fécond 
de  nos  poètes.  Labarpe  seul,  jusqu'à  présent  y 
nous  semble  avoir  porté  un  jugement  con- 
Tenable  des  opéras  de  ce  poëte. 

«  Quinault  a^t-il  dit,  n'a  sans  doute  ni  cette 
audace  heureuse  de  figures,  ni  cette  éloquence 
de  passion,  ni  cette  harmoniejsayante  et  yariée» 
ni  cette  connaissance  profonde  de  tous  les 
effets  du  rhythme,et  de  tous  les  secrets  de  la 
langue  poétique  :  ce  sont  là  les  beautés  du 
premier  ordre  ;  et  non-seulement  elles  ne  lut 
étaient  point  nécessaires,  mais,  s'il  les  avait 
eues,  il  n'eût  point  fait  d'opéra,  car  il  ii*au- 


nit  rien  laissé  à  foire  an  ipusîcien.  Mais  il  a 
sonreot  une  élé^nce  facile  et  uq  tour  nom- 
breux ;  son  ^pression  est  aussi  pure  et  aussi 
jBsteqiie  la  pensée  est  claire  et  ingénieuse  ;  ses 
constructions  forment  un  cadre  parfait  où  ses 
idées  se  placent  comme  d'elles-mêmes  dans 
oa  ordre  lumineux  et  dans  un  juste  espace  ; 
les  yers  coulans^  ses  phrases  arrondies ,  n'ont 
pas  l'espèce  de  force  que  donnent  les  inyer- 
sîons  et  les  images;  ils  ont  tout  l'agrément 
qui  nait  d'une  tournure  aisée  et  d'un  mélanee 
continuel  d'esprit  et  de  sentiment,  sans  qu  il 
j  ait  jamais  dans  l'un  et  dans  l'autre  ni  re« 
dierche,  ni  traTail.  Il  n'est  pas  du  nombre 
des  écriraios  qui.  ont  ajouté  à  la  richesse  et 
à  Ténergie  de  notre  langue;  il  est  un  de 
ceux  qui  ont  le  mieux  fait  roir  combien  on 
peut  la  rendre  souple  et  fiexible  (i).  Enfin , 
6*il  paraît  rarement  animé  par  le  génie  des 
Ters,  il  parait  trës-familiarisé  avec  ks  grâces; 
et,  conune  Yirgile  nous  fait  reconnaître 
Yénus  à  l'odeur  d'ambrosie  qui  s'exhale  de 
h  dietelure  et  des  Têtemens  de  la  déesse, 
de  mûme  quand  nous  venons  de  lire  Quinault, 
il  nous  semble  que  l'Amour  et  les  Grâces 
viennent  de  passer  prés  de  nous.  » 
Plusieurs  critiques  ont  reproché  à  Quinault 


(OQatlqa'on  a  ditcpxt  Qoinaiilt  a  dntpMc  la  langue. 


I 


2^  SBOOUDB  MOTICV?' 

d'être  trop  douxerewj^y  même  dans  les  inô«- 
mens  les  plus  tragiques.  Cependant  11  y  a 
plusieurs  endroits  de  ses  opéras  où  il  a  prouvé 
qu'il  savait  prendre  tous  les  tons  quand  \\  le 
fallait.  On  n'a  qu'à  lire  le  monologue  de  Blèduse 
dans  Persée^  pour  s'en  convaincre. 

Pallas,  la  batbare  P&lkis, 
Fat  îaknise  de  mes  appas ,  etc. 

Nous  pourrions  encore  citer  ^e  morceau  de 
la  fioreur  Roland»  commençant  ainsi: 

Taisez-vous  malheareax  »  osere^vous ,  sans  cesse ,  etc. 

Et  la  preniière  scène  du  5*  acte  de  Proser-« 
pine>  où  Pluton  dit  : . 

yous  qui  reconnaisses  ma  suprême  puissance, 
Dopnez-moî  dçs  conseils ,  donnez-moi  du  secours. 
L'orgueilleux  Jupiter  m'offense  :  etc. 

On  l'a  blamè  avec  bten  plus  d'injustice 
encore  de  ce  que  sa  yersification  était  saas 
perf  et  sans  force,  mais  une  yersificatîon 
forte  serait  un  défaut  dans  les'  opéras  qui 
doiyent  respirer  une  élégante  mollesse,  comme 
la  poésie  douce  et  coulante  serait  un  défaut 
dans  un  suj^t  mâle  de  tragédie.  Le  grand  talent 
d'un  poète',  est  de  savoir  proportionner  son 
9tjle  au  genre  qu'il  adopte;  et  cer(;es,  jamcûa 


SUA   QUINAULT.  SQ 

depuis  t^ainault,  personoa.n*a  mieux  connu 
le  langage  de  là  poésie  lyrique ,  si  même  il  j 
a  jamais  été  égalé. 

Un  genre  où  Quinault  eût  încofilestable- 
ment  excellé ^  c'est  celui  de  la  poésie  légère; 
plnsieurs  passages  de  ses  opéras  en  oi&ent 
d'excellens  modèles.  Il  a  su  y  prendre  aussi 
\e  ton  et  la  poukur ,  jwit  de  l'idylle,  soit  de 
l'élégie ,  soit  même  du  madrigal  ;  c'est  peut- 
être  même  à  causedc  la  conformité  de  Voltaire 
avec  lui  pour  cette  dernière  espèce  de  poésie, 
que  Yoltaîre  en  a  parlé  avec  un  enthousias^ 
me  qu'il  pousse  souvent  trop  loip^ 

Le  grand  talent  de  Quinauh  ne  peut  pas 
empêcher  lés  connahseurs  ié  lui  trouver  des 
défauts.  On  est  obligé  de  recognaî^e  qu'il 
a  un  peu  trop  de  ci&tte  mollesse  où  il  excel- 
lait, et  qu'il  prodigue  trop  oelte  galauterie 
Tolup^euse  qui  est  l'ame  de  ses  pièces.  Il 
j  a  presque  toujours  partie  carrée  d'amour 
des  quatre  amans,  do^t  les  feux  se  croisent 
dans  ses  opéras ,  où  il  multiplie  trop  les  épi^ 
sodés.  Il  rend  amoureux  d'une  manière  ua 
peu  trop  fade  des  personnages  chez  qui  les 
passions- les  plus,  tendres  même»  devraient 
au  moins  avoir  une  couleur  héroïque  ou 
sombre;  tels  qu'Hercule,  Pluton,  Roland  et 
Thésée.  Il  nous  fait  toujours  voiç  de  grands. 

3. 


i 


30  SECONDE   NOTICE 

rois ,  et  des  vieillards  mômes  soupirant  comme 
des  bergers,  et  parlant  de  perdre  la  vie  s'ils 
n'obtiennent  l'objet  de  leur  flamme  :  chez 
lui  les  personnages  les  plus  rébarbatifs,  ont 
toujours  la  tendresse  à  la  bouche,  et  le  roi 
des  enfers  ne  le  cède  à  qui  que  ce  soit  ea 
amoureux  penchans  et  en  langoureux  dis- 
couirs.  Il  est  dii&oile  de  ne  pas  rire  lorsqu'il 
lait  dire  à  Plutou  : 

Les  aeceos  plaintifs  de  sa  voix 
Oot  ému  moo  cceur  inflexible  ;  , 
Qu\io  cœur  &er  est  troublé,  quand  il  derient  sçnsible 
Peur  la  ptemièrç  fois  ! 

£t  quand  son  confident  loi  dit  : 

Le  tém»  d'mmcr  n'est  pas  connu  ;         * 

II  faut  Tattendre. 
Quand  ce  tems  &tai  çstveuUy 

Il  &ut  se  rendve* 

Quel  Intéressant  ingénu  que  ce  sensible 
Pluton,  le  geôlier  des  morts!  On  croirait  pres- 
que qu'il  sagît  d'Une  jeune  bergère  qui'com- 
inencc  à  sentir  son  cœur  parler  pour  la  pre- 
mière fois.  ^ 

Un  poëte  qui  prêterait  aujourd'hui  un  lan- 
gage si  doucereux  et  si  mielleux  à  des  per- 
sonnages împosans  ou  puissans,  se  ferai!  mo- 
quer de  lui. 


SïTlBk  QUIHABLT.  5l 

I  Maiè  Quînault  se  confonna  en  cela  au  goût 
âesoû  siècle ,  où  la  galanterie  romanesque  et 
'complimenteuse  était  en  grande  vogue,  et 
où  les  lectures  ordinaires  des  gens  de  qua- 
lité étaient  les  romans  de  Scudéri  et  de  la 
Calprenède.  Racine  même  n'a  pu  se  soustraire 
à  cette  contagion;  et  il  a  quelquefois  outré  la 
dose  de  galanterie  qu'il  donne  à  ses  héros* 

Au  surplus ,  on  ne  peut  pas  absolument 
blâmer  Quinault  d'avoir  exploité  le  domaine 
h  merreilleux.  S'il  a  pris  tous  ses  sujets 
dans  la  fable  ou  dans  la  magie,  c'est  que  là 
WTikment,  tous  les  arts  parlent  à  toutes  le» 
passions.  La  poésie,  la  musique,  la  dause  et 
les  décorations  doîyent  concourir  à  1  embel- 
lissement de  ce  genre  de  spectacle ,  a'»»',]^   . 
b«t  presque  exclusif  est.  d'intéresser  et  dé- 
mouYoir  les  sens.  Le  fond  du  drame,  ainsi 
<iue  l'a  imaginé  Quinault,  qu'on  doit  en  re- 
farder comme  l'inventeur  en  France,  doit 
ûtre  gracieux,  et  le  terrible  ne  doit  s'y  faire 
sentir  que  par  moment.  Il  n'a  manqué  à  ce 
poêle  que  d'avoir  resserré  son  action  en  moins 
«i'actes;  car  un  opéra  en  cinq  actes  est  tou- 
jours trop  long,  si  bon  qu'il  soit.  Il  Inl  » 
manqué  aussi,  dans  les  morceaux  d'un  nvou- 
Tement  passionné    (  agUato  )  ,  l'égobte   ae 
nombre  et  de  cadence  que  Métastase  a  le  pro- 


P2  SEGORDE   NUT1{:;S 

mierobservée  parmi  les  poètes  italiens^  el  (|u< 
sçul  et  tout  récemment  a  pratiquée  M.  Hofi*-^ 
mapa^  p^^rqii  les  poëtes  français. 
-  Toutefois  Métastase  est  bien  loin  d'avoir 
conçu  le  drame  lyrique  comme  Quioault. 
f  eicfectionnant  l'ouYrage  commencé  par  Apos- 
tolo-Zéna^  il  puisa  tous  ses  ouvrages  dans 
rbistoire.  Aussi  ses  opéras  sont-ils  tous  cte^ 
tragédies,  tandis  que  ceu^  de  Quinaujt  sont 
impropreoient  appelés  tragédies'^yriqufis. 

Vopiéra  français,  d'fiiUeurs,  est  un  genre  à 
part.  Il  a  été  porté,  sous  le  rapport  musical , 
à  sa  plus  haute  perfection  ;  et  les  hrillans  ac- 
oedsoires,  tels  que  les  ballets  et  les  dôcors,t  en 
-font  par  leur  ensemble  un  spectacle  unique 
en  Europe, 

Ua  des  grands  mérites  de  QuiuauU ,  et  q^| 
fait  oublier  ses  médiocres  dé&uts;  c'est  qu'il 
aratt  un  talent  particulier,  non  pas  sèulemeat 
pour  foire  des  vers  bons  à  mettre  en  chant , 
ainsi  qu'à  être  déclamés,  mais  pour  faîre  dea 
drames  charraans  et  d'un  genre  qu'il  a  créé. 
Tous  ses  opéras  sont  bien  intrigués  ;  Taction 
y  est  bien  développée,  et  Us  font  le  mçine  effet 
j\  la  lecture  que  des  tragédies  ou  dçs  comé- 
dies ;    Les  auteurs  d'aujourd'hui  ont  donné 
dans  l'ogposé  d'une  manière  si  extrême,  que 
les  trois-quarts  des  opéras  faits  depuis  un  demi- 


sut   QCINAULT.  ÏS 

siècle  sont  ce  qu'on  peut  appeter,  écoartés,  et 
4  peine  supportables  par  leur  concision ,  leur 
s^eresse  et  la  brléyeté  du  dialogue. 

Tous  les  opéras  de  Quinault  que  nous  don* 
Dons  ici,  ne  sont  point  tels  qu'il  les  a  laissés* 
Noos  ûYone  cru  dcToir  adopter  pour  la  ma- 
jeure partie,  les  changemens,  additions  e| 
coupures  qui  y  ont  été  faits.  Nous  avons 
donné  les  ups  en  entier,  sans  rjen  changer  au 
texte  de  l'auteur,  tels  qn^Jtys,  tsis  ^  JPro^ 
urpine,  Phaéion ,  Jmadis  et  Artnide.  Nous 
Q'aTons  donné  les  autres  quQ  réduits,  tels  que 
Atcute^  Thésée  et  Roland^ 

Nous  ayons  ajouté  des  variantes  à  ceux  des 
opéras  réduits,  oO  ce  qui  a  été  supprimé  A  lu 
représentation  est  bon  4  CûQserrer  A  la  lec* 
ture ,  comme  Roland» 

Enfin,  nous  ayons  donné  ^mx  yaHautes  les 
diangemens  faits  par  Marmontel,  dans  l'opéra 
d'Atys,  qu'il  a  réduit  à  trois  actes  fort  courts, 
où  Quinaolt  est  trop  dénaturé,  et  qui  se  trouve 
réduit  aux  proportions  d'une  cantate  oxi  d*an 
oratorio. 

Nous  n'avons  pas  voulu  afouter  &  Pvoser^ 
pine  des  variantes  qui  indiquassent  les  cou^ 
pures  ^  réductions  et  cbangemens  que  GuiUard 
y  a  faits,  en  i8o3,  parce  que  cet  auteur  a  tel- 
lement défiguré  la  pièce  de  Quiniuilt,  qu'elle 


i 


34  SECONDE   NOtiCB 

en  est  méconnaissable.  C'est  un  nouvel  opéi-.a 
qu'il  a  fait  avec  les  membres  de.  ce  poëte,  e< 
il  s'en  faut  de  beaucoup  que  cette  Proserpîno 
ainsi  bâchée ,  refaîte  et  refondue ,  valle  cello 
de  l'auteur  d'Armide. 

Outre  les  opéras  que  nous  insérons  dans 
notre  recueil,  Quînault  en  a  fait  beaucoup 
d'autres ,  qu'on  ne  lit  ni  ne  rcptéseùte  plus. 
Ce  sont  par  exemple  :  Les  Fêtes  de  i'A-^ 
mour  et  de  Bàcchus,  Cadmus,  (e  Triomphe 
de  i*  Amour ,  le  Temple  de  (a  Paix. 

Nous  ne  parlerons  pas  ici  de  ses  tragédies  et 
de  ses  comédies  ;  elles  sont  mentionnées'dans 
la  première  notice  de  l'ancien  Répertoire 
dont  celui-ci  est  la  suite. 

Il  a  laissé  aussi  une  très-jolie  description 
en  vers,  de  la  maison  de  Sceaux,  que  l'on 
trouyera  imprimée  dans  le  quarantième  tome 
de  la  collection  des  poêles  de  madame  Dabo. 

L'Académie  française  fit,  on  ne  sait  pour- 
quoi, quelque  difficulté  à  sa  réception  :  ce-* 
pendant ,  ses  opéras ,  dans  lesquels  if  s'était 
montré  le  premier  homme  de  son  siècle, 
comme  Corneille  dans  la  tragédie,  et  Molière 
dans  la  comédie ,  eussent  dû  le  faire  admettre 
sans  hésitation.  Mais  à  cette  époque-là,  comme 
aujourd*hui,  être  grand  littérateur  ou  homme 
de  génie ,  6e  n'était  pas  toujours  un  titre  suf* 


SUE   QUllIlULT.      ^  55 

feant  pour  être  admis  dans  Tillustre  compa- 
cte ;  il  fallait  encore  être  protégé.  Aussi  Té* 
tiît-îl  par  Colbert,  et  même  par  Louis  ÎIV. 
Ce  monarque  lui  donna  ^  en  outre^  le  cordon 
de  Saint-Michel,  avec  une  pension  de  deux 
mille  livres.  Lullj,  qui  l'aTait  si  bien  appré- 
cié^ lui  donnait  quatre  mille  livres  de  chacun 
de  ses  opéras. 

Comme  il  avait  mêléT  l'étude  du  droit  à 
edle  de  la  poésie ,  il  se  trouva  dans  le  cas 
d'arranger  les  comptes  d'un  ricke  négociant, 
dont  il  épousa  ensuite  la  veuve,  qui  lui  ap- 
porta plus  de  cent  mille  écus  de  fortune. 
Tout  cela  réuni  fesait  un  sort  très -brillant 
pour  un  poète;  surtout  dans  un  siècle  où  la 
valeur  réelle  de  l'argent  était  triple  de  celle 
d'aujourd'hui,  à  égalité  de  valeur  nominale. 

Cependant,  il  a  osé  se  plaindre  de  la  mé-    ' 
diocrité  de  sa  fortune  dans  ces  jolis  vers  ; 

Cest  arec  peu  de  biens ,  no  terrible  devoir 
De  le  sentir  pressé  d'être,  cinq  fois  bean-père. 

Quoi  !  cinq  actes  devant  notaire 

Vonr  cinq  filles  qall  faut  pourvoir  ! 

G  ciel!  pcnt-on  jamais  avoir 

Opéra  phis  fikcheax  à  faire  ! 

Ce  sont  là  des  plaintes  de  poSte,  et  l'on  sait  ^ 

trop  à  quoi  Ton  doit  s'en  tenir,  | 


5G  ^  S1SC0VDC  Noncfi 

De  ses  cinq  fiUcs,  trois  le  tirèrent  d'em-* 
barras  en  se  fesant  religieuses.  Cela  ne  lui 
fait  point  d'honneur.  Un  particulier  qui  avait 
environ  soixante  mille  francs  de  rente  d'au- 
jourd'hui, pouvait  très-bien  doter  toutes  ses 
filles  9  en  eût-il  eu  dix. 

A  peine  sortait-il  de  sa  cinquantième  année» 
qu*îl  fut  assailli  de  j  dégoûts ,  d'insomnie  9 
de  langueurs  :  pendant  deux  ou  trois  mois  il 
se  sentit  mourir ,  pour  ainsi  dnre,  plusieurs 
fois  par  jour,  ayant  continuellement  des  dé- 
faillances. Il  se  repentft ,  par  principe  de  dé- 
votion ,  d*avoir  consacré  son  tcms  à  des  opé- 
rask  Sa  femme  même^  particulièrement  mue 
par  des  idées  religieuses  5  ne  Tavait  épousé 
qu'à  condition  qu'il  renoncerait  au  théâtre  5 
qu'elle  regardait  comme  tout*à-faît  profane, 
et  il  ne  se  remit  à  faire  des  opéras  que  par  la 
volonté  absolue  de  Louis  XIV.  Ainsi,  il  a  dû 
son  immoitalité  littéraire  aux  ordres  d'un 
gouvernement. 

Pour  expier  ce  qu'il  regardait  comme  d'an- 
ciennes erreurs,  il  avait  commencé  un  poëme 
sur  l'extinction  en  France  de  la  religion  réfor- 
mée, lorsque  la  maladie  l'emporta,  le  vingt- 
six  octobre  1688,  après  avoir  composé  pour 


loi-même  cette  épUaphe  d'trae  skaplteité  re- 
marquable. 

^^tssDi ,  arrête  ici  poar  prier  nn  moment  ;    * 

Cctt  ce  qpe  des  TÎvans  les  morts  peuvent  attendre. 

Qnuid  ta  soras  aa  monomeot , 

On  aora  soin  de  te  le  rendre. 


Vota.  Les  Ters  aionti^s  par  MarmonUl  sont  précédés  de 
paiemels. 


Graads  Opd*a«.  I. 


PERSONNAGES. 


îALCIDE  ou  HERCULE- 

LYCAS ,  confident  d'Alcide. 

ADMÈTE ,  roi  de  Thessalie. 

CLÉANTE,  écnyer  d'Admète, 

lALCESTE ,  princesse  d'Yolcos. 

GÉPHISE,  confidente  d'Alceste. 

PHÉRÈS ,  père  d'Admète. 

LYGOMÊDE  ,  fière  de  Thëtis,  et  roi  Jt  l'île  dcScyros. 

ÇTRATON ,  confident  de  Lycomède. 

Troape  de  Soldats  de  Lycomèdf . 

Troupe  de  Soldats  thessaliens. 

(APOLLON. 

Troupe  de  pleureuses. 

Prêtres  funéraires. 

La   ?BlliaPAI.B   PLEUBEUSC^ 

tlroupe  de  Divinités  dt  la  âier. 
THÉTIS. 

Troupe  de  matelots. 
]ÉOL£ ,  roi  des  Vents, 
DIANE. 
MERCURE. 
PLUTON. 
PROSERPINE, 
iUne  onobre  rebutée. 
lUne  ombre  heureuse. 
L'OMJUaE  D'ALCESTE. 
CARON, 

(ALECTON,  l'une  des  Furies. 
Suivans  de  Pluton,  chantant,  dansant,  et  rolant. 
Chœur  des  Peuples  de  la  Grèce. 
Troupe  dé  Bergers  et  de  Bergères. 
La  scène  se  passe  dans  la  ville  d'Yoloos,  en  Tliessalie. 


ALCESTE, 

TRAGÉDIE-LYRIQUE. 

ACTE  PREMIER. 

Le  Uiéàtre  représente  on  port  de  mer,  où  Ton  Toit  un 
grand  Taisseau  orné  et  préparé  pour  une  fête  galante , 
au^milîea  de  plasieurs  vaisseaux  de  guerre. 


iSCÈNE  I. 

âLCIDEy  LYCAS,  CBceuB  de  TaiiiAi.iEBr s, 

que  l'on  oe  voit  poiol. 

CHceuR. 
V  iTEï  )  vivez ,  heureux  époux. 

ITCAS. 

Votre  ami  le  plus  cher  épouse  la  princesse 

La  plus  cbarmante  de  la  Grèce  ; 
Lorsque  chacun  les  suit ,  Seigneur,  les  fnjsz-YOUs? 

CHOBIIB. 

.Tivezy  tic. 


4o  ALCESTE. 

LTCAS. 

.Vous  paraissez  troublé  des  ciis  qui  retentissent  ; 

Quand  deux  amans  heureux  s'unissent 
Le  coeur  du  grand  Alcîdè  eu  serait-il  jaloux  7, 

CHOEUn. 

Vivez,  vivez,  heureux  époux. 

LTCAS. 

Seigneur,  vous  soupirez,  et  gardez  le  silence. 

AtCIDE. 

Ah!  Lycas,  laisse-moi  partir  en  diligence. 

LTCAS. 

Quoi!  dès  ce  même  jour  presser  votre  dépait  ? 

ALCiDf. 

J'aurai  beau  me  presser,  je  partirai  trop  tard. 
C  e  n'est  point  avec  toi  que  je  prétends  me  taire  ; 
yUccste  est  trop  aimable  ,  elle  a  trop  su  me  pknre  ; 
Un  autre  en'est>âimé,  rien  ne  flatte  mes  vœux  ; 

C'en  est  fait  :  Admètc  l'épouse , 
Et  c'est  dans  ce  moment  qu'on  les  unit  tous  deux, 
Ah!  qu'une  ame  jalouse 

Éprouve  un  tourment  rigoureux! 

J'ai  peine  à  l'exprimer  moi- même. 

Figure-toi ,  si  tu  le  peux , 
Quelle  est  l'horreur  extrême 

^    De  voir  ce  que  Ton  aime 

Au  pouvoir  d'un  rival  heureux. 

LTCAS. 

L'amour  est-il  plus  fort  qu'un  héros  indoirtpt«bte  ?  ' 


ACTE  1,  ÔCÈNE  1,  4i 

LWivers  D  a  point  eu  de  monstre  redoutable 
Que  vous  D'ayex  pu  sunnonier. 

ALCZDE. 

Eh!  cio's-ta  qnâ  TÂmour  «oit  moins  à  redouter?, 

Le  plus  grand  cœur  a  sa  faiblesse  : 
Je  ne  pais  me  sauver  dé  IWdeur  qui  me  presse 

Qa'en  quittant  te  fatal  séjour  ; 

Contre  d'aimables  charmes 
La  valeur  est  sans  armes  v 
Et  ce  n'est  qu'en  fuyant  qu'on  peut  vaincre  l'amour. 

I.TCAS.  .    . 

Tous  devez  vous  fiDrcer,  au  moins ,  â  voir  la  fête 
Qui  déjà  dans  ce  port  vous  parait  toute  prête. 
Votre  fuite  à  présent  ferait  un  toop  grand  broit: 

Différez  jusqnes  â  la  ouit. 

ALCÎDE. 

'Ah!  Lycas,  quelle  nuit!  Âh!  quelle  nuit  funeste! 

XTCAS. 

Tout  le  reste  du  jour  voyez  encore  Alceslc. 

ALCIDE. 

La  voir  encore!...  Hé  bien  î  différons  mon  départ î 

Je  te  l'avais  bien  dit ,  je  partirai  trop  tard. 

Je  vais  la  voir  aimer  un  époux  qui  fadorc  ; 

Je  verrai  dans  leurs  yeux  un  tendre  empressement. 

Que  je  vais  payer  chèrement 

Le  plaisir  de  la  voir  encore  ! 

EUSEMBLE. 

L'amoor  a  bien  de»  maux ,  mais  le  plus  grand  de  tous 
Cett  y  tourment  ^éae  jalottx. . 


42  ALCLb;ili. 

SCÈNE  II, 

CÉPHISE,  SfTRATON. 


'  Dà9S  ce  beaa  joar  quelle  humeur  sombre 
Fais-tu  voir  à  contre-tems  ?. 

STBATOir. 

C'est  que  je  ne  suis  pas  du  nombre 
Pes  amans  qui  sont  contens. 

CiPHlSE. 

Un  ton  grondeur  et  sévère 
N'est  pas  un  grand  agrément  j 
Le  chagrin  n'avance  guère 
Les  afikires  d'un  amant. 

STBATOBI.j 

Lycas  a  su  me  faire  entendre 
Que  j«  n'ai  plus  ton  cœur,  qu'il  doit  seul  y  prétendra , 
l^t  que  tu  ne  vois  plus  mon  amour  qu'à  regret. 

CéPHISE. 

Lycas  est  peu  discret... 

STnATOIf. 

^h  !  je  me  doutais  bien  qu'il  voulait  me  surprendre. 

ClSPHlSE. 

Lydis  est  peu  discret 
D'avoir  idit  mon  secret. 


ACTE    1,  SCÈNE  II.  43 

•  TBATOir. 

Conuiieot  il  est  donc  vrai  !  la  n'en  fais  point  d'ezcvse  ? 
Tu  me  trahis  ainsi  »  MUi^  en  être  confose^ 

CÉPHIfC. 

Ta  te  plains  sans  raison  ; 
Est-ce  une  trahison 
Quand  on  te  désabuse  11 

STBATOEI. 

Qot  jt  suis  étonné  de  voir  ton  changement  ) 

CÉPHISE. 

Si  je  change  d'aniaut, 

Qa'y  troaves-lu  d'étrange  2 
Est-ce  on  sojet  d'étonnemcnt 
De  voir  une  amante  qai  change  ?. 

STBATOH. 

Par  on  espoir  doux  et  trompent 
Ponrqaoi  m'engageais-ta  dans  un  amoar  li  tendre?, 
Fallait-il  me  donner  ton  cœur, 
Pni$<]ne  tu  voulais  te  reprendre  ^ 

CÉPHIIE. 

Quand  je  t'offifaîs  mon  cœur,  c'était  de  bonne  foi  £ 
Que  n'empêches- ta  qu'on  te  l^Sle?. 

Est-ce  ma  finte 
Si  Lycat  me  plaît  plni  que- toi  ^'.^ 

STQAXQV. 

loSnts!  est-ce  le  yitlx  de  ms  per9éTérance  î 

CÉPHISE. 

Essaie  un  peu  de  l'inconstance. 


44  ÀLCESTE. 

C'est  toi  qui  le  premier  m'appris  h  m'en^ger  ; 
Pqul'  récompense , 
Je  te  veux  apprendre  A  diaoger. 

8TBATOII  ET   CÉPHISE. 

.,  ^        (       aimer    ) 
11  tout  i     .  >    toujours  : 

(    cuaiiger    ) 

Les  pins  douces  amoura  > 

•         ,  (  fidèles. 

Sont  bs  amours  ^  „ 

(  nouvelles. 

Il  &ut  i     '^"      l  toujours. 
(   changer.   ) 

SCÈNE  III. 

LYCOMÈDE,  SRATON,  CÉPHISE. 

ITCOMÈDE. 

Stratos  ,  donne  ordre  qu'on  s'apprête 

Pour  commencer  la  C'^lc. 
(  Siraton  se  rélire ,  et  Lycomède  parle  à  Céphise.) 
Enfin,  grâce  an  dépit,  je  goûte  la  douceur 
De  sentir  le  repos  de  retour  dans  moo  cœur. 
J'étais  â  préférer  au  roi  de  Thessalie; 

Et  si  pour  sa  gloire  on  publie 
Qu'Apollon  autrefois  lui  servit  de  pasteur» 
3e  suis  roi  de  Scyros,  et  Tb^tis  e^  ma  sœur. 
3'ai  su  me  consoler  d'un  hymen  qui  m'outrage  ; 
J'en  ordonne  les  jeux  avec  tranquillité. 

Qu'aisément  le  d^p't  dégage 

Des  fers  d'une  ingrate  beauté  \ 

4. 


ACTE  I,  SCÈNE  ly.  45 

Et  qn'après  on  Iqng  esclavage 
11  est  doax  d'être  en  liberté'. 

CÉPHZSE. 

Il  u'est  pas  sûr  toajoars  de  croire  l'apparence  : 
T7a  coeur  bien  pris  et  bien  touché 
N'est  pas  aisément  détaché , 
Ni  sitôt  guéri  que  l'on  pense  ; 
Et  Pamoor  est  souvent  caché 
Sous  une  feinta  indifférence. 

LTCOMioE. 

Quand  on  est  sans  espérance,  . 
On  est  bientdt  sans  amour. 
Mon  rival  a  la  préférence  ; 
Ce  qne  j'aime  est  en  sa  puissance  ; 
Je  perds  tout  espoir  en  ce  jour.. 
Quand  on  est  sans  espérance 
On  est  bientôt  sans  amour. 
Voici  llieure  qu'il  faut  que  la  fête  commence  ; 
Chacun  s'avaiice, 
Préparons-nous. 

SCÈNE  IV. 

PHÊRÈS,  ADMÈTE,  ALCESTE,  ALCIDE,^ 
LYCAS,  CÉPHISE,  STRATON,  pedple»^ 

DE  THESSAIIE.- 

LE    CBGCtJlt. 

Vivez  ,  vivci ,  heureux  époux. 


1 


46  Alceste. 

puénfas. 
Jouissez  d«s  douceurs  du  nœud  qui  vous  assemble. 

L£    CHOEUn. 

Vivez,  vives,  heureux  époux. 

ADMÈTE   ET    ALCESTE. 

Quand  Thymen  et  Tamour  sont  bien  d'accord  ensemble 
Que  les  nœuds  qu'ils  forment  sont  doux! 

LE  CHOEUB. 

vivez,  vivez,  heureux  époux. 

^      SCÈNE  V. 

•LES  PBÉCÉDEHS,  DEUX  TRITONS. 

(Dts  NtfrdidM  «t  d«s  Tritons  forment  une  fête  ^  où  se  m41«Dt 
des  matelots.) 

DEUX  TniTOSS. 

Malgbé  tant  d'orages 
Et  tant  de  naufrages , 
chacun  â  son  tour 
S'embarque  avec  l'Amour. 

Partout  où  Ton  mène 
Les  coeurs  amoureux. 
On  voit  la  mer  pleine , 
D'écueils  dangereux  ; 
Mais  sans  quelque  peine 
On  n'est  jamais  heureux. 
Une  ame  constante 


ACTE  I,  SCÈNE  V.  4^ 

Après  la  tonnnente 
£^ère  an  beau  jour. 

Malgré,  etc. 

(On  danse.) 
CÉPBISE,  alternaUvementavec.le  chceur. 
Sennes  cceurs,  U  Bon  vous  rendre, 
Le  péril  est  grand  d'attendre; 
Vous  perdez  d'heureux  momensl 
En  cherchant  à  vous  défendre  • 
Si  l'amour  a  des  tourmens, 
Cest  la  faute  des  amans. 

-,  ^i.      (  On  danst.) 
CÉPBIfE. 

»  Aimable  espérance 
»  Bègne  dans  les  cœurs  : 
>  Tu  &is  la  constance 
»  l>es  tendres  ardeurs. 

»  Quand  l'amour  s'envole,  ' 

»  Ta  viens  le  flatter, 

»  Ta  voix  le  console 

»  Et  sait  l'anéter. 

f>  Aimable  espérance,  è!c, 

»  Ta  doucenr  extrême 
»  Est  un  don  charmant, 

»  Qui  vaut  le*  bien  même  Jj 

»  Qu'on  cherche  en  aimant.  ^Ê 

»  Aimable  e^ïéranpe,  etc.  ™ 

-   (On  dans«.) 


48  ALCESTE. 

CÉPHISE,  àAdmèto. 

»  Une  paisible  victoire 
»  Enchaîne  sous  vos  lois  les  plus  ridies  climats  : 
»  Vous  triomphez  des  plus  brillans" appas; 
»  Tout  applaudit  à  votre  gloire. 

(  On  danse.) 
LXCO.VLTLOZ,  à   AlçcJte. 
On  vous  apprête 
Dans  mon  vaisseau 
Un  divertissement  nouveau. 

LTCOMÈDE   E«   STBATOK. 

Venez  voir  ce  que  notre  fête 

Doit  avoir  de  plus  beau. 

(Lycomèdc  conduit  Alcesle  dans  son  vaisseau;  Straton  j 
mène  Cëphise  ;  et  dans  le  tems  qii'Admèie  «t  Alcide  y 
veulent  entrer,  le  pont  s»enfonce  dans  la  mer.)  ^ 

ADMÈTE   ET  ALCIDE. 

Dieu  !  le  pont  s'abime  dais  l'eau* 

CHOEUn  DES   THESSALIESS. 

Ah!  quelle  trahison  funeste! 

ALCESTE    ET   CÉPHISE. 

Au  secours!  au  secours! 

ALCIDE. 

Peifide!... 

ADMÈTE. 

,        Alceste!... 

ALCIDE    ET   AOMèTf.  ^  ' 

Laissons  les  vain^  discours. 


ACTE  I,  SCENE  VI.  49 

Au  secours I  an  secours! 

(  Les  Thessaliens  coureot  s'embarquer  ponr  suii^re  Ly- 
comède.) 

CHOeUB   DES.  THESSAlIEBSf 

Aa  secours!  au  secours! 

SCÈNE  YL 

THÉTIS,  ADMÈTE,  ALGIDE. 

THÉTiS,  Mitant  de  la  mer. 
Epoux  infortuné,  redoute  ma  colère  ! 
Tu  Tas  bâter  Tiiistaiit  qui  doit  finir  tes  jours; 

Cest  Tfaétis,  que 'là  mer  révère, 

Qœ  m  vois  contre  toi  du  parti  de  son  frère  ; 

Et  c'est  à  la  mort  que  tu  cours. 

Admète  et  algu>e. 
Au  secours!  au  secours! 

THiTlS. 

Puisqu'on  méprise  ma  puissance , 

Que  les  vents  déchaînés, 

Que  les  flots  mutinés 

S'arment  pour  ma  vengeance. 

fTbelis  rentre  dans  la  mer,  et  les  Aquilons  excitait  une  tem- 
pête qui  agite  les  vaisseaux  qui  s'efforcent  de  poursuÏN  re 
•  Lycomède.  ) 


Grands  Opéras.    I . 


i 


5o        ALCESTE.  ACTE  I,  SCÈNE  TII. 

SCÈNE  yii. 

ËOLE/ADMÈTE/ALCIDE. 

Le  Ciel  protège  les  héros, 
(Allez ,  Admèce  t  allez  Alcide  ; 
Le  Dieu  qû  sor  les  Dieux  préside 
M'ordonne  de  calmer  les  flots  : 
'Allez,  poorsaivez  an  peifide. 
(;Admète  et  Alcide  courent  s'embarquer.  )j 

Reûrez-voas 

Yents  en  courons  ]  • 

Rentrez  dans  vos  prisons  profondes  : 
Et  laissez  régner  sor  les  ondes 
Les  Zéphyrs  les  plus  doux. 

(  L'orage  cesse ,  les  Zéphyrs  volent,  et  foui  fuir  les  Aquilons, 
qui  tombent  dans  la  mer  avec  les  nuages  qu'ils  en  avaient 
élevés;  les  vaisseaux  d' Alcide  et  d'Admèle  poursuivent 
Lycomède.) 


tm    m   PlBMIBl  ACTE. 


ACTE  SECOND. 

La  scène  est  dans  Tilè  de  ScyroS ,  et  le  théâtre  repré*  ] 
sente  la  principale  ville  de  cette  ile. 


SCÈNE  I. 

lYCOUkDE,  ALCESTE,  STRATON,  soldats 
de  Lycomède. 

LICOMÈDE. 

A.'lloV5,  allons  ;[  la  plainte  est  vaine, 

ALCESTE. 

(àh!  qaelle  rigaenr  inhnmaineS 

LTGOllèDE. 

(iyions,  je  suis  sourd  à  vos  cris^ 
Je  me  venge  de  vos  mépris. 

AI.CE8TE. 

Quoi  I  vous  serez  inexorable  ?. 

LTCOMEDE. 

Cruelle!  vous  m'avez  appris 
\k,  devenir  impitoyable. 

I^LCESTE. 

Est-ee  ainsi  que  Tamouc  a  lu  vous  émouvoit  ?. 


52  ALCESTE. 

Est-ce  aiosî  que  pour  moi  votre  ame  est  attendrie  ? 

tYCOMÈDE* 

L'amour  se  cliange  en  furie 
Quand  il  est  au  désespoir.       , 

Puisque  je  perds  toute  espérance , 
Je  veux  désespérer  mon  rival  à  son  tour  *  - 

Et  les  douceurs  de  la  vengeance 
Ont  de  quoi  consoler  des  rigueurs  de  l'amour. 

ALCESTE. 

Voyez  la  douleur  qui  m'accable. 

LTCaMioB. 

Vous  avez  sans  pitié  regardé  ma  douleur , 

Vous  m'avez  rendu  misérable  ; 

Vous  partagerez  mon  malheur. 

ALCESTE. 

Admète  avait  mon  cœur  dès  ma  plus  tendre  enfance  ; 
Nous  ne  connaissions  pas  l'amour ,  ni  sa  puissance , 
Lorsque  d'un  nœud  fatal  il  vint  nous  enchaîner  : 

Ce  n'est  pas  une  grande  ofiènsc 
Que  le  refus  d'un  cœur  qui  n'est  plus  ^  donner. 

LTCOMÈDE. 

Est-ce  aux  amans  qu'on  désespère 

A  devoir  rien  examiner? 

Non ,  je  ne  puis  vous  pardonner 

D'avoir  trop  su  me  plaire.  ' 

Que  ne  m'ont  point  coûté  vos  funestes  attraits  ! 
Us  ont  mis  dans  mon  cœur  une  cruelle  flamme, 
Us  ont  arraché  de  mon  ame 
L'innocence  et  la  paix. 


ACTE  II,  SCÈNE  II.  53 

Non ,  ingrate ,  non ,  iuhumaine  ; 
Non ,  quelle  que  soit  votre  peine , 
Non ,  je  ne  ▼ons  xendrai  jamais 
Ions  les  lÉanx  qoe  votas  m'avez  ùâts, 

8TBAT09. 

Voici  l'ennemi  qaî  s'avance  ^  ' 

En  diligence. 

LTCOMEDE. 

A  noos  défendre. 

AI.C<«TE. 

Ah  !  cruel ,  que  n'épargnez«vou8 
Le  sang  qu'on  va  répandre  ! 

(lycomèdecnatiraint  Akeste  d'entrer  dans  la  ~Tilt«,  el  l«s 
soldats  de  Lycomèdo  en  ferment  la  porte  aussilôl  qu'ils  y 
K>Bt  entrés.  ) 

SCÈNE  II. 

ADMÈTE,  ALCIDE,  LYCAS,  sop-OAts 
assiégeaus.. 

ADMÈTE  ET    ALCIDE. 

Mabchez,  macchez,  marchez  : 
Approchez ,  amis ,  approchez  ; 
Marchez,  marchez,  marchez» 

Hâtons-nons  de  punir  les  traîtres  ; 

BendoDS^nous  maîtres    .  •  1 

Des  mars  qai  les  tiennent  cadiés  :  ,  J 

Marchez ,  marchez ,  marchez; 


g,  -AL  GESTE. 

SCÈNE  III. 

LYCOMÈDE,    STRATON,    «oidAII.    Msiégé»  ; 
ADMÈTE,   ALCIDE.   LYCAS,  «oïDAi»  «- 

fiégcansi. 

'      LTCOMÈDE,  sur  les  remparts. 
Ne  prétendez  pas  nous  surprendre, 
Venex,  nous  allons  vous  attendre  : 
Nous  ferons  tous  notre  devoir 
Pour  vous  bien  recevoir. 

ADMÈTE. 

Perfide  !  évite  un  sort  funeste  : 
Ou  le  pardonne  tout  si  tu  veux  rendre  Alcestc. 

I.TCOWÈDE. 

J'aime  mieux  mourir ,  s'il  le  faut , 
Que  de  céder  jamais  cet  objet  plein  de  charmes.  ^ 

ADMiTE   ET   ALCIDÉ. 

A  l'assaut!  â  l'assaut! 

LTCOUÈDE   ET    STBATOÏ. 

■Aux  armes  l  aux  armes! 

LES  ASSxiOEABS* 

A  Tassant!  à  Tassàut? 

tES  AssiioÉs. 
Aux  armes!  aux  aim^! 

ADMiTB   ET  lYCOMÈDE. 

A  moi  î  compagnons  j  à  moi  l 


M^^itL  n,  bCENE  III.  55 

Suivez  voirc  roi, 
(L«  ^«égé.par  une  sorUe  s>efforçem  d'.mp^eh.r ra.«.i.  ) 
A|.CID£. 

C'est  Alcide 
Qui  vous  guide, 

ADULTE   ET   AtCipK. 

A'  moi,  compagnons!  â  moi! 
(  Aldd.  s»oppo,e  à  l'enlreprUe  de,  iraupe.  qui  sont  sorUe. 
dt  la  ville ,  et  U  rétablit  l'assaut.  ) 
TOUS   ENSEMBLE. 

DoDDOds,  donnons  de  toutes  pwts. 

LES  ASSIÉgeAhS. 

Que  diacnn  S  l'envi  combatte. 

Que  l'on  abatte 

Les  tonrs  et  les  remparts. 

TOUS. 

Donnons,  donnons  de  toutes  parts. 
Coorage ,  courage ,  courage  ! 
'  Us  sont  â  nous,  ils  sont  k  nous. 
(Us  asdëgësfont  nn  dernier  effort  dans  une  second*  sortie 
pour  repousser  les  assiégcans.) 
ALCIDU. 
C'est  trop  disputer  l'avantage  ! 
Je  vais  vous  ouvrir  nn  passage  j 
Suivez-moi  tous,  suivez-moi  tous, 
(àlcide  entre  dans  la  viUe,  suin  d'Admète  et  d«  toutes  le 

troupes,  par  la  porte  qu'a  vient  d'enfQnc«r.)  ^  , 

LES  ASSI^GEARS.  ^Ê 

Cooftge  ;  courage ,  coorage  !  ^| 

Us  sont  è  nous ,  ils  sont  à  nous. 


56  ÀLCESTE. 

Achevons  d'emporter  la  place  ; 
L'enneini  commence  à  plier. 
Main  basse,  main  basse,  main  basse. 

LES  ASSiiGÉS,  reodant  les  armes. 
Quartier ,  quartier ,  quartier. 

LES   ASSIlÉGEr?fS. 

La  ville  est  prise, 

LES  ASSIÉGÉS. 

Quartier ,  quartier ,  quartier. 

LTCAs,  terrassant  STB  AT  OH. 
Il  faut  rendre  C^ise. 
stbAtob. 
Je  sub  ton  prisonnier. 
Quartier,  quartier,  quartier. 

SCÈNE  IV. 

PHERÈS,  armé  et  marchant  avec  peine» 

Quoi  !  c'en  est  déjà  fiiît',  et  l'on  a  pris  la  ville  ! 
La  faiblesse  dé  l'âge  a  retardé  mes  pas  : 
,      La  valeur  devient  inutile 

Quand  la  force  n'y  répond  pas. 


-^*«.  II,   SCÈNE  V.  5 

SCÈNE  V. 

»^C,DE.  ALCESTE.  CBPHISE.  phéKÊS. 
«»>«  â  TOtre  fil,  ce»,  ainabk  priocesse. 

PHÉBÈS. 

Ce  doa  de  votre  main  fermt  e„cor  pto  do»,, 

,.  *ICIDE. 

AU«.^exhreodreiM„h.^,^p^ 

Toot^st  soumis,  la  gtierre  cesse; 
2«»Sncav»  Poarquoi  me  Jaissez-voas  ? 
Qnel  nouveau  soin  vous  presse  ?.  " 

ALCIDE. 

Vous  n'avez  rien  à  redouter  : 
'enischcttheraiUeuisdestynmsâdomter. 

AtCESTE. 

He  JlT^^  '^''^  '^■"«  P'«»»te 
âTZ'TJ"'^  •"'■"'  ^o*"  -"  '«patient,  l 
^'^  *°°J°°"  '«»  doit-elle  exporter?. 

AtClDE. 

Gardez-vous  bien  de  m'arréter. 

ALCE8TE. 

Ccsi  votre  valeur  triomphante 
va»  mt  le  sort  cbannam  frô^  «^»-    n 

n«-i         j         ««que  nous  allons  goûter  ; 

Quelque  douceur  que  l'on  ressente. 


58  ALCESTE. 

Un  ami  tel  que  vous  l'augmenU  : 
Voulez-vous  sitôt  nous  quitter  ?, 

ALCIDE. 

Gardez-vous  bien  de  m'arrêter. 
Laissez,  laissez-moi  fuir  un  charme  qui  m'enchante  : 
Non ,  toiite  ma  vertu  n'est  pas  assez  puissante 

Pour  répondre  d'y  résister. 
Non ,  encore  une  fois  ,  princesse  trop  charmante  ^ 

Gardez^vons  bien  de  m'anéter. 

SCÈNE  yi. 

ALCESTE,  PHÉRÈS,  CEPHïSB. 

ENSEMBLE. 

CHEnCBOKs  Admète  promptement. 

ALCESTE. 

Pcut-on  chercher  ce  qu'on  aime 
Avec  trop  d'empressement! 
Quand  Tamour  est  extrême  ^ 
Le  moindre  éloignement 
Est  un  cruel  tourment. 


wLK.xr,  11,  SCENE  VU.  5^^ 

SCÈNE  VII. 

SàDMÈTE,  blessé:  CLBANTE,  ALCESTE 
PHÉRÈS,  CÉPHISE.  ' 

alceste, 
O  DIEU  î  quel  spectacle  funeste  i 

CLéARTE. 

te  clirf  des  ennemis  mourant  et  terrassé 

î>e  sa  rage  étirante  a  ramassé  le  reste, 

Le  roi  vient  d'en  être  blessé. 

ADMÈTE. 

le  menrs,  charmante  Alcestel 
Mon  sort  est  assez  donz 
Pbisqne  je  menn  ponr  fous. 

A&CESTE. 

Ccsi  pour  tous  voir  mourir  qne  le  ciel  me  dâivre  ! 

COMÈTE. 

Avec  le  nom  de  votre  époux 
J'eusse  été  trop  heureux  de  vivre  ! 

Mon  sort  est  assez  doux 

Poisqnc  je  meurs  pour  vous. 

'  ALCESTE. 

Est-ce  là  cet  bymen  si  doux ,  si  plein  d'appas  ! 

Qui  nous  promettait  tant  de  chaimes? 
Fallait-il  que  sitôt  l'aveugle  sort  des  armes 
Tranchât  des  nœuds  si  beaux  par  un  aflreux  trépas  î 
ftt^e  là  cet  hpaeu  si  doux,  si  plein  d'appas  ! 


i 


6o      ALCESTE,  ACTE  II,  SCENE  VIH. 
Qiii  nous  promettait  tant  de  charmes?, 

ADMETS. 

Alccste ,  vous  pleurez  ! 

ALCESTEt 

^        Admète ,  tous  mourez  ! 

ALCESTE. 

Se  peut-il  que  le  ciel  permette 
Que  les  cœurs  d'Alceste  et  d' Admète 
Soient  ainsi  séparesf 

ADMETE. 

Alceste  y  tous  pleurez  ! 

ALCESTE. 

Admète ,  tous  mourez  ! 

SCÈNE  VIII. 

APOLLON,  ADMÈTE,  ALCESTE,  PBÉRèS, 
CÉPHISE,  CLÉANTE. 

AFOLLOir. 

La  lumière  aujourd'hui  te  doit  être  raTÎef  ; 

Il  n'est  qu'un  seul  moyen  de  prolonger  ton  sort; 

Le  destin  me  promet  de  te  rendre  la  Tie , 

Si  quelque  autre  pour  toi  veut  s'offrir  à  la  mort. 

Reconnais  si  quelqu'un  t'aime  parfaitement  : 

Sa  mort  aura  pour  prix  une  immortelle  gloire  : 

/       Pour  en  conserver  la  mémoire 
Les  arts  vont  élever  un  pompeux  monument. 

FIN    DU    SECOND    ACTE. 


'  ACTE  TROISIÈME. 

Le  tkéâtre  représente  on  moeament  élevé  par  les  arts. 
Snr  le  devant  parait  no  torabeati ,  et  aa-dessQS  est  nne 
icscription  grecque  à  la  gloire  de  la  personne  qui  s'im- 
molera pour  Âdmète. 


SCÈNE  I. 

ALCESTE,  PHÉKÈS,  CÉPHISE. 

ALCESTE. 

ixB  !  pourquoi  nous  séparez-vous  ? 
Ebl  tvL  moins  attendez  que  la  mort  nous  sépate  ; 

Cruels!  quelle  pitié  barbtr» 
Vous  presse  d'arracher  Alceste  à  son  époux  t 

Ah  !  pourquoi  nous  séperezrvons?, 

PHÉnis   ET   CÉPBISE. 

Plus  vo^rc  époux  mourant  voit  d'amour  et  d'appas , 
Et  plus  le  jour  qa'il  perd  lui  doit  faire  d'envie  : 

Ce  sont  les  doucearà  de  la  vie 

Qui  fout  les  horreurs  du  trépas. 

ALCESTE. 

Les  Arts  n'ont  point  encore  achevé  leur  ouvrage  ; 
Ce  tombeau  doit  porter  la  glorieuse  image 

Grands  Opéras,  i .  .6 


62  -ALCESTE. 

De  qui  signalera  sa  foi 
^  En  mourant  pour  sauver  son  roi. 

Le  prix  d'une  gloire  immortelle 
Ne  peut-il  toucher  un  grand  cœur  ?. 
Faut-il  que  la  mort  la  plus  belle 
Ne  laisse  pas  de, faire  peur?, 
lA.  quoi  sert  la  foule  importune 
Dont  les  rois  sont  en^arrassés  Z 
Un  coup  fatal  de  la  Fortune 
Écarte  les  plus  empressés. 

ALC^STBy  FBÉBÈS^  ET   CEFHISE. 

De  tant  d'amis  qu'avait  Âdmète 
Aucun  ne  vient  le  secourir  ; 
Quelque  honneur  qu'on  (promette, 
On  le  laisse  mourir. 

PHÉnês. 
J'aime  mon  vfils^  je  Tai  ùÂi  roi; 
Pour  le  rendre  à  la  vie 
Je  mourrais  sans  effiroi  ^ 
Si  je  pouvais  ofirir  des  jours  dignes  d'envie. 

CÉPHJSE. 

Les  honneurs  les  plus  éclatans 
Ehvain  dans  le  tombeau  promettent  de  nous  suivre , 
On  ne  peut  renoncer  à  vivre  ; 
La  mort  est  affîreuse  en  tout  tems. 

ALCESTE. 

'(Chacun  est  satisfait  des  excuses  qu'il  donne. 
Cependant  on  ne  voit  personne 
Ai  pour  sauver  Admète  ose  perdre  le  jour  : 


ACTE. m,  SCÈNE  ÎJ.  63 

Le  devoir ,  l'amitié  ,  le  sang ,  tout  TabaDdoone  : 
Il  n'a  plus  d'espoir  qu'ep  l'amour. 

SCÈNE  II. 

PHÉRÈS,  CLÉÂNTE,  chgeob  ,  qot  fou 
ne  voit  point,' 

>  PB É BAS. 

VoToiis  encor  mon  fils,  aUous ,  hâtons  nos  pas  ; 
Ses  yeux  Yont  se  copyrir  d'étemelles  ténèbres  \ 

CHCEUB. 

Hélas!  hélas l  hélas! 

PBÉBES. 

Quek  ciîs  !  qoelles  plaintes  fonèUes! 

CHGBY2B. 

Hélas!  hélas!  hélas! 

PHÉBÈS. 

OÙ  yas-to ,  Cléante  ?  Demeure. 
CLi^atE. 
Hélas!  hélas! 
Le  roi  touche  à  sa  dernière  heore  f 
II  s'aflàiblit ,  il  faa^  <p'il  meure  ; 
Et  je  viens  pleurer  son  trépas. 

PHÉBis. 

On  le  plaint ,  tout  le  monde  pleure  9 
Mais  nos  plems  ne  le  sauTent  pas. 


64  ALCESTE. 

SCÈNE  III. 

CHOEUR,  que  l'on  ne  voit  point,  ADMÈTE, 
PHÉRÈS,  CLÉÀNTE. 

CHOEUO. 

O  trop  heureux  Admète  ! 
Que  votre  soit  est  beau  1 

P&EBiS   ET    CtÉASTE. 

Quel  changement  !  Quel  brait  nouveau  ! 

CBOEUB. 

O  trop  heureuj  Admète  ! 
Que  votre  sort  est  beau  ! 
PHÉDÈv  ET  c té Ah'te,  voyant  Admet*. 
L'effort  d'une  amitié  parfaite 
L'a  sauvé  du  tombeau. 

PHÉAÈSf  encrassant  Admète. 
O  trop  heureux  Admète  ! 
Que  votre  sort,  est  beau  ! 

CHceuB. 

O  trop  heureux  Admète  ! 
Que  votre  sort  est  beau  l 

admète. 
Qu'une  pompe  funèbre 
Rende  à  jamais  célèbre 
Le  généreux  efibrt 
Qui  m'arrache  à  la  mort. 


ACTE  III,  SCÈHE  IV.  65 

Akeste  n'aora  plus  d'alannes , 
^  te  V  €511  ai  ses  yenx  diarmaDS , 
A  qui  j'ai  coûté  tant  de  lanoaes  ! 
Qoe  k  TÎe  a  de  cbaimes 
Pour  les  henreaz  amaos  ! 

leberez ,  Dien  des  Aits,  &îtts-iio«s  Toôr  ÏUBMf/i 
^  âoît  éterniser  b  grandeor  de  coonge 

De  qui  s'est  immolé  poi»  moi  ; 

Ne  différez  pas  davantage... 

Ciel  !  O  ciel  !  qa'est-ce  qae  je  toi! 

(On  voit  l'image  d'Alceste  qui  s*est  perc^  le  $mu.  ) 

SCÈNE  W. 

CÉPHISE,  ADMÈTE,  PHÉRÈS,  CLÉAHTE, 
CB€Eu  B ,  que  Yoa  ne  voit  pas. 

CÉPBISE. 

Alceste  est  morte. 

ADMiTE. 

Alceste  est  morte  ^ 

CHCBUB. 

Akeste  est  morte  ! 

CtPBISE. 

Alceste  a  satis&it  les  parqaes  en  eonrrou  ; 
Votte  tombeao  s'ouvrait  j  cUe  y  descend  pour  voos  : 
^ms  ardeur  ne  £m  si  fidèle  et  n  fiirte. 
Alceste  est  m#He  ! 

6. 


£6  ALCESTE. 

Alcesteest  niçrte  l 

CHoeuB. 

Alceste  est  morte',! 

CÉPH|SE. 

Sujets ,  amis,  parens  vous  abandonnaient  tous  ; 
Sur  les  droits  les  plus  forts,  sur  les  noeuds  I«s  plus  doux 
L'Ampur  y  le  tendre  Amour  l'emporte  : 
Alceste  est  morte  ! 

ADMETS. 

'^IcQSte  est  moite  ! 

ÇBOÇUR. 

Alceste  est  morte  ! 
(  Admète  veut  se  luejr ,  pu  le  désarme.  ) 


SCÈNE  V. 


(Piélres  funéraires,  velus  de  blanc  etcouropnës  de  cyprès 
>elon  l'usage  du  deuil  antique ,  el  pleureuses  en  grands 
crêpes ,  couronnées  de  fleurs  ;  portant  les  uns  et  les  autres 
divers  attributs  des  pompes  funèbres  des  anciens,  ainsi  qne 
tous  iej»  ornemffns  qui  ont  servi  à  parer  Alceste.  ) 

(  Tuus  les  personnages  qui  composent  la  pompe  funèbre  vont 
déposer  aux  pieds  d' Alceste  les  urnes  et  vases  des  parfums, 
des  fleurs ,  des  couronnes  de  laurier  et  lei  autres  attributs 
qu'ils  portent.  ) 

LA  PRINCIPAL^  PLEUREUSE,  tenant  le  poignard 
avec  lequel  Alceste  s'est  frappée.    .»     - 


La  mort ,  la  mort  barbare 
Détruis  aujourd'hui  mille  appas. 


ACTE  III,  SCÈNE  VI.  67 

<Jaelle  vicUinc,  hélas! 
Fat  jamais  si  belle ,  et  si  rare  2 

La  mort ,  la  mon  barbare 
Détruit  aujourdliDi  mille  appas. 

'Alceste ,  la  cbarmante  Alceste, 
La  fidèle  Alceste  n*est  plus, 
c&oçun, 
Alceste ,  la  charmante  Alceste , 
La  fidèle  Alceste  n'est  plus. 

I.A  PBISCIPALE  PLEUBEOSz/ 

Tant  de  beauté ,  tant  de  vertus 
Méritaient  nn  sort  moins  funeste. 
Alceste ,  la  charmante  Aiceste, 
La  fidèle  Alceste  n'est  plus. 

CHCBDII. 

Que  nos  pleurs ,  que  nos  cris  renouvellent  sans  cesse  ; 
Allons  porter  partout  la  douleur  qui  nous  presse. 

3CÈNE  VI. 

ADMÈTE,  PHÉRÈS,  CÉPHISE,  CLÉANTE. 

ADMÈTE ,  se  voyant  désarmé- 
Sa!is  Alceste ,  sans  ses  appas 
Goyez-vous  que  je  puisse  vivre  î 

Laissez-moi  courir  an  trépas, 
Où  ma  chère  Alceste  se  livre. 
Sans  Alceste ,  etc. 


68  ALCESTE. 

C'est  pour  moi  qu'elle  meurt ,  bêlas  î 
Pourquoi  m'empécber  de  la  suivre  ? 

Sans  AIccste ,  etc. 

SCÈNE  VII. 

ALGIDE,  ADMÈTE,  PHÉRÈS,  CÉPHISE, 
.     ,  CLÉANTE. 

ÂLCIDE. 

To  me  vois  arrêté,  sur  le  point  de  partir. 
Par  les  tristes  clameurs  qu'on  eoteod  retentir. 

admIte. 
AIccste  meurt  pour  moi ,  par  un  amour  extrême  ; 
Je  ne  reverrai  plus  les  yeux  qui  m'ont  charmé  : 

Hélas  !  j'ai  perdu  ce  que  j'aime  , 

Pour  avoir  été  trop  aimé. 

AtCIDE. 

J'aime  Alceste,  il  est  tems  de  ne  m'en  plus  défendre  : 
Elle  meurt ,  ton  amour  n'a  plus  rien  à  prétendre  ; 
Admète ,  cède-moi  la  beauté  que  tu  perds^ 
Au  palais  de  Pluton  j'entreprends  de  descendre  :. 

J'irai  jusqu'au  fond  des  enfers 

Forcer  la  mort  à  me  la  rendre. 

ADMÈTE. 

Je  verrais  cncor  ses  beaux  yeux  î 
'Allez ,  Alcide  ,  allex ,  revenez  glorieux  : 
Obtenez  qu'Alceste  vous  suive  : 
Le  dis  du  plus  puissant  des  dieux 


ACTE  III,  SCErWE  VIII.  69 

^  plus  digne  que  moi  du  bien  doDt  on  me  prive. 

Allez ,  allez  ne  tardez  pas , 

Arrachez  Âlèeftte  aa  trépas  , 
&  ramenez  au  jour  son  ombre  fugitive , 
Qu'elle  vive  pour  vous  avec  tous  ses  appas  : 
^àahjc  est  trop  heureux  pourvu  qn'Alceste  vive. 

PHÉBÈS,    CÉPHISE,   CLÉABTE. 

Allez  ,  allez  ne  tardez  pas , 
Arrachez  Alceste  au  trépas. 

SCÈNE  VIII. 

HERCURE,    ALCIDE,    ADMÈTE,   PHÉRÈS, 
CÉPHISE,  GLEANTE,  DIANE,  sur  un  nuage. 

DIASE. 

Le  dieu  dont  tu  tiens  la  naissance 
OUige  tous  les  ciieux  d'être  d'intelligence 
En  faveur  d'un  dessein  si  beau  ; 
Je  viens  t'ofirir  ^on  assistance  ; 
Et  M^cure  s'avance 
Pow  t'onvrir  aux  enfe»  un  passage  nouveau. 
(Xercore  vient  en  volant  frapper  la  terre  de  son  caducé«  ; 
l'enfer  s'ouvre  ,  et  Alcide  y  descend.  ) 


FIS    DU   TBOISliUE    ACIL* 

I 


ACTE  QUATRIÈME. 

Le  théâtre  représente  le  fleuve  Achéron. 

SCÈNE  I. 

CARON,   LE9    OUBB^S. 

CÂn05  ,  dans  sa  barque. 

Il  faut  passer  tô^  ou  tard , 
Il  faut  passer  dans  ma  barque. 
On  y  vient  jeune ,  ou  vieillard , 
Ainsi  qu'il  plaît  ^  la  parqi^e  \ 
On  y  reçoit  sans  égard 
Le  berger  et  le  monarque. 
Il  faut  passer  tôt  ou  tard  , 
Il  faut  passer  daps  ma  barque. 

Vous  ,  qui  voulez  passer ,  venez  ,  mâqes  errans , 
Venez ,  avancez ,  tristes  ombres  j 
Payez  le  tribut  que  je  prends, 

Ou  retournez  errer  sur  ces  rivages  sombres. 

LES   OMBDES. 

Fasse-moi ,  Caron ,  passe-moi. 
CÂRoar. 
l  Ttitït  auparavant  que  l'on  me  satisfasse  ; 


ACTE  IV,  SCÈNE  I.  ^, 

On  doit  payer  les  soins  d'un  si  pénible  emploi. 

I  LES    OMBRES. 

'  Passe-moi ,  Caron ,  passe-moi. 

(Caron  fait  entrer  dans  sa  barque  les  omLrcs  ijui  onl  de 
quoi  le  payer.  ) 

CAnoN. 

Donne ,  passe  ;  donne ,  passe  ; 

Demeure ,  toi  ; 
Tu  n'as  rien ,  il  faut  que  l'on  te  chasse. 
DWE   OMBRE,   rebutée. 
De  grâce ,  par  pitié ,  ne  me  rebute  pas. 

CARON. 

Ou  paie ,  ou  tourne  ailleurs  tes  pas. 
l'ombre. 
De  ^ce ,  par  piué ,  ne  me  rcbule  pas. 

CAROir. 

La  pitié  n'est  point  ici  bas , 

Et  Caron  ne  fait  point  de  grâce. 

l'ombre. 
Hélas  !  Caron ,  hélas  î  hélas  \ 

CABOBr. 

Crie,  hélas!  tant  que  tu  vondias ; 
Kwn  pour  rien ,  en  tous  lieux  est  une  loi  suivie  : 

Les  mains  vides  sont  sans  appas  ; 
Eue  n'est  point  assez  de  payer  dans  la  vie, 
Il  faut  encor  payer  au-delà  du  trépas. 


à 


•}7  ALCESTE. 

SCÈNE  II. 

ALCIDE^  CAHON,  les  ombqes. 

ALCIDE ,  sautant  dans  la  barque. 
SoBTEZ ,  ombres  ,  faites-moi  place  ; 
Vous  passerez  nue  autre  fois. 

(Les  ombres  s*enfuient.) 

cabon. 
Ab  !  ma  barqae  ne  peut  souHrîr  un  si  grand  poids  ! 

ÂLCIDE. 

Allons ,  il  faut  que  l'on  me  passe. 

CABON. 

Betire-toi  d'ici ,  mortel ,  qui  que  tu  sois  : 
Les  enfers  irrités  puniront  tou  audace. 

ALCIDE. 

Passe  moi ,  sans  tant  de  façons. 

CAB09. 

-  L'eau  nous  gagne ,  ma  barque  crève. 

ALCIOE. 

Allons,  rame,  dépêche,  achève. 

CAB09. 

Nous  enfonçons. 

ALCIDE, 

Passons ,  passons. 


ACTE  IV,  SCENE  III.  73 

SCÈNE    III. 

(Le  Ihédlre  change  et  reprt^sente  le  palais  de  Pluton.  On 
-voit  dans  l'éloignement  les  Chanips-Élisées.)  ■ 

PLUTON,   PROSERPINE,    l'ombre  d'AL- 
CESTE,  SuiVAîis  DE  PLUTON,  ombres 

HEUREUSES. 

PLUT 05,  sur  son  trône. 

Reçois  le  juste  prix  de  to^  amonr  fidèle  ; 
9ue  ton  destin  nouveau  soit  heureux  h  jamais  ; 
Commence  de  goûler  la  douceur  éternelle 
D'une  profonde  paix. 

SCIVA9S   DE   PLUTON. 

Commence  de  goûter  la  douceur  étemelle 
D'une  profonde  paix. 

(  Les  ombres  heureuses  reçoivent  parmi  elles  l'ombre 
d'Alceste. 

UBE  OMBRE  HEUREUSE,   alternalivemcnt  avot  le 
choeur. 

«  Digne  fille  de  Cérèb, 

n  La  belle  Alceste  t'implore  ; 

»  Calme  les  tristes  regrets 

»  Du  tendre  époux  qui  Ta  dore, 

»  Au  nom  des  droits  des  amans 
»  Ouvrç  ton  caur  â  ses  plaintes  ; 
»  Au  nom  de  tes  traits  charroaus 
Grands-Opéras.    I.  7 


j 


^4  ÀLCESTE. 

»  Dont  Plutoo  sent  les  atteiotes , 

»  Digne  fille ,  etc.  » 

PBOSEBPIKE,  à  l'ombre  d'Alceste. 

Tous  tes  vœux  seront  satisfaits, 
l'époase  de  Platon  te  retient  aaprès  d'elle. 

PLUTON  ET   PBOSEnPIBZ. 

En  (àvear  d'one  ombre  si  belle 
Que  Tenfer  fasse  yoir  tout  ce  qu'il  a  d'attraits. 

(Les  suivans  de  Platon  se  réjouissent  de  la  Tenue  d'Alceste 
dans  les  enfers.) 

SUIYAKS  DE  PLUTOV. 

Tout  mortel  doit  ici  paraître  ; 
On  ne  peut  naître 
I  Que  pour  mourir  : 

De  cent  maux  le  trépas  délivre  ; 
Qui  cherche  à  vivre 
Cherche  à  souffirir. 
Yenei  tous  sur  nos  sombres  bords  : 
Le  repos  qu'on  désire 
Ne  tient  son  empire 
Que  dans  le  séjour  des  morts. 

.    .  *         (On  danse.  ) 

Chacun  vient  ici  bas  prendre  place , 
Sans  cesse  on  y  passe , 
Jamais  on  n'en  sort. 

,  C'est  pour  tous  une  loi  nécessaire  ; 


ACTE  IV,  SCÈNE  ir.  7$ 

L'efibrt  qu'on  pent  (aire 
Vest  qu'un  vaio  effort  : 

Est-on  sage 
De  foîr  ce  passage  ? 

Cest  un  orage 

Qui  mène  au  port. 

diacnn  vient  ici  bas  prendre  place , 
Sans  cesse  on  y  passe , 
Jamais  on  n'en  sort. 

Tous  les  charmes , 

Plaintes ,  cris ,  larmes , 

Tout  est  sans  armes 

Contre  la  mort. 

Chacun  vient  ici  bas  prendre  place , 
Sans  cesse  on  y  passe , 
Jamais  on  n'en  sort. 

(Qn  danse.) 

SCÈNE  IV/ 

ALECTON,  PLUTON,  PROSÉRPINE,  L'oMBa» 
d'ÂLCESTE,  sdivaks  de  PLUTON,  omboes 
hevbeuses. 


QvnTEz ,  quittes  les  jeux ,  songez  h  roôs  défendre  ; 
Contre  un  audacieux  unissons  nos  eflSirts: 
Le  fils  de  Jupiter  vient  ici  de  descendre.; 
Seul ,  il  Oie  atuqucr  tout  l'empire  des  morts. 


^6  ALCESÎE. 

PLUTO». 

Qu'on  arrête  ce  téméraire , 
Armez- vous  ,  amis ,  armez-vous  : 

Qu'on  déchaîne  Cerbère } 

Courez  (ous,  courez  tous. 

ALECTON. 

Son  bras  abat  tout  ce  qu'il  frappe , 
Tout  cède  à  ses  horribles,  coups , 
Rien  ne  résiste ,  rien  n'échappe. 

SCÈNE  V. 

ALCIDE,  PLUTON,PROSERPINE,  Al.EC- 

TON,     lUXYAOlS     DE    PLPTOH,     OM^BES     B£U- 
.    BEUSES. 

PLUTO V,  Toyant  Alcide. 

Ibsolent  ,  jusqu'ici  braves-tu  mon  courroux  ! 
Quelle  injuste  audace  t'engage 
A  Uoubler  la  paix  de  ces  lieux  ? 


Je  suis  né  pour  domter  la  rage 
Des  monstres  les  plus  furieux. 


Est-ce  le  Dieu  jaloux  qui  lance  le  tonnerre 
Qui  t'oblige  à  porter  la  guerre 
Jusqu'au  centre  de  l'univers  2 

Il  tient  sous  son  pouvoir  et  ic  ciel  et  U  terre, 


ACTE  IV,  SCÈNE  V.  77 

Veut-ii  cDCor  ravir  Tempire  des  eo£ers  ? 

ALClDE. 

Rop ,  Platon ,  règne  en  paix ,  jouis  de  tpn  partage. 
}e  viens  chercher  Alceste  en  cet  aflreux  séjour  : 

Permets  que  je  la  rende  au  jour  ; 

Je  ne  veux  point  d'autre  avantage. 

Si  c'est  te  ûdre  outrage 
D'entrer  par  force  dans  ta  coqr , 
Pardonne  à  mon  courage , 
£t  ùâs  grâce  ù  l'amour. 

PBOSEBPINE. 

Un  grand  cœur  pcu|  tout  quao^  ^  aime. 
Tout  doit  céder  à  son  effort. 
C'est  un  arrêt  du  sort , 
Il  faut  que  l'amour  extrême 

Soit  pins  for( 

Que  la  mort. 

PLDTOW. 

Les  enfers ,  Plutou  lui-même , 
Tout  doit  en  être  d'accord  ; 
11  faut  que  l'amour  extrême 
Soit  plus  fort 
Que  la  mort. 
Que  pour  revoir  le  jour  Tombre  d' Alceste  sorte. 

(Piuton  donne  un  coup  de  son  trident  et  fait  sortir  »on 
char.  ) 

I     Prfnez  place  tous  deux  au  char  dont  je  me  sers  : 

Qu'au  gré  de  vos  vœux  il  vous  porte  ; 
I  Partez ,  les  chemins  sont  ouveiis, 

7* 


à 


^8         ALCESTE.  ACTE  IV.  SCÈNE  V. 
Qa'une  Tolante  escorte 
Vous  coQdaise  au  travers 
Des  noires  vapeurs  des  enfers. 

(  Alcide  el  Tombre  d'Alceste  «e  placent  sur  le  char  de  Plu- 
ton  ,  qui  les  enlevé,  sous  la  conduite  d'une  troupe  voI«nte 
de  suivans  de  PlutoQ.') 


riH   DIT    QUATBliME  ACTE. 


i 


»^^^^^^^^* 


ACTE  CINQUIÈME. 

Le  iBéâtre  repiésente  on  arc  de  triom^be  et  des  «npbi- 
théâtres,  oà  Ton  voit  tine  mnltitade  de  difiëreos  penpScs 
de  la  Grèce  assemblés  poor  teceroir  Akade  triogoop^Mct 
des  enfers. 


SCÈNE  I. 

ADMÈTE,  CHOEUR. 

ADMèxE. 

AtODE  est  vainqueur  da  tr^tas , 
L'enfer  ne  lai  résiste  pas. 
U  tamène  Alceste  vivante  ; 

Qae  cbacun  chante  : 
Alc'ide  est  vainqoeor  du  trépas , 
L'enfer  ne  loi  lésîste  pas. 

CHCeVB. 

Alcide  est  vainqueur  da  tr^as , 
L'enfer  ne  loi  résiste  pas. 


Quelle  doaleor  secrète 

Rend  mon  ame  inquiète , 

Et  trouble  mon  amour  l 
Alceste  voit  encor  le  jour , 
Mais  c'est  pour  uç  autre  qa'A.umèl&  1 


L 


OO  A  1j  1^  1!.  s  1  JL. 

C  H  CE  DR. 

'Alcide  est  vainqueur  du  trépas , 
L'enfer  ne  lui  résiste  pas. 

ADMÎITE. 

'Ah  !  du  moins  cachons  ma  fristesse  ^ 
Alceste  dans  ces  lieux  ramène  les  plaisirs. 

Je  dois  rougir  de  ma  faiblesse  : 
Quelle  honte  â  mon  cœur  de  mêler  des  soupirs 

Avec  tant  de  cris  d'allégresse  ! 

CHOËUP, 

Alcide  est  vainqueur  du  trépas, 
L'enfer  ne  Ivfi  résiste  pas. 

ADMtTE. 

Par  une  ardeur  impatiente 
Courons ,  et  devançons  ses  pas. 
Il  ramène  Alceste  vivante  ; 

Que  chacun  chante  ! 

ÀDMèxE    ET   LE    ÇHOEUH. 

Alcide  est  vainqueur  du  liépas, 
L*cnfer  ne  lui  résiste  pas. 

SCÈNE   II. 

LYCAS,  STBATON,  enchamé. 

irYCAS,  menant  STnATON  en  liherlc. 
Auiounn^Hui  qu' Alcide  ramène 
Alceste  des  enfers , 
le  veux  Bnir  ta  peine. 
Qu'on  ne  porte  plus  d'nuUes  fers 
Que  ceux  dont  l'amour  nous  enchaîne. 


ACTE  V,. SCENE  III.  8f 

iTBATÛir  ET    LYCAi. 

Qa'oD  ne  porte  plas  d'autres  fers 
Que  ceux  dout  ramour  nous  encbaîne. 

SCÈNE  III. 

CiPHiSE,  LYCAS,  STRAïON. 

LTCAS  CT  STBATOBr. 

Vois,  Céphise ,  vois  qui  de  nous 
Pëot  rendre  ton  destin  plus  doux. 
LTCAS.  * 

Mes  amoufS  seront  étemelles. 

8TBAT01I. 

Mon  ccenr  ne  sera  plus  jaloux. 

-  LTCAS   ET    STnATOlV. 

^     Sntre  deux  amans  fidèles , 
Choisis  un  heureux  époux. 

CÉPHISE. 

7e  n'ai  point  de  choix  à  faire  : 
Parlons  d'aimer  et  de  plaire , 
Et  YÎyons  toujours  en  paix. 
L'hymen  d^Uuit  la  tendresse., 
11  rend  Tamour  sans  attraits  ; 
Voulez-vous  aimer  sans  cesse , 
Am^ns ,  n'épousez  jamais. 

LTCAS. 

Prenons  part  aux  transports  d'une  joie  éclatante. 

CHOEUR. 

Que  chacun  chante  ; 


8a  ALCESTE,  - 

Alcide  est  vabqueur  da  trépat 
L'enfer  ne  lui  résiste  pas. 

SCÈNE  IV. 

ALCIDE,  ALCESTE,   ADMÈTE,  CÉPHIS  E  , 
LYCAS,  STRATOIf,  PHÉRÈS,  CLÉANXE  ^ 

CHCEUB. 

ALCIDE. 

Poun  nne  si  belle  victoire 
Pent-on  avoir  trop  entrepris  ? 
Ab!  qu'il  est  doux  de  couiir  à  la  gloire 
Lorsque  l'amour  en  doit  donner  le  prix  ! 
Vous  détournez  vos  yeux  !  je  vous  trouve  insensible  ! 
Àdmète  a  seul  ici  vos  regards  les  plus  doux  ! 

ALCESTE. 

Je  fais  ce  qui  m'est  possible 
Pour  ne  regarder  que  vous. 

ALCIDE. 

Vous  devez  suivre  mon  envie , 

C'est  pour  moi  qu'on  vous  rend  le  jour. 

ALCESTE. 

Je  n'ai  pu  reprendre  la  vie 
Sans  reprendre  aussi  mon  amour. 

ALCIDE. 

Admète  en  ma  faveur  vous  a  cédé  lui-même. 

ADMÈTE. 

Alcide  pouvait  seul  vous  ravir  au  trépas  : 


^CTE  V,  SCÉTNE   IV.  S3 

ikeste ,  TOUS  vivez ,  je  revois  vos  appas  ; 
Ai-je  pa  trop  payer  cette  douceur  extrême  ?. 

ADMÈTE   ET  ALCESTE. 

'Ah ,  que  ne  fait-on  pas. 
Pour  sauver  ce  qu'on  aime  ! 

ALCIDE. 

Foos  soupirez  tous  deux  au  gré  de  vos  désirs  ; 
Est-ce  ainsi  qu'on  me  tient  parole  ? 

ADMÈTE   ET   ALGESTE. 

Pardonnez  aux  derniers  soupirs 

VuD  malheureux  amour  qu'il  faut  qu'on  vous  immole. 

Âlceste,    J    ,,       ^        , 

Admète     S        °*         P      ^^^  ^°*'* 

^  (de  moi  votre  sort    )    ,  .    , ,       , 

D'an  autre  que   <.  ,     .   r  doit  dépendre. 

^       ^  de  vous  mon  destin) 

1\  &Qt  dans  les  grands  cœurs  que  ramoor  le  plus  tendre 

Soit  la  victime  du  devoir. 

Alceste,  )   i,       r        i 

..  >  il  ne  faut  plus  nous  voir. 

(Admète  se  retire ,  et  Alceste  offre  sa  main  à  Alcide ,  qui 
Wrêie  Admète^  et  lui  cède  la  main  qu' Alceste  lui  présente.) 

ALCIDE. 

Won ,  non ,  vous  ne  devez  pas  croire 
Qu'an  vainqueur  des  tyrans  soit  tyran  à  son  tour  : 
Sar  l'enfer ,  sur  la  mort ,  j'emporte  U  victoire  j 

U  ne  manque  plus  à  ma  gloire 

Qne  de  triompher  de  l'amour. 

ADMETS  ET  ALCESTE. 

Ah  i  quelle  gloire  extrême  ! 
Quel  héroïque  effort  '. 


i 


84  ALCESTE. 

Le  vainqueur  de  la  mort 
Triomphe  de  lui-même. 

SCÈNE  V. 

ALCIDE,   ALCESTE,   ADMÈTE,   CÊPHISK 
LYCAS,  STRATON,  PHÉRÈS,  CLEANTE 

BERGEBS   ET   PEUPLES   DE   THES»AL1E. 
CHŒUR. 

«  Aimez  en  paix  j  heureux  époux , 
)>  Triomphez ,  généreux  Alcide  ; 

(toajoar,  la  gloire     ^ou.  guide. 

(  sans  cesse  1  amour  ) 

»  Jouissez  à  jamais  des  )     °°°^  ^    i  les  plus  doux. 
(  plaisirs      ) 

»   Aimez  en  paix,  heureux  époux, 

»  Triomphez,  généreux  Alcide. 

(On  danse.) 

CEPniSE. 

C'est  la  saison  d'aimer 

Quand  on  sait  plaire , 

C'est  la  saison  d'aimer 

Quand  on  sait  charmer. 

Les  plus  beaux  de  nos  jours  ne  durent  guère  ; 

Le  sort  de  la  beauté  nous  doit  alarmer , 

Nos  champs  n'ont  point  de  fleur  plus  passagère. 

C'est  la  saison  d'aimer 

Quand  on  sait  plaire , 
C'est  la  saison  d'aimer 
Quand  on  sait  charmer. 


ACTE  V,  SCàHE  V.  85 

Un  peu  o'ainour  est  nécessaire 
II  n'est  î.imnis.  trop  t^t  de  s'enflammer  : 
Voos  cloi!iic-t-on  un  cœur  pour  n'en  rien  fiiire  ?. 

C  est  la  saison  d'aimer 

Qnand  on  sait  plaire , 
C'est  la  saison  d'aimer 
Qaand  on  sait  rhanner. 

(On  dame.) 

CÉPHISE. 

Célébrons  la  victoire 
Do  fils  du  plus  pnissaùt  des  dienx  I 
Qne  Téclat  de  sa  gloire 
Vole  ao  pins  haut  des  cieux. 

(A  Adraèlc  et  à  Alccsle.) 

Goûtez  ù  chaque  instant  une  doacear  nouvelle , 
Tcui'rjs  amans,  vivez  eu  paixj 
Que  voire  ardeur  soit  éternelle , 
Que  vus  plaisirs  couronnent  nos  souhaits  ! 

Célébrons,  etc. 

(On  danse.) 
CHCeuiU. 
Quel  ccenr  sauvage 
Ici  ne  s'engage? 
Quel  coeur  sauvage 
Ne  sent  p-^int  l'amour  ? 
Nous  :;llons  voir  les  plaisirs  de  retour  ; 
Ne  mn'iquons  pas  dW  faire  un  doux  usage , 
Pour  riiiî  un  peu ,  l'on  n'est  pas  moins  sage. 
(Usbcrscrs  et  les  peuples  c«^lèbrent  par    leurs  dan?e»  le 
triomphe  «r.llride  et  la  réunion  d*Admcte  eftï'Alceslc.) 

ri3  d'alceste.    , 
CraDils-Opcras.   *•  8 


THÉSÉE, 

TRAGÉDIE-LYRIQUE  EN  CINQ  ACTES; 
PAR  QUESAULT, 

^cpHsdsiée^  pour  la  première  fois,  le  tr  janvier  i6^5 
en  cinq  actes  ;  et  remise  en  qaatre  actes,  avec  des  chan- 
Çfmcns^  par  Marmontel,  le  a6  (ëvrier  178a  ;  auisiqtie 
^de  Gossec. 


Nota.  Les  rers  aioutés  ou  chang««  par  Harmoctol  »  sont 
K^d(U  d«  guilUmets. 


PERSONNAGES. 


ÉGLÉ ,  princesse  élevée  sous  la  tutèle  d'Égèc,  roi 

d'Athènes. 
CLÉONË,  confidente  d^Eglé. 
ÉG^E. 

'ARC AS  t  confident  d'Egée. 
-SuivAHS  d'Egée. 
Chabub  de  Combàttans. 
La.  GRAKDE-PRÊTrESiE  de  Minerve. 
Chœur  de  Prétresses  de  Minerve, 
MEDEE ,  princesse  magicienne. 
DORINE ,  confidente  de  Médée. 
CHceun  d'Athéniens. 
THÉSéE,  fils  inconnu  d'Egée. 
Choeur  des  haibitans  des  enfers. 
Lçs  FoniEs. 
MINERVE. 
Deux  Vieillards. 
VVE  Vieille. 


La  scène  se  pr.s^e  à  Ail.ùics, 


THÉSÉE, 

TRAGÉDIE-LTHIQVB. 


»<^^^^^«*> 


ACTE  PREMIER. 

Le  tbéâtre  repiéseote  le  temple  de  Hioenre. 

SCÈNE  I. 

t 
(  CftBBlHiUaiu  qat  l'on.Bntcnd  «t  qa«l*oa  n«  toU  pa$. } 

LE^HCBUB. 

Afknçon ,  «Taoçons ,  qne  rieo  ne  nous  étonne  ; 
Fixons,  pecçoos,  fnippoDS ,  qa'on  n'épu-goe  persoone  ; 

Il  faut  périr,  il  faut  périr , 

Il  &at  vmacxe  ou  mourir. 

SCÈNE  II. 

£GLÊ,  COMBATTAKS,  qw  f on  ne  roit  ptf . 

éGLÉ. 

Qoa  que  soit  mon  destin,  il  faut  ici  l'atiendic. 
MÎQtrrt,  c'est  à  voas  que  je  TÎeus  recourir! 


Ç)o  THESEE. 

DIviDÎté ,  qni  devcx  prendre 

Le  soin  de  nous  défendre , 
Hâtez-vous  de  noos  secoaiir. 

COMBATTA5S. 

Avançons ,  avançons ,  etc. 

SCÈNE  III. 

CLÉONE,ÉGLÉ,  combattaks,  que  l'on  ne  voit 
pa»< 

iGLÉ. 

Est-ce  aux  Athéniens ,  est-ce  au  parti  contraire  • 

Que  l'avantage  esc  demeuré? 
Dis-moi ,  pour  qui  le  sort  s'est  enfin  déclaré  ?. 

Ton  silence  me  désespère. 

CLEO  SE.. 

Mes  yeux  troublés  d'eSfoi  n'ont  rien  considéré , 

Thésée  est  le  dieu  tutélaice ,     . 
Qui  me  donne  en  ce  temple  un  refuge  assuré  ; 
Je  ne  sais  rien  de  plus  et  j'ai  cru  beaucoup  faire 
De  gagner  en  tremblant  cet  asile  sacré. 

ÉGLÉ. 

Au  i^ilieu  des  clameurs ,  au  travers  du  carnage 
Thésée  a  jusqu'ici  conduit  mes  pas  errans , 

Son  généreux  courage 
A  fait  son  premier  soin  de  m'ouviir  un  passage 
Entre  deux  eflroyables  rangs 
De  morts  et  de  monrans. 


ACTE  t,   SCÈNE   IV.  9t 

ll*as-ta  pas  admiré  Tardeur  noble  et  gaerrtère 
Dont  il  coort  aa  péril  et  s'expose  an  trépas  ? 
Ali  !  qa'nn  iemie  héros,  dans  i'borrear  des  combats, 
Coovert  de  sang  et  de  poassière , 
Aux  yeux  d'une  princesse  fière, 
A  de  cbarmans  appas  ! 

COMBATTASS. 

Il  fout  périr ,  etc. 

SCÈNE  IV- 

ARCAS,  ÊGLÉ,  CLÉOnC 

BOlé. 

Le  ciel  ne  Tcnt-il  point  mettre  fin  à  nos  peines  ? 
Eclaircis-noas ,  Arcas  ,  <piel  est  le  Sort  d'Albèues. 

Ave  A  s. 
Le  combat  dore  encore,  il  est  sanglait ,  aflreax  , 

Et  le  saccès  en  est  dootem. 

Le  Boi  m'a  conmiandé  de  prendre 
Le  sob  de  l'avertir ,  s'il  &llaît  vons  défendre  ; 
El  ce  n'est  qae  poor  vons  qa'il  a  connu  l'tiroi. 

ÉGLÉ. 

Thésée  est-il  avec  le  Roi  ?. 

ABCAS. 

1^  pins  fiers  ennemis  il  écarte  la  fimle  : 

Oo  reconnaît  sa  trace  aux  flots  de  sang  qai  coule. 

ÉGLÉ. 

O  Dieux!  . 


f)2  THESE^È. 

COMBÂTTAHl». 

Mourez ,  perfides  coeurs , 
Tombez  sons  les  coups  des  vainqueurSf 

SCÈNE  V, 

LA  GRANDE  PRÉTRESSE,  ÉGLÉ,  CLÉON  E-. 

LA   PRÊTRFSSE. 

O  Minerve  !  arrêtez  la  cruelle  furie 
Qui  désole  notre  patrie. 

ESSEMB^E. 

o  Minerve  î  arrêtez  la  cruelle  furie 
Qui  désole  notre  patrie, 
lêcartez  loin  de  uqus  la  guerre  et.  ses  bprreurs , 
Ciel  !  épargnez  le  sang ,  contentez-voq^  dq  pleurs  ! 

C0BIBATTÂ5S. 

Xibetté,  liberté  : 
Victoire ,  victoire ,  victoire. 
Courons  tous  à  la  gloire. 
Combattons  avec  fermeté  , 
Défendons  notre  liberté. 

Liberté,  liberté  : 

Remportons  la  victoire  i 

Liberté,  liberté, 

Victoire,  victoire,  victoire. 


m.%siKt  1,  dtiiM^Si  ¥11.  9<> 

SCÈNE  VI. 

EGÉE,  LÀ   PRÊTRESSE,   ÉGLÉ,  CLÉONË  , 

•  UITAllS,0tC. 
EGÉE. 

Us  mmiiis  soDt  ▼amcas ,  leurs  chefs  sont  immolés  « 

Leur  vaifie  espérance  est  détrnite  : 
ïons  les  peuples  voisbs  ,  (ja'ils  avaient  appelés  , 
.  Sont  dans  nos  Sers ,  ou  soq(  en  faite. 

LA  PBÊTBEIS]^. 

Reodons  grâces  aux  Dieux. 

LE   CBCBUB 

Rendons  grâces  aux  Dieux. 
léaÉE. 
Risque  le  juste  cîel  â  nos  vœux  est  propice , 
»  Allei  et  préparez  on  pompeux  sacrifice 
A  la  difinité  qui  protège  ces  lieux. 

LE   CHCBUB. 

(i^Jloos ,  rendons  grâces  aux  Dieux. 

(  lif  Mtuat.  ) 

SCÈNE  yii. 

ÉGLE,  tGiE. 

ÉGÉC. 

Cma ,  (Cannante  £glé,  de  répandre  àtn  bimes  ; 


9^>  injia  jî.iî;. 

Commençons,  après  tant  d'alarmes, 
A  jouir  d'un  destin  plus  doux. 
Puisque  je  vois  mon  trône  affermi  par  les  armes , 
J'y  veux  joindre  de  nouveaux  charmes. 
En  le  partageant  avec  vous. 

À.VCC  moi  !  Vous ,  Seignein-... 

Que  votre  trouble  cesse. 
Cest  peut-être  un  peu  tard  vouloir  plaire  â  vos  yeux  ; 
Je  ne  suis  plus  au  tems  de  l'aimable  jeunesse  ^ 
Mais  je  suis  roi,  belle  Princesse , 
Et  roi  viçtonenx* 

Faites  grâce  â  mon  âge  en  iâveur  de  ma  gloire, 
Voyez  le  prix  du  rang  qui  vous  est  destiaé; 
La  vieillesse  sied  bien  sur  un  front  couronné , 
Quand  on  y  voit  briller  l'éclat  de  la  victoire. 

Parlez  ,  charmante  Églé ,  parler  â  votre  to«t« 

ÉGLt. 

Depuis  que  j'ai  perdu  mon  père , 
Vos  soins  ont  prévenu  mes  voeux  dans  votre  cour. 
Je  dois  vous  respecter ,  Seigneur ,  je  vous  révère. 

É6ÉE. 

Vous  parlez  de  respect ,  quand  je  parle  d'amour. 

ÉGLÉ. 

»    Mais  votre  foi ,  Seigneur  ,  à  Médée  est  promise. 

EGÉE. 

Je  sais  qne'^  lorsqu'on  la  méprise  | 


ACTE  1»  SCÈNE  vu.  9$ 

On  s'expose  aux  fureurs  de  ses  ressentimeus  ; 
Toute  la  nature  est  soumise 
!A  ses  aflreux  end^utemens. 
Mais  î'ai  fait  élever,  eo  secret  dans  Trésenoe  , 
»  Un  £ls  qui  peut  remplir  tous  mes  engagemens  ; 

»    Et  dans  l'âge  où  l'on  plaît  sans  peine , 
Je  veux  qu'en  épousant  Médée  au  lieu  de  moi , 
Il  dégQge  ma  foi. 

iOLÉ. 

Mais  ,  si  malgré  vos  soins ,  Médée  ambitieuse 
He  s'attache  qu'au  rang  que  vous  me  présentez... 

Que  vous  êtes  ingénieuse 
A  trouver  des  difficultés  ! 
Que  Médée  en  fureur ,  s'arme ,  menace  ,  tonne  , 

Il  faut  que  ma  main  vous  couronne, 
Qoand  il  m'en  coûterait  et  l'empire  et  le  jour. 

Lorsqu'il  se  sent  animé  par  l'amour , 
IJu  grand  cœur  ne  voit  point  de  péril  qui  l'étonné. 

J'atteste  Minerve  &  vos  yeux, 
J'atteste  le  maître  des  cieux , 
Et  sa  foudroyante  justice... 

£  G  LÉ,  l'interrompant. 
Tout  est  prêt  pour  le  sacrifice , 
On  s'avance  en  ces  lienx  ; 
Rendons  grâces  aux  Dieux. 


Od  THESEE. 

SCÈNE  VIII. 

EGÉE,  ÊGLÉ,  scivÂNS  du  noi,  CLËONB, 
LA  PRÊTRESSE,  suite. 

LA   PBÊIBESSE* 

Cet  empire  puissant ,  que  votre  soin  consenre  , 
Vient  reconuaitre  ici  votre  divin  secours  : 

Favorable  Minerve, 

Protégez-pous  toujours. 

'     LE  CHOEUB. 

Favorable  Minô-ve,  etc. 

LA   PRÊTRESSE* 

Chantez  tous  en  paix  ; 
Chantez  la  victoire. 

LE    CROEDR. 

Chantons  tous  en  paix , 
Chantons  la  victoire, 
Et  que  la  mémoire 
En  vive  à  jamais. 

LA    Pnf.TRESSE. 

Chômons  les  attraiu 
Dont  brille  la  gloire. 

LE   CBOECB. 

Chantons  tous  eu  paix , 
rJ)nulons  la  victoire , 


'  ACTE  I,  SCÈNE  1%,  gj 

Et  que  la  mémoîrtt 
'  Ea  vire  à  jamait. 

(  On  dans  t.  ) 

SCÈNE  IX. 

I.E9  pitàcéoEirs,  EGÉE,  conbattAms  qui 
apportent  les  étendards  des  ennemis  vaincus. 

I.A   PBÊTBESSE. 

O  Minerve  savante  I 
O  guerrirre  PalUs  ! 
Soofl&es  qu'un  jeu  sacré  dans  ces  lieux  vous  présenu 
Une  image  innocente 
De  guerre  et  de  combats. 

LE  CRoeuB. 
O  Minerve  savante  ! 
O  guerrière  PiiUas  î 

(  On  forme  Its  jeux  dt  ^errt.  ) 
O  Déesse  puissante  ! 
'  ProCégc  ces  cliniats. 

LA   PBÊTBESSE. 

Paissioas-6ou8  voir  toujours  Athènes  triomphante , 
Poisse  son  roi ,  vainqueur  des  plus  grands  potentats , 
La  rendre  heureuse  et  florissante  ! 

te   CROEUB. 

Que  la  guerre  songlante 
Passe  en  d'autres  États! 
O  Minerve  savante  ! 
O  guerrière  Pallas  ! 

Fin    DU  PBEIIIEB    ACTE. 
Cnnds-Optfras.    !•  9 


<»^^v»  ■^^^««^f»'^-^^'* 


ACTE  SECOND. 

Le  tl^éàtre  représente  une  paitie  extérieure  du  palais 

d'Egée. 


SCÈNE  I. 

MÉDÉE,  DORINE. 

MÉO^E. 

Doux  repos ,  innocente  paix , 

»  Mon  cœur  vainement  vous  rappelle  ; 

n   Dévoré  d'une  ardeur  nouvelle , 

»  11  vous  a  perdus  pour  jamais. 
L'Impitoyable  Amour  m'a  toujours  poursuivie  ; 
I^ 'était-ce  point  assez  des  maux  qu'il  m'avait  faits  ? 
Pourquoi  ce  dieu  cruel ,  avec  de  nouveaux  traits , 
Vient-il  encor  troubler  le  reste  de  ma  vie  ? 

DOBXNC. 

»   Faut-il  vous  refuser  an  plus  juste  penchant? 
TLésée  est  un  béros  charmant  : 

Méprisez ,  en  l'aimaul , 
L'ingrat  Jason  qui  vous  offense. 

MÉOÉE. 

Un  tendre  engagement  va  plus  loin  qu'on  ne  pense  , 
On  ne  sait  pas,  lorsqu'il  commence. 


ACTE   11,  5GEHE  I.  99 

Tout  ce  qu'il  dok  coûter  on  jour. 
Von  ccBur  aarait  encor  sa  première  iimocence 
i         S'il  n'avait  jamais  eu  d'amoar. 
I  Mon  frère  et  mes  deux  fils  ont  été  les  victimes 
'  De  mon  implacable  Ihretir  ; 

J'ai  rempli  Tuoivers  d'horreur  : 
L'Àmonr ,  bélas!  a  ùnt  scnl  tous  mes  crimes. 

n  J'ai  trop  vainement  corobatta , 
j    >  Cest  loi  qui  m'a  rendue  inflexible  et  cruelle  : 
I    U  destin  de  Médce  est  d'être  criminelle  ; 
I    Hais  son  coeur  était  fait  pour  aimer  la  vertu. 

DOtalSE. 

Aimez ,  aîmez^Thésée ,  aimez  sa  gloire  extrême. 

MÉDÉE. 

Mais  qui  me  répondra  qu'il  m'aime  l 
Peut-il  trouver  un  sort  plus  beau  Z 

MÉDÉE. 

Peot-étre  que  mon  cœur  cherche  un  malheur  nouveau. 
Mon  dépit ,  tu  le  sais ,  dédaigne  de  se  plaindre  : 

U  est  difficile  â  calmer  ; 

S'il  venait  â  se  rallumer  , 

11  finidr&it  du  sang  ponr  l'éteindre. 

D0BI5C. 

Qoe  ne  peut  point  Médée  avec  l'art  de  charmer  ! 

MÉDEE. 

Que  puis-jf ,  hélas!  Parlons  sans  feindre. 
^  eqiers  qoeud  je  veux  sont  contraints  de  s'anner  ; 
^is  OD  ne  Ibrce  poiut  un  cœur  &  s'enflammer  : 


J 


2353718 


100  iUli^tiË. 

Met  charmes  les  plus  Ibrts  ne  saaçaient  Vy  contraindre  ! 
▲h  !  je  o'eo  «i  que  trop  pour  forcer  à  me  craindre  , 
fit  trop  peu  pour  me  £aire  aimer. 

SCÈNE  II. 
éqée/médée,  dorink. 

éGÉE. 

7e  Toia  le  succès  fiivorable 

Des  soins  que  vous  m'avez  promis* 

Médée  et  son  art  redoutable 
Ont  gardé  ce  palais  contre  mes  ennemis. 

»  J'ai  trop  long-tems  négligé  ravautaft 
»  De  m'unir... 

M^DÉE. 

Sans  blesset  nos  communs  iuteiéti  « 
})  On  peut  de  notre  hymen  différer  les  apprêts. 

•  Je  sens,  k  les  presser ,  que  rien  ne  vous  iOgjige  ; 
;»  Dans  le  déclin  des  ans ,  l'Amour  n'est  plos  heureux  2 

u  J'ai  vu  foir  les  jours  du  bel  âge , 
»  Et  l'espoir  d'être  aimé  s'est  éloigné  copuDt  eu. 
Mais ,  sans  péril  enfin  je  puis  faire  paiaitre 
Un  fils  que  dans  ma  cour  je  n'osai  reconnaître  : 

Il  peut  venir  dans  peu  de  temS| 
Et... 

U^DÉE. 

Laissons  votre  fils ,  Seigneur  ;  je  vous  entends, 
La  jeune  £gl«  vous  parait  belle  : 


ACTE  II,  SCÙNE  ir.  101 

Ciiaque  jour  je  m'en  aperçoi  ; 
Si  vous  in'abandooDez  pour  «lit ,  < 
Xlicsée  est  seul  digne  de  moi. 

SCÈNE  III. 

.     ABCAS,  M£D£E,  EGÉE. 

ABCAS. 

ScicKOB ,  songez  h  vous. 

BOKE. 

Quel  malheur  nous  mtoace  ? 

ABCAS,    . 

iWsée  est  si  paissant  qu'il  peut  vous  alarmer. 
Au  lieu  d'un  héritier  qui  manque  à  votre  race  , 
Poor  votre  successeur  on  vent  le  proclamer. 

EGEE. 

l\  (kut  arr^cr  cette  audace. 

SCÈNE  IV. 

(  Derrière  le  théâlre.  ) 

tE  CHOEUR. 
»  Kéosez,  régnez  ,  Thcâce,  et  lenoez-uous  hcuicux. 

ÉOÉE. 

»  E^itcudcz-vous  ces  cris  tumultueux  ? 


i 


102  T'HÈSÊE. 

(  A  Arraf .  ) 
»  Rassemblons  au  palais  ma  garde  dispersée. 

M^Df  E,  vivement. 
»   C'est  le  crime  du  peuple,  et  non  pas  de  Thésée, 

PEUPLE. 
^(  Chœur. derrière  le  théâtre.  ) 
»  Régnez ,  régnez ,  Théâée,  et  rendez-nous  heureux. 

SCÈNE  V. 

(  Thésée  parait  environné  du  peuple  d'Athènes,  qui  s« 
réjouit  de  la  victoire  remportée  par  ce  prince.  ) 

LE  PEUPLE. 

CHGEUn. 

QcE  Ton  doit  être 
Content  d'avoir  un  maître 
Vainqueur  des  plus  grands  rois  \ 

Que  Ton  entende 
Chanter  partout  ses  exploits  ; 
Que  toujours  il  nous  défende  : 
Joignons  nos  voix  ; 
Que  la  victoire 
Le  comble  ici  de  gloire  ; 
Suivons ,  aimons  ses  lois. 

Que  Ton  entende 
Chanter  partout  ses  exploits. 

(On  danse.  ' 


Acte  ii»scème  v.  io3 

I.E    CHOEUB. 

Que  toujourt  il  nous'  déCeade  : 
Qu'il  triomphe  ,  qu'il  commande. 

<Ja'il  jouisse  des  douceucs 
I>e  régner  sur  tous  les  cœurs. 

(  On  danse.  ) 

TROIS    VIEILLARDS   ATHÉNIEBS. 

Pour  le  peu  de  bon  tems  qui  nous  reste , 
llien  n'est  si  ^meste 
Qu'un  noir  chçgrin  ; 
Le  plaisir  se  présente  , 
^      Cjiantons  quand  on  cbante. 
Vivons  an  gré  du  destin. 

L'aflreuse  vieillesse , 
Qui  doit  voir  sans  cesse 
La  mort  s'approcher, 
Trouve  assez  la  tristesse. 
Sans  la  chercher. 

(  On  danse.  > 

THÉSÉE. 

C'est  assez ,  amis ,  c'est  assez  ; 
Allez  ,  et  que  chacun  se  rende 
Au%  endroits  qu'au  besoin  il  faudra  qu'on  défende  ; 
Aijez ,  je  suis  content  de  vos  soins  empresses], 
Si  vous  voulez  que  je  commande , 
Allez ,  allez ,  obéissez. 

(Le  peuple  se  relire.) 


lo4  TStSKE. 

SCÈNE  yi. 

MEDÉE,  THÉSÉE. 

HÉDÉB,  à  Thësë«,  qui  Teutsorlir. 
'^HÉSKI)  OÙ  courez-Tous,  que  prétendez-yoïu  Cui«  ?. 

THÉSÉE. 

chercher  le  Roi,  le  voir  et  calmer  sa  eolèrc, 

M^DÉE.      * 

Le  Boi  souffriraH-il  que  vous  donniez  la  loi  ?, 

THÉséE. 

Il  n'aura  pas  lieu  de  se  plaindre  : 
Si  Ton  a  trop  d'ardeur  pour  moi , 
Ce$i  un  feu  que  j'ai  soin  d'éteindre. 

MÉDÉE, 

Quand  on  a  fait  trembler  un  roi , 

Apprenez  qu'on  en  doit  tout  craindre. 
TnésÉE. 
Sans  un  charme  puissant  qui  m'attache  à  sa  eour^ 
J'irais  chercher  ailleurs  une  guerre  nouvelle. 
La  gloire  m'enflamma  dès  que  je  vis  le  jour , 

Tout  mon  cœur  était  fait  pour  elle  ; 
Mais,  dans  un  jeune  cœur,  la  gloire  la  plus  belle 

Fait  aisément  place  à  l'amour. 

MÉDEE. 

iVous"  aimez....  Mais  parlez ,  que  rien  ne  vous  alarme , 
J'pbligcwii  le  Roi  de  vous  tout  accorder. 


ACTE  II,  SCfiHE  ▼!.  io5 

TBÉSÉE.  ' 

C'est  £glé  qui  me  cbarme  , 
.  llli  est  runiqac  prix  que  je  venz  denuiDder. 

UÉD^E. 

Ceit  églé ,  dites-vous....  Églé  qui  tous  engage  l 

THÉSÉE. 

«  Eglé ,  par  ses  vertus ,  a  fixé  xboo  hommage , 
»  Hoo  cœur  est  pour  jamais  eochainé  sons  ses  lois , 
»  Et  je  préfoe  un  si  doux  esoiavagc , 
»  An  sort  hrjliant  âts  plus  grands  rois.  » 

UCDEE. 

>»  11  (ânt  vous  dévoiler  un  fioeste  m jstke ,  h 
Crai^Kz  pooc  votre  amour  un  obsude  fkul. 

THÉSÉE. 

Si  Médée  est  pour  moi ,  qui  peut  m'étre  contiaire  ? 

Vous  avez  le  loi  pour  rival. 
THÉsife. 
Mal^  SB  foi  promise ,  l^lé  pourrait  lui  pUirt  ! 

MÉDÉE. 

taisiex-flioi  voir  Églé ,  laisses-moi  voir  le  fiou 

Allez ,  allez  m'attendre , 

fit  fiez-vous  k  moi. 
yoHs  coBoaîties  bientôt  les  soins  que  je  vais  preo^f  «• 

(TkM««s«rl^  I 


I 


«o6       THÉSÉE.  ACTE  II,  SCÈNE  VII. 

SCÈNE    VII, 

MËDÉE. 

DipiT  mortel ,  transport  jaloux. 
Je  m'abandonne  â  votts. 
Et  toi ,  meurs  pour  jamais ,  tendresse  trop  fàtaîe  : 
Que  le  barbare  amour  ^  que  j'afais  cra  si  doux , 
Se  change  dans  mon  cœur  en  ferie  infernale. 
Inventons  qaelque  peine  affiwase  et  sans  égale  : 
Préparons  avec  soin  nos  plus  funestes  coups. 
'Abl  si  Tingrat  que  j'aime  échappe  â  mon  coutroux. 
An  moins  n'épaignons  pas  mon  heureuse  rivale. 

Dépit  mortel ,  transport  jaloux , 
le  m'abandonne  â  vous. 


rin   DV    SEC05D    ÀCYE. 


ACTE  TROISIÈME,  ' 
SCÈNE  I. 

MÉDÉE,  ÉGLÉ,  CtÈONE.  DORINE. 

MÉDÉE. 

^«WEssE  ,  «avcx-TOM  ce  que  peut  ma  colère  ? 
Quand  on  1  oblige  d'éclater. 

ÉOLlS.       ^ 

Je  prétends  ne  rien  feire 
Qui  vous  doive  irriter. 

MÉDÉE. 

Eh  !  n'est-ce  rien  que  de  trop  plaire  ? 
«  Vous  élevex  vos  vœux  jusqu'à  ïhymcn  du  Roi.» 

ÉGLÉ. 

Si  je  lui  plais,  c'est  malgré  moi. 
«  Mon  cœur  n'est  point  épris  de  la  graudeur  suprême 
»  Trop  souvent  le  bonheur  est  dan^  un  rang  plus  bai.  « 

MÉDÉE. 

Vousaimei  donc  Thésée?...  Ah î  n'en  rougissez  pas, 

U  n'est  que  trop  digne  qu'on  l'aime  I 

Je  m'iotéresse  à  votre  amour. 
Parlez,  vous  connaîtrez  mon  cœur  à  votre  tour. 

ÉGLÉ. 

J'avais  toujours  bravÉ  l'anBÔur  et  ^  puissance', 


J 


io8  THESEE. 

Avant  que  d'avoir  vu  ce  glorieux  vainqueni;  ; 
"Wais  la  gloire  et  l'amour ,  tous  deux  d'iutelligence  , 
fie  sont  que  trop  puissans  pour  vaincre  un  jeune  cœur. 
«  Régnez  avec  le  Roi  dans  une  paix  profonde , 
»  Laissez-moi  mon  amant ,  mon  sort  est  assez  doux  :  » 
Quand  vous  posséderiez  tout  l'empire  du  monde , 
Mon  cœur  n'en  serait  pas  jaloux. 

MÉDÉE. 

Vens  m'en  «vez  trop  dit,  il  est  tems  qu'entre  nous 

La  confidence  soit  égale, 
ir  faut  vous  dégager  d  une  chaîne  faule , 
Vous  aimez  un  héros  qui  ne  peut  être  à  vous , 
Et  Médée  est  voire  rivale. 

É6i>É,  à  ipart. 
Uédée  I  6  eiel  !... 

MBUÊE. 

Redoutez  mon  courroux, 

DUO. 
Nos  deux  ceeurs  sont  unis  par  un  amour  fidèle. 

En  dépit  de  l'amour ,  je  les  veux  diviser. 

ÊGLÉ, 

La  chaîne  qui  nous  lie  est  si  douce  et  si  belle  ! 

MEDiE. 

l'aumi  plus  dt  plaisir  si  je  la  puis  briser. 

^^«^ ,  j'aime  mieux  la  mort  c^u'une  lâche  iheonstaMc , 


ACTE  III)  SCÈNE  IL  .      109 

ToQt  l'enfer  à  mes  jeux  n'aurait  rieo  de  si  noir» 

MÉDÉE. 

Pour  rompre  vos  liens  et  scrrir  ma  vengeance , 
Des  enfers,  s'il  le  faot ,  J'armerai  le  pouvoir. 
Puisque  vous  le  voulez,  vous  allez  me  connaître, 
Si  votre  amour  est  tel  qu'il  veut  paraître , 

tt  Ce  moment  me  le  fera  voir.  » 
(Le  ihéâlre  change,  et  représente  une  loiitade  horriMe.) 

SCÈNE  II. 

MÉDÉE,  ÉGLÉ,  hAbitabs  des  erfers. 
(Mëdée  invoque  les  haSntans  descnftrt.) 

MÉDÉE. 

SocTEz ,  démons ,  sortez  de  la  nuit  étcraelle  : 
Voyez  le  jour  pour  le  troubler. 

CHSUB  DES    HABITARS  DES   EllFEBS,   SOUS  le 
théâtre. 
Sortons  de  la  nuit  éternelle. 

MÉDÉE» 

Que  l'afireux  desespoir ,  que  la  rage  cruelle 
Prennent  soin  de  vous  rasse^nbler. 

CHCECB  DE  DEMOHS^  qui  sortent  par  groupes  de  dil^ 
férens  endroits  du  théâtre» 
Sortons  de  la  nuit  éternelle, 
Voyons  le  jour  pour  le  troubler.  . 

ÉOLÉ,  pendant  le  chœur. 
«  Que  d'objets  horribles  l 
Grands-Opéras   x.  '** 


i 


iio  THESEE. 

»  Dieux  !  où  sommés  ôons  ?, 
»  Quel  afirenx  courroux  \ 
»  Quels  spectres  terribles  !  » 

MEOiE. 

Venez;  peuple  infernal,  venet  ; 
Avancez ,  malheureux  coupables  ; 
Coûtez  l'unique  bien  des  coeurs  infortunés , 
Ne  soye^  pas  seuls  misérables. 

LE    GBOEUn. 

Goûtons  l'unique^ bien  des  cœurs  infortunés, 
Ne  soyons  pas  seuls  misérables. 
HÉn^E. 
Ma  rivale  m'expose  à  des.  maux  effiroyables  ; 
Qu'elle  ait  part  aux  tourmcns  qui  vous  sont  destinés. 
MÉDÉE  ET  LE  CHOEUR  expriment  u&e  joie  barbare. 
Ne  soyons  pas  seuls  misérables , 
Goûtons  Tunique  bien  des  cœurs  infortunés. 
(Ils  entourent  tglé ,  la  poursuivent  et  la  tourmeutenU) 

LE   CBOEUB. 

On  nous  tourmente 
Sans  cesse  aux  enfers , 

-Que  tout  ressente 
Nos  feux  et  nos  fers. 

MÉO^E,  avec  le  chœur. 
Que  tout  gémisse  ! 
Que  tout  frémisse  î 
Quelle  douceur  de  voir  soufirir  ! 

ÉbiÉ. 
Ah!  quel  eflroyablc  supplice  1 


ACTE  III,  SCÈNE  II. 
Faites-moi  promptemeot  mourir. 

MEDÉE,  LE   CHCEUB. 

Non ,  Doo....  Que  tout  gémisse  ! 
Que  tout  frémisse  ! 
Quelle  douceur  de  voir  soufirir  5 

tùLÉ,  . 
Ah  !  quel  efiroyable  supplice  ! 
Faijtes-moi  promptemeot  mourir! 

MÉDÉE,   LE   CHCEUB. 

Non ,  non....  Que  tout  gémisse  ! 
Que  tout  frémisse! 
Quelle  donceuc  de  voir  soufirir  ! 

ÉGLÉ. 

^  \  par  pitié ,  frappez ,  adierez ,  inhumaine  ! 
Cruelle  !  ne  voulez-vous  pas 
Faire  cesser  ma  peine  Z 
Achevez  mon  trépas. 

MEOÉE,   LE    CHCEUB. 

Non ,  non,...  Que  tout  gémisse  I 
Que  tout  frémisse  ! 
Quelle  douceur  de  voir  soufirir  l 

ÉGLÉ. 

'Ah!  quel  efiroyable  supplice! 
Faites-moi  promptement.  mourk. 

M^DÉE. 

Sttis&ites  le  Roi,  contentez  mon  envie. 

iGLÉ. 

Hélas  !  laissez-moi  mon  amour , 


112  THESEE. 

Prenez  plutôt  ma  vie. 

MÉOÉE. 

Ma  haÎDC ,  en  vous  perdant ,  ne  peut  être  aSsouvi«  , 
C'est  grâce ,  c'est  pitié  de  vous  ôtet  le  jour, 

.Vous  aurez  beau  me  poursuivre , 
Vous  aurez  beau  m  alarmer , 
Ce  n'est  qu'en  cessant  de  vivre 
Que  je  puis  cesser  d'aimer. 

MÉDÉE, 
Vous  allez  donc  savoir  de  quoi  je  suis  capable. 
La  plus  horrible  mort  n'a  rien  de  comparable 
'Au  coup  qui  vous  menace  ;  il  est  sanglant ,  aâreuz..., 
Moi-même,  j'en  frémis,  tant  il  est  eflroyable. 

,<0n  apporte  Thésée  endormi.) 
ÉOli. 
tfes%  Thésée  endormi  qui  paraît  â  mes  yeux  ! 

SCÈNE  III. 

LES  pnéCEDEBS,  THÉSÉE,  endormi, 

MIÎDÉE. 

SeCOSdez  mon  courroux  ,  implacables  furies! 
Que  le  sang  commence  à  couler; 
Il  faut  encov  nous  signaler 
Par  de  nouvelles  barbaries. 

LES  furies. 
ill  faut  cncor  nous  signaler 


ACTE  llî.  SCÈNE  m.  ii3 

Par  de  nouvelles  barbaries. 

MÉDEE. 

Votre  amant  va  périr ,  c'est  vous  ^I  m'anîmez 
A.  m'en  ùàve  à  tos  yeux  on  sanglant  sacrifice. 

ÉGtÉ. 

.Vons  pouvez  vouloir  qu'il  périssse , 
Et  vous  dites  que  vons  1  aimez! 

MÊDÉE. 

U  faut  Toir  qui  des  deus  l'aimera  davantage; 
Pblôt  que  le  céder,  j'aime  mieux  que  la  mort , 
B  En  trompant  votre  amour,  satisfasse  ma  rage. 

LES    PUItlES. 

OcdoDoez... 

ÉGLÉ,  précipitamment. 
Arrêtez ,  ah  !  quoi  aflreox  transport  ! 

UÉDÉE. 

»  Obéissez,  achevez  votre  ouvrage. 

LES    FQBIE8. 

»  Qu'il  périsse. 

ÉGLÉ. 

Arrêtez,  ah  !  retenez  leurs  coups^ 
]  épouserai  le  roi ,  je  siûvrai  votre  envie. 
Je  cède  ce  héros ,  que  sa  main  soit  â  vous , 
Bien  ne  m'est  si  cher  que  sa  vie. 

MÉDEE. 

Mais  aurez-vous  bien  le  pouvoir 
l^  lui  paraître  ingrate ,  insensiiile ,  volage  ? 

IQ. 


Ii4  THÉSÉE. 

tOLÉ. 

.  Ce&i  lui  Élire  un  crael  outrage , 
J'aimerais  mieux  ne  le  pas  voir. 

,     MÉDÉE.- 

lïon,  il  faut  â  rinstant  lui, déclarer  vous-même 
Que  votre  cœur  Timmole  à  la  grandeur  suprême  , 
Tandis  que  je  feindrai  d'agir  en  sa  faveur  : 

Enfin ,  je  veux  gagner  son  cœur ,     ' 

Par  le  secours  de  ma  rivale. 
ÉGLÉ,  à  part. 

Dieux  !  quelle  contrainte  fatale  ! 

MÉDÉE. 

Pour  le  prix  de  ses  jours  attirez  ses  mépris , 
Ou  la  mort... 

ÉOLÉ|  vivement. 
Non  ,  qu'il  vive ,  il  n'importe  i  quel  prix. 
le  veux  tout,  je  puis  tout  pour  sauver  ce  que  j'aime  : 
Mon  amoiur  vous  proniet  de  se  trahir  lui-même. 

MÉDÉE  ordonne  auK  furies 4e  se  retirer,  et  le  théâtre 
change. 

(  Les  furies  se  retirent.  ) 
»  Il  suffit.  Demeurez  avec  lui  dans  ces  lieux  ; 
»  Profitez  des  momens  que  ma  bonté  vous  laisse. 
»  Si  SCS  jours  vous  sont  chers ,  gardez  votre  promesse , 
»  Où  bientôt  tout  son.  sang  va  couler  à  vos  yeux.  » 
.    (  Elle  sort  en  touchant  Thésée  de  sa  baguette  magique.  ) 


A.ÙJS  UI,   SCÈNE  IV.-  itS 

SCÈNE  IV. 

Le  théâtre,  reprâ^iite  un  ile  eochautée. 
THÉSÉE,  EGLÉ. 

THÉSÉE,   ëveillë. 

(  Apercevant  £glë.  ) 
*  On  snis-je  ?...  par  quel  chaime  ?...  adorable  princesse  ï 

»  Ah!  c'est  donc  vous  que  je  revoil 
»  Dieux!  quel  moment!  quel  prix  de  ma  tendresse  ï 

ÉGLÉ,  à  part. 
l»Ociel! 

THÉSÉE.* 

»  Un  trdne  offert  et  l'amour  d'un  ^irand  coi 
N'ont  donc  pu  vous  rendre  infidèle  2  ' 

ÉGLÉy.àpart. 
Dieax!  quelle  contrainte  cruelle  f 

THÉ8ÉB. 

^  OÙ  détonmez-Yons  vos  regards  pleins  d'appas  ?. 
Âh  !  ne  me  privez  pas , 
Charmante  Eglé ,  de  la  Êiveur  suprême 
De  lire  dans  vos  ycox  Kcxcès  de  mon  bonheur. 

É6LÉ,  à  part. 
"  EH  !  comment  lui  cacher  mon  embarhis  extrême , 
»  Et  le  trouble  afieui  de  mon  ccenr  2 

THÉSÉE,  avec  vivapUé., 


i 


,iO  THÉSÉE. 

ÉGLÉ. 
(  A  Thésée  )  (  A  part.  ) 

Xhésce...  O  Dieux  ! 

THÉSÉE,  vivement. 

Eglé  l  quelle  rigoeorl 
»  Voos  fuyez  mes  regards!  à  quoi  dois-je  m'attcndre  ? 

»  Ingrate  !  vous  me  trahissez  : 
»  Vous  préférez  le  trône  à  l'amant  le  plus  tendre. 
»  Cruelle!  vous  me  haïssez. 

EGLÉ,  à  part ,  et  alarmée. 
»  Si  dans  mon  cœur  il  pouvait, lire  î 
TuésÉE. 
Eglé  ne  m'aime  pi Js ,  et  n'a  rien  â  me  dire  ?, 
Qu'avez-vous  fait  des  nœuds  que  l'amour  fil  pour  nous?. 
Quoi  î  pour  les  briser  tous , 
Un  jour,  un  seul  jour  peut  sufiSrc  1 
}'aurais  abandonné  le  plus  puissant  empire , 
pour  garder  des  liens  si  doux. 

Cessez  d'aimer  une  volage , 
Faites  sur  vous  uii  noble  eSbrt  \ 
Servez-vous  de  votre  courage 
Four  trouver  un  plus  heureux  sort. 
THÉSÉE,  vivement. 
H  ne  m'en  servirai  que  pour  chercher  la  moi  t. 
Si  la  belle  Eglé  m'est  ravie , 

Je  ne  prétends  plus  v'iea ,  ^ 

Je  perds  l'unique  bien 
Qui  m'aurait  fait  aimer  la  vie. 
)t  Quand  je  livrais  mou  amc  à  l'espoir  le  plus  dou:c , 


ACTE  m,  SCÈNE  IV.  117 

«  BeVas  !  c'était  poor  la  troarer  coupable, 
n  Qa'a\-\e  â  craiadre  encor  de  tes  coups? 
n  Achève ,  accable-moi ,  destin  impitoyable  i 

tdLÉ,     ' 

Hélas! 

THÉSÉE. 

Vous  soupirez ,  toos  tépandez  des  pleurs  l 
Roo,  ooD,  sans  m'attendnr,  je  verrai  vos  donleuts. 

TH]£sÉ£. 

Vous  Youles  me  cacher  vos  larmes. 

ÉCtÉ. 

Ab!  que  TOUS  me  causez  de  mortelles  alarmes  ; 
On  vous  a  peut-être  entendu , 
Ihèsèe  i  e(  tous  êtes  perdu.    , 

THÉSÉE. 

^assurez-Tous ,  non,  ma  belle  princesse , 
Si  TOUS  m'aimez  toujours,  ne  craignez  rien  pour  moi. 

fa  LÉ. 
Qoe  nons  pairons  cher  un  instant  de  faiblesse, 

(  Bas.  )  (  Haut.  ) 

^  7  '»  de  vos  jours.  J'épouserai  le  Roi. 

THÉSÉE. 

^«t  trop  appréhender  que  îe  Roi  ne  s'irrite , 
H  i?at  vous  dire  tout ,  l'Amour  m'en  sollicite  ; 
ïesuis&lsdu  Roi. 

êOLK. 

Vous ,  Seigneur  ! 


i 


ii8  HHÉSÉE. 

THÉSÉE. 

le  u'ai  montré  d'aCord  qae  ma  seule  valeur. 

Cébàit  à  mon  propre,  mérite 
Que  je  voulais  devoir  ms^  gloire  et  votre  cœur. 

iahi. 

Le  Boî,  le  moode  entier  prendraient  en  vain  les  armes, 

Il  n'est  rien  de  si  fort  que  Médée  et  ses  charmes. 

»  Non ,  non ,  n'espérons  pas  apaiser  son  courroux. 

»  Cédons  â  nos  destins ,  â  Médée  invincible , 

»  Pour  vous  son  cœur  barbare  est  devenu  sensible  : 

»  Elle  veut  que  demain  le  Roi  soit  mon  époux. 

TBisÉEi  vivement. 

S  Votre  époux  !  je  fi:émis...  Dieu  F  cousentiriez-vous  2 

iaiÉ. 

7e  ne  puis  vous  sauver  sans  cet  hymen  horrible. 

XBÉSÉE. 

DUO,      l 

Quoil  le  Roi  serait  votre  époux  l 
Non,  cruelle ,  il  n'est  pas  possible. 
Laissez  armer  plutôt  tout  Teuler  en  courroux, 
Le  trépas  est  cent  fois  plus  doux , 
Qu'un  secours  si  terrible. 

tQLÉ. 

»  Ah  !  laissez-moi  fléchir  Médée  et  son  courroux , 
tt  Je  veux ,  s'il  est  possible , 
}t  Apaises  ses  transports  jaloux. 


ACTE  IV,  SCÈNE  V.  ti(f 

EBrsEMBLE  et  alternativement. 

ÉOLÉ. 

VÎFezVTÎvez,  s'il  est  possible, 
Et  laissez-moi  moarfr  pour  vous. 

xnÉsiE. 
Vivez  ,*  vivez,  s'il  est  possible , 
Et  hissez-moi  moarir  pour  vous, 
'Âb  !  qnel  supplice  ! 
»  Qae  de  toonDensf 
>»  Quelle  injustice 
De  briser  des  oceuds  si  cbarmans! 

SCÈNE  y.  • 

MÉDÉE,  E6LÉ,  THÉSÉE. 

MÉDÉE. 

FmgSEz  vos  regrets ,  c*est  trop ,  e'est  trop  vous  plamdre  : 
Je  viens  d'eutenâre  tout ,  il  n'est  plus  tems  de  feindre. 

Pardonnez  à  l'amour  qui  ne  m'a  pas  permis 
De  tenir  ce  que  j'ai  promis. 

TBésÉE. 

Veogez-vous  sur  moi  seul  de  notre  amour  extrême. 

ÉGLÉ. 

Cest  par  mon  seul  trépas  qu'il  faut  nous  désunir. 

THÉSÉE. 

^  Tie  est  la  fàëvenr  que  je  veux  obtenir. 
Consetvcz  ce  béros ,  sauvez-le  pour  vous-même. 


120       THÉSÉE.  ACTE  111,  SCÈNE  V. 

,    THÉSÉE   ET  ÉGLE. 

Épargnez  ce  que  j'aime  , 
C'est  moi  qu'il  faut  punir. 

MÉD^E. 

Je  vous  aime  Tbéscc ,  et  vous  l'allez  connaître  : 
Le  crime  enfin  commence  à  me  paraître  affi:eax , 
Votre  vertu  m'inspire  un  dépit  généreux , 
Je  rendrai  ce  que  j'aime  heureux , 
•    Puisque  mon  cœur  ne  i)eul  l'êtrei 

THÉSÉE    ET    ÉGLÉ. 

Quel  bonlieur  surprenant  pour  nos  cœurs  amoureux  î 

MÉDÉE. 

Gardez  vos  tendres  amours , 
Goûtcz-en  les  charmes  ; 
Aimez  sans  alarmes, 
Aimez-vous  toujours. 

THÉSÏE    ET    EGLÉ. 

Gardons  nos  tendres  amours, 
l  Goûtons-en  les  charmes  ; 
I  Aimons  sans  alarmes, 
/  Aimons-nous  toujours. 

ENSEMBLE./  ,      ,   .       , 

\  MEDEE,  a  part. 

1»  Ah '.quelle  affreuse  violence 
I»  11  faut  que  je  fasse  à  mon  cœur  ! 
f  »  L'espoir  d'une  horrible  vengeance 
\n  Peut  seul  suspendre  ma  fureur. 


FIN   DU   TROISIEME    ACTE. 


«»»^l^^^^l^^'i^'i^'^'^'«**'*^^'^^'^^»*^^<* 


ACTE  QUATRIÈME. 

Le  théâtre  représente  un  palais  fonné  par.  les  enchan- 
temeiis  de  Médée. 


SCÈNE  I. 

MÉDÉE,  seule. 

AH  !  fLUt-il  me  veogelf 

En  perdant  ce  que  j  Vune  l 
Que  (ais-ta,  ma  foreur,  où  vas-tu  m'engager? 
PinÛT  ce  ccnir  ingrat ,  c'est  me  punir  moi^m^me  ; 
y  m  mourrai  de  douleur  ^  je  tremble  d'y  songer. 

Ah  !  faut-il  me  venger , 

En  perdant  ce  que  j'aime  ; 
Bla  rivale  triomphe  et  me  voit  outrager» 
Quoi  I  laisser  son  amour  sans  peine  et  sans  danger  ! 
Voir  le  spectacle  affîreui(  de  son  bonheur  extrême  ! 

Non ,  il  faut  me  venger , 

En  perdant  ce  que  j'aime. 

SCÈNE  II, 

DORINE,  MÉDÉE. 

DOniNE. 

«  Que  Thésée  est  heureux  î 

Grandi  -  Opéras.  X.  *  *' 


122  THÉSÉE. 

MÉDÉE. 

»  Ah  !  frémis  de  son  sort. 
Donne ,  c'en  est  fait.  Tout  est  prêt  pour  sa  mort. 

DOBINE. 

Qnoi!  c'est  sa  mort  gue  l'on  prépare  ! 
Le  Boi  le  doit  choisir  ici  pour  successeur , 
Votre  soio  pour  lui  se  déclare. 

MÉDÉE. 

3'ai  caché  mon  dcpit  sous  ma  feinte  douceur , 

La  vengeance  ordinaire  est  trop  peu  pour  mou  cceur  ; 

Je  la  veux  horrible  et  barbare. 
3e  m'éloignais  tantôt  exprès  pour  tout  savoir  ( 
Du  secret  de  Thésée  il  &nt  me  prévaloir. 
Le  roi  l'ignore  encore,  et  pour  me  satisfaire , 
Ck>ntre  un  fils  inconnu  j'arme  son  propre  p^. 
J'immolai  mes  en&ns ,  j'osai  les  égorger  ; 
Je  ne  serai  pas  seule  inhumaine  et  perfide , 

Je  ne  puis  me  venger , 

'A  moins  d'un  parricide. 

SCÈNE  III. 

EGÉE,  MÉDÉE,  DORINE,  tenant  on  vase. 

MénÉE. 
Ce  vase ,  par  mes  soins ,  vient  d'être  empoisonné: 
Vous  n'aurez  qu'à  rof&ir....  vous  semblez  étonné. 

éaiz. 
Ce  héros  m'a  servi;  malgré'moi  je  Festime  : 
Puis-je  lui  préparer  un  injuste  trépas  ? 


ACTE    IV,  SCÈNE  HL  ia3 

MÉDÉE. 

L'espoir  de  Totrç  amour ,  la  paix  de  vos  états ," 
Tout  dépend  d'immoler  cette  grande  TÎctime. 
Contre  on  rival  heureux  fant-il  qu'où  tous  anime  E 

La  vengeance  a  bien  des  appas;  '' 

Est-ce  trop  la  payer ,  s'il  n'en  co(ïte  qu'un  crime  il 

EGÉE. 

Je  n'ai  rien  Eût  jusqu'à  ce  jour, 

Qui  pousse  flétrir  ma  mémoire. 
S  près  de  mon  tombeau  faut-il  trahir  ma  gloire  1 
Qœ  ne  pais-je  plutôt  étouffer  mon  amour  I 

MÉDÉE.  ^ 

Vous  avez  on  fils  à  Trâèoe , 

Il  faudra  toiqours  l'éloigner. 
Votre  peuple  pour  lui  n'aura  que  de  la  haine  j 
11  adore  Hiésée ,  il  veut  le  voir  r^er  j; 

9  Ce  fils ,  cher  à  votre  espérance , 

9  Sera-t-il  toujours  loin  de  vous  2 
é'gée. 

9  Cessez  d'ai^r  un  cceur  jaloux  | 

p  Et  d'augmenter  jiia  défiance. 

KÉDtE. 

»  N'épargnez  pas  qui  vous  oWéaae , 
»  Vengez-vous ,  vengezrvou^. 

ÉGÉE. 

Roo,  non.... 

MJ^DÉE. 

Laisserez^vous  votre  fils  sans  empire , 
Tandis  qu'un  étranger  jouira  de  sou  sortZ 


i 


ia4  THESEE. 

Et  peat-étre  osera  s'assorer  par  sa  mort.... 

EGÉE. 

Je  cède  aux  senthnens  que  la  nature  inspire  ; 
Je  me  rends ,  l'amour  seul  n'était  pas  assez  fort. 

ENSEMBLE. 
N'épargnons  pas  qni  nous  offense. 

Vengeons-nous ,  vengeons-nous  l 
L'amour  même  n'est  pas  plus  doux 
Que  la  vengeance. 

SCÈNE  IV. 

THéSEË,  EGLÉ,  É6ÉE,  MÉDÉE,  DORINE  , 

ATHÉNIENS. 
MÉDEE. 

Ne  craignez  rîen ,  parfaits  amans , 
Les  plaisirs  suivront  vos  tonrmeiis. 

LE  cnœuR. 
Ne  craignez  rien ,  etc. 

EGÉE   ET   MÉDÉE.  ' 

^Recevez  la  récompense 
De  votre  constance. 

LE    GHGEUR. 

Ne  craignez  rien ,  etc. 

EGÉE. 

Oublions  le  passé ,  ma  colère  est  finie. 
Fuùiqu'AlbàQes  le  veut,  je  consens  qu'après  moi , 


làCTE  IV,  SCÈNE  IV.  ia5 

Ce  hétos  8oît  nn  jour  son  légitime  roi. 

GonamençoDS  la  cérémoDie. 
Qa'oo  apprenne  à  servir  Thésée  en  souverain. 

Prenez  ce  vase  de  ma  main. 

THESEE)  prenant  le  vase  d'une  main,  et  tirant  son  opée  < 
de  l'autre. 

3e  {nre  sur  ce  &r  qui  m'a  comblé  de  gloire , 

Que  je  tous  servirai  contre  vos  ennemis , 

Et  que  vous  n'aurez  pas  de  sujet  plus  soumis. 

(Egée  considère  avec  étonnement  Pépée  de  Thésée ,  et  la 
reconnaît  pour  être  celle  qu'il  a  laissée  pour  servir  un  jour 
à  la  reconnaissance  de  son  fils.) 

iCEE  ,    empêchant  Thésée  de  porter  le  vase  à  sa  bouche.^ 

Que  voi^je  !....  quelle  épée  l....  ah  I  qui  l'aurait  pu  croire  ? 

O  ciel  !  j'allais  perdre  mon  fils  ! 

Tavab  laissé  ce  fer  pour  ta  reconnaissance , 

Mon  fils  l  ah  !  mon  cher  fils  I  où  nous  exposais-tu  ? 

THÉSÉE. 

Ce  fer  eût  dans  mes  mains  trahi  votre  espérance  , 
En  vous  montrant  nn  fils  qui  n'eût  point  combattu. 
Je  voulais  éprouver  jusqu'où  va  la  vertu , 
Sans  prendre  aucun  secours  d'une  illustre  naissance. 

EGÉE. 

'AL  !  perfide  Médée  I 

MÉDÉE. 

m;  a  ces  traits  furieux 
»   Confiais  une  amante  offensée  : 
»    De  tous  deux  méprisée , 
»   J'ai  voulu  vous  pcrdl<e^  tous  deux. 
Mâii  ne  vous  croyez  pas  délivres  de  ma  rage  , , 

II. 


i 


1^6  THESEE. 

Je  o'ai  point  préparé  la  pompe  de  ces  lieux 
Pour  servir  au  bonheur  d'uu  amour  qui  m'outrage. 
Démons ,  accourez  tous ,  détruise^  mon  ouvrage  , 
Sortez  du  séjour  ténébreux, 

(  Les  démons  paraissent  avec  des  flambeaux.) 

SCÈNE  .V. 

I.E8  PBECÉDESS,  DEMONS. 
CHGEUB  DES   DEMOBIS. 

«  lÊMBiiÂSOBs ,  détruisoiis  ces  lieux. 

,   MÉDÉE.       .• 

»  Embrasez,  détruîsez^ ces  lieux. ^ 

CBCEUn  DE   PEUPLE.  ^ 

»  Minerve ,  sauvez-nous  de  ce  ravage  afireux. 

SCÈNE  VI. 

.       LES  PBÉCÉDEBS,   MINERVE. 
MIBEBVE. 

i)   Fuis  ,  barbare  Médée ,  et  respecte  les  Dieux. 
»  Va  soufirir  les  tourmens  d'une  rage  impuissante  , 
>)   Fuis,  porte  ailleurs  l'horreur  et  l'épouvante. 

(  Mëdée  dans  son  char  est  précipitée  sous  terre.) 
»  Et  vous ,  peuple,  soyez  heureux , 
fy  Minerve  veillera  sur  vous  du  hauc.des  jcieux.. 

LE    CHŒUn. 

».  O  divine  Pallas  !  notre  reconnaissance] 
n  Ne  peut  égaler  vos  faveurs , 


ACTE  IV,  SCÈNE  VU.  ,37 
»    Kégnez  h  jamais  sur  des  coears 
»   Qui  révèrent  votre  puissance.  , 

(  Minerve  remonte  aux  cieuz.)  ^ 

SCÈNE  VU. 

X.E9  PirÉcÉDEHS,  czcepté  MINERVE. 

éaiE,  à  Egië. 
Je  sois  cbaimé  de  vos  appas , 
Je  ne  m'en  défends  pas , 
Trop  aimable  Églé ,  je  vous  aime  ;  . 
Mais  je  veux  être  heureux  dans  un  autre  moi-même. 
Mon  rival  m'est  trop  cher  pour  en  être  jaloux, 
le  recoonaîs  mon  fils  à  son  amour  extrême  ; 
Cest  le  sort  de  mon  sang  de  s'enflammer  pour  vous. 
Que  rhymen  prépare 
Des  uceuds  pleins  d'attraits  ; 
Que  l'amour  répare 
Lies  maux  qu'il  vous  a  Êiits  : 
Soyez  unis  â  jamais. 

É6LE,  THÉSÉE. 

Soyons  unis  à  jamais. 

LE   CHŒUB. 

Soyez  unis  à  jamais. 

ÉaÉE,  àÊgJé.i 
n  U  rouïai*  vous  oiïrir  un  brilLint  diadt^mc , 

u    Mon  ills  râmplira  mes  suubaitâ  : 
h  Je  parl0^  avec  ïul  h  puissance  stiprfmCp 


128       THÉSÉE.  ACTE  IV,  SCKNE  VIT. 

LE   CHOCUB. 

»   Couronnez  ce  jcanc  béros  , 
»  C'est  le  ciel  qui  vous  inspire  ; 
»  Il  partagera  vos  travaux , 
»  Fera  voire  bonheur  cl  celui  de  l'empire. 

n  Peiq)le ,  rendez  bommage  à  votre  roi  ; 
»  Jutez  d'obéir  à  sa  loi. 

LE    CHOEUR. 

Jurons  d'obéir  à  sa  loi.  . 

(On  dunse.) 


FIV  DB   THEtEC. 


ATYS, 

TRAGÉDIE-LYRIQUE, 
EAR  QUINAULT, 

Représenta  pour  la  première  fois,  en  cinq  actes,  la 
10  janTÎer  1676  ,  rédake  et  arrangée  en  trois  actes  » 
par  MannoQtel,  et  remise  le  14  janner  1783. 


Nota.  Tout  ce  qui  «st  procédé  de  gatiiemett  ne  se  dit  plu» 
àla  refirésenUtion  et  les  chaogemens  f^s  par  Marmonl**^ 
foat  l'objet  des  irariaales  qui  sont  indiquées  par  des  numéros* 


PERSONNAGES. 


ATYS,  parent  de  SoDgaride,  et  ÊiTorî  de  Célénas,  roi  de 
Phrygie. 

IDAS ,  ami  d'Atys ,  et  frère  de  la  nymphe  Doris. 

SAN6ARIDE,  nymphe  ,  fille  du  fleuve  Sangar. 

DORIS,  nymphe,  amie  de  Sangaride,  et  sœur  dldas. 

'Chgeub  de  Phrygiens  et  de  Phrygiennes.        ^  , 

Us  Songe  funeste. 

iTboupe  de  Phrygiens  et  de  Phrygiennes  qui  dansent  A  lai 
fête  de  Cybèle. 

LA  DÉESSE  CYBÈLE. 

•MÉLISSE,  confidente  et  prêtresse  de  Cybèle. 

TnoupE  de  prêtresses  de  Cybèle. 

CELÉNUS ,  roi  de  Phrygie ,  fils  de  Keptone ,  er  amant  de 
Sangaride. 

TnoupE  de  snivans  de  CélénuSt 

îTboupe  de  Zéphirs,  chantans,  dansans,  volans. 

Cboeub  et  troupe  de  peuples  différens  qui  viennent  à  Ifli 
fête  deOybèle. 

LE  DIEU  DU  SOMMEIL. 

MORPHEË. 

PHOBÉTOR. 

PHANTASE. 

»  TnoupE  de  songes  agréables. 

Tboupe  de  songes  funestes. 

»  LE  DIEU  du  fleuve  Sangar,  père  de  Sangaride. 

»  Tboupe  de  Dieux  de  fleuves,  de  ruisseaux,  et  de  nym- 
phes de  fontaines ,  qui  chantent  et  qui  dansent. 

!ALECTON. 

Tboupe  de  DiVinités  des  bois  et  des  eaux. 

CTboupe  de  Gorybantes. 

La  scène  est  en  Phrygie. 


ATYS, 

TRAGÉDIE-LYRIQUE. 
ACTE  PREMIER. 

.  Le  théâtre  représente  une  montagne  consacrée  â  Cyb^e. 

•  SCÈNE  I.   (t) 

ATYS,  seul. 

H  AiiJOVBi  allons,  accourez  tous; 
»  Cyèèle  va  descendre. 
»  Trop  benreux  Phrygiens ,  venez  ici  l'attendre  : 
n  Mille  peuples  seront  jaloux 
»  Des  ÊkvenrS  que  sur  nous 
»  Sa  bonté  va  répandre, 

SCÈNE  II. 

IDAS,  ATYS, 
ÂUons  I  allons ,  ûrcoutci  lous  i 


f 


J 


,31  ATYS. 

Cybèle  va  descendre. 

ATYS. 

Le  soleil  peint  dos  champs  des  plus  vives  coaleors  ^ 

Il  a  séché  les  pleurs 
Que  sur  l'émail  des  prés  a  répandus  Taurore , 
Et  ses  rayons  nouveaux  ont  déjh  fait  éclore    . 

Mille  nouvelles  fleurs. 

IDAS. 

Vous  veillez  lorsque  tout  sommeille  ; 
.  .(2)  <c  Vous  nous  éveillez  si  matin 
»  Que  vous  ferez  croire  i  la  fin 
)>  Que  c'est  i'iimoor  qui  vous  éveîUe* 

aiTTS. 

»  Non  :  tu  dois  mieux  juger  du  parti  que  je  prends;^ 
»  Mon  caur  veut  fuir  toujours  les  soins  et  les  mystères  : 
n  J'aime  Theureuse  paix  des  cœurs  iudifi*érens« 
»  Si  leurs  plaisirs  ne  sont  pas  grands  ^ 
»  Au  moins  leurs  peines  sont  légères. 

iDAS. 

»  Tôt  on  tard  l'amour  est  vainqueur  ; 

»  En  vain  les  plus  fiers  s'en  défendent  : 

»  On  ne  peut  refuser  son  coeur  n 

»  A  de  beaux  yeux  qui  le  demandent. 
»  Atys,  ne  feignez  phis  ;  je  sais  votre  secret  : 

»  Ne  craignez  rien ,  je  suis  discret. 

n  Dans  un  bois  solitaire  et  sombre , 
»  L'indiflférent  Atys  se  croyait  seul  on  jour  : 
»  Sous  un  feuillage  épais ,  ou  je  révais  à  l'ombra 

»  Je  l'entendis  parler  d'amour. 


ACTE  I,  SCÈHE  III.  133 

ÂTTS. 

n  Si  je  paile  d'amour ,  c'est  contre  soa  empire  ; 
»  J'en  fais  moa  plus  doux  entretien. 

IDAS. 

»  Tel  se  vante  de  n'aimer  rien , 

»  Dont  le  cœnr  en  secret  soupire. 
»  l'entendis  vos  regrets ,  et  je  les  sais  si  bien  ^ 
»  Que ,  si  vous  en  doutez,  je  vais  vous  lesrisdire....  » 
(3)  Amans ,  qui  vous  plaignez ,  vous  êtes  trop  heureux. 
Mon  coeur  de  tous  les  cœurs  est  le  plus  amoureux  [ 
El  tout  près  d'expirer ,  je  suis  réduit  à  feindre. 

Que  c'est  un  tourment  rigoureux 

De  mourir  d'ara  oor  sans  se  plaindre  ! 
Amans,  qui  vous  plaigniez,  voa^  êtes  trop  heureux. 

»  ATTS. 
»  Idas,  il  est  trop  vrai ,  mon  cœur  n'est  que  trop  tendre; 
«  L'amour  me  fait  sentir  ses  pins  funestes  coups  : 
»  Qu'aucun  autre  que  toi  n'en  pnisse  rien  apprendre.  » 

SCÈNE  m. 

SANGARJDE,  DORIS,  ATYS,  IDAS. 

SAKGAniOE   ET   OORIS, 

Azxoas,  allons  ^.ncconrcz  tous  { 
Cybèlc  va  descendre. 

c<  SASGARIDE. 

»  Qne  dans  nos  concerts  les  plus  doux 
»  Son  nom  sacré  se  fasss  entent^re. 
iirands-Opcras .  I.  1%      ' 


134  'ATYSi 

»  AT  Y  s.      ' 

»  Sar  i'uoivets  entier  son  pouvoir  doit  s'étendre. 

SAKOABIDE. 

>)  Les  Dieux  saivent  ses  lois  et  craignent  son  courroux. 

»   ATT8,    SABGABIÙE,   IDAS    ET  DOItlS. 

»  Quels  honneurs,  quels  respects  ne  doitH>D  point  lui  rendre-  7/ 
»  Allons ,  allons ,  accourez  tous  ; 
»  Cybèle  va  descendre.  ». 

SAUGAltlDE. 

Écoutons  les  oiseaux  de  ces  bois  d'alentour  ; 

Us  remplissent  leurs  chants  d'une  douceur  nouvelle  : 

On  dirait  que  dans  ce  beau  joue 

Ils  ne  parlent  que  de  Cybèle. 

ATYS. 

Si  vous  les  écoutez ,  ils  parleront  d'amour. 
Un  roi  redoutable  ^ 
Amoureux,  simable,- 
J4)  »  Va  devenir  votre  époux  : 
»  Tout  parle  d'amour  pour  vous. 

SANGABIDE. 

»  Uest  vrai,  je  triomphe,  et  j'aime  ma  victoire. 
Quand  l'amour  fait  régner,  est-il  un  plus  grand  bien? 
Pour  vous ,  Atys ,  vous  n'aimez  rieu , 
Et  vous  en  faites  gloire. 

ATYS.         ' 

L'amour  fait  trop  verser  ^e  pleurs  ; 
r        Souvent  ses  douceurs  sont  mortelles  : 
tl  ne  faut  regarder  les  belles 


ACTE  I,ÎCÈNE  IV.  i35 

Qae  comme  on  voit  d'aimables  flears. 
»  J'aime  les  roses  nouvelles , 
»  J'aime  à. les  voir  s'embellir; 
'    »  Sans  leurs  épines  craelles 
,   ,.  »  J'aimerais  à  Jes  cueillir. 

SAyfïABlOE. 

»  Quand  le  péril  est  agréable , 
»  Le  moyen  de  s'en  alanner?. 
»  Est-ce  nn  grand  mal  de  trop  aimer 
»  Ce  que  l'on  trouve  aimable  ? 
^  9  Peat-on.  être  insensible  aux  plus  channans  appas?  % 

ATTS. 

Non ,  TOUS  ne  me  connaissez  pas. 
Je  me  défends  d'aimer  autant  qu'il  m'est  possible  ; 
Si  j'aimais  un  jour  par  malheur, 
Je  connais  bien  mon  cœur , 
U  serait  trop  sensible.... 
Hais  il  faut  que  cbacun  s'assemble  près  de  vous  ; 
Cybèle  pourrait  nous  surprendre. 

ATYS  ET  IDAS. 

Allons ,  allons  ^  accourez  tous  ; 
Cybèle  va. descendre. 

^      .  (lia  sortent. ) 

SCÈNE  IV. 

SANGARIDE,  DORIS. 

•AVOABIDE. 

.»  Ans  est  trop  heureux. 


136  âTYS. 

DO  BIS. 

p  L'amitié  fut  toujours  égale  entre  tous  deux  ^ 

»  Et  le  saog  d'assez  près  tous  lié. 
%  Quel  que  soit  son  bonheur',  lui  pbrtez-yons  enrie  l 
»  Vous  qu'aujourd'hui  l'hymen  avec  dé  si  beaux  nâ^uds 

»  Doit  unir  au  roi  de  Pbrjgie  ? 

SABGABIDE. 

»  Atys  est  trop  heureux  : 
»  Souveram  de  son  cœur,  maître  de  tous  set  Toeux, 

}>  Sans  crainte ,  sans  mélancolie , 
»  U  jouit  en  repos  des  beaux  jours  de  sa  rie. 
Aty^  ne  connaît  point  les  tourmens  amoureux. 

A.tys  est  trop  heureux^ 

DOIILS. 

(6)  Quel  mal  vous  fait  l'amour?,  Votre  chagrm  m'étonne. 

SAROABIDE. 

^  Je  te  fie  un  secret  qui  n'est  su  de  personne. 
»  Je  devrais  aimer  un  amant 

.  »  Qui  m'offîe  une  couronne  { 
»  Mais ,  hélas  !  vainement 
>>  Le  devoir  me  l'ordonne  : 
»  L'anlour ,  pour  mon  tourment , 
»  En  ordonne  autrement. 

»  DORIS. 

M  Aimeriez- vous  'Atys,  loi',  dont  l'indifférence 

»  Brave  avec  tant  d'orgueil  l'amour  et  sa  puissance  ?, 

t  »  SAHGADXDE. 

^>  J'aime  Atys  ^n  secret;  mon  crime  est  sans  témoins. 
K  Pour  vaincre  mon  amour  je  mets  tout  en  usage  i 


ACTE  I,  SCÈNE  ly.  i2; 

»  J'appeUt  ma  raisoD ,  j'aoîme  mon  couragt  ; 
w  Mais  à  quoi  servent  toas  mes  toius  ?, 
»  Mou  cœar  en  soofire  davantage, 
»  Et  n'en  aime  pas  moins. 
»  Donis. 
.    »  C'est  le  conrnion  défaut  des  belles  ; 
»  L'ardeur  des  conquêtes  nouvelles 
»  Fait  négliger  les  cœurs  qu'on  a  trop  tôt  charmés, 
9  Et  les  indifierens  sont  quelque£)is  aimés 

M  Aux  dépens  des  amans  fidèles. 
»  Mais  vous  vous  exposez  à  des  peines  cnielles. 

SAS&AniDE. 

(7)  »  Toujours  aux  yeux  d'Atys  \e  serai  sans  appas  ; 
U  le  sais ,  j'y  consens  :  je  veux ,  s'il  est  possible , 

Qu'il  soit  encoi:  pfus  insensible. 
S'il  me  pouvait  aimer ,  que  deviendrais-je  ?  hélas  ! 
Cest  mon  plus  grand  bonheur  qu'Aiys  ne  m'aime  pas. 

(8)  »  Je  prétends  être  heureuse ,  au  moins  en  apparence; 
»  Au  destin  d'un  grand  roi  je  me  vais  attacher. 

SA9GARIDE   ET  DOr.lS.     _ 

D  Un  amour  malheureux ,  dont  le  devoir  s*ofil'nse , 

»  Se  doit  condamner:  au  silence  : 
»  Un  amour  mallicureux,  qu  on  nous  peut  reprocher,. 

n  Ne  saurait  trop  bien  se  cacher. 


â 


i38  AtyS. 

SCÈNE  y. 

ATYS,  SAN6ARIDE,  DORIS. 

(9)  »  Os  voit  dans  ces  campa^ies 
Tous  DOS  Pbrygteos  s'avancer, 

DOms.  i 

(10)  »  Je  vais  prendre  soin  de  pressée 
»  Les  nymphes  nos  compagnes. 

(EUttsort.) 

SCÈNE  yi. 

ATYS,  SANGARIDE, 

ATYS. 

SAsaABioE ,  ce  joux:  est  un  grand  jour  pour  vous. 

BAR^ABIDE. 

HoQS  ordonnons  tous  deux  la  fête  de  Gybèle;' 
Llionneqr  est  ég^l  entre  nous. 

ATYS. 

Ce  jour  même ,  un  grand  roi  doit  être  votre  époux.... 
Je  ne  vous  vis  jamais  si  contente  et  si  belle  : 
Qao  le  sort  du  Roi  sera  doux  l 

SABGAniDE. 

ludlflei  cnt  Atys  n'en  sera  point  jaloux, 


;ACTE  I,  SCiNE  VI.  i30 

-   ATTS. 

?ivex  tous  deux  contens ,  c'est  ma  plas  cbère  envie  : 
]'ai  pressé  votre  bymen ,  j'aj  servi  vos  amonrs  ; 
Mais  enfin  ce  grand  jour ,  le  pins  beau  de  vos  jours , 
Seia  le  dernier  de  ma  vie. 

8A8GABIDE, 

ODÎeaS 

ATTS, 

Ce  n'est  qu'à  vous  que  je  venx  révéler 
Le  secret  désespoir  où  mon  malheur  me  livre  : 
Je  n'ai  que  trop  sa  feindre ,  il  est  tems  de  parler  ; 
Qui  n'a  pins  qu'un  moment  k  vivre 
N'a  phis  rien  à  dissimuler. 

sAROAhide. 
Je  finémis ,  ma  crainte  est  extrême  : 
'Âtys,  par  quel  malheur  faut-il  vous  voir  périr  2 

ATTS. 

Vous  me  condamnerez  vous-même, 
Et  voof  me  laisserez  mourir. 

•    tAHGABIDE. 

famierai,  s'il  le  faut,  tout  le  pouvoir  suprême.... 

.ATTS. 

Non,  rien- ne  me  peut  secourir; 
h  meurs  d'amour  pour  vous,  je  n'eu  saurais  guérir. 

SASOABinE, 

Qui?  vous! 

ATTS. 

•   U  est  trop  vrai, 


!{•  ATYS. 

Vous  m^ainm  ? 

àTYS. 

Je  Yous  aime. 

Vous  me  condamnerez  vous-même , 

Et  vous  me  laisserez  mourir. 

J'ai  mérité  qu'on  mè  punisse  ; 

J'ofi^se  un  rival  généreux , 
Qui  par  mille  bienÊiits  a  prévenu  mes  vœux. 
Mais  je  roffense  en  vain ,  vous  lui  rendez  justice. 

Ah  !  cpLC  c'est  un  cruel  supplice 
D'avouer  qu'un  rival  est  digne  d'être  heureux  ! 
(il)»  Prononcez  mom  arrêta  parlez  sans  vous  contraindre. 

SÂNfrABIDE. 

»  Hélas! 

ATT  s. 

Vbus  soupirez!  je  vois  couler  vos  pleurs^ 
D'un  malheureux  amour  plaignez-vous  les  douleurs  ?. 
saugabide. 
Atys ,  que  vous  seriez  II  plaindre 
Si  vous  saviez  tous  vos  malheurs  ! 

ATYS. 

Si  je  vous  perdset  si  je  meurs , 
Que  puis-je  encore  avoir  à  craindre  ?, 

lANCABIDE. 

Cest  peu  de  perdre  en  moi  ce  qui  vous  a  chatmc  j 
Vous  me  perdez ,  Atys ,  et  vous  êtes  aimé. 

ATIt. 

Aiméî  qu*ent*nds-}e  ?  ô  ciel!  quel  areu  favoraklc! 


•ACTE  1,  SCKKE  Yl.  ifi 

SAS&ABIDE. 

Vous  tn  serez  plus  misérable* 

ATtS. 

Itfoa  malheCir  en  est  plus  aflreoz  : 
Le  bonbeur  que  je  perds  doit  radoobler  l^l^ra^  ; 
Mais  nlmporte ,  aimez -moi,  s'il  te  peM,  i*raotagt, 
Qoaiid  î'eo  devrais  noorir  cent  tbk  ptusmalhearcBz. 

SA9GABIDE. 

Si  TOUS  cbercbez  la  mort ,  il  ùai  qne  je  toos  saive. 
Virez  ,  c'est  mon  amoar  qui  vous  eo  (ait  la  lok 

AVTS. 

Eh!  comment?  di!  pourquoi 
Voolez-Toiis  que  je  Tîve , 
Si  vous  ne  TÎyez  pas  pour  moi  ?.    • 

(12)  ATTS  ET   sahoaeide. 

P  Si  llijmen  unissait  mon  destin  et  le  TÔtre  / 
»  Que  ses  noeuds  auraient  eu  d'attraits  ! 
»  L'amour  £t  nos  cœurs  l'un  pour  Tautre  ; 

9  Faut-il  que  le  devoir  les  sépare  à  jamais? 

»  ATTS. 

»  Devoir  impitoyable  ! 
»  Ah  !  quelle  cruauté  ! 

n  SA9GARIOE. 

»  On  vient ,  feignez  encor  ;  craignez  d'être  écouté. 

»   ATT6. 

»  Aimons  un  bien  plus  durable 
»  Que  l'éclat  de  la  beauté , 


i 


1^2  a.xxi3. 

»  Kien  n'tsx  plus  aimable 
»  Qae  la  liberté. 

SCÈNE  VII. 

»  ATYS,  SAK 6ABIDE,  DÛRIS,  IDAS,  cnoeuB 

DE  PHIITOIEV4  cbaDUmS,  CBOBUBOE  PHBT6IE1VIIE  S 

chantantes  ,-TBOUPEOE  PHBTOiBat  damaos,  tboupk 
DE  pBBTOiEaaES  dansantes. 

»  ATTS. 

»  Mais  déjfl  de  ce  mont  saoré 
».  Le  sonunet  paraît  éclairé 

»  D'one  splendeur  nouvelle. 
»  SAMiSABIOE,  s'aTançant  vers  la  montagne. 
^  La  déesse  descend ,  allons  aa^evant  d'elle. 

»  ATTS   ET.SASGABIDE. 

»  Commençons ,  commençons 
i>  De  célébrer  ici  sa  fête  solennelle  ; 

^  »  Commençons ,  commençons 
»  Nos  jeux  et  nos  chansons. 
f  Le  chœur  répète  les  deux  derniers  vers,) 
»   ATTS  ET   SAVGABIDE. 

ai.Il  est  tems  qub  chacun  Êisse  éclater  son  z^er 
(i3)  »  Venez,  reine  des  dieux î 
»  Venez,  favorable  Cvbèle. 
(Les  chœurs  répètent  les  deux  derniers  vers.) 
»   ATX8. 

»  Quittez  votre  cour  immortelle  i 
»  Choisissez  ces  lieux  fortunés 
n  Pour  votre  demeure  étemelle. 


ACTE  I,  SCÈNE  VII r.  i^Z 

»  LES   CfitEURS. 

»  Venex ,  reioe  des  dieux,  venez. 

(l4)  SAHOABIDE. 

La  terre  sous  vos  pas  va  devenir  plus  belle 
Que  le  séjour  des  dieux  que  vous  abandonnez» 

»  LES   CBCBUB8* 

9.  Venez,  favorable  Cybèle* 

»    ATTS   ET   SAaGAnXOE.    ■ 

»  Tenex  voir  les  autels  qui  vous  sont  destinés. 

»  ATTS,  8AHOABIDE,    IDA.8,   DOBISy  ET  LE^ 
CHOEURS. 

»  Ecoutez  un  peuple  fidèle 

»  Qui  vor.s  appelle. 
»  Venez,  reine  des  dieux,  venez; 
»  Venez,  Êivorable  Cjbèle. 

SCÈNE  yill. 

»  (La  déesse  Cybèle  parait >  et  les  Phrygiens  et  les  Phry- 
giennes lui  témoignent  leur  joie  et  leur  respect.^ 

LES  PBÉcÉUEas,  CYBÈLE. 

CTBiLE. 

(i5)  »  Vesez  tous  dans  mon  temple,  et  que  chacun  révère 
Le  sacrificateur  dont  je  vais  faire  choix; 

Je  m'expliqoerai  par  sa  voix  : 
Les  vœux  qu'il  m'ofirira  seront  sùrs  de  noe  plaire. 
»  Je  reçois  vos  respects,  j'aime  à  voir  les  honneurs 
»  Dont  vous  me  présentez  un  éclatant  honamage  ; 
»  Mais  l'hommage  des  cœurs 

»  Est-ce  que  j'aime  davantage. 


i 


i44  ATYS.  ACT.  I,  SCÈNE  VIII. 

»  Vous  devez  vous  aoîmer 

»  D'une  ardeur  nouvelle  j 

»  S'il  &ut  honorer  Cybèle , 

»  Il  faut  encor  plus  Taimer. 

(  Cybèle  va  se  rendre  da  ns  son  temple  :  tous  les  Phryfçiens 
s*empressent  <l'y  aller,  el  répèlent  les  quatre  derniers 
vers  rfiie  la  déesse  a  prononcés.) 

»  LES  cHoeuns. 
»  Nous  devons  nous  animer  "" 

»  D'une  ardeur  nouvelle  j 
»  S'il  faut  honorer  Cybèle, 
»  Il  faut  encor  plus  l'aimer. 


ni  bD  PKKMICR  ACTK. 


ACTE  SECOND. 

»  Le  théâtre  change,  et  représente  le  temple  de  Cybèle. 

«  SCÈNE   I. 

»  CÊLÉNUS,  ATYS,  sciVAss  de  célésds. 

»    CELÉS  us. 

»  vjTBiLE  est  dans  ces  lieux  ;  ne  suivez  point  mes  pas  : 

»  Sortez.. .  Toi,  ne  me  quitte  pas, 
»  Atys;  il  faut  attendre  ici  que  la  déesse 

»  NoDune  un  grand  sacriûcatenr. 

»  ATT  s.  ' 

»  Son  choix  sera  pour  vous,  Seigneur.  Quelle  tristesse 
}>  Semble  avoir  surpris  votre  cceur  Z 

CÉtÉSUS^ 

»  Les  rois  les  plus  pnissans  connaissent  Timportance 

»  D'un  si  glorieux  choix  ; 
»  Qui  pourra  l'obtenir  étendra  sa  puissance 
»  Partout  où  de  Cybèle  on  révère  les  lois, 

»    ÂTTS. 

»  Elle  honore  anjourdlmi  ces  lieux  de  sa  présence; 
»  C'est  pour  vous  préférer  aux  plus  puissans  des  rois. 
Grandi-Opéras.  I.  ^3  ■ 


I 


i46  ATYS.      - 

CÉLENUS. 

»  Mais  qnand  j'ai  va  tantôt  la  beauté  qui  m'encTiaute , 
»  ^ 'as-tu  point  remarqué  comme  elle  ciait  tremblante  ?. 

»   ATTS. 

»  A  nos  jeux ,  h  nos  chants  j'étais  trop  appliqué  j 
»  Hois  la  fête ,  Seigneur,  je  n*ai  rien  remarqué. 

»  céLÉNUS. 

»  Son  trouble  m'a  surpris  :  elle  l'ouvro  sonamc; 
»  N'y  découvres-tu  point  quelque  secrète  flamme , 
»  <Juclque  rival  caché? 

»  ATTS. 
Seigneur,  que  dites-vous?, 

CÉLÉSUS. 

»  I.e  seul  nom  de  rival  allume  mon  courroux. 

»  J'ai  bien  peur  que  le  ciel  n'ait  pu  voir  sans  envie 

M  Le  bonheur  de  ma  vie; 
»  Et,  si  j'étais  aimé,  mon  sort  serait  trop  doux. 
})  Ne  t'étonne  point  tant  de  voir  la  jalousie 

»  Dont  mon  ame  est  saisie: 
»  On  ne  peut  bien  aimer  sans  être  un  peu  jaloux. 

»   ATTS. 

M  Seigneur,  soyei  Content;  que  rien  ne  vous  alarme  : 
»  L'hymen  va  vous  donner  la  beauté  qui  vous  charme  i 
»  Vous  serez  son  heureux  époux. 

I>   CÉLÉNUS. 

p  Ta  peux  ma  rassurer,  Atys,  je  te  veux  croire; 
»  C'est  son  cceur  que  je  veux  avoir  : 
»  Dis-moi  s'il  est  en  mon  pouvoir? 


^'ACTE  II,  SCÈNE    I,  '      147 

»    AT  Y  s. 

»  Soa  cceur  suit  avec  soin  le  devoir  et  la  gloire , 
"  Et  vous  avez  pour  vous  la  gloire  et  le  devoir. 
n  citÉsus. 

»  Ne  me  déguise  point  ce  que  tu  peux  connaître. 
»  Si  j'ai  ce  que  j'aime  en  ce  jour, 
»  L'hymen  seul  m'en  rend-il  le  maître? 
»  La  gloire  et  le  devoir  auront  tout  fait  peut-être , 
^  Et  ue  laissent  pour  moi  rien  k  faire  h  l'amour. 

ATT3. 

"  Vous  a'mez  d'un  amour  irop  délicat,  trop  lemîre. 

»  CÈLES  us. 
»  L'iadiilëi-ent  Atys  ne  le  saurait  comprendre. 

»   ATYS. 

»  Qu'un  indiffëicnt  est  heureux  î 
»  11  jouit  d'un  destin  paisible. 
»  Le  ciel  fait  un  présent  bien  cher,  bien  dangeicux , 
»  Lorsqu'il  donne  un  cœur  trop  sensible. 

CELéUUS. 

»  Quand  on  aime  bien  tendrement, 
»  Oq  00  cesse  jamais  de  sonfîrir  et  de  craindre  : 

»  Dans  le  bonbeur  le  plus  charmant 
"  Oo  est  ingénieux  ù.  se  faire  un  tourment, 

»  Et  l'on  prend  plaisir  à  se  plaindre. 
"  Va,  songe  h  mon  hymen,  et  vois  si  toul  est  prêt  ; 
*'  Uisse-nioi  seul  ici,  la  déesse  païaît. 

»(Atys5  3rl.) 


i48     ^  ATYS. 

SCÈNE  II. 

»  CYBÈLE,  CÉIuÉNUS,  MÉLISSE,  troupe 

DE  PBÊTnESSES  DE  CYBÈLE. 
»  CYBÈLE. 

»  Je  veux  joindre  en  ces  lieux  la  gloire  et  rabondaoce  : 
»  D'un  sacriiicateur  je  veux  faire  le  choix; 
.(16)  »  Et  le  roi  de  Phrygie  aurait  la  prëfërence, 
S»  Si  je  voulais  choisir  entre  les  plus  grands  rois. 
Le'^uissant  dieu  des  flots  vous  donna  la  naissance  : 
(17)  ^  Un  peuple  renommé  s'est  mis  sous  votre  loi; 
»  Vous  avez,  sans  mes  soins,  d'ailleurs  trop  de  puissance  : 
»  Je  veux  faire  un  bonheur  qui  ne  soit  dû  qu'à  moi. 
»  Vous  estimez  Atys,  et  c'est  avec  justice; 
»  Je  prétends  que  mon  choix  à  vos  vœux  soit  propice  : 
C'est  Atys  que  je  veux  choisir. 

ciLÉsus. 

J'oime  Atys ,  et  je  vois  sa  gloire  avec  plaisir, 

{18)  »  Je  suis  roi,  Neptune  est  mon  père; 

»  J'épouse  une  beauté  qui  va  combler  mes  vœux  : 

»  Le  souhait  qui  me  reste  à  faire, 
»  C'est  de  voir  mon  ami  parfaitement  heureux. 

»    CYBÈLE. 

»  Il  m'est  doux  que  mon  choix  à  vos  désirs  réponde  : 

»  Une  grande  divinité 

»  Doit  faire  sa  félicité 
»  Du  bien  de  tout  le  monde  ; 
«  Mais  surtout  le  bonheur  d'un  roi  chéri  des  cicux 


ACTE  II,   SCÈNE  III.  i49 

»   Fait  le  plus  doax  plaisir  des  dieux. 
»  cÉLÉirus. 
»  Le  sang  approche  Âtys  de  la  nymphe  que  j'aime  ; 
»  SoD  mérite  l'égale  aux  rois  : 
»  11  soutiendra  mieux  que  moi-même 
»  La  majesté  suprême 
»   De  vos  divines  lois. 
»  Rien  ne  pourra  troubler  son  zèle  ; 
»  Son  coeur  s'est  conservé  libre  jusqu'à  ce  jour  : 

»  11  faut  tout  un  cœur  pour  Cybèle; 
»  A  peine  tout  le  mien  peut  suffire  à  l'amour. 

»  CXB^LE. 

»  Portez  à  votre  ami  la  première  nouvelle 

»  De  l'honnenr  éclatant  où  ma  faveur  l'appelle. 

(  Cëlënas  sort.) 

(i9)   SCÈNE  III, 

»  CYBÈLE,  MÉLISSE. 

»  CYBÈLE. 

»  Tu  t'étonnes,  Mélisse ,  et  mon  choix  te  surprend  ! 

»   MÉLISSE. 

»  Atys  vous  doit  beaucoup,  et  son  bonheur  est  grand. 

»    CYBÈLE. 

ï)  I*ai  fait  encor  pour  lui  plus  que  tu  ne  peux  croire. 

MÉLISSE. 

Est-il  pour  un  mortel  un  rang  plus  glorieux  ? 

i4. 


i5o  Atys. 

CïDiLE. 

»  Tu  oe  vois  qae  sa  moiudre  gloire. 
Ce  moi  tel  dans  mon  cœnr  est  au-dessus  des  dieux. 
Ce  fut  au  jour  fatal  de  ma  dernière  fête , 
Que  de  Taimable  Atys  jo  devins  la  conqu<5tc. 
Je  partis  h.  regret  pour  retourner  aux  cicux  ; 
Tool  m'y  parut  changé ,  rien  ne  plut  â  mes  yeux. 

Je  sens  nn  plaisir  extrême 

A  revenir  dans  ces  lieux  : 
Où  peat-on  être  jamais  mieux 
Qu'aux  lieux  où  Ton  voit  ce  qu'on  aîme  ?. 

»  MÉLISSE. 

»  Tous  les  dieux  ont  aimé  ;  Cybèle  aime  â  son  tour  : 
»  Vous  méprisiez  trop  l'amour; 
»  Son  nom  vous  semblait  étrange  : 
»  A  la  (in  il  vient  un  jour 
»  Où  l'amour  se  vengL\ 

»    CYBÈLE. 

»  J'ai  cru  me  Êiirc  un  cœur  maître  de  tout  son  soil, 
»  Vu  caur  toujours  exempt  de  trouble  et  de  tendresse. 

»   AtÉLISSE. 

»  Vous  braviez,  ù  tort 
»  L'Amour,  qui  vous  hbssc  ; 
»  Le  cœur  le  plus  tort 
i\  \  des  raomens  c!e  faiblesse  ; 
»  Mais  vous  pouviez  a!nier  et  dfsccnc'rc  moins  bas. 

»>   CYBtLE. 

«  Non  ;  trop  d'égalité  rend  l'amour  sans  appas. 

»  Quel  plus  Iiaut  rang  ai -je  h  pi  étendre , 
»  Et  de  quoi  mou  pouvoli;  ne  vlcutii  point  à  bout? 


ACTE  II,  SCÈNE  IV.  i5i 

»   Lorsqu'ou  est  au-dessus  de  tout, 
»  On  se  fait,  pour  aimer,  un  plaisir  de  descendre. 
n  Je  lai  sse  aux  Dieux  les  biens  dans  le  ck\  picpatds; 
o  Pour  Atys,  pour  son  cœur  je  quitte  tout  sans  peine, 
«  S'il  m'oblige  û.  descendre,  un  doux  penchant  m'eniiaiue 
B  Les  cœurs  que  le  destin  a  le  plus  séparés 
»  Sont  ceux  qu'Amour  unit  d'mie  plus  forte  cbaîno. 
(20)  »  Fais  venir  le  sommeil  ;  que  lui-même  en  ce  jour 

»  Prenne  soin  ici  de  conduire 

n  Les  songes  qui  lui  font  la  cour. 

»  Atys  ne  sait  point  mon  amour  : 
»  Par  on  moyen  nouveau  je  prétends  l'en  instm're. 
»  (  Mclisse  va  exécuter  les  ordres  de  Cyliùlc.  ) 
»  Que  les  plus,  doux  zéphirs,  que  les  peuples  divers 

»  Qui  des  deux  bouts  de  l'univers 

»  Sont  venus  me  montrer  leur  zèle 

»  Célèbrent  la  gloire  immortelle 
»  Du  sacrificateur  dont  Cybèlc  a  (ait  clioix. 

»  Atys  doit  ^^ïpeuser  mes  lois  ; 

»  Honorez  le  choix  de  Cybcle. 

SCÈNE  IV. 

»  ATYS,  C  Y  BÊLE. 

»  (  Les  Zéphyrs  paraissent  dans.  une>  gloire  élevée  et  bril- 
lante. Les  peuples  diti'ércas  qui  sont  venus  à  la  fêle  de 
Cjbcle  entrent  dans  le  temple, et  tous  ensemble  s'efibrcent 
d'honorer  Atys,  et  le  reconnaissent  pour  le  grand  sacrifi- 
cateur de  Cybèlc.  ) 
»  CBOEUBS   DES   I»EUPLES    ET   DES    ZËPUÏAS. 

»  Célébrons  la  gloire  immortelle 
»  Da  sactificateur  dont  Cybèle  a  fait  clioi.v: 


i52  ATyS.  ACTE  II,  SCÈNE  IV, 

»  A  lys  doit  dispenser  ses  lois  ; 
»  Honorons  le  choix  de  Cybèle. 
(  à  Atys.  ) 
»  Que  devant  vous  tout  s'abaisse  et  tout  tremble  ; 
»  Vivez  heureux  ,  vos  jours  sont  notre  espoir  : 
»  Rien  n'est  si  beau  que  de  voir  joints  ensemble 
»  Un  grand  mérite  avec  un  grand  pouvoir. 
»  Que  Ton  bénisse 
»  Le  ciel  propice 
»  Qui  dans  vos  mains 
»  Met  le  sort  des  humains. 
»  ATX  s. 
»  Indigne  que  je  suis  des  honneurs  qu'on  m'adresse , 
»  Je  dois  les  recevoir  au  nom  de  la  déesse. 
»  J'ose ,  puisqu'il  lui  plaît ,  lui  présenter  vos  vœux  ; 
»  Pour  le  prix  de  votre  zèle , 
»  Que  la  puissante  Cybèle 
»  Vous  reude  â  jamais  heureux. 

»  CBOBUBS   DES  PEUPLES    ET    DES    ZlfpHTIlS. 

»  Que  la  puissante  Cybèle 

»  Nous  rende  â  jamais  heureux. 


FIN   DU    SECOND    ACTE. 


ACTE  TROISIÈME. 

»  Le  tliéâtre   cLange ,  'et  représente  le  palais  da  grand- 
sacrificateor  de  Cybèle. 


SCÈNE  I, 

»  ATY8. 

vJuE  servent  les  Êiveurs  qae  nous  fait  la  Fortane , 
»   Quand  P  Amoar  nous  rend  malheureux  ? 

»  }e  perds  rnniqoe  b<en  qui  peut  combler  mes  vocax , 
»   Et  tout  antre  bien  m'importune. 

»  Que  servent  les  faveurs  que  nous  fait  la  Fortune , 
jii  Quand  TÂmour  nous  rend  malheureux  ? 

SCÈNE  II. 

»   ATYS,  IDAS,  DORIS. 

»    IDÂS. 

»   Peut-on  ici  parler  sans  feindre  ? 

ATYS. 

»  Je  commande  en  ces  lieux,  vous  n'y  devez  rien  craindre. 

noms. 
»  Mon  frère  est  votre  ami. 


104  ATYS. 

»    IDA  S. 

»  Fiez-vous  h  ma  saur. 

»    ATYS. 

»  Vous  devez  avec  moi  partager  mon  bonheur. 

»    IDA  s    E.T   DOBIS. 

»  Nous  venons  partager  vos  mortelles  alarmes  ; 
»  Sangaride ,  les  yeux  en  larmes , 

»  Nous  vient  d'ouvrir  son  coeur. 

»    ATYS. 

»  L'heure  approche  où  l'hymen  voudra  qu'elle  se  livre 
»  Au  pouvoir  d'un  heureux  époux. 
»   IDAS  ET  Donis. 
»   Elle  ne  peut  vivre 
»  Pour  un  outre  que  pour  vous. 

»    ATYS. 

»  Qui  peut  la  dégager  du  devoir  qui  la  presse  ? 

»  tpAs  ET  Donis. 
»   Elle  veut  elle-même ,  aux  pieds  de  la  déesse  , 
»   Déclarer  hautement  vos  secrètes  amours. 

<C   ATYS. 

»  Cybèle  pour  moi  s'intéresse  ; 
»   3'ose  tout  espérer  de  son  divin  secours.... 
)»   Mais  quoi  !  trahir  le  roi  î  tromper  soa  espérance  ! 
»   De  tant  de  biens  reçus  est-ce  la  récompense  Z 

»    IDA8   ET   DOBlS. 

»   Dans  l'empire  amoureux 
»  Le  devoir  n'a  point  de  puissnnce  j 
»  L'Amour  di><pcnsc 


ACTE  ITI,  SCÈNE  lï}.  i55 

»  Les  rivaux  d'être  généreux  : 
»  Il  ûmt  soavent,  pour  devenir  bearenxV 
»  Qu'il  en  coûte  on  peu  d'innocence. 
»   ATT  s. 
»  Je  souhaite ,  je  crains ,  )e  veux ,  je  me  repcns. 

»    IDÂS    ET   DOBIS. 

»  Verrci-vons  un  rival  heureux  à  vos  dépens  ? 

»  ATrs. 
»  ie  ne  puis  me  résoudre  à  cette  violence, 

»    ATY8,    IDAS   EX  DOniS. 

»  En  vain  un  cœur,  incertain  de  son  choix, 
»   Bfet  en  balance  mille  fois  , 

M  L'amour  et  la  reconnaissance  ; 

»  L'amour  toujours  emporte  la  balaoce. 

»    ATTS« 

U  plus  juste  parti  cède  enfin  au  plus  fort. 

Allez ,  prenez  soin  de  mon  sort  : 
"  Que  Songaride  ici  se  rende  en  diligence. 

)>(ldas  et  Doris  sortent.}' 

SCÈNE  III. 

ATYS. 

Noos  pouvons  nous  flatter  de  l'espoir  le  plus  doux  i 

Cybèle  et  l'Amour  sont  pour  nous. 
Vais  du  devoir  trahi  j'entends  la  voix  pressante 

Qui  m'accuse  et  cp\  m'épouvante. 
Uisse  mon  coeur  en  paix ,  impuissante  vertu  : 

K'fti-je  point  assez  combattu  ?, 


i5(>  ATYS. 

Quand  l'Amour,  malgré  loi ,  me  contraint  à  me  rendre. 
Que  me  demandes-tu  ? 
Puisque  tu  ne  peux  me  défendre  i  , 

(21)  »  Que  me  sert-il  d'entendre 
»  Les  vains  reproches  que  tu  &is  ? 
» .  Impuissante  vertu ,  laisse  mon  cceur  en  paiic..,. 

»   Mais  le  sommeil  vient  me  surprendre  ; 
»  Je  combats  vainement  sa  charmante  douceur  : 
»   Il  faut  laisser  suspendre 
»  Les  troubles  de  mon  cœur. 

(Atys  s^endort.) 

SCÈNE  IV. 

»  (I.e  théâtre  change,  et  rcpr<?sente  un  antre  entouré  de 
pavots  et  de  ruisseaux ,  où  le  dieu  du  sommeil  se  vient 
rendre ,  accompagne  des  Songes  agréables  et  funestes.) 

»  ATYS,  dormant!  lE  SOMMEIL,  MORPUÉE, 
PHOBÊTOR,   PHANTASE,    les    sosges 

AGISEABLES,    LES   S05GE8    FUBESTES. 
»    LE    SOMMEIL. 

»   DoBMORS,  dormons  tons  : 
»   Ah  !  que  le  repos  est  doux  ! 

(22)    »    M  ORPHÉE. 

Régnez,  divm  Sommeil ,  régnez  ^r  tout  le  monde  : 
Répandez  vos  pavots  les  plus  assoupissans  ; 

Calmez  les  soins ,  charmez  les  sens  ; 
Retenez  tous  les  cœurs  dans  une  paix  profonde. 

»    PHOBÉTOn. 

»   Ne  vous  faites  pas  violence  ; 


ACTE  111,  SCÈNE   IV.  iS; 

tt   CoaW ,  tmuiBtmz,  clairs  nûsMam  s 
»    11  n'est  permis  qa'oa  bruit  das  eaux 
»  De  troubler  là  douceur  d'un  si  cbarmant  silence. 

»LE  SOMMEIL, MOBPHéE,PBOBÉTOB  ET  PHA8TA8E. 

»  Dormons,  dormons  tous  : 

».  Ab  !  que  lé  repos  est  dovx  i 

n(Les  Soàgek  agréables  approchent  d'Atys ,  et  par  leurs  chants 
et  par  leurs  danses  lui  font  connaître  l'amour  de  C)4>èle , 
et  le  bonheoT  quHl  en  doit  espérer.) 

MOBVH^E. 

Ecoute ,  écoute ,- Atys ,  la  gloire  qui  t'appette  ; 
Sots  sensible  à  l'bonneur  d'être  akné  de  Cybèle  : 
Joui!» ,  heureux  Atys ,  de  ta  félicité.  ^ 

(23)    i>    MOBPHÉE»   PHOBÉTOB   ET  PHAVTÂSE. 

»   Mais  souTiens-toi  que  la  beauté , 

»  Quand  elle  est  immortelle , 
»   Demande  la  fidélité 

»   D'une  amour  éternelle. 

M    PHAITASE. 

»  Que  Tamonr  a  d'ettraîts 
)>  Lorsqu'il  conunenee 
»  A  faire  sem  sa  puissance  ! 
»  Que  Pamour  a  d'attraits 

»  Lorsqu'il  commence 
»  Pour  ne  finir  jamais  ! 
»  Trop  beureux  un  amant 
»  Qu'Amour  exempte  ^ 
»  Des  peines  d'une  longue  attente  ! 
»  Trop  heureux  un  amant 
»  Qu'Amour, exempte 
Grands-Opéras.  I.  l4 


i 


iS8  ATYS. 

»    De  cniote  et  de  toutnent  l 

"M    PHOBéTOB. 

»  Oo&te  en  paix  chaque  jour  une  doacear  doqvcIIc  ^ 
»  Parti^  t1i6areiix  «oit  d'une  divinité  : 

>»  Ne  vante  plus  la  liberté  ; 
))  U  n'en  est  point  du  prix  d'une  chaîne  si  belle. 

n    MOnPHiEy  PnOBÉTOB  ET  PHANTA8E. 

u   Mais  souviens-toi  que  la  beauté ,  etc. 

»    PHASTASE. 

»  Que  l'Amour  a  d'attraits ,  etc. 
(Les  Songes  funestes  s'approchent  d'Atys-,  elle  menacent  de- 
la  vengeance  de  Cybèle,  s'il  méprise  son  aniour,  et  s'il  ne 
l'aime  pas  avec  fid«51ité>) 

US    SOBGE   FUKESTE. 

Oarde-toi  d'ofl^er  un  amour  glorieux  ; 

C'est  pour  toi  que  Cybcle  abandonne  les  cienx  : 

Ne  trahis  point  son  espérance. 
Il  n'est  point  pour  les  Dieux  de  mépris  innocent  ; 
Ils  sont  jaloux  des  coeurs ,  ils  oiment  la  vengeance  : 

(24)  y>  Il  est  dangereux  qu'on  oficnse  ' 
»  Un  amour  tout-puissant. 

»    CHOEUB  DE   SOBGE8   FUNESTES. 

»  L'amour  qu'on  outrage 
»  Se  transforme  en  rage , 
»  Et  ne  pardonne  pas 
»   Aux  plus  charmants  appas. 
»  Si  tu  n'aimes  point  Cybèle 
»   D'un  amour  fidèle , 
M  Malheureux  !  que  tu  souffriras  ! 
>»  Tu  périras. 


ACTE  111,  SCÈNE  VI.  iSg 

»  Craîos  ooe  T«iiç«aiice  cmelVs  ;  ^ 

»  Tremble,  cran»  «a  aflieiix  trépà», 

w  (  Atys  ^pourantë  par  les  Songes  funestes ,  se  rcreille  en  sur- 
saut -,  le  Sonuneil  et  les  Songes  disparaissent  avec  l*anir»  oà 
ik  élaient ,  et  Atys  se  retrouve  dans  le  mcme  palais  où  il 
s'était  endonnL) 

SCÈNE  V. 

ATYS,  CYBÈLE,  SfÉLlSSE. 

'ATT  8. 

STebez  à  mon  seconrs ,  6  Dionx  !  6  justes  Dieux  ! 

CTBiLE. 

t 
làtys;  ne  craigDtfz  rien  ;  Cybèle  est  en  ces  lieaz. 

ATTS. 

Pardonnez  an  désordre  où  mon  cœur  s'abandoone  ; 
Cest  un  songe...» 

CXRÈLE. 

Parlez ,  quel  soagie  vous  étonne? 
Expliquez-moi  votre  embarras. 

ATTS. 

Les  songes  sont  trompeurs ,  et  je  ne  les  crois  pas  : 
»  Les  plaisirs  et  les  peines 
»   Dont  en  dormant  on  est  séduit 
»  Sont  des  chimères  vaines 
»  Que  le  réveil  détruit. 

CtBELE. 

»  Ne  méprisez  pas  tant  les  songes , 


i6o  ATYS. 

»  L'Âmoar  peal  empronter  War  xoix; 

)i  S'ils  font  souvent  des  meosouges , 

»  Ils  disent  vrai  quelquefois. 
i(25)  V  Ils  parlaient  par  niun  ordre ,  et  vous  les  devez  croire» 

ATT  s,  à  part. 
Ocielî 

GTBè&E. 

N'en  doutez  point ,  connaissez  votre  gloire  ; 
Répondez  avec  liberté  :  -, 

Je  vous  demande  un  cœur  qui  dépend  de  lui-même. 

ATYS. 

(a6)  »  Une  grande  divmité 
u   Doit  s'assurer  toujours  de  mon  respect  extrène. 

CTBÈLE. 

n  Les  Dieux ,  dans  leur  grandeur  sqpréme*, 
»  Reçoivent  tant  d'honneurs ,  qu'ils  en  sont  rebutés  : 
»  Ili  se  lassent  souvent  d'être  trop  respectés  ; 
.  »  Ils  sont  plus  contents  qu'on  les  aime. 

»    ATtS. 
»  Je  sais  trop  ce  que  je  vous  doi  ^ 
4         »  Pour  manquer  de  reconnaissance. 

SCÈNE  VI. 

CYBÈLE,  ATYS,  SASGARIDE,  MÉLISSE. 

SABGAbide  ,  se  jetant  aux  pieds  de  Cybèle. 
»  J'ai  recours  à  votre  puissance , 
Reine  des .  Dieux ,  protégez-moi  j^ 


ACTE  III,  SCÈNE  VI.  i6f 

(>7)  Llntér^  d'Atys  tous  en  presse.... 
ATTS,  l'interrompant. 
Je  parlerai  pour  vous,  qjae  votre  crainte  cesse. 

SA9GABXDE. 

Tons  dem  nois  des  plas  beaux  ooeocb..., 

ATTS. 

Le  sang  et  Tamitië  nous  «Dissent  tous  deux  j 

Que  votte  secours  la  délivre 

Des  lois  d'uu  hymen  rigouienx. 

Ce  sont  les  plus  doux  de  ses  vœux , 
D*  pouvoir  11  jauiais  vous  servir  et  vous  suivre» 

»    CTBÈLE. 

(28)  »  Les  Dieux  sont  les  protecteurs 

»  De  la  liberté  des  cœurs. 
»  Allez ,  ne  crai^iez  point  le  Roi  ni  sa  colère  j 
»   Vaurai  soin  d'appaiser 

i>  Le  fleuve  Sangar  votre  père, 

»  Atys  veut  vous  favoriser  ; 
»  Cybèle  en  sa  faveur  ne  peut  rien  refuser. 

ATTS. 

«  AIi  !  c'en  est  trop.... 

»    CYBELE. 

»   Non,  non;  il  n'est  pas  ncucssaiic 
»  Que  vous  cacbiez  votre  bonheur  ; 
»   Je  ne  prétends  point  faire 
»  Un  vain  mystère 
»   D'nn  ânmur  qui  vous  fait  honneur. 
*  Cn  n'est  point  à  Cybèle  d  craindre  d'en  trop  dire. 
»  11  est  vrai ,  j'airac  Atys  ;  pout-  lui  i'ai  tout  quitte: 


i62  ÀTYS. 

»  Sans  lui  Je  ne  veux  plus  de  grandeur  ni  d'empire  ; 
»  Pour  ma  félicité 
»  Son  cœur  seul  pent  suffire. 

(A  Sangaride.) 
»   Allez  ;  Âtys  kii-méme  Ira  voas  garantie 
»    De  la  ùttsAt  violence 
»    OÙ  vous  ne  pouvez  consentir. 

(Sangaride  se  relire.) 
»    CTBÈLE,  à   Atys. 
»   Laissez-nous ,  attendez  mes  ordres  pour  partir  : 
»  Je  prétends  vous  armer  de  ma  toute-puissance. 

(Atys  sort.) 

SCÈNE  VII. 

CYBÈLE,    MELISSE. 

CYBÈLE. 

Qli'Atïs  dans  ses  respects  mêle  d'indiflTérence! 

L'ingrat  Àtyâ  ne  m'aime  pas  : 
L'amoiir  veut  de  l'amour  ,  tout  autre  prix  l'offousc  ; 
El  souvent  le  respect  et  la  reconnaissance 

Sont  Texcnsc  des  cœurs  ingrats. 

»    MÉLISSE. 

»   Ce  n'est  pas  un  si  grand  crime 

»    De  ne  s'exprimer  pas  bien  ; 
»   Un  cœur  qui  n'aima  jamc.is  rien 
>j   Suit  peu  comment  l'amour  s'exprime. 

»    CYBÈLE. 

'!})  «  Saiigûiide  esi  aimable,  Atys  peut  tout  rbarmer  ; 


ACTE  III,  SCÈNE  VIU.  i63 

»  Ils  témoignent  trop  s'estimer , 
n  Et  de  simples  pareofl  sont  moio^  d'intelligeoet:  : 

»  Ils  se  sont  aimés  dès  l'enfonce  ; 

»   Us  pourraient  enfin  trop  s'aimer. 
»  Je  crains  one  amitié  qne  tant  d'ardeur  anime, 

»   Rien  n'est  si  trompeur  que  Testimo  : 
»  Cest  un  nom  supposé 
»  Qu'on  donne  quelquefois  à  l'amour  déguisé. 
»  Je  prétends  m'éclaircir  ;  leur  feinte  sera  vainc. 

»    MÉtISSE. 

»  Quels  secrets  par  les  Dieux  ne  sont  point  péncUcs  ! 
»   Deux  cœurs  â  feindre  préparés 

»   Ont  beau  cacher  leur  chaîne  ; 

»   On  abuse  avec  peine 
»  Les  Dieux  par  l'Amour  éclairés. 

CYBÈLE. 

»  Va,  Mélisse;  donne  ordre  à  l'aimable  Zéphyre 
M  D'accomplir  promptcment  tout  ce  qu'Âtjs  désire. 

(Mélisse  sorl.) 

SCÈNE   VÏII. 

»  CYBÈLE. 

»   EsPCiB  si  cher  et  si  doux , 
»   Ah  l  pourquoi  me  trompez-vous  ? 
»  Des  suprêmes  grandeurs  vous  m'avez  fait  descendre  ', 
»  Mille  cœurs  m'adoraient  y  jo  les  néglige  tous  : 
»  Je  n'en  demande  qu'un ,  i)  a  peine  ù  se  rendre. 
»  Je  ne  sens  que  chagrins  et  que  soupçons  jaloux  : 
»  Est-ce  le  sort  charmaut  que  je  devais  attendre  Z 


i 


l64       ATYS»  ACTE  III,  SCÈNE  VIII. 
»  Espoir  si  cher  et  si  doux , 
)t  Ah  !  poorqaoi  me  trompez-yons  7 

»  Hélas  !  par  tant  d'attraits  fallait^tl  me  surprendre  ?. 

»  Heoreuso ,  si  toujours  j'arais  pn  me  défendre  ! 

»  L'Âmoar  qui  me  flattait  me  cachait  son  courroux. 

»  Cest  donc  pour  me  frapper  des  plus  funestes  coups , 

»  Que  le  cruel  Amour  m'a  Eût  un  coeur  si  tendre  ! 
»  Espoir  si  cher  et  si  doux , 
»  Ah  !  pourquoi  me  trompez-vous  ? 


PIN  DU   TROISIÈME   ACTE. 


ACTE  QUATRIÈME.  (3o) 

Le  tbëâtre  change ,  et  représeole  lo  pabts  da  fleave  SêDgar. 

SCÈNE  I. 

»  SAWGARIDE,  DORIS,  IDAS. 

OOBIS. 

vxcoi!  vous  pleurez! 

IDAS. 

I^oà  vient  votre  peîoe  mortelle  l 

DOBIS. 

»  N'osez-vons  découvrir  voire  amour  à  C^rbèle  ?, 

8A50ABXDE. 

Bélas! 

DOBIS  ET  IDAS. 

Qui  peut  Ofleor  redoubler  vos  eoouîs  .* 

SA9GABIDE. 

ïâas\  J'aime....  hélas!  j'aime.... 

DOBIS    ET    IDA5. 

Athcveii- 

SAïlGAtltÛE. 

Je  ne  pua- 


^ 


i66  ATYS. 

DOniS    ET   IDÂS. 

(3 1)  »  L'anaoar  n'est  guère  heareax  brsqa'il  est  trop  Umide. 

SAvaABIDE. 

Hélas  !  j'aime  an  perfide 
Qni  trahit  mon  amoar. 

(32)  »  La  déesse  aime  Alys  :  il  change  en  moins  d'un  jour.. 
Atys ,  comblé  d'honneurs ,  n'aime  plus  Sangaride. 

Hélas!  etc. 

^  »    DOBIS  ET  IDAS. 

»  Il  nous  montrait  tantôt  nn  peu  d'incertitude  ; 
»   Mais  qui  l'eût  soupçonné  de  tant  d'ingratitude  2 

»    SASOABIDE. 

»  J'embarrassais  Atys  ;  je  l'ai  vu  se  troubler  : 
»  Je  croyais  devoir  révéler 

»  Notre  amour  â  Cybèle  ; 

»   Mais  l'ingrat,  l'infidèle 
»  M'em^)échaît  toujours  de  parleif. 

»    OOniS  ET   IDAS. 

»  Peut-on  changer  sitôt  quand  l'amour  est  extr^e?. 
»   Gardez-vous,  gardez-vous 
»   De  trop  croire  nn  trans^iort  jaloux. 

»    SAVGABIDE. 

»  Cybèle  hautement  déclare  qu'elle  l'aime , 

M  El  l'ingrat  n'a  trouvé  cet  honneur  que  trop  doux  î 

»  11  change  en  un  moment ,  je  veux  changer  de  même. 

»  l'accepterai  sans  peine  un  glorieux  époux  : 

»  Je  ne  veux  plus  aimer  que  la  grandeur  suprême. 

»    DOBIS   ET   IDAS. 

»  Peut-on  changer  sitôt  quand  l'amour  est  extrême  ? 
ï)  -Gardez- vous ,  gardez-vous 


ACTE  IV,  SCÈNE  1.  ,^67 

»  De  ttop  aoire  un  transport  jaloux. 

M    SA5GAIIIDE. 

M  Trop  heureux  un  cœur  qui'pent  croire 

»  Uq  dépit  qui  sert  à  sa  gloire. 
Revenez ,  ma  raison ,  reveuez  pour  jamais  ; 
^nez-voos  aa  dépit  pour  étouûer  ma  flamme  : 
«cparez ,  s'il  se  peut ,  les  maux  qu'Amour  m'a  lUts  ; 

Venez  rétablir  dans  mon  ame 

Les  douceurs  d'une  heureuse  paix. 

P3)  Revenez,  ma  raison,  revenez  poar  jamais. 

»    IDAS    ET   DOBIS. 

»  Une  infidélité  cruelle 

»  K'eflàce  point  tous  les  appas 

»  D'un  infidèle, 

»  El  la  raison  ne  revient  pas 

»  Sitôt  qu'on  la  rappelle. 

»  SANGAniDE. 

»  Après  cette  trahison, 

»  Si  la  raison  ne  m'éclaire , 

»  Le  dépit  et  ma  colère 

»  Me  tiendront  lieu  de  raison. 

»   SAHOrABiDE,   DOBIS,    ET   iDAS. 

Qu'une  première  flamme  est  belle  î 
Qu'on  a  peine  à  s'en  dégager! 
Que  l'on  doit  plaindre  im  cœur  fi(îèle, 
Lorsqu'il  est  forcé  de  changer  I  (3/î). 


j 


i68  ATYS. 

SCÈNE  II. 

(35)CÉLÉKUS,SANGARlDE,IDAS,DORIS, 
8UITÂB8  DE  cihinvs, 

»  Belle  nymphe,  l'bymeu  va  saivre  mon  envie; 

»  L'Amour  avec  moi  vous  coovîe 
A  venir  vous  placer  sur  un  trône  éclatant  : 
J'approcbe  avec  transport  du  favorable  instant 
D'où  dépend  la  douceur  du  reste  de  ma  vie. 
(36)  »  Mais,  malgré  les  appas  du  bonheur  qui  m'attend^ 
n  Malgré  tous  les  transports  de  mon  ame  amoureuse, 

»  Si  je  ne  puis  vous  rendre  heureuse , 

n  Je  ne  serai  jamais  content. 

»  Je  fais  mon  bonhetg:  de  vous  plaire  ; 
»  J'attache  à  votre  cœur  mes  désirs  les  plus  dou^. 

SASGABIDE. 

Seigneur,  j'obéirai;  je  dépends  de  mon  père  , 
£t  mon  père  aujourd'hui  veut  que  je  sois  2  vous. 

»  CÉIÉ5VS. 

(87)  »  Regardez  mon  amour  plutôt  que  ma  couronnew 

»  saboahide. 
»  Ce  n'est  point  la  grandeur  qui  me  peut  â>louîr, 

CéLÉUUS. 

»  No  sanriex-vous  m'aimcr  sans  que  l'on  vous  l'ordonne  2 

»  saugabide. 
»  Seigneur,  conteutez-vous  que  je  sache  obéir  ; 
M  En  l'état  où  je  suis,  c'est  ce  que  je  puis  dire... 

(Sangaride  aperçoit  Atys.) 


ACTE  IV,  SCÈNE   III.  169 

SCÈNE  III. 

n  ATYS,  CÉLÉKUS,  SANGARIOE,  DORIS. 
IDAS,  suivABS  DE  ciLinvs, 

cthisv  8, 
VoTiiE  coeur  se  trooble ,  if  sonpîre  ? 

SARGAniDE. 

Expliquez  en  votre  faveur 
Tout  ce  que  yoos  voyez  de  trouble  daos  mou  cœur. 

CÉLÉVUS. 

Rien  ne  m'alarme  plus,  Atys  ,  ma  cramtç  est  vaine. 
Meo  amour  touche  enfiu  le  cœur  de  la  beauté 
Doot  je.  suis  enchanté. 

Toi ,  <]ui  fus  témoin  de  ma  peine, 
Cher  A  lys,  sois  témoin  de  ma  fëlicfté. 
(38)  »  Peut-on  la  concevoir?  Non ,  il  faut  que  Ton  aime 
»  Pour  juger  des  douceurs  de  mon  bonheur  extrême... 

»  Mais,  près  de  voir  combler  mes  vœux, 
»  Que  les  momens  sont  longs  pour  mon  cœur  amouKUx! 
»  Vos  parens  tardent  trop;  je  veux  aller  moi-même 

»  Les  presser  de  me  rendre  heureux. 

(  Célénus  et  sa  suite,  Doris  et  Idas  sortent.) 


Grands-Opéras.   I. 


l5. 


,1^0  ATYS. 

SCÈNE  IV. 

ATYS,  SANGARIDE. 

ATYS. 

{39)  «  Qu'il  sait  peu  son  malbeurî  et  qu'il  est  déplorable 

»  Son  amour  méritait  un  sort  plus  favorable  : 

»  J'ai  pitié  de  Terreur  dont  son  cœur  s'est  flallc. 

SANGARIDE. 

»  Épargnez-vous  le  soin  d'êtie  si  pitoyable; 
»  Son  amour  obtiendra  ce  qu'il  a  mérité. 

ATYS. 

Dieux  !  qu'est-ce  que  j'entends  ? 

SASGAnlDE. 

Qu'il  faut  que  je  me  venge  J 
Que  j'aime  enfin  le  roi,  qu'il  sera  mou  époux. 

ATYS. 

Sangaride!  chl  d'où  vient  ce  changement  étrange?. 

SABGABIOE. 

N'esl-ce  pas  vous,  ingrat!  qui  voulez  que  je  change? 

ATYS. 

Moi? 

SAVGARIDE. 

Quelle  trahison! 

ATYS. 

Quel  funeste  courroux  î 

ATYS   ET   SABGAniDE. 

Pourquoi  m'abandonner  pour  une  amour  nouvelle  ? 


ACTE   IV,  SCÈNE  IV.  1711 

Ce  n'est  pas  moi  qai  romps  une  chaîne  si  bello, 

ATT  s. 

Beauté  trop  cruello ,  c'est  vous! 

SÂ5GAJl^DE. 

Amant  infidèle ,  c'est  vous  l 

ATYS. 

AL  î  c'est  vous ,  beauté  trop  cruello! 

SA5GAniX),E. 

AIiî  c'est  vous,  amant  infidèle T 

A  T  ï  ». 
Beauté  trop  cruelle .  c'çsi  vous 

SAVGAniDE. 

Amant  infidèle,  c'est  vous 

ATTS   ET   SA5GAniDE. 

Qui  rompez  des  liens  si  doux  ! 

SANGAniDE. 

Vous  m'avez  immolée  â  l'amour  de  Cybèle. 

AT  Y  s. 
Il  est  vrai  iju'à  ses  yeux ,  par  un  secret  effroi ,     '       / 
l'ai  voulu  de  nos  cœurs  cacher  l'Intelligence  ; 
Mais  ce  n'est  que  pour  vous  que  j'ai  craint  sa  vengeance. 

Et  }o  ne  la  crains  pas  pour  moi. 
Cybèle  m'aime  en  vain ,  et  c'est  vous  que  j'adore. 

s  A  N  G  A  R I  D  E. 
Après  votre  infidélité,    * 
Auriez-vous  bien  la  cruauté 
Pe  vo'»;Ioir  me  tromper  curorç  ? 


A  T  Y  S ,  vivement. 

Moi ,  vous  trahir  !  vons  le  pensez  ! 

lograte  !  que  vous  m'offensez  ! 

Eh  bien',  il  ne  faut  plus  rien  taire  ; 
Je  vais  He  la  déesse  attirer  la  colère , 
M 'offrir  &  sa  fureur,  puisque  vous  m'y  forcez... 

SÂVGABIDE. 

Ahî  demeurez,  Atys;  mes  soupçons  sont  passés  : 
Vous  m'aimez ,  je  le  crois,  j'en  veux  êu:e  certeine  ; 

Je  le  souhaite  assez 

Pour  le  croire  sans  peine. 

(4o)  »  ATYS. 

»  Je  jure. 

»  SAVGABIDE. 

»  Je  promets. 

)>   ATYS    ET    SAnGAHIDE. 

}>  De  ne  changer  jamais. 
»  saugadide. 
»  Quel  tourment  de  cacher  une  si  belle  flamme  ! 

»  ATYS. 

»  Bedooblons-en  l'ardeur  dans  le  fond  de  notre  ame. 

»    ATYS   ET  8ABGABIDE. 

»  Aimons  en  secret^  aimons- nous; 
»  Aimons  plus  que  jamais  en  dépit  des  jaloux. 

»  SAUGARIDE. 

^  »  Mon  père  vient  ici. 

»   ATYS.       ' 

))  Que  rien  ne  vous  étomie  ; 
H  Survom-oous  Ûû  pouvoir  que  Cybèle  n^tt  donne  : 


ACTE  IV,  SCÈNE  V.  173 

M  Je  vais  préparer  les  Zéphyrs 
»  A  suivre  nos  désirs. 

(11  »orl.) 

SCÈNE  T, 

»{SÀNGARIDE,    CÉLÊNUS,   le    dieu   du 

FLEUVE  SAflCAn;  TBOUPE  DE  DIEUX  DE 
FLEUVES,  DE  BUISSEÀUX,  ET  DEDIYIHITlfs 
BE  FOBTAinES. 

»   LE    DIEU    DU    FLEUVE   SAHGAB. 

»  0  VOUS  qui  preoez  paît  aa  bien  de  ma  fiimille , 
»  Tons,  vénérables  Dieux  des  fleuves  les  plus  grands, 
"  Mes  fidèles  amis  et  mes  plus  cfaers  porens, 
»  Voyez  qnel  est  l'époBZ  que  je  donne  à  ma  fille  : 
»  iVi  pris  soin  de  choisir  «ntre  les  plus  grands  rois. 

»   CHCeUB   DE   DIEUX  DE    FLEUVES. 

»  Nous  approuvons  votre  choix. 

»  LE  DIEU  DU    FLEUVE    SANGAB. 

»  11  a  Neptune  pour  son  père; 
n  Les  Phrygiens  suivent  ses  lois  : 

»  J'ai  cm  ne  pouvoir  Êiire 
)»  Un  choix  plus  digne  de  vous  plaire. 

»  CBŒUR  DE   DIEUX    DE    FLEUVES. 

tt  Tous ,  d'une  commune  voix , 
»  Tïous  approuvons  votre  choix. 

LE  DIEU   DU   FLEUVE    SAHGAB. 

»  Que  Ton  chante ,  que  Ton  danse  j 
»  Rions  tous ,  lorsqu'il  le  Ciuit  : 

i5. 


174  ATYS, 

»  Ce  ii'c^  jiimais  trop  lOt 
»  Qae  le  plaisiv  commcuc^. 
»  Qd  trouve  bientôt  la  iin 
»  Des  jours  de  icjouissaDce; 
»t  QtK  a  beau  cbasscr  le  chagrin, 
»  Il  revient  plus  tôt  qu'on  ne  pense. 

»    LE  D1.EU    DU    FliEVVE   SANG\«    ET    LE     C  II  OC:  U  II,., 

>j  Que  l'on  chauto ,  que  Ton  danse  j 
n  Rions  tous ,  lorsqu'il  le  faut  ; 

»  Ce  n'est  jamais  trop  tôt 

»  Que  le  plqisii;  coromence. 
il  Que  Ton  chante  ,  que  Ton  danse  j 
»  Bious  tous ,  lorsqu'il  le  faut. 

»  D^EVS,    Ç..E  TLÇVVES»    D^VIKITÉS    ^J.E    l'ONTAlHE.?. 
CT  pE  nuiS.SEACX,  cliaiUant  et  dansant  unscmVU.. 
,    >»  L(i  beauté  la  plus  sév^ce 
if  Prend  pitié  d'un  long  tourment^ 
i\  Et  rani9ut  qui-  i>er8éYère 
*     »  Devient  un  heureux  amant, 
i)  Tout  est  doyx  et  rien  ne  coûte 
M  Pour  un  corur  qu'on  veut  tou.cher. 
»  l^'oodc  se  fait  une  route  , 
»  Eu  s'effqrçanl  d'en  chercher  5 
}>  L'eau  qui  tombe  goutte  à.  goutU; 
»  Perce  te  plus  dtij:  rocher. 

».  ^.'Hyraen  seul  ne  saurait  plaire, 
»  Il  a  beau  flatter  nos  vœux  ; 
»  L'Amour  seul  a  droit    de  faire 
»  Les  plus  doux  àa  tous  tes  nœuds.. 
»  Il  est  fier,  il  est  rebelle; 
i>^  Mais  il  charme. tel  qa'il  est; 


ACTE   IV,   SCÈNE  V.  175 

»  L'Hymen  vient  quand  on  Tappelle  j 

V  L'Amour  vient  quand  il  lai  plult* 

»  Il  n'est  point  de  résistance 
»  Dont  le  tcms  ne  viepne  k  bout;, 
)>  Et  Teffort  de  la  constance 
«  A  la  fin  doit  vaincre  tout. 

V  Tout  est  doux  et  rien  ne  coûte 

»  Pour  un  cœur  qu'on  veut  touclicr  j 
M  L^)nde  se  fiiit  une  route , 
»  En  s'efforcent  d'en  chercbcr  ; 
>>  L'eau  qui  tombe  goutte  â  gocUte 
y)  Perce  ie  plus  dur  rocbeç, 

»  L'Amour  trouble  tout  le  monde  ; 
»  Cest  la  source  de  nos  pleurs  ; 
»  C'est  un  feu  biftlant  dans  l'onde; 
»  C'est  l'écueil  des  plus  grands  cœurs^ 
»  Il  est  fier,  il  est  rebelle; 
»  Mais  il  charme  tel  qu'il  est  : 
»  L'Hymen  vient  quand  on  l'appelle; 
»  L'Amour  vient  quand  il  lui  plaît. 

U»  DIEU  D^:  FLEUVE   ET  USÇ  Diy  IWITÇ  DE 

FOBTÂISI E,  dansent  et  chantent  ensemble, 

»,  D'une  constance  extrême 

»  Un  ruisseau  suit  son  cours,;. 

»  Il  en  sera  de  même 

31^  Du  choix  demei  amours,, 

»  Et  du  moipent  que  j'aime  ,^ 

»  Cest  pour  aimer  toujours. 

V,  Jamais  u.rf  cçcar  volage  I 


t'jG  ATYS. 

«  Ne  troQTC  an  beurenx  sort  : 
»  Il  n'a  point  l'avantage 
»  D'étro  long-tems  Rapport; 
»  Il  cherche  encor  Torage 
»  An  moment  qn'il  en  sort. 

nCHÛCUDDEDIEUSDE  FLEUVES  ET  DE  DI  VIS  1T£S> 
DE    FOUTAISES. 

»  Un  grand  calme  est  trop  fâcheux; 
M  Noos  aimons  mieux  la  tourmente. 
»  Que  sert  un  cœur  qui  s'exempte 
A  De  tous  les  soins  amoureux? 
»  A  quoi  sert  une  eau  dormante  ? 
«  Un  grand  caUne  est  trop  fâcheux  , 
»  Nous  aimons  mieux  la  tourmente. 

SCÈNE  VI. 

»  ATYS,  SAKGÀRIDE,  CÉLÉNUS,  troupe 

DE  ZÉPHBYS»  tE  DIEU  DU  FLEUVE  SAKOAlli 
TUOUPE  DE  DIEUX  DE  FLEUVES,  DE  »  U I  S- 
SEAUX,    ET   DE   DIVIBIITÉS  DE    FOUTAïaiES. 

»   CnOBUn     DE      DIEVX       DE      FLEUVE»     ET      DE 
F05TA1SES. 

»  Vehez  former  des  nœuds  charmans, 
»  Atys,  venes  unir  ces  bienbeuieux  amans. 

»   ATYS. 

»  Cet  hymen  déplaît  A  Cybèlc  : 
»  Elle  déicnd  de  l'achever  : 
»  Sangaride  est  un  bien  qu'il  faui  lui  tésci  ver , 
M  El  que  je  demande  pour  elle. 


.ACTE  IV,  SCÈNE   VI.  177 

»   LE    CBOCUr.. 

»  Âh  !  quelle  loi  craelle  ! 
.     »  CELÉS  os. 
n  Atjs  peut  s'engager  lui-même  à  me  trahit  ! 
»  Atjs  coutrè  moi  s'intéresse! 

»  ATTS. 

»  Seigneur ,  je  suis  à  la  déesse  ; 
a  Dès  qu'elle  a  commandé ,  je  ne  puis  qu'obéir. 

»   LE   DIEU    DU   FLEUTB   SÀSOAn. 

»  Pourquoi  fiiut-il  qu'elle  sépare 
n  Deux  iliastres  amans  pour  qdi  l'hymen  prépare 
»  Ses  liens  les  plus  doux  ? 
»  LE  cdOEun. 
»  Opposons-nous 
»  k  ce  dessein  barbare. 

»   ATTS. 

»  Apprenez,  audacieux, 
»  Qu'il  n'est  tien  qui  n'obéisse 
»  Aux  souteraînes  lois  de  la  reine  des  Dieux  ! 

n  Qq'oo  nous  enlère  de  ces  lieux  : 
*>  Zéphyrs,  que  sans  tarder  mon  ordre  s'accomplisse. 
(  Les  Zéphyrs  enlèvent  Alys  et  Sangaride.  ) 
»  LE   CBGCUS. 

»  Quelle  injustice! 


FIN    DU   QDATBIEME    ACTE. 


J 


ACTE  CINQUIÈME. 

»  Le  théâtre  change ,  d'icpréseote  des  jardin*  agFéableSk^ 

SCÈNE  I. 

»  CiliÉKUS,  eXBÈLE,  MELISSE.. 

^  »  CÉLÉRUS. 

»    V  ous  m'^tez  SaQgaride ,  inhumaine  Cybèle  ! 

»  E«t-ce  le  prix  du  ,%h\e 
»  Que  j'ai  fait  avec  coin  éclater  à  vos  yeus,  ? 
»  Préparez-voas  ainsi  la  douceur  étemelle 

»  Dont  vous  devez  comblei;  ces  lieux? 
»  Est-ce  ainsi  qqe  les  rois,  sont  protégés  des.  Dieux  "h 
»  Divinité  cruelle, 
)>  Descendez-vous  des  cieux 
»  Pour  tioubler.  un  amour  £dèlc , 
»  Et  pour  venir  m'ôter  ce  que  j'aime  1^  mieux  ? 

»  cx^kilz. 

n  J'aimais  Atys  ;  1'' Amour  a  fait  mon  injustice  r 
»  Il  a  pris  soin  de  mon  supplice; 
M  Et ,  SI  vous  êtes  outragé , 
>)  Bientôt  vous  serez  trop  venge, 
(ij  i)  1)  Atys  adore  Sangariilc^ 


ACTE  V.  SCBKE  I.  179 

CÉLÉNUS. 

Atjs  l'adore  J  ahî  Ife  pertklc'! 

CYBÈLE. 

^'iogriit  Tdus  unissait  et  voulait  me  trahir  ; 
'  Il  s'est  trompé  loi-iaêine  en  crQyant  m'ébloair. 
a}}  »  Les  Zéphyrs  Tont  laissé  seul  avec  ce  qu'il  oline 
»  Dans  ces  aimables  lîeax; 
le  m*y  sais  cachée  à  leurs  yeux  : 
^y  viens  d'être  témoin  de  leur  amour  extrême. 

€ÉLÉBîrs. 

^  «cl  !  Atys  plairait  aux  yeux  qui  m'oat  charmé  I 

CYBÊLE. 

^•pouvez-vons  douter  qu'Atys«e  soit  aknc?. 
•^on,  non,  jamais  amour  n'eut  tant  de  violence  : 
*^  OBI  JDté  cent  fois  de  s'aimer  malgré  nous , 

£1  de  braver  nolrC  vengeance  j 
^  noas  ont  appelés  craels ,  tyrans ,  jaloux  : 

^^^  I  leurs  coeurs  d'intelligence , 
Tons  deux...  ah!  j'ènftèmis  au  motnerit  (jtie  j'y  pense'..., 
°»s  deitt  s'abandonnaient  à  des  transports  si  dcux , 
V^c  je  n'ai  pu  garder  plus  loug-tems'le  silence , 
«1  retçûir  Péclat  de  mon  jtiitetourrottx. 

ciLésuS. 
*  mort  est  pour  leur  crime  ime  pfeiiie  légère/ 

(43)  €TB'£L&. 

on  coeot  à  les  punir  est  assez  engagé  : 
^  ^ous  l'ai  déjà  -dit ,  croyez-en  ma  colère , 
(44)  Bienidt  vous  serez  trop  vengé. 


J 


i8o  ATYS. 

SCÈNE  ÏI. 

»  ATYS,  SARGARIDE,  CYBÈLE,  CÉLÉNUS, 

MÉLISSE,     TB(H7PE     DE     PBÊTRESSES     DE     C  Y- 
B£LE. 

CTBÈLE    ET    CÉLÉNUS. 

»  Venez  vous  livrer  au  supplice. 

ATTS   ET    SABGARIDE. 

Quoi  !  la  terre  et  le  ciel  contre  nous  sont  armés  ! 
(45)  Souflrtiez-vous  qu'on  nous  punisse  ? 

»   CYBÈI*E    ET    céLÉHUS. 

»  Oubliez-vous  voire  injustice  ? 

ATYS   ET    SABGAniDE. 

Ne  vous  souvi6nt-iI  p1n&  de  nous  avoir  aimes  ?, 

/  (46)  CYBÈLE    ET    CÉLENUS. 

z  Vous  changez  mon  amour  en  haine  légitime. 

»  ATYS    ET    SANGABIDE. 

»  Pouvcz-vons  condamner 
»  L'amour  qui  nousi  anime  ? 
^>  Si  c'est  un  crime , 
»  Quel  crime  est  plus  à  pardopner  ? 

v 
»    CYBÈLE    ET    CÉLÉUUS. 

»  Perfide!  deviez-vpus  mo  taire 
»  Que  c'était  vainement  que  je  voulais  vous  plaire  ? 

»  AT)rS   ET   SARGARIDE. 

»  Ne  pouvant  suivre  vos  désirs  , 
»  Nous  croyions  ne  pouvoir  mieux  îsôxq 
»  Que  de  vous  épargner  de  mortels  déplaisirs. 


ACTE  V,  SCEKE   II.  i8r 

»  CXBiLE. 

»  D^un  supplice  crael  craignes  rborrear  extrême. 

»   CXBkhZ  ET    CÉL^HUS. 

n  Oaîgnez  on  funeste  trépas.  ^ 

»  ATYS  ET   8AÏI6AIIDÉ. 

P  Vei^^-Yoïis  ,.s'ii  le  fant  ;  ne  me  pardonnez  pas  ; 
»  Mais4»ardonnez  4  ce  que  j'aime. 

»    CTBÈLE   Eï   CÉLÉBOS. 

»  C'est  peu  de  nous  trahir ,  vous  nous  1)raYez ,  ingrats! 

»    ÀTTS  ET   SAHGABIDE. 

»  Setez-vons  san»  pitié  ? 

9»   CTBàtE  ET   CÉLÉSDS.. 

»  Perdei  tonte  espéftoce. 

»  ATTS  ET  SAHGAfilDE. 

»  L'Ajnont  boas  a  forcés  2  tous  faite  une  c^nae  ; 
»  Il  demande  grâce  pour  nous. 

»  CTBifiE   ET   céLÉHVS. 

»  L'Amour  en  courroux 
»   Demande  ^engeance. 

CTBÈtE. 

Toi  (foà  portes  ftartout  et  la  rage  et  lliorréar  i 
Cesse  de  tourmenter  les  criminelles  ombres  : 
Tiens ,  crudie  Àkcton ,  sors  d^  royaumes  sombres  ; 
Inspire  au  cœur  d'Afys  ta  barbote  (ureur.^ 


Grands-Opéras,  i'.  i6 


»  SCÈNE  III. 

»  ALECTON,  ATYS,  SANGARIDE,  CYBÈLE  ? 
CÉLÉlîîUS  ,    MÉLÏSSE  ,    IDAS  ,    DORIS  > 

TBOUPE   DE    PBÊTBSSSE5   DE   CYBÈLE,    CHGEUB 
DE   PHBTGIER». 

(  Aleeton  sort  des  enfers  ,  tenant  à  la  main  un  flambeau 
qu'.elie  secoue  sur  la  tcte  «PAfys.  ) 

ATYS. 

Ciel  !  qpielle  vapeur  m'environne  ! 
Tous  mes  sens  sont  troublés,  je  frémis ,  je  frissonne , 
Je  tremble,  et  tout^à>coup  une  infernale  ardent 
Vient  eolbnuner  mon  sang  et  dévorer  mon  cœur. 

Dieux  î  que  voîs-je  ?  le  ciel  s*arme  contre  la  terre  ! 

Quel  désordre  !  quel  bruit  !  quels  éclats  de  tonnerre! 
Quels  abîmes  profonds  sous,  me»  pas  sont  ouverts  I 
Que  de  fantômes  vains  sont  sortis  des  enfers  ! 

(  A  Cybèle ,  qu'il  pren4  po^r  59n{aiide.  ) 
Sangaride,  ah!  fuyez  la  mort  q^e  vous  prépare 

Une  divinité  barbare  : 
C*est  votre  fetil  pêtlï  qài  cauàe  ma  terreur, 

SASGAIUDE. 

Atys ,  reconnaissez  votre  funeste  erreur. 

ATYS,  prenant  Sangaride  pour  uu  monstre. 
Quel  monstre  vient  k  nous  !  quelle  fiireur  le  guide! 
Ah  !  respecte,  cruel ,  Taimablc  Sangaride. 


ACTE  v;  SCENE  III.  i83 

SASGAniDE. 

Atys,  mon  cher  Atys  ! 

Quels  btvlemens  aflreiis  ?. 

cthisvSf  à/SaogarkIe. 

Foyex,  saurez-vous  de  sa  rage. 

ATT8 ,  tenant  à  la  main  le  couteau  sacré  qui  sert  aux 
sacrifices. 

11  ùxa,  combattre  :  Aiiiour ,  seconde  mon  eoarage  ! 

(  Alys  court  après  Sangaride  ,  qui  fuit  dans  un  des  cotés 
du  théâtre.  ) 

CÊLÉSUSET   LE   CQOEUB. 

Anéte ,  arrête ,  malheureux! 

^(jCélétius^court  après  Alys.  ) 
'  SABÛ ABIDE  y  àODt  an  des  côtés  du  théâtre. 

LE   CHteUB. 

OcieU 

SABOIABIDE. 

Je  meurs. 
I 

LE    CBOeUA. 

Atys ,  Atys  lui'anâme 
Fait  périr  ce  qu'il  aime  ! 
cihtfivs  ,  rerenant  sur  lé  théâtre. 
le  n'ai  pu  retooir  ses  eSbrts  furieux  ; 
Sangaride  expire  à  nos  yeux. 

CTBèLE. 

»  Atys  me  sacrifie  une  indigne  rivale. 


i 


i84  ATYS. 

»  Partagez  avec  moi  la  douceur  sans  égale 

»  Que  Ton  goûte  en  vàigeaot  up  amour  outragé. 

»  Je  vous  l'avais  promis* 

)>  CÉtÊSUS. 

>)  O  promesse  ^tale  ! 

»  Çaogaride  n'est  pUu,  et  je  suis  trop  veogé^ 

(  Célénus  se  relire  au  côté,  du  théâtre  oia  est  Sangaiide 
morte.) 

..  SCÈNE  IV. 

»  ATYS,  CYBÉLE,  MÉLISSE,  IPAS,  ÇBCEiim 

DE  pnSTGIEHS. 
ATT  S. 

(}i76  je  viens  'd*immoler  une  gcandc-vlctîme-? 
SaogaridiB  est  sauvée ,  el  c'est  par  ma  valeur. 

ÇX^hhE^  touchoDt  Atys. 

Ach^e  ma  vengeance  j  Atys ,  connais  Km  crfane , 
Et  reprends  ta  raisQQ  pour  sentir  ton  malheur. 

AXTS, 

17n  calme  heureux  succède  au  trouble  de  mon  coeur. 

Sangaride ,  nymphe  charmante , 
Qu'êtes-vous  devenue  ?  où  puis-je  avoir  recours...?. 

Divmité  toute-puissante ,  -  * 

Cybèlc ,  ayez  pitié  de  nos  tendres  amples.; 
Rendez-moi  Sangaride,  épargnez  ses  l^ux jours., 

C  r  B  è  L B  ,  montrant  à  Atys  Sangaride  morte. 
Th  kl  peux  voir  ;  regarde. 


ACTE   V,   SCÈNE  IV.  i8S 

ATT8. 

'Ah  !  quelle  barbarie  I 
Sangaride  a  perda  la  vie  ! 
'Àb!  quelle  maio  ciuelle!  ah!  qael  cœur  iohuQuJn!... 

Us  coups  dont  elle  mcqrt  sont  de  la  propre  voêod, 

ATTS. 

Moi ,  l'aurais  inunolé  la  beauté  qai  m'eochante  !... 

O  ciel  !  ma  maiu  saDglante 
Est  de  ce  crime  horrible  un  témoîa  trop  certain  ! 

LB    ÇHOEUfi. 

'Âtys,  Alys  lal-méme 
Fait  périr  ce  qu'il  aime. 

ATTS. 

Quoi  !  Sanga^ide  est  morte  1  Atys  est^soQ  bourreau  ! 
Quelle  Teugeaoce,  à  Dieux!  qael  supplice  nouveau! 

Quelles  horreurs  soçt  comparables 

A  Texcès  des  maux  que  je  sens  2 

Dieux  cruels  !  Dieux  impitoyables  ! 

Hé  quoi  I  n'étes-TOus  tout-puissans 

Que  pour  iàire  des  misérables  l 

CXBàLE. 

Atys  y  je  vous  a>  trop  aimé  : 
Cet  amour,  par  vous-même  ea  courroux  transformé , 

Fait  voir  encor  sa  violence. 
Jugez,  ingrat  I  jugez ,  en  ce  funeste  jour , 

De  la  grandeur  de  mon  amour 

Par  la  ^grandeur  de  fnsx  vengeance. 
Atys,  c'est  à  l'Amour  que  tu  dois  imputer... 

iG. 


ii86  ATYS. 

'    ATT  s. 

Barbare  î  quel  amour  qui  prend  soin  d'inventer 
Les  plus  horribles  maux  que  la  rage  peut  faire  l 

Bienheureux  qui  peut  éviter 
Le  malheur  de  vous  plaire  l 
O  Dieux  î  injustes  Dieux  l  que  n'étcs-vous  mortels  ! 
Faut-il  que  pour  vous  seuls  vous  gardiez  la  vengeance?, 
Cest  trop ,  c'est  trop  souffrir  leur  cruelle  puissance  i 
Chassons-les  d'ici-bas  ,  renversons  leurs  autels. 
Quoi  !  Sangaride  est  morte  l  Atys ,  Atys  lui-même 

Fait  périr  ce  qu'il  aime  ! 

(5o)  »  CYBÈLÈ  ,  ordonnant  d'emporter  le  corps  de  San- 
garide morte. 
}>  Otez  ce  triste  objet. 

rf  ATïS. 
»  Ah!  ne  m'armchez  pas 
»  Ce  qui  reste  de  tant  d'appas  : 
p  En  fussiez-voiis  jalouse  encore , 
»  Il  faut  que  je  l'adore 
^       A  Jusque  dans  l'horreur  du  trépas. 

(  Il  suit  le  corps  de  Sangaride.  ) 

«SCÈNE  V. 

>»  CYBÈLE,  MÉLISSE. 

»   CTBilLE. 

})  Je  commence  à  trouver  sa  peine  trop  cruelle  ; 

»  Une  tendre  pitié  rappelle 
j)  L'amour  que  mou  courrou2(  croyait  avoir  banni. 


ACTE  V,  SCÈNE   VI.  '187 

»  Ma  rivale  n'en  plus ,  Atys  n'est  plus  coupable  : 
»  Qu'il  est  aisé  d'aimer  un  criminel  aimable  î 
»  Après  l'avoir  puni  J 
»  Que  son  désespoir  m'^jouvante  ! 
»  Ses  jours  sont  en  péril ,  et  j'en  jfirémis  d'efiloi': 
»  Je  veux  d'un  soin  si  cher  ne  me  fier  qu'à  moi. 
p.  Allons.,.  Mais  quel  spectacle  â  mes  yeux  se  présente  ! 
»  Cest  Atys  mourant  que  je  voi  ! 

«  SCÈNE   VI. 
»  Atys,  idas,  cybêle.  mélisse,  pkê^ 

TBESSES'DE    CTBÈlE. 

»  IDA8,  soutenaift  Atys. 
I  II  s'est  percé  le  sein ,  et  mes  soins  pour  sa  vie 
V  N'ont  pu  prévenir  sa  fureur. 

GTBktB. 

»  Ah  l  c'est  ma  barbarie , 
»  Ccst  moi  qui  lui  perce  le  cœtir. 

ATYS, 

»  Je  meurs  ;  l'amour  me  guide 
»  Dans  la  nuit  du  trépas  : 
»  Je  vais  où  sera  Sangaride... 
n  Inhumaine  \  je  vais  où  vous  ne  serez  pas. 

GTBÈLE^ 

»  Atyg,  il  est  ttop  vrai ,  ma  rigueur  est  extrême;; 

»  Plaignez-vous ,  je  veux  tout  soufiHr  : 
p  Pourquoi  suis-jc  immortelle  en  vous  voyant  périr .?,    ^ 


i 


i8?.  'ATYS. 

ATTS   ET   CYBÉLE. 

»  Il  est  doux  de,  mourir 
»  ÀTec  ce  que  Too  aime. 

»  CXBÈIE. 

»  Qoe  mon  amour  funeste ,  armé  contre  moi-même , 
)i  Ne  peut-il  vous  venger  de  toutes  mes  rigueurs?, 

ATTS. 

))  Je  sois  assez  vengé;  vous  m'aimez,  et  je  meurs. 

CTBàLE. 

»  Malgré  le  destin  implacable, 
»  Qui  rend  de  ton  trépas  l'arrêt  irrévocable , 
»  Atys  I  sois  à  jamais  l'objet  de  mes  amours  ; 
}y  Reprends  ua  sort  nouveau ,  deviens  un  arbre  aimable 

v  Que  Cybèle  aimera  toujours. 
I)  (  Atys  prend  la  formed'ua  arbre  aimé  Ho  la,  déesse  Cjbèie  , 
et  que  l'on  appelle  pin.  ) 

«  Venez,  furieux  Corybantea, 
»  Venei  joindre  à  mes  crb  vos  clameurs  éclatantes  ; 
»  Venez ,  nympbes  des  eaux  ;  venez ,  dieux  des  forêts , 

D  Par  vos  plaintes  les  plus  toucbantes , 

»  Secondez  mes  tristes  regrets. 


«SCÈNE    VII. 


I»  CYBELE,  TBOUPB  DB  BTMPHES  DES  BAUX» 
TROUPE  DE  DIVISITÉS  DES  BOIS|  790tiPE  DE 
COBXBAHTES. 

>»   CYBàlE. 

Il  At«b  ,  l'almablc  Atys ,  avec  tous  ses  attraits, 
y  Descend  dons  la  nuit  étcmcUe  i 


ACTE  y,  SCÈHB  VIL  189 

2>  Mais ,  Éial^  1»  mort  ancUe, 
»  L'amour  de  Gybèle 
»  Ne  momra  jamais. 
1»  Sons  une  noavelle  £gore 
a  A^  est  ranimé  par  mon  ponvcdr  àina , 
»  Célé^xm  80Q  OQOTOMi  desiio; 
»  Pleures  sa  fooeste  aTentore. 

»  CHCeUBS   DES   DIYIBITÉS  DBS  lAVX  BT  DBS    Dl- 
VlHlxés  DES   BOIS. 

»  Célébrons  sooDOtnrean  destin* 
»  Pleurons  sa  fianeste  aventure. 

»  CTBÈIB. 

»  Qae  cet  arbre  saeié 

»  Soit  révéré 
»  Qe  tonte  la  nature  ; 
»  QoH  i^éièvo  au-dessus  des  aibres  les  plus  beanj:  ^ 
»  Qu'il  soit  voisÎQ  des  cieux ,  qu'il  règne  sur  les  eaux  { 
»  Qu'il  ne  puisse  brûler  que  d'une  flunme  pwe. 
?>  Que  cet  aibre  sacré 

»  Soit  révéré 
»  De  toute  la  nature. 
(  Le  chœar  répète  les  trois  demien  vers.  ) 
19  CTBÈX.B. 

»  Que  ses  rameaux  soient  toujours*  veris^ 
»  Que  les  plus  rigoureux  hivers 
P  Ne  leur  fassent  jamais  d'ioj  ure. 
Que  cet  arbre ,  etc. 

»  CTBÈLE   ET  LE   GHOBUR   DES  DIVII^ITÊS  DE> 
SOIS   ET   DES   EADZ. 

)»  Quelle  douleur  1 


190  'ATYS. 

»  CISÈLE  ET  tB  CHOEUB  DES  C0BTBA5TES. 

»  Ahl  quelle  rage! 

»  CTBÈLE    ET   LES   C0CEJJBS. 

»  ^  !  quel  malhem  I 

CTȏLE, 

2>  Atys,  aa  printems  de  son  âge , 
»  Pécit  comme  ime  fleur 
»  Qa'im  soudaîo  orage 
>>  Benverso  et  ca?age. 

»   CYBÈLE   ET  LE   CHCBUD  DES  DIYIHITÉS   DES 
BOIS   ET  QES  EAUX. 

»  Qaelle  doalecffî 

»  CYBàLE  ET  LE   CBCBUB  DES   COBTBABTES. 
]»  Ah  l  quelle  rage  1 

9  CTBÈLE   ET   LES   CHCBUBS. 

»  Ah!  quel  malheur  I 

(  Les  diTlnilës  des  bois  et  des  eaux  j  avec  les  Corjbantes',  ho- 
norent le  nouvel  arbre ,  et  le  consacrent  à  Cybèle.  Les  re- 
grets des  divinités  des  bois  et  des  eaux ,  et  les  cris  des  Co- 
rybanles ,  sont  secondés  et  terminés  par  des  tremblemens 
de  terre ,  par  des  éclairs  et  par  des  éclats  de  tonnerre.  ) 

»    GTBÈLE   ET   LE   CHCEUB  DBS   DIVIBIT^S   DES 

BOIS  ET  DES  EAUX. 

»  Que  le  malheur  d'Âtys  afflige  tout  le  monde. 

n   CTBèLE    ET    LE    CaGEUB  DES    COnTBABTES. 

»  Que  tout  sente  ici  bas  , 

>»  L'horreur  d'un  si  cruel  trépas. 

»  CTBÈLE    ET   LE    CHOBUB   DES   UIVIBITÉS   DES 
BOIS   ET   DES   EAUX. 

»  PéoétroDS  tons  les  cœurs  d'une  douleur  profoode  [ 


AUrt.  V,  bC'EKB   VII.  I^H 

»  Qne  les  boîs ,  que  les  eatu  perdent  tons  leurs  appas. 

»  CYBÈLE    ET  LE    CHOBUB    DES    CORTBABTES. 

»  Que  le  tonnerre  nous  réponde  ; 
»  Que  la  terre  iirémisse  et  tremble  sous  nos  pas. 

»  CTBèx.E    ET   LE   CBGEUB  DES   DIYIBITES   DES 
BOIS   ET   DES   EAUX., 

»  Qae  le  malheur  d'Atys  afllige  tout  le  monde. 

»   TOUS   EBSEHBLE. 

n  Que  tout  sente  ici  ba&. 
»  L'horreur  d'un  si  cruel  trépas. 


tïV  D  ATTS. 


^^^^1  tm^h^^  »i»i»»ii»^i»^«^i^«^>^i^^<^^i»'i^<^^»^»^^>#ii»<^^ 


AVERTISSEME3ST. 


Pâk  suite  des  changemens  qu'a  éprouvés  le 
système  de  la  coupe  des  opéras  depuis  Qui^ 
nault,  Âtjs  est  un  de  ceux  qui  ont  le  {)Ius 
souffert  de  la  réduction.  IVJhiis  en  fesant  uqg 
pareille  opération^  Marmontel  a  plutôt  songé  à 
la  commodité  de  la  représentation  et  du  mu^ 
sicien  qu'à  l'intérêt  littéraire,  et  il  a  mutile 
l'opéra  que  nous  Tenons  de  donner.  Gepen-> 
dant  pour  faire  connaître  aux  lecteurs  cette 
pièce  telle  qu'elle  se  joue^  nous  indiquons  ici 
les  changemens  de  scène  et  les  morceaux  que 
ce  grand  littérateur  y  a  ajoutés. 


ATYS. 

VARIANTES. 

(0  ACTE  premier: 

Le  tiléâtre  représente  no  ricbe  paysage  an  fond  clnqnel  on 
▼oit  le  Mont  Ida ,  et,  en  avant ,  le  péristile  du  temple 
dcCybèle. 

SCÈNE  I. 

fATYS. 

Amabs  qoi  vous  plaignez ,  etc. 
•     •••     *•••*»•*» 
(  Le  reste  comme  à  la  scène  II  dn  texte  de  Qoinatilt.  ) 

AIR. 


Brûlé  d'une  i 
Qoi  iàdt  Aon  malbenr , 
Il  fant  dans  mon  ame 
ddier  ma  dooleor. 
Il  fiât  qae  j'expire , 
Victime  da  sort ,  ' 
Sans  même  oser  dire 
Qui  cause  ma  mort. 
Grands-Opéra».  l.         ^  17 


J 


igi  VARIAIÏÎES  D'ATYS. 

Parmi  l'allégresse 
D'un  peuple  assemblé  ; 
Confus  et  troublé, 
De  quelle  trietessâ 
Je  sois  Accablé  S 

Brûlé  d'une  flamme ,  etc. 

Ma  douleur  me  trahît  ;  et  quelqu  un  peut  m'enCeodre. 

(a)  AI». 


Atys ,  votre  coeur  est  changé. 
L'Amour  se  serait-il  vengé  ? 
N'est-ce  pas  lui  qui  vous  éveille? 

AIB. 

ATT  s* 

La  paix  des  coeurs  indiff^ens 
Fait  mes  délices  les  plus  chères  : 
Si  leurs  plaisirs  ne  sont  pas  grands  ,^ 
'Au  moins  leurs  peines  sont  légères. 

•        •        •        .        4 

(3)  Devient  votre  époitt  ; 
Tout  doit  parler  d'amour  pour  von?^ 

SÂRGABIQE. 

Oui ,  je  dois  chérir  ma  victoîije. 


(4)  Ainsi ,  vous  opposez  eux  plus  touchais  appas , 


ACTEI.  ,ç)5 

Une  indifféreDce  invincible  2 


(5)  DOBIS. 

Que  je  vont  plains  f 

(6)  Son  cceor  paisibAo 
Fuît  FÂmour,  et  aaint  ses  appas. 

(?)  AlB. 

Est-îl  on  destm  pitis  Croél  ? 
Ah!  qni  fdt  jamais  plos  à  plaindre  l 
Cbanne  d'an  amoor  mutuel , 
Xe  me.Tois  réduite  à  vous  craindre. 
Le  ccrar  d'Atys  est  le  seul  bien 
On  mon  cfsnr  en  secrist  aspire  ; 
J'adore  Atys ,  et  je  désire 
Que  jamais  Atjs  n'aime  tien  I 
'Atys ,  pour  qni  seul  je  respire  l 
Est-il  un  destin  plus  cruel  ?  etc^ 

(8)  Je  viens  de  voir ,  dans  ces  campagnes , 


(9)  Les  jeux  vont  bientôt  commencer  ^ 
Et  je  ne  vois  point  nos  compagnes  ! 

(10)  SAIK^ABIDE. 

Que  n'aroK-vous  su  vous  contraindre  l 
0  Dieux! 


jqS  yARIAKTÇS  D'AÏYS. 

(il)   DUO. 
ATTS. 

Hélas  !  si,  dan3  ma  peine  ; 
Une  espérance  vaine 
Mêlait  sa  douce  erreur  !... 
Hais  rieD  n'en  soulage  lliorreiir.^ 

SASGABIDE. 

Atys,  vons,  qae  j'adore, 
n'accablez  pas  encore , 
Par  des  tourmens  nouveai^i 
XJo  cœur  qui  partage  ¥0S  maux. 
I«aisseiomoL 

ATZS. 

NoQ ,  cmelle. 

SAlGAniDE. 

Vivex ,  soyez  fidèle  ; 
Mais  vivez  sans  me  voir* 

ATTS. 

Ah  1  croyez-voas  possible 
De  vivre  sans  espoir?. 

8AB6ABIDC, 

Ail  !  quel  supplice  horrible , 
De  s'aimer  sans  espoir  ! 

EHSEMBI.E. 

Ciel!  sans  ton  assistance,      '^ 
Est-il  une  constance 
(  ^ale  à  nos  malheuçs  ? 

O  ciel ,  qui  vois  nos  pleurs , 
Est-il  une  constance 


(àCTE  I.  ti97 

]Égale  à  DOS  malheurs  ?, 

ATÏS. 

Hélas  !  quelle  est  ma  peine  ! 
Toute  espérance  est  vaine. 
Bien  n'adoucit  mes  maux. 

SAliaABIDC. 

Atys,  vous  que  f adore, 
n'accablez  pas  encore , 
Far  des  tourmens  nouveaux , 
Un  cœur  qui  sent  vos  maux. 
LaîsseZ'iQoi. 

ATYS. 
Nou ,  cruelle. 

BASGABIDE. 

Vivez,  soyez  fidèle; 
filais  vivez  sans  me  voir. 

ATYS. 

Que  voulez-vous ,  cruelle , 
D'un  cœur  an  désespoir  ?, 

EVSEMBLE. 

Ciel  !  sans  ton  assistance , 
Est-il  une  constance ,  ett. 
(Une  symphonie  annonce  Parrivée  de  Cybèle.) 
ATYS. 
La  déesse  descend.  Allons  au-devant  d'elle* 


ï7- 


198  VARIANTES  D'ATYS. 

SCÈNE  VII. 

ATYS,   SANGABIDE,    CÊLÉNUS,  CYBÈLE, 
IDAS,  DORIS,  MÉLISSE,  pbêtbes  de  Cy- 

BÊLE,   PEUPLE   DE    PBBTGIE. 
LE    CHOBUB. 

Vekez  ,  reine  des  Dieux ,  venez , 
,        Venez ,  j&vorable  Cybèle. 

ATTS. 

Pour  ces  rivages  fortunés , 
Quittez  votre  cour  immortelle. 

SAflGÀBIDE   ET  ATTS. 

■Venez  voir  les  autels  qui  vous  sont  destinés. 
(i3)atys. 

LE    CHŒUB. 

Ventf^,  reine  des  Dieux,  etc. 

CTBÈLE. 

(i4)  Qu'on  m'écoute  en  silence  i  ....... 

i(i5)  Célénus,  le*  ciel  vous  6t  roi  ; 

j(i6)  C'est  bien  assez  pour  vous  de  gloire  et  de  puissance. 
1^    Je  veux  faire  un  destin  qui  ne  soit  dû  qu'à  moi. 
le  crois  voir ,  dans  Atys ,  un  ministre  tidèle  ; 


L 


i 


îàCTE  ï.  tç^ 

{17)  Rieo  ne  pourra  troubler  son  zè)e. 

SoD  ccenr,  pour  yoos  être  fidèle , 

S'est  réseinré  iusqa'à  ce  jour. 

U  faut  toDt  no  cœur  pour  Cjbèle  ; 
k  peioe  tout  le  mien  peut  sa&n  à  famour. 

(Au  peuple.  ) 

Gélâ>Tez  la  gloire  Immortelle 
Do  sacrificateur  dont  Cyfoèle  a  fait  choix. 

Qu'Atys  nous  dispense  ses  lois  : 

Honorons  le  choix  de  Cjbèle. 

tB   CHOBUB. 

Honorons  le  choix  de  Gybèle. 
Qn'Atys  nous  dispense  ses  lois. 
Celui  dont  Çybèle  a  fait  choix , 
Obtient  une  gloire  immortelle  ; 
Son  sort  l'égale  aux  plus  grands  rois. 

(Fête  célébrée  en  l'honneur  de  Cybèle.  Atys  est  revêtu  des 
marques  de  sa  nouvelle  dignité^ 


FIS   OD   PREItlEB   ACTE. 


(»8)ACTE  SECOND. 

Le  théâtre  représeqU;  le  vestibule  da  palais  da  graad^ 
prêtre  de  Cybèle. 


SCÈNE  I. 

CYBÈLE,  MÉLISSE. 

CTBÈLE. 

Ci'est  ici  son  palais  ;  mais  je  Êûs  ,  pour  sa  gloire  | 
Encor  plus  que  tn  ne  peux  croire. 

(19)  Fais  venir  le  sommeil,  et  que ,  dans  ce  séjour, 
Ce  Dieu  prenne  soin  de  conduire 
Les  songes  qui  forment  sa  cour. 
Aiys  ne  sait  pas  mon  amour  ; 

Par  un  moyen  nouveau  je  prétends  Ken  instruire... 

Célénus  avec  lui  s'avance  i  éloignons-nous. 

SCÈNE  II. 

AJYS,  CÉLËNUS. 

CilÉBUS. 

Saiigabq>e  gémit  !...  Elle  t'ouvre  9on  ame  ; 


SiCTE  It  a»| 

n'y  décoaTres-tu  point  quelque  secrète  flamme  ? 
<)aelqoe  rival  caché  2 

ATT  s. 
Seigneur,  que  ditest-tous 31 

t 
le  seul  nom  de  rival  allume  mon  courroux/ 
Transport  dont  mon  ame  est  saisis , 
Sombre  et  cruelle  Jalousie, 
Vas-tu  avenir  mon  vautour^ 

Sombre  et  cruelle  Jalousie , 
Sors  dé  mon  cœur ,  fîiis  sans  retour , 
'    âoigne-toi ,  triste  furie , 
Tb  fais  le  tourment  de  TAmour. 

Tu  vois  le  trouble  qui  me  presse , 
}èdj9  :  pour  le  cahner ,  je  m'abandonna  h  toi. 
Aux  peines  de  mon  coeur  si  ton  coeur  s'intéresse, 
^ois  Songaride  ,  ^  sers  ton  ami  dans  ton  roi. 

SCÈNE  III, 

làTYS. 

O  funeste  amitié  !  confiance  accablante  !    ^ 
Sur  quel  abîme  aflreux  vous  tenez  en  suspens 

Mon  ame  incertaine  et  tremblante  ! 
3e  souhaite,  je  crains,  je  veux,  je  me  reffens... 
Trabirai-je  mon  roi  ?  Perdrai-je  mon  amante  ? 
Malbeomix  !  sur  mes  jours  quel  poison  je  répands  I 

Je  suis  aimé  de  Sangaride  ; 
L'heure  approche  où  mon  sort  et  le  sien  se  décide  ; 


202  VARIANTES  D'ATYS. 

(20)  AIR.  ^ 

Quel  trouble  agite  mon  cœur  l 
Qae  d'eaneiiiis  il  rassemble  ! 
Ne  pourrai-je  unir  ensemble 
*         L'innocence  et  le  bonheur? 
Auquel  des  deux  renoncer  ? 
Je  veux  ehoîsit,  et  je  tremble, 
Oui ,  je  tremble  â  prononcer. 
Je  succombe  ;  et  je  sens  une  froide  langueur 
Dans  tous  mes  esprits  se  répandre... 
Le  sommeil  vient-il  me  surprendre 
Hélas  l  des  malheureux  c'est  l'Uniique  douceur... 
Ah  l  laissons-lui  suspendre 
Le  trouble  de  mon  cœur. 

SCÈNE^  IV:.     ' 

ATYS  eûdotmi,  MORPHÉE,  les  sosges. 

(21)  CHCEDB., 


1 22)  TouJOUBS  aimé ,  toujours  fidèle , 
Pour  une  immortelle  beauté  , 
Brûle  d'une  flamme  immortelle. 


i 


(a3)  Garde-toi  d'offenser  un  amour  tout-puissant. 

SONGES    BECBEUZ. 

Combien  de  délices 
.  Ton  cœur,  va  goûter  î 


ACTE  IL         ^  ao3 

S0B6ES   FUSSSTCS. 

Combien  de  supplices 
Ta  dois  redouter  I 

ENSEMBLE. 

Des  plaisirs     )  ^ 

Des  malheurs  J  '^^^ 

De  toD  choix  dépendent. 
Ces  plaisirs     )  ,,  ,.     ,  _ 
CesiialheursP""""^^"*- 
Choisis  ton  destin»   , 

(Daoto  des  Songes.) 
80VGE8    FCRESTES. 

Si  ton  ccenr  rebelle, 

Ingrat ,  infidèle , 

Irrite  Cybèle, 

Tu  cours  an  trépas. 

L'amour  qu'on  outrag2  ,■ 

Se  transforme  en  rage  ; 

L'amour  qu'on  outrage , 

Ne  pardonne  pas.  \ 

CTBÈ.LE. 

j(a4)  ^^  )  coux-là  sont  vrais  ,  et  vous  devez  les  croire. 

ATÏS. 

(35)  Vous  servir  avec  zèle  est  mon  devoir  suprême. 

CTBiXE. 

Le  zèle  n'esi  pas  de  l'amour  ; 
Et  les  Dieux  sont  encor  plus  flattés  qu'on  les  aîme. 

ATTS. 

AIR. 

Je  suis  comblé  de  vos  bienfaits  : 
Comment  y  serais-je  insensible  ?> 


À 


so4  VARIANTES  D'ATYS. 

Les  mériter,  s'il  est  possible  , 
Est  le  pins  cher  de  mes  souhaits. 
Je  suis  comblé  de  vos  bienÊûts  : 
Comment  y  Berais-je  insensible  ?, 

(99)  D'mi  malheureux  hymen  dissuadez  le  Roi  : 


i(3o)  CTBÈLE,  à  Sangaride. 
Cybèlc  aux  vœux  d'Atys  n'a  rien  à  refuser  £' 
(Atys  de  sa  (ayenr  ne  saurait  abuser  ; 
Rassurez-Tous.  Je  l'aime ,  et  je  veux  bien  le  dire* 
Le  cceur  d'Atys  manquait  à  ma  félicité. 
Sans  lui  je  ne  veux  plus  de  grandeurs  ni  d'empire; 
Et  pour  lui  seul  j'ai  tout  quitté. 

8AII&ABIDE,  àpart. 
Blalheureuse! 

CTBÈLÉ,  àpart» 
Je  crois  l'entendre  qui  orapire  ! 
(ASangaride.) 
Allez.  Atys  lui-même  ira  vous  garantir 

D'une  Êoale  violence. 
Et  vous,  Âtys,  et  vous»  attendez  en  silence,- 
Que  de  mes  volontés  je  vous  Êksse  avertir. 

(3o)  N'aS-tu  pas  de  leurs  yeux  surpris  rbtelligtince  l 
N'a»-tu  pas  entendu  qu'ib  soupiraient  tout  bas  t 
Je  vois  dans  ces  jardins  s'éloigner  Sangaride  ; 
Suis-la  des  yeux.  Bientôt  le  soupçon  qui  me  guide, 
M'y  fera  voler  sur  les  pas. 


^CTE  IL  2oS. 

SCÈNE  VIII. 

CYBÊLF. 

EsTHX  là  le  retour  que  je  devais  attendre? 
Mille  cœurs  m'adoraient;  je  les  néglige  tous. 
Uo  seol  m'a  su  cJianner  ;  il  a  peine  à  se  rendre. 
Cest  donc  pour  me  frapper  des  plos  sensibles  conps, 
Qoe  le  cniei  Amour  m'a  &it  un  cœur  si  lendre  l 

m. 

Tremblez  ingrats ,  de  me  trahir. 
Je  sais  haïr 
Autant  que  j'aime.  . 
Je  TOUS  observerai  moi-même  ; 
Et  n'eapérex  pas  m'éblonir. 

Quel  noir  projet  mon  ccenr  enfante  ! 
Quelle  horrible  peine  il  invente  ! 
Atys,  conobien  tu  vas  gémir! 
Ah  !  ma  vengeance  m'épouvante  : 
Je  n'y  puis  penser  sans  frémir. 
Itemblez ,  etc. 


PIS  DU  SECOSD  àCTE. 


Grands-Opéra»,  t.  i8 


^i,^».»^^<^.^»^*»«rf<»»^M»»^i^<^^«**^«i^^^»^liO..^ 


(5=»)ACTE  TROISIÈME. 

è 
Le  théâtre  représente  les  jardins  da  palais  de  Célénus. 

SCÈNE  I. 

SANGARIDE,  DORIS. 

(33)  OECLE  avec  moi ,  pourquoi  ce  silence  timide  ?. 

(34)  La  Déesse  aime  Âtys  ;  Atys  l'aiinq  i  son  tour. 


(35)  AIR. 

Malheureuse,  hélas  !  faime  encore  î 

De  rinfidèle  que  j'adore , 

Mon  cœur  ne  peut  se  détacher.  " 

Je  sens  le  trait  qui  me  déchire  : 

En  vain  je  voudrais  l'arracher  ^ 

Et  je  redouble  mon  martyre , 

En  m'efibrçant  de  le  cacher. 

Malheureuse  ,  hélas  !  etc. 

(36)  Mais  l'ingrat  a  changé  ;  je  veux  changer  de  même. 
J'accepterai  sans  peine  un  glorieux  époux. 
7e  ne  veux  plus  aimer  que  la  grandeur  suprême  ; 
Et  le  bouhenr  d'un  Roi  qui  m'aime , 


ACTE  III.  2071 

Va  faire  mes  soins  les  plas  doux. 


(87)  ClÉLéNUS,  SANGABIDE,  DORIS. 

CÉLÉRUS. 

Belle  Nymphe ,  l'Amour,  avec  moi ,  vous  convie 
A  venir  vous  placer  sur  un  trône  éclatant. 


(38)  Mais  rassurez  un  cœur  jaloux. 
Je  veux  ,  en  vous  aimant,  me  flatter  de  vous  plaire. 


(3q)  CÉLtSDS. 

Ab  !  ce  n'est  point  assez. 

SAB^ABIDE. 

Que  puis-je  encor  vous  dire  l 

(  Atys  paraît.  ) 
cél.£l!(us,à  Sangaride. 


(4o)    AIB. 

Je  vais  posséder  Sangaride! 
Ah  î  qui  fiit  jamais  plus  heureux  2 
Sa  bouche  innocente  et  timide 
A  daigné  répondre  à  mes  vœux. 
J'ai  lu  mon  destin  dans  ses  yeux  ; 
Vd  soupir  a  trahi  son  ame. 
Dans  ce  moment  délicieux , 
J'ai  senti  redoubler  ma  flamme  : 


2q8  variantes  D^ATYS. 

Dans  ses  regards  j'ai  yu  les  cieux. 

Je  yais  posséder  Saogaride  l  etc. 

j(4 1)  Qu'avec  lui  j'ai  de  peine  à  Ceindre  ! 
Et  que  )e  plains  l'erreur  dont  il  est  si  flatté  l 
sabioAbide. 

Non ,  dispensez-vous  de  le  plaindre  : 
Il  obtiendra  le  prix  qu'il  a  bien  mérite  ! 

DUO. 

Jurons  de  nous  aimer  toiqonrs , 
De  vivre  ou  de  mourir  ensemble. 

ALXEBHAlIYEHEBrT. 

Ce  n'est  pas  pour  moi  que  je  tremble , 
Non  !  je  ne  crains  que  pour  vos  jours. 

eiisem(le. 

Jurons  de  nous  aimer  toujours, 
De  yivte  ou  de  mourir  ensemble. 

ILltebiatiVeiieKt. 

Tyrans  cruels ,  tyrans  jaloux  ! 
Hélas  \  pourquoi  séparez-vous 
Deux  coeurs  qu'un  noeud  si  doux  rassemble  ? 
Jurons,  etc. 

CTBÈLE,  avant  de  paraître. 

Perfide  Atys  ! 

ATTS. 

J'entends  Gybèle  \ 
Nous  soimnes  tcabis.  Ahl  loin  d'elle, 


Î4CTE  m,  209 

Payons  ,  s'il  eo  est  teDM  ^  éyitODS  ion  coorroi». 

SCÈNE  Y: 

(43)  CYBÈLE,  CéLéNnS,  MiLISSE. 

CTBÈIB,  Tivemeot. 
Ovi ,  Câéoos ,  Atys  adore  Saogaride. 
'     •     •     • •     •     t       , 

CTBilE.  ' 

^44)  Ici  9  <1<>D9  c«9  aimablos  lient , 
A  s'était  retiré  seul  avec  ce  qa'il  aime  ; 


CTBàLEt  à  Mélisce.     . 
(A  Gëlëims.) 
[45}  Qu'on  les  amène  ici.  Croyez-en  ma  colèfe. 

(4(>)  ciL^nus. 
épargnez  Sangarîde.  < 

CTBÈLE. 

lèpargner  ma  riTale  ! 
EQe  a  fait  mon  malheur  et  le  malheur  d'Atys^ 
Ses  yeni  ont  allumé  les  feux  qu'il  a  sentis  ;. 
Sa  cm^able  beauté  ne  m'est  que  trop  &tale!  ^ 


iS. 


3,0  VARIANTES  D'ATYS. 

SCÈNE  VI. 

CYBÈLE,  CÉLÉNUS,   ATYS,   SANGARIDE, 

PBÊTBES  DE    CYBÈLE. 

(4^)  CTBÈLE,  ironiquement, 
iVmez,  heureux  aman»,  venez,  qu'on  vous  unisse. 


(48)    QTJATtJOR*. 

▲TTS. 
Pardonnez ,  d  puissante  immortelle. 

CYBÈLE. 

Noo ,  jamais ,  non  !  couple  ingrat  et  rebelle. 

CÉIÉRUS,  à  part, 
llffalgré  moi  jVime  encor  rinûdèie. 

SANGABIDE. 

Hélas  I  Atys ,  sans  moi , 
•Vous  eût  gardé  sa  foi. 

CTBÈLE)   à  Célénus.        ^ 

Elk  a  su  plaire  ;  elle  est  trop  criminelle. 
ATT  s. 
Son  crime  est  d'être  belle. 

CEiésus,  à  part 
Elle  est  encor  plus  belle. 

SANOAniDE. 

Hélas  I  quel  excès  de  rigueur  2 


ACTE   III.  211 

ATYS,   SASGAniDE. 

A  quel  af&eux  suj^Iice 
Je  sens  livrer  mon  cceur  ! 

CTBÈLE, 

ESSEMBLC.  {    L'uD  et  l'antre  est  complice  : 
Ils  ont  percé  mon  cœor. 

cÉLÉaus, 
'A  qael  afireux  supplice 
Je  sens  livrer  mon  cœur. 

ATY8. 

Pardonnez ,  d  puissante  immortelle  l 

CTBÈI.E. 

190D ,  jamais,  non  !  conple  ingrat  et  rebelle. 

SABGAKIDE. 

Hélas  !  Atys ,  sans  moi , 
ft^oos  eût  gardé  sa  foi. 

CTBitE. 

Elle  a  su  plaire  ;  elle  est  trop  aiminelle. 
ATTS  ,  k  Sangaride. 
Ton  crime  est  d'être  belle. 

,CÉIÉSDS,  à  pari. 
Elle  est  encor  pins  belle, 
L'infidèle  ! 

8ABGARIDE  ,  à  Alys. 

Je  cause  ton  malheur. 

CYBÈLE. 

L'eflroi  qu'il  sent  pour  elle 
I^edouble  ma  fureur. 


:aïa  VARIANTES    D'ATYS. 

GÉLÉauS,  à  part. 
Je  tremble,  hélas  !  pour  oUe. 
Cjbèle  est  en  fuieur. 

ATÏS. 

OCybèle! 
TùTaiinais!  infidèle! 

SASOABIDE. 

Hélas  !  Atys ,  sans  moi  ^ 
Vous  eût  gardé  sa  foi. 

CéLÉNUS. 

Hélas!  ce  n'est  qu'à  moi 
Qu'elle  a  manqué  de  foi. 

CYBÈLE,  àCëlénus. 
Jamais  il  o'aima  qu'elle. 

ATTS,  à  Sangaride. 
Ton  crime  est  d'éire  belle  ^ 
Je  cause  ton  malbei^r. 

CÉLI^SUS. 

Son  crime  est  d'être  belle  ; 
Et  c'est  pour  mon  malheur. 

SAVGAniDE. 

Je  m'ofire  en  sacrifice. 

CTBÈLE,   à  Gëléiiu«. 

L'un  et  l'autre  est  complice. 

ATT  s. 
Qae  mon  sang  vous  fléchisse.        ' 

CYB^LE. 

Je  me  Serai  justice. 


ACTB  III.  aia 

Laissez  2  ma  justice 
Yons  Élire  uo  sacnfice. 

CASOABIDE. 

Qpe  la  mort  noos  oiiiase  j 
Qo'oo  même  instant  finiyf 
Ma  Yie  et  80O  malbeor. 

ATYS,  SABCfABIDE. 

A  quel  affîmix  supplice 
Je  sens  livrer  mon  ccear  Jl 
CiLÉvus. 

^SEMBLE.  ^    H^  I  ^^j.  ^^  g^pliç^  ^ 

Je  Taiine  avec  ardeur. 

CTBàLE. 

Aa  plus  affirenz  supplice 
Us  ont  livré  mou  cœur. 

(49)  SCÈNE  yil. 

ATYS,  ÇYBÈLE. 
&TTS  y  tenant  «ncore  à  la  raala  le  couteau  gacré» 


J- 


ai4  VARIANTES  D'ATYS. 

(5o)  SCÈNE  yiii. 

CYBÈLE,  ATYS^   MÊLISS^,   DORIS,   IDAS 

PEUPLES   DE   PHBXGIE.     ' 

LE  CHOBUB,  au  fond  du  théâtre,   en^iroiuiauit  le  corps 
de  Sangaride. 

Atts,  Atys  lui-mémfe 
Fait  périr  ce  qu'il  aime. 

C  TB  è  L  E ,   au  ^  chœur. 

éloignez  cet  objet*        '    ' 

ATYS. 

Crueb ,  ne  m'ôtez  pas 
Ce  qai  reste  de  taat  d'appas. 

'Je  veux  la  suivre  ;  je  Tadore  , 
Jusque  dans  lliorrenr  du  trépas. 
En  fussiez-vous  jalouse  encore  ^ 
Je  Y&JLX  expirer  dans  ses  bras. 

(Atys  veut  se  frapper.) 
CTBÈLE. 

Arrête  !  je  fus  trop  cruelle , 

'Arrête!  et  vis  du  moins  pour  elle^ 

Si  tu  ne  peux  vivre  pour  moi  : 
J,e  vais  la  rappeler  de  la  nuit  étemelle. 
O  Plutou  î  6  mon  fils  I  cède  aux  vœux  de  Cybèle. 
Et  toi ,  pour  qui  la  mort  va  révoquer  sa  loi , 
Revois  le  jour ,  revois  un  amant  si  fidèle. 
Je  serai  dans  les  ciçnx  moins  heureuse  que  toi. 

AXXS. 

IXenx! 


ACTE  Itl.  4r5 

SANGARIOE. 

Qui  ra{^le  au  jour  mon  ame  fugitive  Z 

ATYS    ET    SA9GABIDE. 

fAh!  vous  laissez-vous  désarmer? 

Ah  î  consentez-vous  J   q°f,i«vive, 
(   quelle  vive, 
Et  qu'elle  vive  pour  m'aimefî 
Er  que  je  vive  pour  Taîmer  ! 
CHceun.. , 
Ah  !  vous  laissez-yous  désarmer  ?, 
Ahî  consentez-vous  qu'elle  vive. 
Et  qu'elle  vive  pour  Taimer! 

cTBi:iiE. 

Cessez  de  répandre  des  larmes , 
Mortels ,  oubliez  à  jamais 
Et  ma  colère  et  vos  alarmes  ; 
He  pensez  pins  qu'à  mes  bienÊiis. 

CBtEUR. 

Cessons  de  répandre  des  larmes , 
Cjbèie.noQS  rend  ses  bienfaits. 

SCÈNE  IX. 

LES  pnÉcÉOEVS,    CELENUS. 

CÉLÉvns,  avec  sa  cour. 

Atys  ,  ne  crains  plus  ma  vengeance  : 
Cybèle  a  pardonné ,  je  pardonnue  à  mon  tour. 
C'est  aux  rois  comme  aux  dieux  d'exercer  la  clémence. 


«i6  VARIANTES  D'ATYS. 

ATT8   ET   SAHGAIIDE. 

^lébront  à  jamais ,  célébrons  ce  grand  joar. 
BendoDS  hommage  à  la  clémence  : 
Elle  a  désarmé  la  vengeance  , 
EUe  a  triomphé  de  r&moar. 

CHQEUB. 

CélâiroDB  à  jamais ,  etc. 

(Marche  de  prêtres  de  Phymen,  qui  Viennent  unir  les  deSx 
amans.) 

CHCBUB,  des  prêtres  et  du  peuple. 

Dien  da^boidiear ,  Dieu  des  plaisirs  tranqcdlles , 

Hymen  !  descends ,  viens  onir  sons  ta  loi 

Denx  vrais  amans ,  deçà  coenrs  dignes  de  toi. 

L'aimable  paix  protège  tes  asiles. 

Le  tendre  amour  repose  sur  ta  &i. 

(  Atjs  et  Sangaride  sont  unis  à  l'autel  de  l'Hymen;  et  une 
été  générale  termine  le  spectacle. 


VIS  DES  VABIASTES  D'ATTS. 


ISIS, 

TRAGÉDIE-ITWQUE  EN  CINQ  ACTES, 
PAR  SUINAULT/ 

Représentée,  pour  la  première  fois ^  le  5  janyier.  1677^ 


Grands-Opéras.  l«  19 


i 


PERSONNAGES. 


HIÉRÂX ,  amant  de  la  Kymphe  lo  »  et  frère  d'ÈjffïS, 

PIRAJÏTE ,  ami  d'Hiérax. 

10 ,  Nycdplie  ,  fille  da  flenve  loaclms ,  aimée  de  JFnp'ter  | 

persécutée  par  Jmioa,  et  reçue  enfin  au  rang  des  di- 

▼inités  célestes  sons  le  nom  disis. 
MICÈNE ,  Nymphe,  confidente  d'Io. 
MERCURE. 

diœurs  des  Divinités  de  la  teire  et  des  échos. 
Troupe  de  Divinités  de  la  terre ,  des  eaux  et  des  richesses 

souterraines. 
JUPITER. 

IRIS ,  confidente  de  Jpnon. 
JUNON. 

HÉBÉ ,  fille  de  Junon ,  et  Déesse  de  la  jeunesse. 
Choeurs-  et  troupes  des  Jeux  et  des  Plaisirs  de  k  Suite 

d'Hébé. 
Chœur  et  (roupe  de  Nymphes  de  la  Suite  de  Jonc». 
ARGUS. 

Une  Nymphe  représentant  Syrinx. 
Cbœur  et  troupe  de  Nymphes  compagnes  de  Syrinx. 
,  Un  des  Sylvains  représentant  le  dieu  Pan.  ^ 
Cliœor  et  tîonpe  de  bergers  suivans  de  Pan^. 
Cbœur  et  troupe  de  Satyres  de  la  suite  de  Pan, 
Chœur  et  troupe  de  Sylvains  suivans  de  Pan. 
ERINNIS,  furie. 
Chœur  et  uoupe  de  peuples  des  climats  glacés. 


tt20  PERSONNAGES, 

'  Deux  conducteurs  des  Ghalybes  travaillant  â  forger  raciec. 
iChœur  et  troupe  de  Chalybes. 

Suite  des  Parques.  La  Guerre ,  les  Fureurs  de  la  Guerre  , 
là  Famine ,  les  Maladies  violentes  et   languissantes  ^ 
rincendie,  llnondation,  etc. 
Les  trois  Parques. 
Chœurs  des  Divinités  célestes. 
Chœui;  et  troupe  de  peuples  d'Egypte, 


ISIS, 

TRAGÉDIE-LYRIQUE. 

ACTE  PREMIER. 

(Le  diéâlre  représente  des  prairies  agréables ,  où  le  fleave 
loachas  serpente.)  ' 


SCÈNE  I. 

HIÉRAX,  seul. 

v^ESSOBS  d'aimer  une  infidèle  ; 

Évitons  la  honte  cruelle 
ûe  servir ,  d'adorer  qui  ne  nous  aime  plus  t 
Achevons  de  briser  les  nœuds  qu'elle  a  rompus  : 
Dégageons-nous ,  sortons  d'un  si  funeste  empire. 

Hélas  l  malgré  moi  je  soupire  ! 

Ah  !  mon  cœur  !  quelle  lâcheté! 
Quel  charme  te  retient  dans  un  bontciix  martyre  \ 
Tu  D'as  pas  craint  des  fers  qui  nous  ont  tant  coûté  j 

As'tn  peur  de  la  liberté  1 

Revenez ,  liberté  charmante  *, 

Vous  n'êtes  que  trop  diligente , 
iorsqu'il  (ai;t  dans  un  cœur  faire  place  à  Tamour  ; 

19. 


.  222  ISIS. 

Mais  que  vous  êtes  lente , 
Lorsqu'un  juste  dépit  presse  votre  retour  ! 

SCÈNE  II. 

PIRANTE,  HIÉRAX. 

PIB  AS  TE. 

Ctsi  trop  entretenir  vos  tristes  rêveries  ; 
Venez ,  tournez  vos  pas  vers  ces  rives  fleuries  ; 
Regardez  ces  flots  argentés\ 
.  Qui ,  dans  ces  vallons  écartés , 
Font  briller  Témail  des  prairies  : 
Interrompez  vos  soupirs  ; 
Tout  doit  être  ici  tranquille  ; 
Ce  beau  séjour  est  Tasile 
Du  repos  et  des  plaisirs. 

BI]ÉBÂX. 

Depuis  qu'une  nymphe  incoastante 
A  trahi  mon  amour  et  m'a  manqué  de  foi , 
Ces  lieux ,  jadis  si  beaux,  n'ont  plus  rien  qui  m'encbanCe  \ 
Ce  que  j'aime  a  changé ,  tout  est  changé  pour  moi. 

PIBASTE. 

La  fille  d'Iuachus  hautement  vous  préfère  ' 
A  mille  autres  amans  de  votre  Sort  jaloux  ; 

Vous  avez  l'aveu  de  son  père , 

Par  les  tfoins  d'Argus  votre  frère  : 
La  puissante  Junon  se  déclare  pour  vous. 

HIEBAX. 

Si  l'ingratp  m'sdmait ,  je  serais  son  époux. 


ACTE  I,  SCÈNE  II.  aiS 

Celte  DjBDpbe  légère 
De  joar  en  jour  dififôre 
XJd  hymen  qu'autrefois  elle  avfiit  cru  si  doux. 

L'inconstante  n'a  pi«&  TempresseiEf  nt  extrême 
De  cet  amour  naissant  ,qm  répondait  au  mien  : 
'  Son  changement  paraît  en  dépit  d'elle-même  ; 

Je  ne  le  connais  que  trop  bien  : 
Sa  bouche  quelquefois  dit  encor  qu'elle  m'aime  ; 
Biais  son  coeur  ni  ses  yeux  ne  m'en  disent  plus  rien, 

PIBABTE. 

Se  peut-il  qu'elle  dissimule? 
'Après  tant  de  sermcns ,  ne  la  croyex-vous  pas  ? 

HIÉBAX. 

Je  ne  les  crus  ^ue  trop ,  hélas  I 
Ces  sermens  qui  trompaient  mon  cœur  tendre  et  crédule. 

Ce  fut  dans  ces  vallons,  où,  par  mille  détours, 
Inachus  prend  plaisir  à  prolonger  son  cours  ; 
Ce  fut  sur  soA  charmant  rivage 

Que  sa  ûlle  volage 
Me  promit  de  m'aimer  toujours. 
Le  zéphyr  fat  témoin ,  l'onde  fut  attentive , 
Quand  la  nymphe  jtira  de  ne  changer  jamais  ; 
Mais  le  zéphyr  léger  et  Tonde  fugitive 
Ont  enfin  emporté  les  sermens  qu'elle  a  £dts. 

Je  la  vois ,  l'infidèle. 

PIBARTE. 

Eclairclssez-vous  avec  elle. 


J 


9»4  isi^ 

SCÈNE  III. 

I.A  «YMPHE  10,  MICÈNE,  HIÉRÂX, 
CIRANTE, 

10. 

BI'aiiiËz-V0U8  ?  pois-je  m'en  ilatter?i 

BIÉBAX. 

Craelie!  eo  voulex-TOns  douter?. 

En  vain  votre  inconstance  éclate  ; 
^  vain  elle  m'anime  â  briser  tons  les  nœuds  : 

Je  vous  aime  tôiqours,  ingrate! 
^lus  que  vous  ne  voulez ,  et  plus  que  je  ne  vcost 

Je  crains  un  funeste  présage. 
|Jn  aigle  dévorant  vient  de  fondre,  à  mes  yeux , 

Sur  un  oiseau  qui,  dans  ces  lieux , 

M'entretenait  d'un  doux  ramage. 
Piffécez  notre  bymen ,  suivons  l'avis  des  cieuz. 
BiÉnAx. 

ISfotre  bymen  ne  déplaît  qu'à  voire  cœur  volage  : 
Répondez-moi  de  vous ,  je  vous  réponds  des  Pieux. 

(Vous  juriez  autrefois  que  cette  onde  rebelle 
6e  ferait  vers  sa  source  une  route  nouvelle  , 
Plutôt  qu'on  ne  veiraît  votre  cœur  dégagé  : 
Voyez  couler  ces  flots  dans  cette  vaste  plaine  ; 
C'est  le  même  pencbant  qui  toujours  les  entraîne  ; 
J^tvti  cours  ne  cbange  point,  et  vous  avez  cbangé, 


^      ACTE  I,  SCÈNE  !ll.  aa5 

10. 

Laissez-moi  revenir  de  mes  frayeurs  secrètes  ; 
J'attends  de  votre  amour  cet  efibrt  généreux. 

HléBA3L 

7e  veux  ce  qui  vous  plaît,  craelle  que  vous  êtes! 
Yous  o'dbosez  qae  trop  d'mi  amour  malheureux. 

10. 

Non  ;  je  vous  aime  encor. 

Quelle  firoideur  extrême  ! 
locoDStante  !  est-ce  ainsi  qu'on  doit  dire  qu'on  aime  ? 
lô. 
C'est  à  tort  que  vous  m'accusez  ; 
Vous  avez  vu  toujours  vos  rivaux  méprisés. 

BléBAX. 

Le  mal  de  mes  rivaux  n'égale  point  ma  peine  ; 
La  douce  illusion  d'une  espérance  ^ine 
Ve  les  fait  pomt  tomber  du  faite  du  bonheur  ; 
'Aucun  d'eux ,  comme  moi,  n'a  perdu  votre  cœur  : 

Comme  eux,  â  votre  humeur  sévère 

Je  ne  suis  point  accoutumé. 

Quel  tourment  de  cesser  de  plaire , 
Lorsqu'on  a  fait  fessai  du  plaisir  d'être  aimé  ! 

Je  ne  le  sens  que  trop ,  votre  cœur  se  détache , 
Et  je  ne  sais  qui  me  l'arrache^ 
Je  cheidie  en  vain  l'heureux  amant 
Qui  me  dérobe  un  bien  chaïmant , 
Où  j'ai  cru  devoir  seul  prétendre  : 
Je  septirais  moins  mon  tourment , 
Si  je  trouvais  à  qui  m'en  prendre. 


d26  ISlSi 

Vous  ftiyez  mes  regards ,  tous  ne  me  dites  rien  • 
Il  faut  vous  délivrer  d'un  fôcbenx  entretien  :  ^ 
Ma  présence  vous  blesse,  et  c'est  trop  vous  contraindre^ 

10. 

laloux,  sombre  et  chagrin,  partout  où  je  vous  vois, 
Vous  ne  cessez  point  de  vous  plamdre  : 

Je  voudrais  vous  aimer  autant  que  je  le  dois  : 
Et  vous  me  forcez  à  vous  craindre, 

10    ET    HIÉBÂX. 

Non ,  il  ne  tient  qu'à  vous 
De  rendre  notre  sort  plus  doux. 

10. 

Non ,  il  ne  tient  qu'à  vous 
De  rendre 
Mon  cœur  plus  tendre. 

.  -  HIÉBAX. 

Non ,  il  ne  tient  qu'à  vous 
De  rendre  mon  cœur  moins  jaloux. 
10  ET  BiinAx. 

Non ,  il  ne  tient  qu'à  vous 
De  rendre  noire  sort  plus  doux. 

SCÈNE    IV. 

10,  MICÈNE. 

MICÈBE. 

Ce  prince  trop  long-tems  dans  ses  chagrins  s'obstine. 
On  pardonne  au  premier  transport 


ACTb  1,  5i;£IIC  IT.  337 

I/bb  BBÊUim.  qra  9e  pbiot  à  toct, 
£t  <fâ  snsnîsoQ  semaâne^ 
Masàbfia 
Oo  stwè^not 
Coolie  OB  Mttow  chagrai. 

lO. 

Je  ym  bien  te  patler,  enfio ,  sams  artifice; 
Ce  prince  infortnoé  s'alanne  avec  jostke. 
Le  maître  sooveraîo  de  la  tetre  et  des  cienx 

Entreprend  de  plaire  k  mes  yeux  : 
Dd  ccenr  de  Jnpker  F  Amour  m'ofl&e  Tempire; 

Meicore  est  vena  me  le  dire  ; 
le  le  vois  diaqne  joor  descendre  dans  ces  lieux. 
MonoŒor,  aotant  qo'il  pent,  Êdt  toojoms  résistance; 

Et ,  pour  attaquer  ma  constance , 
Il  ne  fallait  pas  moins  que  le  plos  grand  des  dieux. 

On  écoute  aisément  Jupiter  qui  soupire; 
Cest  un  amant  qu'on  n'ose  mépriser; 
Et  du  plus  grand  des  cœurs  le  glorieux  empire 
Est  difficile  à  refuser. 

10. 
Lorsqu'on  me  presse  de  me  rendre 
-     'Aux  attraits  d'un  amour  nouveau , 
Plus  le  charme  est  puissant,  et  plus  il  serait  beau 

De  pouvoir  m'en  défendre. 
Quoi!  tu  veux  me  quitter!  d'où  vient  ce  sob  (tressant? 

MICÈBIE. 

Cest  pour  vous  seule  ici  que  Mercure  descend. 


.< 


aaS  ISIS. 

SCÈNE  y. 

MERCURE,  10,  ÇHGCDB  de9  divinités  de  la 

TEIVnE    ET    CHOEB  DES  ÉCHOS. 

M  E  n  c  U  n  E ,  sur  un  nuage. 
■Le  Dieu  puissant  qui  lance  le  tonnerre, 
Et  qui  des  cieux  fient  le  sceptie  en  ses  mains , 
!A.  résolu  de  venir  sur  If  terre 
Chasser  les  maux  qui  troublent  les  humains. 
Que  la  terre  avec  soin  â  cet  honneur  réponde  : 
Echos,  retentissez  dans  ces  lieux  pleins  d'appas ;^ 
Annoncez  qu'aujourd'hui ,  pour  le  bonheur  du  monde ,' 

Jupiter  descend  ici  bas. 
(  Les  cbœurs  répètent  les  quatre  derniers  Ters  dans  le  tera» 
que  Mercure  descend  sur  la  terre.) 

M  £  iC  C 17  B  E  ,  parlant  à  lo. 
.C'est  ainsi  que  Mercure, 
Pour  ^Qser  des  dieux  jaloux, 
Doit  parler  hautement  â  toute  la  nature  ; 
Mais  il  doit  s'expliquer  autrement  avec  vous. 

Cest  pour  vous  voir,  c'est  pour  vous  j^airé, 
Que  Jupiter  descend  du  céleste  séjour  ; 
EV  les  biens  qu'ici  bas  sa  présence  va  faire 
Ne  seront  dus  qu'à  son  amour. 

10. 

Pourquoi  du  haut  des  cietix  ce  dieu  veut-il  descendre  ?. 
Mes  vœux  sont  engagés,  mou  cœur  a  fait  un  choix ^ 

L'Amour  tôt  ou  tard  peut  prétendre 
Que  tous  les  cœurs  se  rangent  sous  ses  lois  : 


ACTE  I,  SCÈNE  VI.  a29 

C'est  un  hommage  qu'il  faut  rendre  ; 
Mais  c'est  assez  de  le  rendre  une  fois. 
medcuhe. 
Ce  serait,  en  aimant,  une  contrainte  étrange  i 
Qu'on  cœur,  pour  mieux  choisir,  n'osât  se  dégager  : 
Quand  c'est  pour  Jupiter  qu'on  change , 
11  n'est  pas  honteux  de  changer. 
Que  tout  Tunivers  se  pare 
De  ce  qu'il  a  de  plus  rare , 
Que  tout  brille  dans  ces  lieux  : 
Que  la  terre  partage 
L'éclat  et  la  gloire  des  cieux, 
Que  tout  rende  hommage 
^ka.  plus  grand  des  Dieux. 

SCÈNE  yi. 

(Les  Divinités  de  la  terre»  des  eaux  et  des  riHinsses  soiHcr- 
raines  Tiennent,  magnifiquement  pzxàty,  pour  recevoir 
Jupiter  et  pour  lui  rendre  hommage.) 

CHCeUB   DE   DIYlUlTés. 

Que  la  terre  partage 
L'éclat  et  la  gloire  des  cieux; 
Que  tout  rende  horomage 
Au  plus  grand  des  Dieux. 

(Vingt<piatre  Di-sinitds  chanUnt{  huitDivinitd»  de  la  lerri>; 
huit  Divinités  des  eaux  ;  huit  Divinités  des  richesses  sou- 
terraines.) 

((Douze  Divinités  dttnsanfes*,  quatre  Divinités  do  la  terre  ; 
quatre  Divinités  des  eaux  i  quatre  Divinités  des  rie  Iio&^cs 
souterraines.) 
Grandf-Opéras.  i.  .20 


a32  ÏSIS. 

Qu'un  nuage  vous  environne  : 

Belle  nyn^he ,  rassurez-vous. 

Je  vous  aime,  et  pour  vous  le  dire, 
3  e  sors  avec  pisdsir  de  mon  suprême  empire. 
La  fondre  est  dans  mes  mains ,  les  dieux  me  font  la  cour  i 
3e  tiens  tout  l'univers  sous  mon  obéissance  ; 

Mais,  si  je  prétends  en  ce  jour 
Engager  votre  cœur  à'  m'aimer  h  son  tour, 

Je  fonde  moins  mon  espérance 

Sur  la.  grandeur  de  ma  puissance^ 

Que  sur  l'excès  de  mon  amour. 

10. 

Que  sert-il  qu'ici  bas  votre  amour  me  clioisisse  ? 
L'honneur  m'en  vient  trop  tard  ;  j'ai  formé  d'autres  nœuds  : 
Il  Êdlait  que  ce  bien,  pour  combler  tous  mes  voeux, 

fte  me  coûtât  point  d'injustice , 

Et  ne  fît  point  de  malBeureux. 

JUPITER. 

C'est  une  assez  grande  gloire 
Pour  votre  premier  vainqueur, 
D'être  encor  dans  voire  mémoire , 
Et  de  me  disputer  si  long-tems  votre  cœur. 

10. 

La  gloire  doit  forcer  mon  cœur  d  se  défendre. 
Si  vons  sortez  du  ciel  pour  chercher  les  douceurs 

D'un  amour  tendie , 
Vous  pourrez  aisénient  attaquer  d'autres  cœuis, 
Qui  feront  gloire  de  se  rendre. 

JUPITEIt. 

Il  n'est  rien  dans  les  cicux ,  il  n'est  rien  ici  bas 


"•«CTE  II,  SCÈNE  n.  a33 

De  si  cfaamiant  que  vos  appas  : 
Rien  ne  peat  me  toadier  d'une  flamme  si  Ibrte  ; 

Belle  Nympbe,  vous  l'emportez 
Sor  les  «atres  beautés, 

yUuant  que  Jopiter  l'emporte 

Sur  les  antres  dimités. 
.Verrez-vons  tant  d'amour  avec  indifférence  7-, 
Qud  trouble  vous  saisit^  où  toumez-Toos  yos  pts  ?. 

10. 

Mon  cœur  eiv  votre  présence 
Fait  trop  peu  de  résistance  : 

Contentez-vous ,  hélas  ! 

D'étonner  ma  constance^ 

Et  n'en  triomphez  pas. 

JUPITEIt« 

Eh!  pourquoi  craignez-vous  Jupiter  qui  vous  aime  ? 

10. 

Je  crains  ^out,  je  me  crains  moi-même. 

JUPITEII, 

Quoi  !  voulez-vous  me  fuir  ?. 

10. 

C'est  mon  dernier  espoir.  ^ 

JUPITEB. 

doutez  mon  amour. 

10. 

écoutez  mon  dev<Mr. 

7UP1TES. 

Vous  avez  un  cceur  libre ,  et  qui  peut  se  définidre! 

10. 

Hon  ;  vous  ne  laissez  pas  mon  coeuc  eu  mon  pouvoir. 


a36  ISIS. 

MEUCDUE. 

Si  je  fais  ma  première  afiàire 
De  vous  voir  «t  de  vous  plaire  ? 

IBIS. 

Je  ferai  mon  premier  devoir 
De  vous  plaire  et  de  vous  voir. 
meucube. 
Vn  cœur  fidèle 
A  pour  moi  de  charmans  appas  : 
Vous  avez  mille  at^its ,  vous  n'êtes  que  txop  beUe  ; 
Mais  je  crains  que  vous  n'ayez  pas 
Un  cœur  iidèle, 

IBIS. 

Pourquoi  craignez-vous  tant 

Que  mon  cœur  se  dégage  ? 
Je  vous  permets  d'être  inconstant , 
Sitôt  que  je  serai  volage. 

M'EBCUBE   ET    IBIS. 

Promettez-moi  de  constantes  amours.; 
Je  vous  promets  de  vous  aimer  toujours. 

MEBCUBE. 

Que  la  feinte  entre  nous  finisse. 

IBIS. 

Parlons  sans  mystère  en  ce  jour. 

MEBCUBE    ET    IBIS.   ., 

Le  moindre  artifice 
Offense  l'Amour. 

IBIS. 

Quel  soin  presse  ici  bas  Jupiter  àc  descendre  l 


'ACTE  II,  SCÈNE  V.  237 

MEDCUnE. 

Le  seal  bien  des  mortels  lai  fait  quitter  les  cieux. 
Mais  qael  soupçon  nouveau  Junon  peut-elle  prendre  ?. 
Me  saiYi^*ellQ  point  Jupiter  en  ces  lieux  l 

mil. 
Dans  les  jardins  d'Hébé  Junon  vient  de  se  rendre. 
(  Junon  paAit  au  milieu  d'un  nuage  ^  s'avance.  ) 
MEBCUSE. 
Un  nuage  enir'onvert  la  découvre  à  mes  ytax» 

Iris  parle  ainsi  sans  mystère  ? 
Cest  ainsi  que  je  puis  me  fier  à  sa  foi  ?, 

IBII. 

Ve  me  reprochez  pas  que  je  suis  peu  sincère  ;' 
yoos  ne  ré(es  pas  plus  que  moi. 

MERCUBE   ET  IBIS. 

Gardez  pouc  quelque  autre 
yotre  amour  trompeur  • 
Je  reprends  mon  coeur , 
Reprenez  le  vdtre. 
(  Le  nuage  s'approche  de  terre,  et  Junon  descend.  ) 

SCÈNE  V- 

JUWON,  IRIS. 

IRIS. 

)'ai  cherché  vainement  la  fille  d'Inachus. 

2UVOV. 

'Ah  !  je  n'ai  pas  besoin  d'en  savoir  davantage. 
Non  2  Iris ,  ne  la  cherchons  plus. 


23a  ISIS. 

Jupiter ,  dans  ces  lieux,  m'a  donné  de  i'ombi:age |[ 

J'ai  traverse  les  airs ,  j'ai  percé  le  naage 

Qu'il  opposait  à  mes  re^ds  :  \ 

Mais  en  vain  j'ai  tourné  les  yeux  de  toutes  parts  i 

Ce  Dieu ,  par  son  pouvoir  suprême , 

M'a  caché  la  Nymphe  qu'il  aime , 
Et  ne  m'a  laissé  voir  que  des  troupeaux  épars. 
Non,  non  ;  je  ne  suis  point  une  crédule  épouse , 

Qu'on  poisse  tromper  aisément  : 
Voyons  qui  feindra  mieux  de  Jupiter  amant , 

Ou  de  Junon  jalouse. 
11'  est  maître  des  cieux ,  la  terre  suit  sa  loi  ; 
Sous  sa  toute  puissance  il  faut  que  tout  fléchisse  : 
Mais  puisqu'il  ne  prétend  s'armer  que  d'artifice , 
Tout  Jupiter  qu'il  est  >  il  est  moins  fort  que  moi. 
Dans  ces  lieux  écartés ,  vois  que  la  terre  est  belle  f 

mis. 
Çlle  honore  son  maître ,  et  brille  sou^  ses  pas. 
juaoïr. 

L'Amour,  cet  Amour  infidèle, 

Qui  du  plus  haut  des  cieux  l'appelle 

Fait  que  tout  lui  rit  ici  bas. 

Près  d'une  maîtresse  nouvelle , 
Dans  le  fond  des  déserts  on  trouve  des  appas , 

Et  le  ciel  même  ne  plaît  pas 

Avec  une  épouse  immortelle. 


ACW  jll,  SCENE  VI.  239 

,    SCÈNE   VI- 
jtjpi;ter,  junon,  mercure,  iris. 

JUPITEB. 

Dahs  les  jardins  d'Hébé  vons  deviez  en  ce  jour 
D'une  Donvelle  nymphe  augmenter  votre  coar. 
Quel  dessein  si  pressant  dans  ces  lieux  vous  amène? 

7t7S05. 

Je  ne  vous  suivrai  pas  plus  loin. 
Je  viens  de  votre  amour  attendre  un  nouveau  soin. 
Ne  vons  étonnez  pas  qu'on  vons  quitte  avec  peine , 
Et  que  de  Jupiter  on  ait  toujours  besoin  : 
Vous  m'aisiez ,  et  j'en  suis  certaine. 
yupiTEB. 
Souhaitez ,  je  promets 
iQue  vos  voeux  seront  satisfaits. 

JUBOH. 

J'ai  Eût  choix  d'une  nymphe ,  et  déjà  la  déesse 
De  l'aimable  jeunesse 
Se  prépare  à  la  recevoir  ; 
Mais  je  n'ose ,  sans  vous ,  disposer  de  personne  : 
Si  j'ai  quelque  pouvoir, 
Je  n'en  prétends  avoir 
Qu'autant  que  votre  amour  m'en  donne. 
Ce  don  de  votre  main  me  sera  précieux. 

JUPITEIt. 

9'approove  Vos  désirs ,  que  Vien  n'y  soit  contraire. 
Mercure ,  ayez  soin  de  lui  plaire , 


24o  "    ISIS. 

Et  portez  â  son  gré  mes  ordres  en  tous  lieux  ; 
Que  tont  suive  les  lois  de  la  reine  des  cieui. 

MCnCUBE  ET   IBIS. 

Ouc  tout  suive  les  lois  de  la  reine  des  cieux. 

JUPITEB. 

Parlez ,  que  voire  choix  hautement  se  déclare,     x 

^  JUBOS. 

La  nymphe  qui  me  plaît  ne  vous  déplaira  pas  ; 

Vous  ne  verrez  point  ici  bas 
De  mérite  plus  grand ,  ni  de  beauté  plus  rare  : 

Les  honneurs  que  je  lui  prépare 
Ne  lui  sont  qnç  trop  dus  : 
Enfin ,  Junon  choisit  la  fille  d'Inachus. 

JUPITEB» 

La  fille  d'Inachus  l 

JUSDN. 
Déclarez-vous  pour  elle. 
Peut-on  voir  à  ma  suite  une  nymphe  plus  belle  ^ 

Plus  capable  d'orner  ma  cour , 
Et  de  marquer  pour  moi  le  soin  de  votre  amour  ?i  ' 
Vous  me  Tavez  promise ,  et  je  vous  la  demande. 

JUPITEB. 

Vous  ne  sauriez  combler  d'une  gloire  trop  grande 
La  nymphe  que  vous  choisissez. 
Junon  commande; 
Allez ,  Mercure ,  obéissez. 

IBIS. 

Junon  commande; 
Allez,  Mercui^,  obéissez. 


ACTE  II,  SCÈKE  VIT.  a4n 

SCÈNE  yii, 

(Le  théâtre  change  et  reprësonle  les  jardins  d'^bc ,  ddesse 
de  la  jeunesse.) 

HÉBE,  TROUPE  DE  ÏE1Î!L  ET  DE  PI.Al»IB8,  TROUPE 

DE  STMPHES  de  la  suite  de  Jnnon. 

(Six  Nymphes  de  Junon  suivantes}  vingt-quatre  Jeux   et' 

Plaisirs  chantant  ;  neuf  Jeux  et  Plaisirs  dansant.) 

(De«  Jeux  et  des  PJoisirs  s'avancent  en  dansant  devant  la 

déesse  Hébé.) 

HÉBÉ* 

Les  Plaisirs  les  pljos  doux 

Sont  faits  pour  la  jeunesse. 

Venez,  Jeux  cbarmaust,  venez  tous; 

Gardez^Tous  bien  d'amener  avec  vous 

La  sévère  Sagesse. 

Les  Plaisib  les  plus  doux 

Sont  faits  pour  la  jeunesse. 

Fuyez,  fuyez ^  sombite  Tristesse; 

Noirs  Chagrins,  fuyez  loin  de  nous; 

Vous  êtes  destinés  i)our  Tafireuse  vieillesse. 

Les  Plaisôrs  les  plus  doux 

Sont  faits  pour  la  jeunesse: 

(Le  chceur  répèle  les  deux  "derniers  vers.) 

(  Les  Jeux ,  les  Plaisirs  et  les  Nymphes  de  Junon  se  diverlis" 
sent  par  des  danses  et  par  des  chansons,  en  attendant 
la  nouvelle  nymphe  dont  Junon  veut  faire  choix.) 

DEUX   flYMPHES   CHABITE1IT   ESSEMBLE. 

Aimez,  profiitez  du  tems, 
CTrands-Opéras*  l.  ftli 


2^2 


Jeunesse  charmante  ; 
Rendez  vos  clésirs  contcns. 
Toat  tit,  tout  enchante] 
Dans  les  plus  beaux  ans. 
L'Amour  vous  éclaire , 
Marôhez  sur  ses  pas  ; 
Cherchez  à  vous  (aire         , 
Des  nœuds  pleins  d'appas  : 
Que  vous  sert  dé  plaire, 
Si  vous  n'aimez  pas? 

Pourquoi  craigncz-vons  d'aimer, 
Beautés  inhumaines? 

Cessez  de  vous  alarmer? 
L'Amour  a  des  peines 
Qui  doivent  charmer. 
Ce  Dieu  vous  éclaire , 
Marchez  sur  ses  pas; 
Cherchez  à  vous  faire 
Des  nceuds  pleins  d'appas  : 
Que  vous  sert  de  plaire , 
Si  vous  n'aimez  pas  ? 

LE   CHOEUR. 

Que  ces  lieux  ont  d'attraits! 
GoAtons-en  bien  les  charmes; 
L'Amour  n'y  fait  jamais 
Verser  de  tristes  larmes; 
Les  soins  et  les  alarmes 
N'en  troublent  point  la  paix. 
Jouissons  dans  ces  retraites 
Des  douceurs  les  plus  parfaites: 


ACTE  II,  SCÈNE  Vin.  24a 

Suîvez-noas,  dwmviiis  Pbisirs* 

Comblez  tous  nos  dé$irs; 

Voyons  couler  ces  eaux 

Dans  ces  riaos  bocages  j 

Chantez,  petits  oiseaux, 

Chantez  sous  ces  feuillages  ; 

Joignez  vos  doux  ramages 

A  nos  concerts  nouveaux. 
Jouissons  dans  ces  retraites 
Des  douceurs  les  plus  parfaites  : 
Suivez-nous,  cbarmans  Plaisirs; 

Comblez  tous  nos  désirs. 

SCÈNE  VIII. 

10,  MERCURE,  IRIS,  HÉBÉ,  les  jeux',  les 

PLAISIBS;    TBOUP£   DE  SïMPBEtt    DE    LÀ    SUITE 

DE  juaoïr. 

MEBCUBE  ET  IBIS,  conduisant  lo. 

Servez,  Nymphe,  servez,  avec  un  soin  fidèle ^ 
La  puissante  reine  des  cieux; 
Suivez  dans  ces  aimables  lieux 

La  jeunesse  immortelle; 
Tout  plaît  et  tout  rit  avec  elle. 

(Hébé  elles  Nymphes  reçoirenl  lo.) 
S  É  B  É  et  le  chœur  des  Nymphes  * 

Que  c'est  un  plaisir  chaimaut 
D'être  jeune  et  belle! 


a44       ISIS.  ACTE  ÎI,  SCÈNE  VIU. 
Triomphons  à  toat  moment 
D'une  conquête  nouvelle. 
Que  c'est  un  plaisir  chaimant 
D'éîre  jeune  et  belle  ! 


Fin  DU  SECOSD   ACTE. 


ACTE  TROISIÈME. 


Le  théâtre  change  et  roprtseiite  le  solhade  ou  Argus 
fait  sa  demeure ,  près  d'un  lac  et  au  oûUea  d'une 
foréi. 


SCÈNE   I. 

ARGUS,  lO. 


MJasb  ce  solitaire  s^oor 
.Voos  êtes  sous  ma  garde ,  et  Innon  vou^  y  laisse  : 
nies  yeux  veilleront  loor-à-tour , 
Et  vous  observeront  sans  cesse. 

10. 

Est-ce  là  le  bonheur  que  Junon  m'a  promis? 
Argus ,  apprenez-moi  quel  crime  j'ai  commis. 

ABGUS. 

Vous  êtes  aimable  ; 
Vos  yeux  devaient  moins  charmer  ; 

Vous  êtes  coupable 
De  vous  faire  trop  aimer. 

10. 

Ne  me  dêçiisez  rien  ;  de  quoi  m'accuse-t-eUe  ? 
Quelle  offense  k  ses  yeux  me  rend  si  criminelle  ? 


J 


a'iG  ISIS. 

fie  pourrai-je  apaiser  son  funeste  courroux  ?i 

ABGUS. 

Cest  une  oSbdsc  cruelle 
De  paraître  belle 
A.  des  yeux  jaloux. 
L'amour  de  Jupiter  a  trop  paru  pour  vous. 

lO. 

Je  suis  perdue,  d  ciel!  si  Junon  est  jalouse. 

ABGUS. 

On  ne  plait  guère^à  l'cpouse, 
Lorsqu'on  plaît  tant  à  Tépoux.  • 

Vous  n'en  serez  pas  mieux  d^être  ingrate  et  volage  ^ 
Vous  quittez  un  fidèle  amant , 
Pour  recevoir  un  plus  brillant  hommage  ; 
Mais  c'est  un  avantage 
Que  vous  paîrcz  chèrement. 
Vous  n'eu  serez  pas  mieux  d'être  ingrate  et  vohge. 

y  ni  l'ordre  d'enfermer  vos  dangereux  appas  ^ 
La  déesse  défend  que  vous  voyez  personne. 

10. 

Aux  rigueurs  de  Junon  Jupiter  m'abandonne  : 
Non ,  Jupiter  ne  m'aime  pas. 

(Argus  enferme  lô.) 


ACTE  1 11,  SCÈNE  II.  u^'j. 

SCÈNE  II. 

HIÉRAX,  ARGUS. 

/ 
uiÉn  Ax ,  voyant  lo  qui  entre  dans  la  demeure  d'Argus. 

La  peifide  craint  ma  présence  j 

Elle  me  fuit  eu  vain,  et  j'irai  la  chercher.... 

AnGUS,  arrêtant  fliérax. 

Non. 

BiésAx. 

Laissez-moi  lui  reprocher 

Sa  cruelle  inconstance. 

ABGUS. 

Non ,  on  ne  la  doit  pomt  voir. 

HIÉBAX. 

Quoi  !  Junon  me  .devient  contraire  l 

ABGUS. 

L'ordre  est  exprès  pour  tous  ;  perdez  un  vain  espoir. 

aiÉBAx. 
L'amitié  fraternelle  a  si  peu  de  pouvoir  l 

An  G  us. 
Non ,  je  ne  connais  plus  ni  d'ami ,  ni  de  frère  ^ 

Je  ne  connais  que  mou  devoir. 
Laissez  la  Nymphe  eu  paix ,  ce  n'est  plus  vous  qu'elle  aime. 

HIËBAX. 

Quel  est  l'heureux  amant  qui  s^en  est  fait  aimer  ? 
Mommez-le  moi. 


J 


348  ISIS. 

AIGUS. 

Tremblez  k  l'entendre  nommer  ; 
Cest  un  dka  toat-poissant,  c'est  Jupiter  lui-même. 

BIÉBAX. 

O  Dieuil 

ABGUS. 

DégBgez-<TOns  d'un  amour  si  fatal  { 
Sons  balancer,  il  faut  vous  y  résoudre  : 
C'est  un  redoutable  rival 
Qu'un  amant  qui  lance  la  fixidre. 

■  liBAX. 

Dieux  tottt-pnissads!  ah!  vous  étiez  jaloux 
De  la  Célicité  que  vous  m'avez  ravie  ! 

Dieux  tout-pttissansi  ah  !  vous  étiez  jaloux 
De  me  voir  plus  heureux  que  vous  !* 
•Vous  n'avez  pu  soufirir  le  bonheur  de  ma  vie , 

Et  je  voyais  vos  grandeurs  sans  envie  : 
3'aimais ,  j'étais  aimé  ;  mon  sort  était  trop  doux. 

Dieux  tout-puissans  !  ah  !  vous  étiez  jaloux 
De  la  félicité  que  vous  m'avez  ravie  ! 

Dieux  tout-puissans  !  ah  !  vous  étiez  jaloux 
De  me  voir  plus  heureux  que  vous  l 

ABGUS. 

Heureux  qui  peut  briser  sa  chaîne  l 
Fimssez  une  plainte  vaine  i 
Méprisez  TmEdélité  : 
.Un  cœur  ingrat  vaut-il  la  peine 

D'être  tant  regretté?. 
Beutenx  qui  peut  briser  sa  chaîne  S 


ACTE  III,  SCÈNE  IIL  249 

B1<BAX   BT   AIGUS. 

Henreox  qui  pei|t  briser  sa  chaîne  ! 

AB6VS. 

Liberté,  liberté! 

SCÈNE  III. 

ARGUS,  HI£RAX,  UB£  ifMfHE  qui  représente 
STBmx;  uonpe  de  STifFHES  eq  habit  de  cbssie;  la 
«TMPBB  SYAlffX;  boit  «TMfBES  compagnes  de 
STBiBS,  chantaotes^  quatre  tatrus  htmphes  chan- 
tantes; sis  aTMfHBs  oompagoei  de  sxBtsz,  dan- 


STBISt,   (ShCBUB  de   qyifPHEI. 

LiBEBri,  liberté? 

(Uae  partie  dej  Nymphes  dame  dans  U  tcms  que  les  autres 
dianient.  ) 
ABavs  ET  UII^BAS, 

^l^oelles  danses  1  quels  chants  !  et  quelle  nouveauté  S 

STBIBX  ET   LES  fVMPBES. 

S'il  est  quelque  bien  au  monde, 
Cest  la  liberté. 

ABOOS  ET   BlénAZ. 

i^e  Toulex-yousî 

CBOBUB  DE   HTMPBEi. 

Liberté,  liberté! 

ABGUS   ET    BlÉBAX. 

Que  Toulei-Tous  ?  il  (aut  qu'on  nous  réponde. 


25o  ISIS, 

SYBISX   ET   tES    BYMPHES. 

S'il  est  quelque  bien  au  mondé. 
C'est  la  liberté. 

SCÈNE  IV. 

ARGUS,  HIÉRAX,  SYRINX,  MERCURE,  dé- 
guisé eu  berger,   tboupe  de  hymphes,  tboupc 

DE   BEBGERS,  TBOUPE  DE   SATYfiES| TBODPE    DE 
STtVAlSS. 

UEBCVBB,   CHCBUB   DE   BTBtPBES,  DE   BEBGEBS,  £:c 
DE  STLVAIRS. 

LiBEBTi,  liberté! 
UEBCDRE)  déguisé  en  berger,  parlant  il  Argus. 
De  la  nymphe  Syrinx  Pao  chérit  la  mémoire  { 
U  en  regrette  encor  la  perte  chaque  jour  : 

Pour  célébrer  une  fête  h  sa  gloire , 
t     Ce  dieu  lui-méioe  assemble  ici  sa  ^|pr  ;    * 
11  veut  que  du  malheur  de  sou  Edèle  amour 
Un  spectacle  touchant  représente  Thistoire. 

ABGDS. 

C'est  un  plaisir  pour  nous ,  poursuivez ,  j'y  consens  { 

Je  ne  m'oppose  point  â  des  jeux  innocens. 

(  Argus  Va  prendre  place  sur  un  siège  de  gazon  proche  de 
l'endroit  oh  lo  e^t  enfermée  «  et  fait  placer  Hiérax  de 
l'autre  côté.  ) 

HEB  CVBE ,  parlant  à  part  à  toute  la  troupe  qu'il  conduit. 

Il  donne  dans  le  piège  ;  achevez ,'  sans  remise , 

Achevez  de  surprendre  Argus  et  tous  ses  yecut  : 

Si  voas  tentez  une  grande  entreprise  , 


ACTE  ÎII,  SCÈNE  V.  25i 

MercnrB  voos  conduit,  TAmonr  vons  favorise , 

Et  voas  servez  le  plu»  paissant  des  Dieux. 
(Mercure  ,  les  liergers,  les  satyres  et  les  syl vains  rentrent 
derrière  le  théâtre.  ) 

SCÈNE  V.^ 

ARGUS,  HIÉRAX,  SYRITïX,  tboupe  de 

HTMPHES. 
STUIlfX  ET   LE   CHOEUR   DES   IITIIPHES. 

XiBEBTé ,  liberté  ! 
S'il  est  quelque  bien  an  monde , 
C'est  la  liberté. 
Liberté ,  liberté  ! 

STniEIX. 

l'empire  de^  l'Amour  n'est  pas  moins  agité 
Que  l'empire  de  l'onde  : 
Ne  chercbons  point  d'autre  félicité 
Qu'un  doux  loisir  dans  une  paix  profonde. 

STBIflX  ET   LE   CHCBU». 

SU  est  oMlqae  bien  au  monde , 

C'est  la  liberté. 

Liberté,  liberté! 

(  Dans  le  iems  qa*une  partie  des  Nymphes  chante ,  le  reste 
de  la  troupe  danse.  ) 


f 


aSz  ISIS. 

SCÈNE  .VI. 

ARGUS,  HIÉRAX,  SVRINX,  Tnoupt  de  vrïn^ 

PflESi  OV  DES  STLVAIUS  BEPIlésEVTASt  LE  DIED 
Pin;  TBOUPE  DE  BEH&EBS  ,  TROUPE  DE  8A» 
TYBES,   TBOfJPE   DE    STLVAIEIS. 

(  Les  bergers  et  des  sylvains  dansant  et  chaulant  viennent 
offrir  des  présens  de  fruits  et  de  fleurs  à  la  nymphe  Syrinx, 
et  tâqlient  de  lui  persùad-  r  de  n'aller  point  à  la  chasse  et 
de  s'engager  sous  les  lois  de  l'Amour.  } 

(  Douce  Satyres  chantant  et  rortant  des  présens  à  Syrinx  i 
qautre  Satyres  jouant  de  la  flûte;  douce  bépgers  porUmi  des 
présens  à  Syrinx  ;  quatre  bergers  jouant  de  la  flûte;  quatre 
Sylvains  dansant  i  quatre  iergers  héroïques  dansant  ;  deux 
bergers  chantant.  ) 

Quel  bien  derez-vous  Attendre , 
Deauté ,  qui  chassez  dans  ces  bois  ? 

Que  poayez-rous  prendre 

Qui  vaille  un  cœnr  tendre 

.Soumis  à  vos  lois  ? 

Ce  n'est  qu'en  aimant 
Qu'on  trouve  un  sort  charmant. 
Aimez  en&n  à  votre  tour  ; 
Il  Ëiut  que  tout  cède  à  TAmoar  : 
Il  sait  frapper  d'un  coup  certain 
Le  cerf  léger  qui  fuit  en  vain  ; 
Jusque  dans  les  antres  secrets , 
Au  fond  des  forêts , 

Tout  doit  sentir  ses  traits. 


S 


Lorsque  l'Amour  vous  appelle , 


I 


I 


5àCTE  III.  SCÈNE  VI.  j^ 

PoorqDoi  foyez-vons  ses  plaisirs?. 
La  tose  uoavelle 
N'en  est  que  plus  belle 
D'aimer  les  zéplijrs: 
Ce  n'est  qu'en  aimant 
Qu'on  trouve  un  sort  cbarmant. 
^Aimez  enfin  â  votre  tour; 
Il  Bmt  que  tout  cède  à  l'Amenr: 
II  sait  frapper  d'un  coup  certain 
liC  cerf  léger  qui  fuit  en  vain: 
Jusque  dans  les  antres» secrets. 
Au  fond  des  forêts , 
Tom  doit  sentir  ses  traits. 
PAN. 

Je  vous  aime,  Nymphe  charmante- 
Un  amant  immorte!  chercbe  à  plaire  à  tos  ywa. 

SYniNX. 

Pan  est  un  dieu  puissant  ;  je  révère  les  Dieux  ; 
Mais  le  nom  d'amant  m'épouvante. 
PAV. 
Pour  fiiire  trouver  le  nom  d'amant  pkis  doux 

J'y  joindrai  le  titre  d'époux.  i 

Je  n'aurai  pas  de  peine 

A  m'engager 
Dans  une  aimable  cba$ne  ; 
Je  n'aurai  pas  de  peine 

A  m'engager 
Pour  ne  jamais  changer. 
Aimez  un  dieu  qui  vous  adore  ; 
Uoissons-nous  d'un  nœud  diarmant. 
Grands-Opéras,  i,  2  a 


J 


-.  ISIS. 

Un  époux  doit  être  encore 
Plus  à  craindre  qu'un  amant. 

PAN. 

Dissipex  de  vaines  alarmes  ; 
Éprouvez  i' Amour  cl  ses  charmes  ; 
Comiaissez  ses  plus  doux  appas: 
jîon ,  ce  ne  peut  être 
Que  feute  de  le  connaître 
Qu'il  ne  vous  plaît  pas. 

SYBISX. 

Lés  maux  d'autrui  me  rendront  sage. 

Ahl  quel  malheur  ^ 

De  laisser  engager  son  coeur  l  ^' 

'  f«.,t  \\  oasser  le  P  us  beau  de  son  âge 
Pourquoi  faut-U  passer  ic  4 

Dans  une  mortelle  langueur  1 

J^h  1  qiwl  malheur  l 

Poutquoi  n'avoir  pas  le  courage 

De  s'afl&anchir  de  la  rigueur 

D'un  funeste  esclavage  ? 

Ah  !  quel  malheur 

De  laisser  engager  son  cœur  ! 

PAK. 

Ah  1  quel  dommage 
Oue  vous  ne  sachiex  pas  aimer! 
Ou.  vous  sert-il  d'avoir  tant  d'attmits  en  partage  , 
Si  von.  en  négligez  le  plus  grand  avanlage. 
no,  vous  sen-\\  de  savoir  tout  charmer? 
Ahl  quel  dommage 
Que  vous  ne  sachiez  pas  aimer  ! 


ACTE  m,  SCÈNE  VI.  255 

CHCBUB    DE    STLVAI5S  ,    DE    SATYRES    ET     DE 
BEBGEB8. 

Aimons  saDS  cesse. 

GHGBUB  DE   STMPaES. 

N'aknoDS  jamais. 

CHOBVB    DE    tTLVAIBS,    DE     SATTBES    ET    DE 
BEBGEBS. 

Cédons  â  l'Âmoor  qui  nous  presse  ; 
Pour  Tivre  heoreuz ,  aimons  sans  cesse. 

CBOECB  DE   BTMPHES. 

Pour  viv^  en  paix , 
N'aimons  jamais. 

STBIBX. 

Le  chagno  suit  toujours  les  coeucs  ^e  TAmour  l^lesse. 

PAS. 

La  tranqaille  sagesse 
N'a  que  des  plaisirs  imparfaits. 

CBCeUB    DE    STLVAIBS,    DE    SATXBES     ET    DE 
BEBGEBS. 

Aimons  sans  cesse. 

CHOBUB  DE    HTMPHES. 

N'aimons  jamais. 

STBIBX. 

'   On  ne  peut  aimer  sons  Êiiblesse. 

PAB. 

Que  cette  faiblesse  a  d'attraits  ! 


j 


laSe  ISIS. 

CnCEVVi   DE    aTLT^AllfS,   DE    SATTBES    ET     DE 
BEUGERS. 

Aimons  sans  cesse. 

CnceUR  DE  «YMPHES. 

N'aimons  jamais. 

CBOeUB    DE    SYLTAllilS,     DE    SATTHES    ET    DE 
BEBGEU8. 

Cédons  â  l'amout  qui  nous  presse  ; 
Four  vivre  Iieareux ,  aimons  sans  cesse. 

CHCeun  DE  SYMPHES. 

Pour  vivre  en  paix 
N'aimons  jftnftis. 

STMHX. 

FaiA-^  qu'en  ^nSna  4^coun  on  si  iieaa  )Our  se  passe  ? 
^Mes  compagnes ,  courons  daiis  le  fort  des  forêts  ; 
payons  qui  d'entre  nous  se  sert  mieux  de  ses  trmts  : 
Courons  à  la  cbasse. 

lES  CHoecBS. 
Courons  à  la  cbasse. 
STBIVX,  revenant  sur  le  théâtre,  suivie  de  Pan. 
Pourquoi  me  suivre  de  si  ptès  ? 

PAR. 

Pourquoi  fuir  qui  vous  aime  ? 

STBIH.X. 

IJn  amant  n/emibarrasse, 
STDiiri  ET  LES  CBOEDBS,  derrière  le  théâtre. 
Courons  â  la  chasse. 


"ACTE  m,  SCÈNE  VI.  257 

PAN,  revenant  une  seconde  fois  surla  scène ,  suivant  toujours 
Syrinx. 

le  ne  pois  yoos  quitter;  mon  coeur  s'attache  â  tous 

pAr  des  nceuds  trop  foits  et  trop  doux... 

BTBIHS. 

Hes  compagnes ,  v«nez!.„  C'est  en  vain  que  j'appelle. 

PA9. 

Ecoutez ,  ingrat^  l  écoutez 
Un  dieu  channé  de  vos  beautés , 
Qui  vous  jure  un  amour  ûdèle. 
SXBISX ,  fuyant. 
Je  déçIarQ  à  l'Amour  une  guerre  immoctelle. 

TBOUPE  DE  BEBSEBS   QUI   ABBÊTE9T   STBISX. 

Cruelle  !  arrêtez. 

TBOUPEDE  STLV  Aias  ET  DE  SATYRES  «QUI  ABBÊTEST 
STBIRX. 

Arrêtez ,  cruelle  ! 

SYRISI3C 

On  me  retient  de  tous  côtés, 

CUCeUB  DE  SATYRES,  DE  STL  VAXN8  ET  DE  BERGERS. 

Cruelle  !  arrêtez. 

fTBinx. 
Dieux ,  protecteurs  de  l'innocence  ; 
Naïades ,  Nymphes  de  ces  eaux. 
J'implore  ici  votre  assistance. 

(  Sjrinx  se  jetle  dans  les  eaux.  > 
PAS,  suivant  Syrinx  dans  le  lac  où  elle  s'est  jetée. 
Où  VOUS  exposez-vous  ?  Quels  prodiges  nouveaux  ! 

%2, 


La  Nymple  est  changée  eu  roseanx  ! 

;  (  Le  vent  pénètre  dans  les  roseaux ,  et  leur  fuit  former  un 
bruit  plùntif.) 

Hélas  !  quel  brait  !  Qu'entends-ie  ?  Âh  !  quelle  iroix  nouvelle  l 
La  Nymphe  tâche  encor  d'exprimer  ses  regrets. 
Que  son  murmm-e  est  doux  !  que  sa  plainte  a  d'att(ai]LS  ! 
Ne  cessons  point  de  nous  plaindre  avec  elle. 
Ranimons  les  restes  chaimans 
D'une  nymphe  qui  fut  si  belle  ; 
Elle  répond  encore  à  nos  gémisiemens  : 
Ne  cessons  point  de  nous  plamdre  avec  elle. 

(  Pan  donne  des  roseaux  aux  Bergers ,  aux  Satyres  et  aux 
Sylvains ,  qui  en  forment  un  concert  de  flûtes.  ) 


Les  yeux  qui  m'ont  charmé  ne  verront  plus  le  jour  ! 

Était-ce  ainsi ,  crael  Amour , 
Qu'il  fallait  te  venger  d'une  beauté  rebelle  ? 
N'aurait-il  pas  suffi  de  t'en  rendre  vainqueur , 
Et  âe  voir,  dans  tes  fiers,  son  insensible  cœur 
Brûler  ,  avec  le  mien ,  d'une  ardeur  étemelle  2 

Que  tout  ressente  mes  tourmens. 

PAS  ET  DEUX  BEDGEB8,  accompagnés  du  concerl  de 
flûtes. 

Ranimons  les  restes  charraans 
D'une  nymphe  qui  fut  si  belle; 
Elle  répond  encore  à  nos  gémissemens  : 
Ne  oessons  point  de  bous  plaindre  avec  elle. 

(Argus  commence  à  s*assoupir  ;  Mercure ,  déguisé  en  Berger , 
s'approche  de  lui ,  et  achève  de  l'endormir  .en  le  touchant 
de  son  caducée.  ) 


fACTE    III,  SCENE  VII.  a5c) 

PAS. 

Que  ces  roseaux  plaîatlfs  soient  â  jamais  aimés... 

MEnCUBE. 

U  suffit  i  Argus  dort ,  tons  ses  yeux  sont  tesmés  : 
Allons,  que  rien  ne  nous  retarde  ; 
Délivrons  la  Nym^^e  qu'il  garde. 

SCÈNE  yii. 

lO,  MERCURE,  ARGUS,  HIÉRAX;  tboups 

DE  STLVAmSy  DE  SATTBES  ET  DE  BEBOEBS. 

MEBCU  BE  )  fesant  sortir  lo  de  la  demeure  d'Argus ,  qu'il 
ouvre  d'un  coup  de  son  caducée. 

RECOBBraAissEz  Mercure ,  et  fuyez  avec  nous  : 
Éioigoez-Tous  d'Argus ,  avant  qu'il  se  réveille. 

HIÉBAX,  arrêtant  lo ,  et  parlant  à  Mercure. 

Argus  avee  cent  yeux  sommeille  ; 

Mais  croyez-vous 
Endormir  im  amant  jaloux  ?, 
Demeurez. 

MEBCUBE. 

Malheureux  1  d'où  te  vient  cotte  audace  ? 

HIEBÀ-X. 

l'ai  tout  perdu ,  j'attends  le  trépas  sans  efl&oi  j 

Un  coup  dé  foudre  est  une  grâce 

Pour  nn  mâllreureui  comme  moi. 
Eveillez^ vous,  Argus  ;  vous  vot^s  laissez  surj)rcridr(ï. 


i 


a6o  ISIS. 

AnGus  ET  uiÉnAx. 

Puîssaote  reine  des  cieux, 
JuQon ,  venez  noos  défendre, 

MEBGUOE ,  fraisant  Argus  .et  Hiéc»x  de  «on  caducée* 

iCommencez  d'éproaver  la  colère  des  Dîeax, 
(  Argus  tombe  mort ,  et  Hiérax ,  changé  en  oiseau  de  proie  , 
s'envole.  ) 

CH<]B1IB  DE  STL^TAlNS,  DE  SATYRES  ET  DE  BERGEBS 

Fuyons. 

10. 

Vous  me  quittez  !  quel  secours  puls-'îe  attendre  Z 

jÇÇ^ÇB  DE  SYLVAlffSiP^  SATYRES  ET  DE  BEEGkEJlS 

Fuyons  )  Junon  vient  dans  ces  lieux. 


SCÈNE  VIII. 


ÏUNON,  sur  son  cbar;  ARGUS,  IQ,  ÊRINNIS, 

rUBXE, 


Pevois  le  jour ,  Argus  ;  que  ta  figure  change, 

(  Argus,  transformé  en  paon,  vient  se  placer  devant  le] char 
de  Junon.  ) 

Et  vous ,  Nymphe ,  apprenez  comment  Junon  se  yçogé. 
Sors  ,  barbare  Eriunis ,  sors  dju  fond  des  enfers  \ 
Viens  1  pratjds  soin  de  servir  ma  yçngeapce  fatale, 
t^t  dVij  ïoontrer  rbocrcur  eu  cent  climais  divers  : 
ICpoavautc  tout  Tunivers 


«CTE  III,  SCÈNE  Vin.  u6i] 

Par  les  lounnens  de  ma  rivale  ; 
^Viens  la  pooir  aa  gré  de  mon  courroax; 
Redouble  ta  rage  ioferoale , 
£t  &is,  s'il  se  pcat,  qu'elle  égale 
La  fiirear  de  mon  cœor  jaloux. 
(  La  Furie  sort  des  enfers  ;  elle  fpoursuit  lo  ;  elle  l'enlève , 
et  Junon  remonte  dans  le  ciel.  ) 

I o ,  pour&uirie  parla  Furie. 
O  Dieiu  !  où  me  rédoisez-vous  2 


FIN    DU   TBOISIÈME  ACTE. 


J 


I»^»^<»»^<»«^»^^<»« 


^^^»^i^>^^i^«i^«^<i»^^  i^iîm^»^^' 


ACTE  QUATRIÈME. 


Le  théâtre  change  et  représente  Tendroit  le  plus  glacé  de 
la  Scythie. 


SCENE  I. 

Des  Peuples  paraissent  transis  de  froid. 
CBOEUBS  DE 9  PEVPfts,  des  climats  glacés. 

Xj'hiveb  qui  nous  tonrmente 

S'obstine  â  nous  geler  ; 

Nous  ne  saurions  parler 
Qa'avec  une  voix  tremblante. 

La  neige  et  les  glaçons 
I^oas  donnent  de  mortels  frissons. 

Les  frimats  se  répandent 

Sur  nos  corps  langnissans  ; 

Le  froid  transit  nos  sens; 
Les  plus  durs  rochers  se  fendent. 

La  neige  et  les  glaçons 
Nous  donnent  de  mortels  frissons. 


ACTE  ly,  SCÈNE  II.  i63 

SCÈNE  II. 

lO,  EAINNIS,  PUBiE,  LES  PEUPIE8  des  climats 
glacés. 

10. 

Laisse-moi,  craelle  Furie  l 
Cruelle  !  laisse-moi  respirer  un  moment. 

Ah!  barbare!  plus  je  te  prie , 
Et  plus  tu  prends  plaisir  d'augmenter  mon  toutment. 

ÉBI51SI8. 

Soupire  ^  gémis ,  pleure ,  crie  ; 
Je  me  &is  de  ta  peine  un  spectacle  charmant. 

lo. 

^Laisse-moi ,  cruelle  Furie  ! 
Cruelle  !  laisse-moi  respirer  un  moment. 
Quel  horrible  séjour  !  quel  froid  insupportable  l 
Tes  serpens ,  animés  par  ta  rage  implacable , 
Ne  sont-ib  pas  d'assez  cruels  bourreaux  ?. 
Pour  punir  un  cœur  misérable , 
yiens-m  chercher  si  loin  des  supplices  nouveaux  ?, 

Éniaais. 

Malheureux  habitans  d'une  demeure  affîeuse , 
Connaissez  de  Junon  le  fîmeste  courroux  : 

Par  sa  vengeance  rigoureuse , 

Vous  voyez  une  malheureuse  / 

Qui  sonflire  cent  fois  j^lus  que  vous. 

(  lo  et  la  Furie  répètent  les  deux  derniers  vers.  ) 


264  ISiS. 

CHOEUBS    DES   PEUPLES   DES    CLIMATS  GLACES. 

Ah  !  qaelle  peine- 
De  trembler ,  de  longair  daus  lliorrenr  des  frimats  l< 

10. 

Ah!  quelle  peiné 
D'épronver  tant  de  maux  sans  trouver  le  trépas  î 
'    Ah  !  quelle  vengeance  inhumaine  ! 

ÉRIN5IS. 

Viens  changer  de  tourmens ,  passe  en  d'autres  climats* 
(La  ^urie  enlraîne  et  enlève  lo.) 
lO.      . 
Ah  !  quelle  peine  ! 

CHCeiTBS   DES   PEUPLER   DES    CLIMATS   GLACÉS. 

Ah  î  quelle  peine 
De  trembler ,  de  languir  dans  Thorreur  des  frimats  ! 

SCÈNE  III. 

Le  théâtre  change  et  représente  des  deux  côtés  les  forges 
des  Chalybes ,  qui  travaillent  à  forger  l'acier.  La  mec 
paraît  dans  l'enfoncement. 

HUIT  CHALYBES  DAHSAHSJ  DEUX  COHDUCTEUSS 
D£S.CHALTB£S  CRABTAHS;.  CHOEXJB  DES  CHA- 
LYBES. 

(Dans  letems  que  phisletirs  Chalybes  travaillent  dans  les 
forges ,  quelques  autres  vont  et  viennent  avec  empressc- 
nient  pour  apporter  l'acier  des  mines ,  et  pour  disposer  ce 
qui  est  nécessaire  au  travail  qui  se  fait.  ) 


ACTE  IV,  SCÈNE  IV.  a65 

LES  DEVS   COSDUCTEURS   ET   LE   CnOEUR   DES 
CJBALTBES. 

Que  le  feu  des  forges  s'allome  ; 
TravailloDS  d'un  effort  nouveau  ; 
Qu'on  ûksse  retentir  Tenclnme 
Sous  les  Goc^  pesans  du  marteau. 

SCÈNE  IV. 

lO,     ERINKIS,     LES     CONDUCTETTItS     DES     CHA- 
LTBES;   TBOUPE   ET   CHCEUB  DES   CHÀLTBES. 

10  )  aii'inili«a  des  feux  qid  sortent  des  forges. 
QcEL  déluge  de  feux  vient  sur  moi  se  répandre 
Ociel! 

(JLes  Chalybcs  passent  auprès  d'Io  avec  des  morceaux  dnîpées , 
de  lances  et  de  haches  à  demi-forgées.  ) 

ÉBINRIS. 

Le  ciel  ne  peut  t'entendre  ;  t 

Tu  ne  te  {>lains  pas  assez  haut. 

LES  DEUX   COBDVCTEUBS   ET  LE' CnOBVB  DE^ 
CBALTBES. 

Qa'oD  prepttre  tout  ce  quHl  fiint» 

10. 

JuDODi  serait  moins  inhumaine  ; 
Tu  me  fàus  trop  souflrir ,  tu  sers  trop  bien  sa  haine. 

ÉBIR5IS. 

'An  gre  de  son  dépit  jaloux  , 
Tes  maux  les  plus  cruels  seront  encor  trop  Ctonx. 
Grands-Opéras,  i.  23 


266  ISIS. 

Hélas  ]  quelle  rigueur  extrême  i 

C'est  en  vain  que  Jupiter  m'aime  ; 
La  haipe  de  Junon  jouit  de  mon  tourment. 

Que  vous  baissez  fortement , 
Grands  Dieux!  qu'il  s'en  faut  bien  que  vous  aimiez  de  même!} 
(Les  feux  des  forges  redoublent,  ctfles  Chalybes  enyiroBnent  ' 
lo  avec  des  morceaux  d'aciers  brûlans.  ) 

10. 

Nfi  pourrai-je  cesser  de  vin-e  ? 
Cherchons  le  trépas  dans  les  flots. 

ÉBiniris. 
Partout  ma  rage  te  doit  suivre  ; 
N'attends  ni  secours  ni  repos. 
(  lo  fuit  et  monte  au  haut  d'un  rocher ,  d'où  elle  se  précipite 
'    dans  la  mer  ;  la  Furie  s'y  jette  après  la  Nymphe.  ) 

. SCÈNE  V. 

Le  théâtre  change  et  représente  l'antre  des  Parques. 

SUITE   DES   PABQVES,    LA'GHEnBE,    LES     FUBEURS 

DE  LA  ouebue,  les  maladies  violentes  et 

LAIIGCISSA5TES,   LA    FAMIKE,   l'iNCERI^IE  ,  l'i- 
StOSDATION,  etc.,  CHAaTAirS,   DABSABS. 

CQGBUB  DE  LA   SUITE   DES  PABQUES. 

Exécutons  l'arrêt  du  sort  ; 
Suivons  ses  lois  les  plus  craelles  : 
Présentons  sans  cesse  à  la  mort 
Des  victimes  nouvelles. 


îàCTE  IV,  SCÈKE  V.  267 

LA   GUEDBE. 

Que  le  fer , 

LA    FAMISE. 

Que  la  £ûm , 

L'mCEVDlE. 

Que  les  feux, 
l'ibohdatior. 

Que  les  eaux  ; 
^     TOUS  ensemble. 
H}ae  uml  serre  â  creuser  mille  et  mille  tombeaux. 

LES  MALADIES   VIOLEBTES. 

Pa^oD  s'empresse  d'entrer  dans  les  royaumes  sombres 
Par  mille  cbemins  difierens. 

LES  MALADIES  LAHOUISSABTBS. 

{àdbeyez  d'expirer ,  infortunés  monrans  ; 

ICberchez  uo  long  repos  dans  le  séjour  des  ombres.* 

LE  CHCBVR. 

Exécutons  l'arrêt  du  sort  ; 
Suivons  ses  lois  les  plus  cruelles  : 
Présentons  sans  cesse  à  la  mort 
Des  victimes  nouvelles. 

LA  ouebue. 

i!)iie  le  fer, 

LA  FAMIBE. 

Que  la  faim , 

l'ibcendie. 
Que  les  feux , 


268  ISIS. 

l'isondatios. 

Qae  les  eaux  ; 

TOCS  EUSEUBLE. 

Qae  tout  Serve  à  creuser  mille  et  mille  tombeaux. 
(La  suile  des  Parques  témoigne  le  plaisir  qu'elle  prend  à 
terminer  le  sort  des  humains.  ) 

SCÈNE  VI. 

10,   EEINNIS,  LA   SUITE   DES  PABQafiS. 

10  ,  parlant  à  la  suite  des  Parques. 
Cest  contre  moi  qu'il  fikut  tourner 
Votre  rigueur  la  plus  fimeste  : 
D'une  vie  odieuse  arrachez'inoi  le  reste  ; 
Hâtez-vous  de  la  terminer. 

L£  C9QBUB   9E  LA  SUITE  DES   PABQUE8. 

Cest  aux  Panjnes  de  Tordooner. 

10. 

Favorisez  mes  vœnx,  Déesses  souveraines , 

Qui  réglez  du  destin  les  immuables  lois  ; 

Finissez  mes  jours  et  mes  peines  ; 

Ne  me  conBamnez  pas  h.  mourir  mille  fois 

(  Le  fond  de  l'antre  des  Parques  s'ouvre ,  et  les  trois  Parques 
en  sortent.  ) 


ACTE  IV,  SCÈNE  Vil,  a69 

SCÈNE  VII. 

LES  PARQUES,  lO,  ERINRIS,  suite  des 

P^HIQUES. 

LES  PÀBQUES. 

Le  fil  de  la  vie 
De  tons  les  faumaios , 
Soivant  notre  envie , 
Tourne  dans  nos  mains. 

10. 

Tranchez  mon  triste  sort  d'an  coup  qni  me  délivre 
Des  tonrmens  que  Jonon  me  contraint  a  sooflHr. 

Chacun  vous  ùàt  des  vœui  pour  vivre , 

Et  je  vous  en  &is  pour  inoorir. 

éBISHIS. 

Jupiter  Ta  soumise  aux  lois  de  son  épouse  ^ 

Elle  a  rendu  Junon  jalouse  : 
L'amour  d'un  dieu  puissant  a  trop  su  la  charmer  £ 

Elle  est  trop  peu  punie  encore. 

10. 

Est-ce  un  si -grand  crime  d'aimer 
Ce  que  tout  Tunivérs  adore?. 

LES  PAlU^UBS. 

N}  mpbc ,  apaise  Junon ,  si  tu  veux  voir  la  fin 
De  ton  sort  déplorable  : 
C'est  l'arrêt  du  destin  *, 
Il  est  irrévocable. 

23. 


J 


370  ISiS.'iCTE  IV,  SCÈNE  VIT. 

10. 

Hélas  !  comment  fléchir  aoe  haine  implacable  ? 

I.E8  PABQUES,  iBISHlS,    LE  CHCBUA  DE  IiA  SUXTfi 
DES  PABQUES. 

Cest  l'arrêt  du  destin  i 
Il  est  irrévocable. 


FIN  DU   <2lIAi;BlàHE   ACTE. 


ACTE  CINQUIÈME. 


Le  théâire  change  et  représente  les  rirages  do  Nil  et 
râpe  des  embouchures  par  où  ce  fleave  se  jette  dans 
la  mer. 


SCÈNE  I. 

10,  ERINKIS. 
10 ,  sortant  de  la  mer ,  d'd&  elle  est  tirée  par  la  Furie. 

Xixmn,%  àMS  tonnnens ,  paissant  maître  du  monde  : 
Sans  vous ,  sans  votre  amour,  hélas  l 
Je  ne  soufirirais  pas. 
Réduite  au  désespoir ,  mourante ,  vagabonde , 
J'ai  porté  mon  supplice  en  mille  afireux  climats  ;] 
Une  horrible  furie ,  attachée  à  mes  pas , 
M'a  suivie  an  travers  du  vaste  sein  de  l'onde. 
Teiminez  mes  tourmeus ,  puissant  maître  du  monde  \ 

Voyez  de  quels  maux  ici  bas 
STotre  épouse  punit  mes  malheureux  appas  : 

Délivrez-moi  de  ma  douleur  profonde } 
Ouvrez-moi ,  par  pitié ,  les  portes  du  trépas. 
Terminez  mes  tounnens ,  puissant  maître  du  monde  ; 
Sans  vous ,  sans  votre  amour ,  hélas  ! 
Je  ne  soufirirais  pas. 


21^2  ISIS. 

C'est  Japitcr  <{ui  m'aime  :  ah  !  qui  le  pourrait  croire  ! 

Je  ne  sais  plus  dans  sa  mémoire  ; 
Il  n'entend  pas  mes  cris ,  il  ne  voit  pas  mes  plears  : 
Après  m'avoir  livrée  aux  plus  crueb  malheurs , 

Il  est  tranquille  au  comble  de  la  gloirç  ; 

Il  m'abaudonne  au  milieu  des  douleurs. 

A.  la  fin ,  je  succombe  ;  heureuse,  si  je  meurs  ! 

(  lo  tombe  accablée  de  ses  tourmens ,  et  Jupiter ,  touché  de 
pitié  ,  descend  du  ciel.  )  , 

SCÈNE  II. 

JUPITER,  10,  ÉIIINNIS. 


Il  re  m'est  pas  permis  de  finir  votre  peine  , 

Et  ma  puissance  souveraine 
Doit  suivre  du  destm  Tirrévocable  loi  : 
C'est  tout  ce  que  je  pois,  par  un  amour  extrême , 
Que  de  quitter  le  ciel  et  ma  gloire  suprême 
Pour  prendre  part  aux  maux  que  vous  souflrez  pour  moi. 

10. 

'Ah  !  mon  supplice  augmente  encore  î 
.Tout  le  feu  des  eoiers  me  brûle  et  me  dévore  ! 
Mourrai-je  tant  de  fois  sans  voir  finir  inûn  sort  Z 


Ma  tendresse  pour  vous  rend  Junon  inflexible. 
Elle  voit  mon  amour  ;  il  lui  paraît  trop  fort  : 
Son  courroux  se  redouble  et  devient  invincible. 


ACTE  V,  SCÈNE  III.  273 

40. 

Réimporte  ;  en  ma  faveur  soyez  toujours  sensible. 

JUPITER. 

)Cett  trop  vous  exposer  â  son  jaloux  transport  ; 
tl^rrite ,  en  vous  aimant ,  sa  vengeance  terrible. 

10. 
Âîmez-moi ,  s'il  vous  est  possible  , 
!A^ssez  pour  la  forcer  à  me  donner  la, mort. 
(Junon  descend  sur  la  terre.) 

SCÈNE  III. 

JUPITER,  JUNOJCî,  ïp,  ÊRINNIS. 


iVçVEZ ,  déesse  impitoyable  ; 

Venez ,  voyez ,  reconnaissez 
'Cette  nymphe  mourante ,  autrefois  trop  aimable  : 
Cest  assez  la  punir ,  c'est  vous  venger  assez  ; 
L'éclat  de  $a  beauté  ne  la  rend  plus  coqpii^c  : 
Far  la  -Ctuelle  hor^epr  du  tourment  qui  Ta^cable , 
Son  crime  et  ses  appas  sont  ensemble  eÛàiccs. 

Sans  jalousie ,  et  sans  alarmes , 

Voyez  ses  yeux  noyés  de  larmes , 
IJue  Fombre  de  la  mort  commence  de  couvrir. 


Ils  n'ont  encor  que  trop  de  cbannes  , 
Puisqu'ils  savent  vous  attendrir. 


274  ÎSIS. 

JCPITEB. 

Une  juste  pUié  peut-elle  vous  aigrir  ? 

iVotre  courroux  fatal  ne  doit-il  point  s'étebdre  l 

JUSOII. 

!Ah  !  vous  la  plaignez  trop ,  elle  n'est  pas  à  plaipdre.     , 
Non ,  elle  ne  peut  trop  soufl^îr. 

JUPITEB. 

3e  sais  que  c'est  de  vouis  que  son  sort  doit  dépendre  : 
Ce  n'est  qu'à  vos  bontés  qu'elle  doit  recourir. 
II  n'est  rien  que  de  moi  vous  ne  deviez  attendre  ^ 
Si  je  puis  oliiîger  votre  haine  â  se  cendre. 

10. 

!Àh  !  laissez-moi  mourir. 

yUPITEB. 

Ptenez  soin  de  la  secourir. 

JUSOV. 

Vous  l'aimez  d'un  amour  trop  tendre  : 
IloB ,  elle  ne  peut  trop  soufisir. 

JUPITEB. 

Quoi  !  le  coeur  de  Junon ,  quelque  grand  qu'il  paisse  étte , 
If  e  saurait  triompher  d'une  mjuste  foreur  ?, 

JURON. 

De  la  terre  et  du  ciel ,  Jupiter  est  le  maître , 
Et  Jupiter  n'est  pas  le  maître  de  son  cœur  ! 

JUPITEB^ 

Hé  bien  !  il  Êtnt  que  je  commence 
A  me  yaincte  en  ce  jour. 


ACTE  V,  SCÈNE  m.  275 

.VoQS  m'apprendrez  â  me  voÎDcre  à  mon  tour. 

JUPITEB  ET  JUHOH. 

J'abandonnerai  ma  vengeance, 


YUBOH. 
lUPttEB 


Hendez-moi  votre  amour. 


{Abandonnez  Votre  vengeânctf , 
Je  vous  rends  mon  amour. 


JUPITEB. 

Noires  ondes  du  Styx ,  c'est  par  vous  qne  je  jure  ; 
Fleuve  afircux ,  écoutez  le  serment  que  je  fais. 
Si  cette  nymphe  enfin  reprend  tous  ses  attraits  ; 
Si  Junon  fait  cesser  les  tourmens  qu'elle  endure , 
Je  jure  qne  ses  yeux  ne  troubleront  jamais 
De  nos  cœurs  réunis  la  bienheureuse  paix. 
Noires  ondes  du  Styx ,  c'est  par  vous  que  je  jure  ; 
Fleuve  aflreux ,  écoutez  le  serment  que  je  fais. 

JUSOH. 

Nympbê ,  je  veux  finir  votre  peine  cruelle  j; 
Qne  la  Furie  emporte  aux  enfers  avec  elle 
Le  trouble  et  les  horreurs  dont  vos  sens  sont  saisis. 
(  La  Furie  s'eafonce  dans  les  enfers ,  et  lo  se  trouve  délivrée 
de  «es  peines.  ) 

Après  un  rigoureux  supplice , 
Goûtez  les  biens  parfaits  que  les  Dieux  ont  choisis  j 

Et ,  sous  le  nouveau  nom  d'Isis  , 
Jouissez  d'un  bonheur  qui  jamais  ne  finisse. 

JUPITER  ET  JUflOir. 

Dieux ,  recevez  Isis  au  rang  des  immortels  ; 
Peuples  voisins  du  Nil ,  dressez-lui  des  autels. 


M 


i 


2'j6         xlSIS,  ACTE  V,  SCÈRE  III. 

{Les  divinités  du  ciel  descendent  pour  recevoir  Isis;  les 
peuples  d'Egypte  lui  dressent  un  autel ,  et  la  reconnaissent 
pour  la  divinité  qui  les  doit  protéger.) 

(  Divinités  qui  descendent  du  ciel  dans  la  gloire  ;  peuples 
d'Egypte  chantans,  quatre  égyptiennes  chantantes ,  peuples 
d'Egypte  dansans»  quatre  égyptiennes  dansantes.) 

CHCBUB  DES  D1Y1KITÉS« 

iVenez ,  Divinité  nouvelle. 

CHCEDB    DES  PEUPliES  d'jSgTPTE. 

Isis ,  toamez  sar  nous  vos  yeux  ; 
Voyez  l'ardeur  de  noire  zèle. 

CHOBITB    DES   DIYIBITÉS. 

La  céleste  cour  vous  appelle. 

CHOeUB    DES   PEUPLES  d'ÉGTPTE. 

Tout  vous  révère  dans  ces  lieux, 

(Jupiler  et  Junoti  prennent  place  au  milieu  des  divinités, 
et  y  font  placer  Isis.) 

JUPITEB  ET  70NOR. 

Isis  est  immortelle  ; 

Isis  va  briller  dans  les  cieux  ; 

Isis  jouit  avec  les  Dieux. 

D'une  gloire  étemelle. 

(Jupiler,  Junon  et  les  divinités  remontent  au  ciel,  et  y 
conduisent  Isis ,  dans  le  tems  que  les  chœurs  des  divinités 
et  des  peuples  d'JÉgypte  répèlent  ces  quatre  derniers  vers.) 


PROSERPINE, 

TRAGÉDIE-LYRIQUE  ES  CINQ  ACTES, 
.       PAR  QUINAULT, 

Représentée  pour  ki  première  fois,  le  i5  novembre  i6So, 


Grands-Op^r.is.  ï.  2.} 


i 


PERSONNAGES. 


CÉRÈS. 

CYANE,  nymphe  de  Sicile,  confidente  de  Cérès. 

CR15ISE ,  dieu  de  fleuve  de  Sicile. 

MERCURE. 

ARÉTHUSE ,  nymphe  aimée  d- Alphëe. 

ALPHEE  ,  dieu  de  fleuve ,  amant  d'Arcthuse. 

PROSERPINE ,  fille  de  Jupiter  et  de  Cérès. 

.Tbçupb  de  Nymphes. 

TnouPE  de  Dieux  des  bois. 

TnouPE  d'habitans  de  Sicile. 

PLUTON,  dieu  des  Enfers. 

■ASCALAPHE,  fils  du  fleuve  Achéron,  et  confident  de 

Pluton. 
TnouPE  de  Divinités  infernales. 
TnouPE  de  Suivans  de  Cérès. 
Les  Ombiies  heureuses. 
Les  trois  Ju&es  des  Esfebs. 
Les  trois  Furies. 
JUPITER. 
L'AMOUR,  L'HYMÉNÉE,  VÉNUS,  PALLAS  , 

APOLLON  et  mars. 
Troupe  de  Divinités  célestes. 
Troope  de  Divinités  de  la  suite  de  Pluton. 

yertumne,  flore  et  POMONE. 
Troupe  de  Divinités  de  la  terre. 


PROSERPÏNE, 

TRAGÉDIE-LYRIQUE. 

ACTE  PREMIER. 

Le  théâtre  représente  le  palais  de  Cérès. 

SCÈNE  I. 

CÉRÈS,  CYANÉ,  CftINiSE. 

v7ouToiB|  dans  ces  aimables  lienx, 

Les  doacenr»  d'une  paix  charmante.  ^, 

Les  superbes  géants,  armés  contre  tes  dieux, 

Ne  nous  donnent  plus  d'épouvante; 
Ils  sont  ensevelis  sons  1^  masse  pesante 
Des  monts  qu'ils  entassaient  pour  attaquer  les  cieux. 
Nous  avons  vu  tomber  leur  chef  audacieust 

Sous  une  montagne  brûlante  : 
Jupiter  Ta  contraint  de  vomir  à  nos  yeux 
Les  restes  enflanmiés  de  sa  rage  mourante  ; 

Jupiter  est  victorieux, 
Et  tout  cède  à  l'effort  de  sq  main  foudroy^ic. 

Goûtons,  ete. 


28o  PKOSERPINB. 

OÉnÈS,  CTAsé,  CBISISE. 

Goûtons  j  etc. 

CEBÈS. 

»  Prenez  soin  d'assembler  tout  ce  qui  suit  mes  lois;^ 
Honorons  le  vainqueur,  d'qne  commune  voix. 

CinèS,    CTASÉ,  ET   CKIBISE. 

Honorons  le  vainqueur,  d'une  commune  voir. 

(  Cyané  et  Crinise  vont  de  deux  côtés  diflférens  appeler  les 

divinités  et  les  peuples  de  la  Sicile,  pour  venir  ensenable 

célébrer  la  victoire  de  Jupiter.) 

SCÈNE  II. 

Mercure  descend  du  ciel. 
MERCURE,  CËRÈS. 

cÉnÈs. 

MCiCUBE,  quel  dessein  vous  fait  ici  descendre  l 

MEBCnnE. 

lupîter,  ptès  de  vous,  m'ordonne  de  me  rendre. 

s  cénis. 

Non,  non;  3  vos  discours  je  n'ose  ajouter  foi. 

Jupiter,  après  sa  victoire , 
Songe  â  tenir  en  paix  l'univers  sous  sa  loi  : 
,11  est  trop  occupé  de  sa  nouvelle  gloire; 
Eh!  le  moyen  de  croire 
Qu'il  songe  encore  ^  moi?i 


'AGTEI,  SCÈNE  11.  uSi 

MEBCUttE 

Dans  les  soins  les  plus  grands, dont  son  aine  est  remplie, 
U  se  soavient  toujours  que  vous  Favez  charmé  : 

Il  est  mal-«isé  qu'on  oublie 

Gè  qu'on  a  tendrement  aimé. 
Il  admire  les  dons  que  vous  venez  de  faire 

En  cent  climats  divers. 
L'abondante  Sicile,  heureuse  de  vous  (itaire, 
De  vos  riches  moissons  vdt  tout  »e»  champs  couverts  ; 
BSais  la  mère  des  diaux  se  plaint  que  la  PlM^ygie  i 

Qu'^  a  toi^purs  chérie. 
Ne  se  ressente  pas  de  vos  soins  bienCesans, 

Et  c*est  Jupiter  qui  vous  prie 

D'y  poitet  vos  divins  présens. 
Quelle  gloire  de  voir  qtfhm  dieu  si  grand  implore 

Voti^&vorabte  secours! 

CiBÈS. 

Peut-être  qu'il  m'estime  encore  ; 
Mais  il  m'avait  promis  qu'il  m'aimerait  toujours. 

L'amour  qui  pour  lui  m'anime 
Devient  plus  fort  chaque  jour  ; 
Est-ce  asSeiï  4,'^n  peu  4'csii^e 
Pour  le  prix  de  tant  d'amour? 

MEnCURE. 

Il  scut  l'ardeur  qu'un  tendre  amour  inspire , 
Avec  plaisir  il  se  laisse  enflammer  : 
Mais  un  amant  chargé  d'un  grand  empire 
N'a  pas  toujours  le  tems  de  bien  aimer. 

CÉKÈS. 

Quand  de  sou  cœur  je  devins  souveraine , 


J 


282  PROSERPINE. 

N 'avait-il  pas  le  monde  à  gouverner  ?i 
Et  ne  troQvait-il  pas,  sans  peine ,^ 
Do  lepis  de  reste  à  me  donner  ? 

9e  Vai  va  sous  mes  lois,  ce  dieu  si  redoutable^ 
Je  IVi  vq  plein  d'empressement. 
'Ah!  qu'il  serait  aimable^ 
S'il  aimait  constamment! 

M  C  B  C  U  B  E. 

Son  amour  craint  de  trop  paraître; 
Pans  le  ciel  on  l'observe  avec  des  yeux  jaloux, 

çéfiès. 

Dequeb  dieux  n'est-il  pas  le  maître? 
Ne  les  fait-il  p^s  trembler  ioosl 
Que  vous  l'excusez  mai  quand  mon  amour  l'accuse  l 

S'il  pouvait  avoir  quelque  excuse, 
Mon  cceur  la  trouverait  raille  fois  mieux  que  vous. 
Allez;  à  ses  désirs  il  faut  que  je  réponde: 
Je  quitte  une  paix  profonde 
Qui  m'ofîre  ici  mille  appas  ; 
Que  ne  quitterait-on  pas 
Pour  plaire,  au  maître  du  monde  2 

CinèS  ET  MEBCUBE. 

Que  ne  quitterait-on  pas,  etc. 
.   (Mfrcure  &*enTole  pour  aller  a^  ciel  retrouver  Jupiter.) 


i 


âCTEI,  SCÊHE  IIL  a85 

SCÈNE  m. 

ARÉTHUSE,   CERÈS. 

ciiis. 
La  Plirj^  a  besom  de  mes  dons  précieoz , 
Et  \e  laisse  arec  vous  Proseipine  en  ces  lieux  : 
J'ai  peine  à  la  quitter,  cette  fiOe  si  cbère.^ 

▲  «ÉTHUSE. 

Je  sois  dans  la  Sicile  une  nymphe  étrangère  ; 
Je  viens  tous  conjurer  de  m'en  laisser  partir. 

CÉBÈS. 

Non,  Aréthuse,  iioo,ie  n'y  pois  consentir. 

AléTHVSB. 

lAIphée  à  mon  repos  a  déclaré  la  gnetie: 

Diane,  prc^ice  à  mes  Tcenz, 
En  vain,  ponr  me  cacher  à  ce  fleave  amoureux^ 

Fit  ouvrir  le  sein  de  la  terre; 
U  n'est  point  de  détours  dans  l'ombre  des  enfers 

Qœ  son  amoor  n'ait  découverts. 
Je  l'ai  trouvé  partout  ;  et  soUS  des  mers  profondes 
J'ai  TU  ses  flots  brûlans  suivre  mes  froides  ondes*, 
Je  veux  le  foir  encore  au  bout  de  l'univer^. 

cÉiiàs. 
Les  soins  d'un  amour  extrême 
Devraient  moins  vous  alarmer; 
Vous  craignez  trop  qu'on  vous  aime  ,- 
Ne  craignei-yous  point  d'aimer  ?, 


284  PROSERPINE. 

Vous  rougissez^  Ârhétuse! 

Votre  rougeur  vous  Qccu$e. 
n  est  aisé  de  voir,  dans  ce  trouble  &tal, 
Le  péril  où  l'amour  eo  ce  lieu  vous  expose. 

AR^THUSE. 

Le  dangereux  amour!  que  je  lui  yeux  de  mal 
Du  trouble  qu'il  me  cause! 

CÉBÈS. 

%vec  Alphée  ici  je  teux  vqus  arrêter. 

AnéTBVSE. 

Ehl  de  grâce,  aidez-moi  plutôt  à  Téviter. 
Je  crains  enfin  qu'il  ne  m'engage , 
Et  sa  constance  me  Êiit  peur. 
Non,  si  je  le  vois  davantage, 
Je  ne  répoads  plus  de  mon  c^eor. 
CÉBis. 
Aimez  sans  vous  contraindre  ; 
Aimez  à  votre  tour. 
Cest  déj^  r^sentir  l'amopr 
^  Que  de  commencer  à  le  craindre. 

jGiBÀS   ET  AB]£THaSE. 

C'est  déjà  ressentir  l'amour,  etc. 

CÉBÈS. 

Je  vais  voir  ftoserpinc,  et  partir  promptcment^ 
Demeurez  avec  elle  eo  na  lieu  si  charmant. 
Pour  foir  l'Amour  qui  vous  appelle 
Ife  cherchez  plus  de  valus  détpurs: 
Aimez  un  amant  ildèle  ; 
On  n'^  trouve  pas  toujours. 
(  Cdrcs  va  voir  Prosexj^ÎAc  avant  çue  4e  jîarUt  pour  aller  en 
Phiygie.) 


ACTE  I,  SCÈWE   IV.  285 

SCÈNE  IV.     , 

ARÉTHUSE. 

Vaisb  fierté ,  faible  rigueur, 

Qoe  TOUS  aye:^  peu  <^e  p^^ssauce 

Contre  TAmour  e:t  la  con^taoce! 

y  me  (ifirté,  £^ie  rigueur, 

'Ah!  que  vqu3  gardez  mal  mon  coeur! 
En  vain  par  vos  conseils  \e  me  Sais  violence  : 
Je  combats  vainement  une  douce  langueur  : 
Eâas!  vous  m'engagez  A  fiiire  résistance , 

Et  vous  me  laissez  sans  déCense , 

Au  pouvoir  de  TAmonr  vainqueur. 

Vaine  fierté,  faible  rigueur, 

Que  vous  avez  peu  de  puissance 

Goiltre  f  Amour  et  la  constance! 

Vaine  fierté,  (àible  rigueur, 

Ah!  que  vous  gardez  mal  mon  cœur!... 
Je  vois  Alpbée,  p  Dieut!  où  sera  mon  asile? 

Mon  cœur  est  déjà  charmé , 
Et  ma  fuite  est  inutile  : 
Hélas!  qu'il  est  difficile 
De  liiir  un  amant  aimé!... 

ir approche;  je  tremble.  Ah?  faut-il  qu'il  jouisse 

Du  trotible  honteux  où  je  suis?... 

Pardonne,  Amour,  si  je  le  fuis  : 

J'en  ressens  un  crael  supplice  ; 
Mais,  n'importe,  je  veux  Tévilor  b\  je  puis. 


îi86  PROSERPINE. 

SCÈNE.  V. 

(âLPHÉE,  ARETHtSE* 

ALPHÉE. 

Àbhêtez,  Nyipphe  trop  sévère; 

Ne  fîiyez  plus  d'une  course  légère 
Les  soius  trop  empressés  de  mon  cœur  amourea:c  ; 
Sï'ayez  plus  contre  moi  ni  chagrb  ni  colère  ; 

J'ai  résolu  de  ne  vous  plus  déplaire, 
Et  ie  vais  étouSbr  mon  amour  malheureux. 

Al\éTHUSE. 

Alpbée!... 

ALPnÊE. 

âlphée  eqEn  vous  arrête ,  inhumaîne  î 
Mais  VQUS  vous  arrêtez  pour  voir  briser  sa  chaîne , 
,  C'en  est  fait ,  mes  feis  sont  rompus. 

ABÉTHU^E. 

Alphée ,  est-il  bien  vrai  ? 

i^LPHÉE^ 

M'çn  doutez  point,  crueUe! 
3e  le  reprends  ce  coeur  trop  tendre  et  trop  ûdèle  » 
!Ce  cœur  trop  rdïuté  par  de  cruels  refus. 

ABÉTHDSE. 

Alphée!  est-il  bien  vrai  que  vous  ne  m'aimez  plus  ?i 

ALPHEE. 

Ingrate!  il  est  trop  vrai,  mon  cœur  rompt  avec  peine 
Des  nœuds  qu'il  a  troi^véâ  si  beaux  j      ' 


'ACTE  I,  SCÈNE  V.  287 

Mais,  de  peur  (pi'îl  ne  les  reprenne, 
Je  lé  veax  engager  en  des  liens  nouveaux.    ^ 

J'ai  vu  raimablc  Proserpine  : 
On  connaît,  à  l'éclat  de  sa  beauté  divine  $ 
Que  du  maître  des  dieux  elle  a  reçu  le  jour. 
Rendez-lui  grâce; 
C'est  elle  qui  vous  débarrasse 
De  mon  C&cbenx  amoiir. 

ÀBÉTHUSE. 

Si  ProSeipiné  est  belle, 
Son  coeur  est  fier  et  rigoureux; 

Votre  chaîne  nouvelle 
Ne  vous  rendra  pas  plus  heureux^ 

ALPOÉE. 

N'importe  ;  je  veux  bien  souffrir  sous  son  empire. 
Vous  ne  m'avez  déjà  que  trop  accoutumé 
Au  rigoureux  martyre 
D'aimer  sans  être  aimé. 
Proserpine  vous  aime ,  et  j'ose  au  moins  prétendre 
Que  vous  me  servirez  dans  cet  engagement. 
Vous  savez  si  mon  cœur  est  tendre! 
Vous  avez  éprouvé  s'il  aime  constamment! 

ABÉTH  USE,   voulant  fuir  Alphée  qui  la  suit. 
Non ,  je  ne  veux  jamais  entendre 
Parler  ni  d'amour,  ni  d'amant... 
Me  suivrez- vous  sans  cesse?, 

ALPHÉE. 

Me  fuirez- vous  toujours  ?, 
L'ingrate  Arélbuse  me  luisje 
Sans  espoir.de  secours! 


t 


a88  PROSEBPINE. 

C'est  un  fea  noaveau  qnl  me  presse'. 

ABÈTHtfSE» 

Me  snivrez-voas  sans  cesse?, 

ALpoéE. 
Me  fiiirez-vous  tonjoarsZ 

SCÈNE  VI. 

PBOSERPINË,  ALPHéE,  ARéTHUSE;  CVANIS, 
CRINISE  ;  TROUPES  de  Dirmixés   tes  de  peuples 

DE   SICOLE;   RYMPHES  et  DITIRTiS  DES   BOIS   ET   DES 

EAUX ,  cbaDliDtes  j  babitass  db  ticiiXy  cfasDtans  ;  un 
couducteub  de  la  fiTE,  et  des  babitaks  de 
sictu  9  daosaos. 

PBOSEnPifllE. 

CÉnÈs  vi^  nous  6ter  sa  divine  préseucc  ; 

Ces  lieux  voot  perdre  leurs  attraits.,. 

Cérès ,  favorable  Cérès, 
Faites  cesser  bientôt  votre  cruelle  absence  : 

Cérès,  favorable  Cdrès, 

Ecoutez  nos  tristes  regrets. 

LE   CBOEUR. 

Cércs,  favorable  Cérès,  etc. 


ACTE  I,  SCÈNE  VlTÏ.  289 

SCÈNE    VII. 

CERÈS,    PR0SER1PINE,   ALWÉE,    ARÉTHUSE , 
CVANÉ,    CRINISE;   tboopes  dk    sivinné^  et 

DE    PEUPLES. 

(  Cérès ,  sur  son  chatf  tiré  par  dei  dragons  ailés.) 
Vous,  qoi  ▼oolez  pour  moi  signaler  votre  s^le^ 
Ne  tioublez  point  la  paix  de  cet  hedreàjç  séjear/ 
Je  presse  nioo  départ  poar  hâter  mon  retouj^y 
Acrompagnez  ma  fille  avec  on  soin  fidèle} 
Cliangez  vos  tristes  chants  en  de  channans  concerts  ; 
Qae  j'entende  en  partait  »  dans  le  milieu  des  airs, 

Éclater  la  gloire  nouvelle 

Du  plus  grand  dieu  de  l'univers* 

,       (Elle  s'envole.) 

SCÈNE  VIII. 

PROSERPINE,  ALPHÉE,  ARÉTUtSE,  CYANÉ, 
CRINlSE;  TBOUPE  DE  oiviiriTés,  tboupe  de 

PEUPLES. 

PROSEBPllIE  ET  LE   GncKllB. 

CÉLÉBROfis  la  victoire 
Du  plus  puissant  des  dieux  ; 
Qu'an  trophée  étemel  conserve  la  mémoire 
D'un  triomphe  si  glorieux. 
Célébrons  la  victoire 
Grands-Ope ra?.   i,  25 


290PROSERPÏIÎE.i!LCTE  I,  SCÈNE  Vlll. 

Do  phis  paîsfiant  des  dieux  j 
FeSQfDS  retentit  jusqu'aux  deux 
Le  brait  Iclatant  de  sa  gloire. 

Gélébron&i.çtPi.  . 

(On  danse  autour  d'un  trophée  qu'on  élève  en  l*bonneur 
de  lupit»r,  «l  qtre  l'on  forme  des'  d'i^bris  des  armes  moiys- 
Irueuses  des  gëans  vaincus.) 

(Sut  la  fin  de  cette  fétë,  on  entend ^n  tremblement,  de 
tçrre  qui,  lait  tomber  une  partie  du  palais  àe  Cërès.) 

PnointPtJXt.  ET   t£  CHCBUJR. 

Ce  palais  ^  Uxoohet  i  6  dieux,  la  terre  s'ouvre  ! 

Qi^els  tremblemeos  aflîeux  !  ' 

li'eofet  découvre 

Ses  goùfifres  ténébceux... 

Jupiter,  laucez  le  tonnerre, 

Renverses  «  par  de  nouveaux  coups  ,* 

Le  cbef  audacieux  dès  enÊms  de  la  terre; 

Il  vent  se  relever  pour  s'armer  contre  vous. 

Achevez  d'étouf&r  la  guerre  : 

Jupiter,  lancez  le  tonnerre.' 

j[  Le  tonnerre  tombe  sur  le  mont  Etna ,  qui  parail  dans  l'cloi- 
gnement>  et  ce  coup  achève  d'accabler  le  chef  des  géans , 
qui  s'efforçait  de  se  relever.) 


PI9   0U   PfiEHtER  ACTE. 


l  f 

ACTE  SECOND"' 

Le  ihéâtre  (^ge,  et  représente  les  iatdios  de  Gérés. 

SCÈNE  I. 

CRINISÉ,  AtPHEE. 

CBIBISE. 

J  uptTEB  a  domté  les  géans  pour  jamais. 

Ce  beaa  séjour  brille  de  Dooveanx  charmes  ; 
Tout  y  ressent  le  retour  èb  la  paix. 

Ah  \  que  le  repos  a  d'attraits 

Après  de  moitelles  alarmes  l 

alphi£e.  . 

La  Faix,  dans  ces  beaox  lienx,  m'oflre  en  vain  mille  appas: 
L'Amour  en  rend  poar  nioi  la  douceur  iiitltile  ;^ 

Cruel  Amour,  hélas! 
Que  me  sert-il  de  voir  tout  le  monde  uan^Ue , 

SA  mon  cœur  ne  l'est  pas?. 


Vous  changez,  vous  quittez  une  nymphe  iohumaijie^ 

Votre  cceur  ne  "risque  tîen 
/  A  choisir  une  autre  chaîne  ; 

C'est  toujours  un  bien 
De  changer  de  peine. 


2Q2  PROSERPINE. 

ALPHiE. 

Hearei^,  qui  peut-être  inconstant! 
Rebuté  des  rigûçurs  d'une  haine  éternelle, 
J'ai  vdtalu  la  quitter,  cette  beauté  cruelle, 
:  Et  j'éprouve  qu'en  la  quittant 

Mon  cœur  est  encor  moins  content. 
3'ai  feint  de  ressentir  une  flamme  nouvelle  : 
J'ai  fait  voir  â  ses  yeux  un  dépit  éclatant  ; 

Mais,  hélas!  dans  le  même  instant, 
Je  brûlais  en  secret, je  languissais  pour  elle. 

Ht  je  ne  l'aimai  jamais  tant. 

Qu'il  coûte  cher  d'être  fidèle  l 

Heureux,  qui  peut-être  inconstant! 

CRIIHISE   ET   AI.PHÉQ. 

Qu'il  coûte  cher,  etc. 

ç  a  I N I  s  E. 
Quelqu'un  vient  ;  gardez  le  silence. 

A  L  p  H  É  E. 
C'est  Âscolaphe  qui  s'avance. 
Pour  quelque  soin  pressant  il  quitte  les  enfiers; 
Il  n'a  de  mon  amour  que  trop  de  connaissance.    ' 
Où  n'ai-je  ppmt  porté  la  honte  de  mes  fers  ? 

(  CriQue  sorl.) 

SCÈNE  II. 

ASCALAPWE,  ALPHÉE. 

A  L  e  H  É  E.  V       ^ 

VESEa  goûter  ici  le  doux  air  qu'on  respire. 


ACTE  II,  SCÈNE  II.  2t)3 

ASCÀlAPnE. 

Je  dois  suivre  le  dieu  de  rinfèmal  empire. 
La  terre ,  par  ses  ^emblemens , 
.Vient  d'ébranler  les  fondcmens 
De  nos  demenres  sombres. 
Platon  9  voulu  voir  si  la  clarté  des  deux 

Ne  s'ouvre  point  de  passage  en  ces  lieux , 
Pour  aller  aux  enfers  eflkroucber  les  ombres. 
11  me  permet  dé  voir  ÂréUmse  un  moment, 
â  L  p  H  é  E. 
D'où  vous  vient  tant  d'empressement  ? 

ASCALAPHS. 

le  l'ai  vue  aux  enfers;  que  je  la  trouvais  belle  ! 

ALpnict.  * 
L'ingrate  me  fuyait;  elle  est  toujours  cruelle! 

ASCALAPHE. 

Ses  cruautés  pour  Vous ,  ses  soiRs  pour  fuir  vps  pas, 
Ont  encore  à  mes  y«nx  augmenté  ses  appas. 

ALPHÉE. 

Les  flammes  amoureuses 
Descendent-elles  jusqu'à  vous  ? 
L'Amour  veut  un  séjour  plus  doux 
Que  vos  demeures  téoâ>renses. 
ASCAtAPHE. 
L'astre  brillant  qui  vous  luit 
Finit  son  cours  dans  Jes  ondes  : 
Il  ne  peut  percer  la  nuit 
De  nos  demeures  profondes  ; 
Mais  il  u'est  point  de  séjour 

25. 


à 


29-5  PROSERPINE. 

Impénclrable  à  l'Amoar. 

Alphée/ 
Qa'espérez-voas  d'une  ame  si  sévère  ?i 
Mon  amouc  ne  peut  rémonvoir. 

ASCALAPHE. 

Si  vous  ne  savez  pas  le  secret  de  lui  plaire , 
Un  autre  pourra  le  savoir. 

ALPBÊE. 

Saurez-vons  de  son  cœur  vamcre  la  résistance  ? 
Est-ce  aux  enfers  qu'on  apprend  ce  secret  ?. 

48CALAPBE* 

On  apprend  attx  enfers  à  gatder  le  silence 

Et  Ton  y  sait  être  discret  : 
La  nymphe  que  je  cherche  avec  soin  vous  évite;  j 
Pour  la  trouver  il  faut  que  je  vous  quitte. 

(II  sort.) 

SCÈNE  III. 

ALt»HEE. 

AmA5S  quî  u'étes  point  jaloux, 
Que  votre  sort  est  douxl 
L'Amour  m'a  fait  gémir  sous  une  dure  chaîne; 
Mais ,  quand  je  me  plaignais  de  ses  funestes  coups , 
Je  ne  connaissait  pas  le  plus  cruel  dé  tous. 
Un  autre  aime  Àréthuse  et  ne  craint  point  ta  haine, 
Et  je  vob  sûr  moi  seul  tomber  tout  ioa  courroux! 
Cctait  peu  du  malheur  d'aimer  une  iuhtmiaine  ; 


ACTE   II,  SCÈNE  IV.  sqS 

Le  boulieur  d'un  rival  a  redoublé  ma  peine. 
Amans  qui  n'êtes  point  jaloux , 
Que  yotre  sort  est  doux  ! 

SCÈNE  IV. 

ARÊTHtJSE,  ALPHÉE. 

âLPHÉE. 

IrghAte!  écoutez-moi;  fe  ne  reux  plus  me  plaindre, 
le  ne  vous  dirai  rien  ^t  voua  pùisisè  si^irmér. 

A'n'iTHUSE. 

Votts  cessez  de  m'aimer. 
Je  cesse  de  vous  craindre. 

ALPH  ÉE. 

Ascaié^hè  vous  cherche  ici  ; 
Bientôt  vdWs  le  fSrrèz  paraître  : 

Aréthûse ,  peut-être , 

Vous  le  cherchez  aussi. 

ABÉTHUSE. 

l'aimable  Proserpine  en  votre  atne  a  fait  naître 

Une  nouvelle  ardeur  : 
Si  vous  ne  m'aimez  plus,  que  vous  sert  de  conoattre 

Le  secret  de  mon  cœuc  2 
ALpHés. 
Fant-il  que  votre  coeur,  h  TAmour  moins  ref>elle, 
Récompense  un  amant  s&ns  éprouver  sa  foi  2 
Si  ce  bkp  eAt  été  le  prhi  du  pkis  &dèle , 

■Ah!  vous  savez,  craelle! 


à 


Qu'il  Q  était  dû  qa'à  moi. 

ABÉTHUSE. 

Votre  nouvelle  chaîne  est  si  belle  et  si  forte  ! 
poun|aoi  songer  encore  à  des  liens  rompus?, 

Que  vous  iniporte 

Qu'un  autre  emporte 
Un  prix  (pii  ne  vous  touche  plus  ?. 

ALPHÉE. 

.Vous  avez  fui  les  soins  de  mon  amour  extrême  ; 

Vous  m'avez  dté  tout  espoir  t 

Si  je  disais  que  je  vous  aime, 
.Vous  m'ôteriez  encor  le  plaisir  de  vous  voir. 

ABÉTHUSE   ET   ALPn^fi. 

Cesi  une  )  •     .    ,        i 

%  autre  que  moi  qui  règne  dans  votre  ame  { 
C  est  un  3 

Vous  trouvez  d'autres  nœuds  plus  doux... 
En  vain  je  veux  cacher  ma  flamme, 
Mon  amour  parait  trop  dans  mon  transport  jaloux  : 
Non ,  je  ne  puis  aimer  que  vous. 

SCÈNE  y. 

ASCAl^APHE,    ARETUUSE,  ALPHEE. 

ABÉTHUSE. 

É5T-U.  vrai  que  mon  cœur  soit  eu  votre  puissance  ?, 

ASCALAPUEi 

Je  vous  aime  sans  espérance*^ 
J'ai  voulu  soulager  mon  m^l 


ACTE  H,  SCÈNE  V.  297 

Par  le  chagrin  de  mon  rival. 

Dans  les  enfers  c'est  ainsi  qu'on  en  use  ; 
Mes  maux  n'ont  pu  trouver  d'autre  adoucissement. 

Pardonnez-moi  ^  belle  Âréthuse , 
Je  ne  suis  pas  le  seul  qui  se  vante  en  aimant 

De  posséder  un  coeur  qu'on  lui  refuse } 
Mais  Alphée  aujourd'hui  n'est  plus  tant  rebuté  ; 
.Vous  ne  fuyez  plus  sa  présence. 

ABéXHUSE. 

Pour  punir  votre  vanité , 
Je  veux  que  vous  voyiez  triompher  sa  constance. 

ASCAtAPHE. 

En  lui  donnant  la  préférence , 

Vous  me  rendez  la  liberté. 

C'est  goûter  la  félicité 

Que  d'Amour  braver  la  puissance. 
AlphÉE,  ABÉTHUSE,   et  ASCALÂP HE,  ensemble. 
ALPHÉC  )      (  I 

,  <Pour  être  heureux,  il  faut  qu'on  aime  bien. 

ASCALAPHE.  {  Pour  être  heureux ,  il  faut  qu'on  n'aime  rien. 

ASCALAPBE. 

Mais  Pluton  va  bientôt  rentrer  dans  son  empire  j 
Il  passe  en  ces  lieux  :  il  admire 
Les  charmes  d'un  séjour  si  doux. 


i 


398  FROSERPINE. 

SCÈNE  VI. 

PLUTON,   ÂRÉTHUSE,    ÀSCÂLAPHE, 
ALPHÊli:. 

PLVTOV. 

Demeubez,  AréthnscM.  Âlphéa,  éloignes- vous. 

■^-  (Alpbée  se  retire.) 

Les  efibrts  cTun  géant ,  qa'on  croyûît  «(iccablé, 
Ont  fait  encor  gémir  le  ciel ,  la  terre  et  Tonde. 
Mon  empire  s'en  est  troublé  î 
Jusqu'au  centre  du  monde 
Mon  trône  en  a  tremblé. 
L'afTreux  Typhon,  avec  sa  vaine  rage, 
Trébuche  enfin  dans  des  gouSces  sans  fonds. 
L'éclat  du  jour  ne  s'ouvre  aucun  passage 
'  Pour  pénétrer  les  royaumes  profonds 

Qui  me  sont  échus  en  partage. 
Le  ciel  ne  craindra  pins  que  ses  fiers  ennemis 
Se  relèvent'jamais  de  leur  chute  mortelle^ 
Et  du  monde  ébranlé  par  leur  fureur  rebelle 

Les  fondemens  sont  raâermîs. 
le  puis  faire  goûter  une  paix  étemelle 
Aux  peuples  souterrains  que  le  sort  m'a  soumis. 

Mais  par  vos  soins  puis-je  voir  Proseqpine 
'Avant  que  de  quitter  cet  aimable  séjour  l 

ABÊTUnSE. 

Cette  fière  beauté  s'obstine 
  fuir  les  amans  et  l'amour. 


ACTE  II,  SCÈNE  VII.  299 

Dans  rionOoeDt  repos  de  celte  solitude 
|£lle  évite  les  dieos. 
De  la  terre  et  des  cieojc  : 
Jugez  de  SOD  inquiéiude 
Si  le  dieu  des  enfers  paraissait  à  ses  yeux!.,. 
Caché  sons  cet  épais  feuillage , 
Vous  pourriez  la  voir  un  moment. 

Allez  ;  il  suffira  que  votre  soin  Teogage 
A  veoir  dans  pe  lieu  charmaot  ; 
Et,  si  je  puis  la  voir,  il  n'importe  commenti 

(AréthusesQit) 

SCÈNE  yii. 

PLTJTON,  ASCALAPHE. 

'ASCALAPUE. 

J'ai  peine  â  concevoir  tfoà  vient  le  trouble  extrême 
Où  le  cœur  de  Pluton  semble  s'abandonner, 
p  L  0  T  G  K. 

Tu  peux  t'en  étonner  * 

J'en  çaié  surpris  moi-même. 

J'ai  trouvé  Prosj9n>jn0  <n  Tisiianl  cefl  lieqx; 
Les  pleurs  coulaient  de  ses  bieanx  yçux  : 
Elle  fuyait  inteidite  et  tremblante. 
Pour  implorer  l'assistance  des  Dieux, 
Elle  tournait  ses  regards  Vers  les  cieuxj 
Sa  douleur  et  son  épouvante 


3oo  PROSERPINE. 

ReDdaicnt  encot  sa  beauté  plus  tondiante. 
Les  accens  plaintils  de  sa  voix 
Ont  ému  mon  àsor  inflexible. 
Qu'un  cœur  fier  est  troublé ,  quand  il  devient  sensible 
Pour  la  première  fois  ! 

ASCALAPBC. 

Contre  rAmonr  quel  coeur  peut  se  défendre  l 
Le  tems  d'aimer  n'est  pas  connu  : 

Il  ÙMt  l'attendre. 
Quand  ce  tems  fatal  est  venu , 
Il  &ut  se  rendre. 
Contre  Pàmour  quel  cœnr  peut  se  défendre  ?. 

PLUT05. 

De  ce  dieu  si  puissant  je  méprisais  les  feux  $ 
J'éprouve  enfin  sa  vengeance  cruelle. 
Je  l'ai  vu ,  ce  di^u  dangereux  ; 
Il  suivait  Proserpine,  il  volait  après  elle; 
J'ai  vu  de  sa  fatale  main 

Partir  un  trait  de  flamme  : 
J'ai  voulu  l'éviter  en  vain; 
Le  coup  a  pénéti^  jusqu'au  fond  de  mon  ame. 

ASCALAPBC. 

L'Amour  a  surmonté  le  maître  des-  enfers; 
Il  n'a  plus  rien  &  vaincre  après  cette  victoire. 

PLVTO»  ET  ASCAtAPHE. 

L'Amour,  comblé  de  gloire, 
Triomphe  de  tout  l'univers. 


ACTE  II,  SCÈKE  TIII.  3oi: 

SCÈNE    VIII. 

PROSERPI5E,  CYANJÉ,  ARÉTHUSE, 
PLUTOH,  ASCALAPHE,  tboupc  db 
BTMP&ES,  de  la  suite  de  PioscMpnie,diaDtant  et  ' 


PIOSIIPIITE  £T    SES  HTMPHES. 

Les  beeox  jours  et  la  paix 
Sont  reTenus  ensemble. 

p  L  ir  T  o  5. 

La  troope  des  npnphes  s'assemble^ 

RetirooSHMHis  Soas  ce  feuillage  épais.    - 

(Platon  et  Ascalapbe  se  retirent  et  se  cachent  ;  el  Proserpine 
et  ses  nymphes  s'avancent;,  en  dansant^et  en  efaoniant.) 

Les  beaux  jours  et  la  paix. 

Sont  revenus  ensemble. 
On  ne  Toit  plus  de  cœur  qui  tremble  ; 
Tout  rit  dans  ces  lieux  pleins  d'attraits. 
^  Les  beaux  jours ,  etc. 

(Proserpine  et  s'fs*^ nymphes  continuent  leurs  danses  et  leurs 
chants.) 

PBOSEBPIBË. 

Belles  fleurs ,  cbarmant  oi^bragc, 
Il  ne  £int  aimer  que  vous. 

LE   CHGECJB. 

On  ne  trouve  rien  de  doux 
Quand  on  est  daps  l'esclavage. 
Grands  Opéras,   i .  sG 


â 


3o2  PROSERPINE. 

PROS&BPIBE. 

Belles  fleuts,etc. 

LE   C  HCEUB. 

Les  amans  n'ont  en  partage 
Qitf  langueais ,  que  soins  jaloux. 

PttOSEBPIBIE. 

BcUes  flenrs ,  etc. 

LE   CBOEUB. 

Belles  fleurs,  etc.  , 

PB0SEBFI5E. 

Quand  un  cœur  est  trop  sensible , 
Rien  ne  peut  le  rendre  heureux. 

>    LE    CHGEUB. 

Dans  les  plus  aimajbles  nœuds 
On  n'a  point  de  bien  paisible 

PBOSEDPIBE. 

Quand  un  cœur,  etc. 

LE  CHŒUB. 

C'est  toujours  un  mal  terrible 
Que  l'ardeur  des  plus  beaux  feux, 

PBOSEBPI5E. 

Quand  un  cœur,  etc. 

LE    CBCeUB. 

Quand  uo  cœur,  etc. 

pboseApihe. 
Que  notre  vie 
Dottfiiire  en?ie! 


Acte  h,  scène  viii,  3oa 

Le  vrai  boisent 
Est  4/B  garder  son  cœur. 

Le  jour  o'éciairo , 

Que  pour  aous  plaire: 

Ces  arbres  verts 
Ont  le  plus  beau  feuillage, 
Et  mille  oiseaux  divers, 

Dans  ce  bocage , 
Imitent  nos  concerts 

Par  leur  ramage. 

Que  notre  vie ,  etc. 

Tout  s'mtéresse 

Dans  nos  désirs* 
Jamais  l'Amour  ne  nous  blesse  : 

Les  doux  plaisirs 
Sont  pojar  les  cœurs  sans  faiblesse. 

Que  notre  vie ,  etCk 

I-B    CHCEUB. 

Que  notre  vie,  etc. 

Pour  nous  défendre 

D'un  amour  tendre , 

Avec  fierté, 
Nous  avons  pris  les  armés  ; 
Nos  biens  n'ont  point  coûté 

De  tristes  larmes: 

La  liberté 
N'a  jamais  que  des  cbarmes.    < 

Que  notre  vie,  etc. 


3o4  PROSERPINE.     - 

'  PROSEÇPIHS. 

Nous  reverrons  bientôt  Cérès  dans  ces  boaux  lieux  ; 
Il  faut  lui  préparer  des  guirlandes  riouvelles. 
Séparons-nous;  voyons  qui  sait  le  mieux 
Assortir  les  fleurs  les  plus  belles. 

LB   C  H  ce  un  DES   s  Y  M  P  H  ES. 

Voyons  qui  sait  le  mieux,  etc. 

(  Les  nymphes  s'écartent  ;  Proserpinç  et  Cyané  cueillent 
des  fleurs.) 


SCÈNE  iX. 


PLIJTON,  PROSERPINE,  ASCALAPHE,  CVAKE;^ 

TBOUPE   DE  DIVIBITiS   DES   ESirEBS.' 
PLUTOV. 

ISFEESALES  divinités, 

Secondez  mon  amour;  sortez.' 

(  Une  troupe  de  divinités  infernales  sort  de  la  terre  et  le 
char  de  Plutoa  parait  en  même  tcms.) 

PROSEnPIBE. 

Ciel  !  prenez  ma  défense» 

PnoSEOPISE    E^T   CTANÉ. 

O  ciel!  protégez  1  innocence. 

PLUTON,   ASCAIAPH6   ET   LES    DIVIBITES    IUPEBSALES. 

Pro'serpine,  ne  craignez  pas 
Un  dieu  charmé  de  vos  appas. 

C  t  A  B  é  ,  retenant  Proserpinç. 
QucUc  barbare  violence! 


ACTE   II,  SCÊWE  IX.  3o5 

PLyTOS. 

Nymplie,  crains  ma  vengeance  : 

Soas  peine  de  perdre  la  voix , 

Garde-toi  de  parler  de  tont  ce  que  tu  vois. 

(  L'ëcharpe  de  Proserpine  demeare  dans  les  mains  de  Cyanë, 
et  Piuton  fuit  placer  Proserpine  près  ^c  lui  sur  son  char.) 

PBOSEBPIHE. 

Ciel  !  prenez  ma  défense. 

PBOSEBPmB   ET  CTASÉ. 

O  ciel  !  prot^oz  l'innocence. 

PlUTOK,  ASCALAPHE  ET  LES  DIVINITÉS  IBIFEBRALES| 
descendant  aux  enfers  avec  Proserpine. 
Proserpme ,  ne  craignez  pas 
TJo  dieu  charmé  de  vos  appas. 


FIK  DU   SECOND  ACTE. 


26. 


i 


ACTE  TROISIÈME. 


Le  théâtre  change,  et  représente  Te  mont  Etna  vomissant 
des  flammes,  et  les  lieux  d'alentour. 


SCÈNE  r. 


ALPHÉE',    ARÉTHtSE,    CRINISE,   troupe 

DE   BTMPHESj'tDOU  P£    DE    DIEUX   DES    BOIS. 
TOUS   E  NSEMBLE. 

JT  ttOSEBPiFE ,  répondez-nous  : 
Hélas!  en  quels  lieux  êtes- vous  ?, 
O  disgrâce  cruelle! 
L'écho  6dèle 
Au  fond  des  bois 
Répond  k  notre  voix... 
Proserpme,  ah!  £kut-il  qu'en  vain  on  vous  appelle  ! 
Proserpine,  répondez-nous ,  etc. 
(  Grinise ,  les  nymphes  étales  dieux  des  bois  se  retirent.) 


ACTE  m,  SCÈNE  II. 

SCÈNE  II. 

ARÉTHUSE,   ALPHÉe. 

ABiTBt7SE. 

K'adoais-jb  pomt  inoocemment 
Causé  tant  de  cris  et  de  buncs? 
D'un  désir  curieux  je  n'ai  point  pris  d'alarmes  : 
Qui  croirait  que  Pluton  pût  devenir  amaint  ?, 
Il  deoiandait  h  voir  Proserpine  un  moment; 

Je  crains  qu'il  n'ait  trop  vu  ses  çbormes. 
Ce  n'est  que  pfir  mes  soins  que  Cérès  peut  sflVoic 
Si  le  dieu  des  enfers  tient  sa  fille  captive  : 
11  m'est  permis  d'aller  ftir  infernale  rive. 
Adieu  :  dans  peu  de  teias  inespéré  Vous  revoir. 
AtPirÉE, 

Pouvez- vous  oublier  qu'il  faut  que  je  vous  suive  ? 
J'ai  sans  cesse  suivi  vos  pas, 
Quand  j'excitaîs  voire  colère  j 
Quand  j'ai  cessé  de  vous  déplaire , 
Pourrais -je  ne  vous  suivre  pas?, 
Ahéthuse. 

Du  maître  des  enfSsrs  p  veux  aller  me  plaindre  ; 

Craignez,  en  me  sabrant,  d'atûrer  son  courroux. 

ALFH^E. 

Pour  mol  rien  n^ist  tant  â  craindre 

Que  d'être  éloigné  de  vous. 
Que  l'absence  de  ce  qu'on  aime 
Est  un  M|)plice  rigoureux 


f 


3o8  PROSERPINE. 

Pour  les  coeurs  amoureux  ! 

Tout  autre  mal  cède  â  ce  mal  ciftrène  ; 

Et  Tenfer  même 

N*a  rien  de  plus  alTittax 

Que  Tabsetice  de  ce  qu'on  aime. 

ALPHÉE    ET    AnéTHUSE. 

Le  bonheur  est  partout  où  l'Amour  est  en  paix. 
Ne  nous  quittoas  jamais. 

SCÈNE  m. 

ALPHÉE,  ARéTHUSE,CRINlSË;  troupe 

DE    STMPHES    ET   DE. DIEUX    DES    BOlS. 
T  O  U  S  E  A  s  B  M  B  I.  E.         ■       • 

Cérès  rerient  :  ali  !  quelle  peine  !  I 

Cadions-Dous  i  s^  yeux. 
Sa  fille  n'est  plus  dfin$  ces  lieux  ; 

Son  espérance  est  vaine. 
Que  lui  pourrons-nous  dire?  ô  Dieux! 
Cérès  revient  :  ah  !  quelle  peine! 
Cachons-nous  â  ses  yciix.       •  .*•   • 
(Les  nymphes  et  les. dieux  des  bois  se  cacherit .-  Alphée  et 
Aréthuse  descendent  aux  «Aters;  Ib  cliar  votant  de  Gérés 
s*arréle,  et  la  Déesse  en  descend.}        .-   ,    . 

scÈNK;.ivr"\ 

CEKÈS.- »    •  •  ' 

Je  valstearoir  ma  fiUe;  elle  est  dans'  ces  campagnes. 
Je  vKa$  4*y  voir  l^os  nymphes  tes  côospagnes. 


ACTE  m,  SCÈNB  ^  309 

le  vais  goûter  près  d'elle  un  sort  doux  et  charmant. 
Hélas!  qu'an  tendre  amour  accroît  l'empre9semeut 

De  la  tendrase  maternelle! 
Proserpine  est  pour  moi  le  gag^  précieux 

De  i'amour  du  plus  grand  des  dieux  : 

Cest  Jupiter  que  j'aime  ea  elle. 

J'ai  rendu  les  humains  heut^Qx;. 

Mes  traraux  ont  condalé  leurs  v.œnx  : 
U  m'est  permis  enfin  d'être  heureuse  moi-même, 
làprès  avoir  acquis  un  immortel  honneur  : 
Quand  chacun  par  mes  soins  goûte  un  bonheur  e:^trême , 
Qu'il  m'est  doux  de  songer  &  mon  propre  bonheur  1 

Les  nymphes  de  ces  lieux  semblent  fuir  ma  présence... 
Proserpine  !  ma  fille  !  ah  !  quel  triste  silence  ! 
ïùsircç  ainsi  qu'on  detait,  dans  cet  heureux  séjour, 

Se  réjouir  de  mon  retour  ?.... 
yenez ,  nymphes ,  venez  ;.  que  ma  fille  s'avance  : 

Venez ,  dieux  des  bois ,  Tenez  tous. 

SCÈNE  y. , 

CÉBES,  CRINISE,  tboupe  de  hthp^es  et  de 

DIEUX  DES  BOIS. 

cinis. 

Ma  fille  n'est  pas  avec  vous? 
Quoi  donc  !  est-ce  le  soio  que  vous  en  deviez  prendre  ?i 
Rendez-moi  Prosergine....  Au  lieu  de  me  la  rendre , 
STous  m'offrez  seulement  des  soupirs  et  des  pleurs. 


à 


3io  PROSERPUTU 

LE    CHCEUB. 

O  Cérès ,  6  mère  trop  tendre  ! 
Ab!  quelles  seront  vos  docdearsf 

CÉBÈS. 

Ciel  !  on  m'ôce  ma  fille  !  Et  qui  l'ose  entreprendre  ?. 

TBOUPÉ   DE   STMPHES. 

Nous  n'avons  pu  l'apprendre , 
Et  l'on  a  pris  le  tems  que  nous  cueillions  des  fleurs. 

cénÈs. 
J'ai  cru  qu'un  éoux  repos  devait  ici  m'atteudre  ; 
Je  n'y  retropve ,  hélas  !  que  de  cruels  malheurs. 

tE   CHCEUB. 

O  Cécès  t  etc. 


SCÈNE  VI. 


CY AN É,  GÉRÉS,  C R IN ISE,  TBOUPE  DE  vtmphes 

ST  DE  DlEU^t  DE  BOIS. 
CXÂVÉ.  ^ 

Je  ressens  vos  ennuis ,  et  j'en  çu7s  tro^  atteinte  ; 
Qooi  qu'il  puisse  arriver,  vous  allez  tout  savoir  : 
Il  faut  que  mon  devoir 
L'emjporte  sur  ma  crainte* 
CCBis. 
Parle ,  ma  chère  Cjané  ; 
Soulage  un  cœur  infortuné. 

CYÀWÉ. 

J'ai  snivi  ProseTjrïne ,  et  j'ai  pVis  sa  défense  : 
HélasJ  tous  mes  l^fibrts  pour  elle  ont  été  vains  -, 


^CTE  m,  SCÈNE  VII.  3fi 

Soo  écharpe  est  eDtre  mes  maios. 

GÉBÈS. 

Ce  cher  et  triste  objet  presse  encor  ma  veogeaDce  : 
Hâte-toi  de  nommer  l'ennemi  qui  m'offense. 

CtAsL 

Ccst....  c'esL.H 

CEBÈS. 

•AcLève. 

CTABÊ. 

Cest.... 

(La  voix  lui  manque ,  et  elle  est  transformée  en  rui^eau.) 

CÉnàs  EÎX  LE  CHGEUn. 

Ah!  qoel  malheur  nouveau! 
Cyané  perd  la  Toix  »  et  n'est  pku  qu'un  ruisseau. 


SCÈNE  yii. 


CÉRÈS,  GRINI3E,  TBOÇPE  de  btmvhesetde 

DIEUX  DES  »OlS. 

c£bès. 
O  flkalheoreose  mère  f 

LÈ.CHCEITB. 

o  trop  malheureuse  Cérès  l 

CÉBÈS. 

tes  dieux  n'ont  pu  souflrir  qu'use  nymplie  sincère 
M'ait  découvert  mes  ennemis  seert^té  ! 


À 


3ia  PROSEBPIKE. 

Je  ne  saurai  donc  pas  sur  qui  lancer  les  traits 
De  ma  juste  colère  ! 
Ou  me  ravit  une  fille  si  chère  ! 
Jupiter  dans  les  cieux,  sourd  â  mes  vains  regrets  | 
Ne  ressent  plus  qu'il  est  son  père  l 
0  malheurense  mère  1 

LE  CHGBUB. 

O  trop  malbeurèuse  Cérès  ! 

CiBÈS. 

Ah!  quelle  injustice  cruelle  ! 

O  dieux  !  pourquoi  m'arrachez-vous 

Uii  bien  que  je  trouvais  si  doiîx  ! 

De  celte  audace  criminelle 
Est-ce  Apollon  ou  Mars  que  je  dois  soupçonner  ?, 
Leurs  mères  en  fureur  n'ont  pu  me  pardonner 

D'avoir  une  fille  si  belle. 
Dois-je  accuser  TAraour  ?  et  scrt^il  aujourd'hui 
A  me  ravir  un  bien  que  je  tenais  de  lui  ?< 

Trahirait-il  mon  cœur  fidèle  ?, 

Ahl  quelle  injustice  cruelle  !  etc. 

Par  mes-^ins  les  champs  de  Cybèle 
De  fruits  et  de  moissons  viennent  d'être  couverts  : 
De  mes  dons  précieux  la  richesse  nouvelle 
Brille ,  par  mes  travaux ,  en  cent  climats  divers  ; 
Et  quand  de  tant  de  biens  j'ai  comblé  l'univers, 
Les  dieux  percent  mott  cœur  d'une  douleur  mortelle. 

Ah  !  quelle  injustice  cruelle  !  etc. 

Après  un  si  sensible  outrage", 
filon  cœur  désespéré  s'abandonne  â  la  rage. 


ACTE  III,  SCÈNE  VIII.  3i3 

Do  monde  tn^  heureos  Je  veux  troubler  h  paix  : 
Brûlons  I  ravageons  tout  ^  détruisons  mes  bienÊiits. 

SCÈNE  VIII. 

CÉRÈS,    TBO0»E     DC    VTMPHES    £T    0£    DIEI7X  ' 
CBAMPÊTBBS,  TBOUPE   DE    SUIVAIS  DB  Cl^Bis, 
TBOVPB  DE  PEUPLES  DE  llCltE. 


(Les  suirans  de  C^rès  rompent  les  arhres ,  en  prennent  def 
branches  et  en  font  des  flambeanx ,  qn*ils  allument  au  fen 
qni  sort  du  mont  Etna  ;  ils  brûlent  les  bled ,  malgrd  les 
efforts  et  les  cris  des  nymphes,  des  dieux  champêtres  et  des 
peuples.) 


CÉBÈS ,  tenant  denx  flambeaux  allumc^s. 

Que  tout  se  ressente 
De  la  fureur  que  je  sens. 

LE    CBOEUB. 

Qnel  crime  avons-nous  fait  ?  Divinité  puissante , 
Écoutez  les  clameurs  des  peuples  gémissans. 

CÊBÈS. 

)'ai  Élit  du  bien  à  tous  ;  ma  fille  est  innocente , 
Et  pour  toucber  les  Dieux  nos  cris  sont  impuissans. 
3'entendrai  sans  pitié  les  cris  des  innocens. . 
Que  tout  se  ressente ,  etc. 

LE    CHGEUB« 

Ah  !  quelle  épouvantable  flamme  ! 

Grand s-Opcras.  I.  ^7 


i 


3i4   PROSERPIHE.  ACTE  III,  SC  VIII. 

Ab  1  quel  rarage  aflreux  ! 
cé-Bès. 
Forions  partout  lliorrear  qui  règne  dans  mon  ame  ; 
Portons  partout  d'horribles  deaiL 

LE    CBOEUB. 

Ah  !  quelle  épouvantable  flamme  !  etc. 


FIN    ou    TDOISIÈME    ACTE. 


ACTE  QUATRIÈME. 

Le  théâtre  diaoge,  et  représente  les  Champs-Elysées.  ' 

SCÈNE  I.    ' 

OMBRES  HEUREUSES,  duntantes^  et  louant  delà  flûte. 

CHŒVB   ]>ES   OMBBSt    HEUBEVSES. 

XJOIS  d'ici ,  loin  de  oous, 

Tristes  ennuis ,  importunes  larmes  ; 

Gardez-Tous ,  gardez-vous 

Dlnterrompre  la  paix  dont  nous  goûtons  les  cbarmei  : 

Gardez-Tous,  gardez-vous 

De  troubler  un  bonheur  si  doux. 

DEUX  OMBBES  HEUBEUSE8. 

O  bienheureuse  vie  ! 
Vous  ne  nous  serez  point  ravie , 
O  doux  plaisirs  <}ont  nos  vceax  sont  comblés  l 
Vous  ne  serez  jamiûs  troublés» 

UEUX  AUTBES  OMBBES  B.EUBEVSES. 

Ah  !  que  ces  demeures  sont  belles  ! 

Que  nous  y  passons  d'benrenx  jours  ! 
Quelle  félicité  pour  les  amans  fidèles  ; 

Ici  les  amours  étemelles  ^ 

Ont  toiqours  les  douceurs  des  nouvelles  amours. 

Ah  !  que  ces  demeures  sont  belles  !  etc» 


3i^  PROSBRPINE. 

DEUX   AUTBES  OMBIIBS  flED  BC»  SES. 

Dans  ces  beaux  lieux  tcmt  ooas  enchante  j; 
l/cs  plaisirs  y  suivent  nos  pas, 
Et  plus  on  en  jonitj,  pins  le  désir  augmente^ 
D'en  goûter  les  appas. 

LE  CHCEUB  DES  OMBBES  HEOBEU8S8. 

O  bienheurease-Tie  l  etc.     . 


SCÈNE  II. 


I^ROSEBPINE,    ASCALAPHE^    kes    ombbes 

QEUBEUSES, 

I 

PBOSEBPIITE. 

Ma  ckèrc  liberté,  que  vons aviez  d'atlmits! 

En  VOUS  perdant,  hélas  !  qae  mon  amo  est  atteinte 

De  douleur,  de  trouble,  et  de  crainte  ! 
Ma  ch^c  libellé,  que  vous  aviez  d'attraits! 

Faut-il  vous  perdre  pour  jamais...? 

Ombres,  que  j'interromps,  souf&ez  ma  triste  plainte; 
Ce  n^est  pas  pour  mon  cœur  que  vos  plaisirs  sont  faits.. 
Plaignez-vous  avec  moi  du  dieu  qui  m'a  contrainte 
De  troubler  la  douceur  de  votre  heureuse  paix. 
Ma  chère  liberté,  etc. 

/  ASCA1.APHE. 

(Aimez  qui  vous  aime; 
Rien  n'est  si  charmant. 
Pluton  n'est  pas  un  dieu  sujet  au  changement  : 
11  vous  oflre  son  cœur  avec  son  diadème. 
Aimez  qui  vous  aime,  etc. 


ACTE  IV,  SCÈNE  III.  3i7 

LE  CnoeVBDES  0M9BES.  • 

Aimez  <pi  vous  aime ,  etc. 

PnOSETtPIRE. 

Que  D'est- il  saiîsiaît  de  sa  grandeur  suprême  Z 

J'étais  heureuse  sans  amaùt  ; 
Mqo  çœar  se  coctenlait  de  r^ncr  sur  lui-même. 

ASCALAP^E  ET  LES  OMBBES. 

Aimez  qui  tous  aime,  etc. 

ÏBOSEBPIHE. 

Ah  !  tans  la  liberté,  sans  sa  douceur  extrême, 
Tout  autra  bien  est  un  cruel  tourment. 

ASCALAPHE   ET  LES  OMBBEI. 

Aimez  qui  tous  aime, 

(  Les  Ombres  heureuses  lorleut.  ) 

SCÈNE  m. 

ARÉTHUSE,  ALPHÉE,  PROSERPINE, 
ASCALÀPBE. 

fBOSttflSE* 

Est-ce  tma  illusion  dont  le  cbarme  m'abuse  ?. 
Est-ce  toi,  ma  cbère  Arétbuse?i 

ABiTHUS£« 

Pluton  veut  qu'avec  tous  nous  demeurions  ici  ; 
Nous  suivons,  sans  efibrt,  la  loi  qu'il  nous  impose. 

ALPHÉE. 

Ce  dieu  veut  soulager  le  chagrin  qu'il  vous  cause, 

^7' 


i 


lit  croit  que,  par  nos  soins,  il  peut  être  adouci. 

ABÉTHUSE. 

Il  attend,  pour  vous  voir,  que  de  votre  colère 
Les  premiers  transports  soient  calmés. 

AtPHÉE    ET    ABÉTHUSE. 

Le  dieu  qbe  vous  charmez 
THe  songe  qu'à  vous  plaire. 

pnoSEB^PiflE,  à  Arëlhufe. 

Que  devient  pour  Tamonr  ton  mépris  éclatant? 
Cet  amant  près  de  toi  goûte  uu  bonheur  paisible. 

.    AVÉTDUSE. 

Bieo  o'f^i  impossible 
A  Tamour  constant* 
En  vain  je  présumais  tant 
D'avoir  un  coeur  invincible. 
Rien  n'est  impossible,  etc. 

AtVHÉE. 

Qi^un  amont  fidèle  est  content 
D'engager  ce  qu'il  aime  â  devenir  sensible  ! 

AlPa^E    ET    ABÉTHUSE. 

Rien  n'^st  îa^Assible,  etc. 

âSCALAPHE. 

Plutoo  poona  trouver  un  favorable  instant. 

Où  SQQ  amour  pouc  vous  deviendra  moins  terrible. 

A8CALAPHE,  AléTBITSE  ET  ALPHEE. 

Rien  n'est  impossible ,  etc. 
Voyet  Cb  béftn  séjour,  ces  charmantes  campagnes, 
Ces  valions  écattés,  ces  pais'dbiles  forêts. 


ACTE  IV,  SCENE  III.  3i9 

PnOSEBPiSE. 

Ne  revcrrai-jepln»  Cérès? 
Ne  reverrai-je  plus  mes  fildèles  compagnes  ? 

ASCÂLAPHE. 

Vous  avez,  par  malheur,  goûté  de  quelques  grains. 
^D'ua  finit  de  ces  iieuK  souterrains. 

ALPHÉeTET   AUEtttUSE. 

Plnton  le  sait,  il  Tient  de  nous  le  dire. 

ASCALÀPat. 

J'ai  prîs  soin  de  l'en  avertir. 
Par  l'arrêt  du  destin,' le  dieu  de  cet  empire 
Peut  Yoos  voir  désormais  autant  qû^  le  déâro. 

ALPHl^E,   AniTBUSE    ET    ASCALAPHE. 

Jamais,  s'il  n'y  veut  consentir, 
f)a  séjour  des  enfers  vous  ne  pourrez  sortir. 

'pnOSERPIH  E. 

Je  ne  verrai  jamais  la  lumière  céleste  l 

(  A  Ascalaphê.  ) 
Dans  une  ardente  soif,  par  un  secours  funeste , 
C'est  toi  qui  m'as  montré  ce  fruit  si  dangereux  ? 
Tu  m'as  caché  l'arrêt  du  destin  rigoureux  ! 

Péifîde  l  c'est  toi  qui  m'abuses, 

Et  c'est  toi-même  qui  m'accuses^ 
lUil  du  moins  le  destin  exaucera  les  vœuK 

De  ma  juste  vengeance  ; 
Ta  ne  surprendras  plus  la  crédule  innocence  ; 

Tu,  seras  un  objet  aflreûx  ^ 

Et  d'un  présage  raalbonreas. 
Va,  crud,  va  languir  dans  Ihotrcur  des  ténèbres  ;   - 


320  PROSERPINE.  - 

Va;  deviens,  s'il  se  peut,  aussi  triste  que  mot  ; 

Que  tes  cris  soient  des  cris  fuuèbres: 
Que  le  sombre  chagrin ,  que  le  mortel  eflroi 
^e  se  lassent  jamais,  de  voler  après  toi. 

(  Âscalaphe  est  traniformé  en  hibou ,  et  s*envoie ,  et  Alphé^ 
et  Ârélhme  se  retirent  en  voyant  arriver  Ptuton.  ) 

SCÈNE  •  IV. 

PLUXON,   PROSERPINE. 

PBOSSnPISE. 

iVsflEz-Tous  GODUe  mol  défendre  un  tâ&éniise?. 

PLUT05* 

Votre  pouvoir  ici  ne  sera  point  borné  ; 
On  n'est  point  innocent  quand  on  peut  vous  déplaire  ^ 
Épuisez,  s'il  se  peut,  sur  cet  infortuné 
Tous  les  traits  de  votre  colère. 

PBOSEBPXSBi 

iToot  ressent  ici-bas  mon  trouble  et  ma  terreur  • 

Les  ombres ,  sans  trembler,  ne  peuvent  plus  m'enicndre. 

Ne  sonflrez  pas  que  ma  furent 
De  cet  heureux  séjour  fasse  un  séjour  d'horreur  ; 
A  la  clarté  du  ciel  hâtez-vous  de  me  rendre. 


Ne  regrettez  point-tant  la  lumière  des  cieux. 

Des  astres  faits  pour  nous  éclairent  ces  beaux  lieux. 

Jamais  un  verdojfUnt  feuillage* 
Ne  cesse  de  parer  les  arbres  de  nos  bois  : 
Sans  cesse  dans  nos  champs  nous  trouvons  à  la  fois 


'Acte  iv,  scène  iv.  321 

Des  fmits,  des  flems,  et  de  l'ombrage  ; 
Et  1«  tems  aflQ:«iix  des  frimas 
Est  h  seole  saisoo  que  Toa  n'y  coonait  pas. 

mOSERPlVE. 

'Mon  triste  coeur  ne  peut  connaître 
La  douceur  des  appas  qu'on  Toit  ici  paraître. 
Hélas  !  ces  lieux  si  beaux,  ou |e  frémis  d'eflroi, 

Sont  toujours  les  enfers  pour  moi. 

PLUTOir. 

Je  suis  roi  des  enfers;  Neptune  est  toi  de  Tonde  ; 

Nous  regardons,  avec  des  yeux  jaloux, 
Jupiter  plus  heureux  que  nous  \ 
Çou  sccptie  est  le  premier  des  trois  sceptres  du  monde. 
Bfais  si  de  votre  cœur  j'étais  victorieux, 
Je  serais  plus  content. d'adorer  vos  beaux  yeux, 
'Au  milieu  des  enfers,  dans  une  paix  profonde. 

Que  Jupiter,  le  plus  heureux  des  dieux, 
N'est  content  d'être  roi  de  la  terre  et  des  cieux. 

PKOSEKPIHE. 

Que  deviendra  Cérès  h  qui  je  suis  si  chère  ? 
<}uelle  snrpijse  !  hélas }  quelle  douleur  amtrrc  ! 
Hélas! 

PLUT05. 

Ne  donnerez-vous 
Des  soupirs  qu'à  votre  mère  ? 
Aimez,  beauté  trop  sévère  :  •  - 

Les  soupirs  d'amour  sont  doux. 

PnOSERPlNE.  • 

D'uQ  insensible  coeur  (fuç  pouvez-vous  attendre  ? 


3aa  ~  PftOSERPIWE. 

PCUTOB. 

J'ignorais  le  pouvoir  dès  Iraîis  qui  m'ont  Sarpris; 
Mon  cœur  ne  eooiuifîssaHt  rien  de  doux,  ni  de  tendre. 

Ne  pourrat-ie  tous  apprendre 

Ce  (jue  vous  m'avez  a^ipta  2} 

ntOSEBPIirE, 

Dieu  cruel  !  vota  n'aimez  que  lei  pleurs  et  les  cris. 
Deviez-vous  aux  efafèrs  me  contraindre  à  descendre  ?, 
Vous  m'ôtez  le  bonheur  qoÀ  m'étak  destiné! 

PLtTTOV. 

Est-ce  à  mdt  qu'il  faut  vous  en  prendre  Z 
Accusez-en  l'amour  que  vous  m'avez  donné. 

PnOSERPIVE. 

Voulez-vous  me  causer  d'étemelieS  alarmes  2 

PLtrTOlil. 

Voulez-vous  me  causer  d'étemels  déplaisirs  ^ 

pnOSEBPIBIE.    , 

Laisses-mol  suivre  en  paix  mes  innocens  désirs. 

PLnTON. 

Laissez-moi  la  doiKçur  de  voir  toujours  vos  cLarmcs, 
phoseupiiiie. 
ATbyec  couler  mes  larmes. 

PtUTOV. 

écoutez  mes  soc^irs. 

(   '  Mon  amour  fidèle 

9  LU  TON.  <    Ne  touche  point  voire  cœur  ! 

(  Ah!  quell»  rigueur  ! 


ACTE  IV,  SCÈKE  V.  323 

i  Ma  douleur  moiteUe 

»iiosEBPisE.  I    Ne  touche  poiutvotfe  cœur.' 
\  èh  1  quelle  riguiur  ! 

PLUTOH. 

N'importe,  fussif^-T0i|3  ceqt  ibis  plfi$  ipIfWBiiiipe , 
BfoQ  {imour  cntrc|irend  de  vaincre  votre  haine. 

SCÈNE  V.     * 

PLUTÇN,    PROSERPINE,    cïiCeub   d^ombres 

,  HEUBEDSES,  CHOEUR  DE  DIVISITES  {SFEBRALES, 
DITIHITÉS'IHFEX^SAles  de  la  suite  de  PlutOD,  chan- 
tantes, tES  TROIS  JvIgES  DES  ENFER$,  DIYIHITES 
IBFEBBrAliES  ,  dansantes,  OMBRES  HE.nBEl7S£$  , 
daniantes. 

PttJToil* 
Que  l'on  suspende  ici  les  touimens  étemels 

Des  plus  criminels  : 
Qa'aux  enfers,  en  ce  jour,  tout  soit  exempt  de  peine.... 
Vous  qu'un  heureux  repos  suit  après  le  trépas.... 
Et  TOUS ,  dieux,  mes  sujeu ,  venez ,  hâtez  Vos  pas  ; 

Rendez  hommage  à  votre  reine , 

Admirée  ses  divins  appas.... 

Régnez',  aimable  souveraine  ; 

Régnez  &  jamais  ici  bas. 

LESCHCeUBS  DES  OHBBES  HEUREUSES  ET  DES 
DIVmiTéS   IBPERVAIiE'S. 

Rendons  hommage  k  notre  reine. 
Admirons  se»  dirins  appas.... 


324  PROSERPINE. 

Régnes,  aimable  souveraine,  etc. 

(  Les  ombres  tbenrcuses  et  les  divinité»  infernales  rcnâct/t 
hommage  à  Proserpine ,  et  lAi  apportent  de  riches  prësens; 
elles  témoignent  leur  joie  par  leurs  danses  et  par  leurs 
chants.) 

CHCBVn  t>E8  OMfeftCS  BEU1IEI78ES. 

C'est  assez  de  regrets  ; 
Cest  verser  trop  de  larmes  : 

GoAtez  les  attraits 
D'an  destin  plein  de  channes  ; 
Platon  aime  mieux  que  Okh,       ^ 
Vue  mère 

Vaut^elle  un  ëpoax  ? 
L'amour  doit  touiours  plaire  ; 

iLes  soins  en  sont  doux. 
Un  cœur  est  trop  sauvage , , 

S'il  change  l'usage 

D'un  bien  si  charmant  | 

Et  c'est  grand  dommage 

D'en  Élire  un  tourment. 
Triomphez  dans  ces  lieux  ; 
Cest  pour  vous  que  soupire 

L'un  des  plus  grands  dieîa. 
Possédez  son  empire  ; 
Tout  cède  au  pouvoir  de  vos  yeux. 
Une  mère,  etc. 

tE    CnCBUB    DES    DlTlHlTlEs    ISP£KirA.tE8    Et   DES 
OMBDES    HEUBEU8ES. 

Dans  les  enfers ,     . 
^      Tout  rit ,  tout  chante  : 
On  votis  doit,  beauté  charmante , 


ACTE  IV,  SCÈNE  y.  3a5 

La  doacear  de  dos  concerts. 
Vd  dieu  sévère 
'  Par  Tos  yeox  est  enflammé  ; 
Tout  soo  empire  vous  révère  : 

Qu'a  est  doux  d'avoir  charmé 
Un  cœur  qui  n'a  jamais  aime  ! 
Que  vos  appas 
Auront  de  ^oire  ! 
Ils  étendent  leur  victoire 
Jusqu'où  rè^e  lé  trépas. 

Un  dieu  sévère ,  etc. 


ri»  DD   QUATBlèllE   ACTE, 


Crana»-Opértj.  r.  ^3 


à 


^^^^'^•^'<*»^l»»^»»w>^  ^,y  ^-«^  - 


> 


ACTE  CINQUIÈME. 

Le  théâtre  change ,  et  représcotc  le  palais  de  Pluton.. 

SCÈNE.  I. 

PLUTON,    LES    TROIS   JUGES    bts    EffFEBS,    LES 
TBOIS  FCBIES,   TBOUPE   DE   DIVINITES   IlIFEBEUlES^ 

PLUTOV. 

iVocs ,  qaî  recoDoaissez  ma  sapréme  puissance ,  ^^ 

DoDoez-moi  des  conseils ,  donnez-moi  du  secours.  '   ^ 

L'orgaeillenx  Jnpiter  m'oflfense  : 
Il  vent  rompre  oujourdlmi  l'heureuse  intelligence 
Que  nous  avions  juré  de  conserver  toujours. 

Les  Dieux  ont  aimé  ions ,  et  le  dieu  du  ciel  mMe  ■ 

I 
S'est  laissé  cent  fois  enflammer. 

Cest  la  première  fois  que  j'aime ,  •' 

Et  l'on  veut  me  ravir  ce  qui  m'a  su  cbanner.  i 

Ah  !  c'est  une  rigueur  extrtoie 
De  condamner  un  coeur  i  ne  jamais  aimer.  | 

'    1 

C'est  votre  reine  qu'on  demande  y 

Jupiter  veut  que  je  la  rende , 
Et  Mercure  prétend  l'enlever  d'ici4)e8. 
Pouvons-nous  endurer  que  l'on  nous  la  ravisse  ?, 


LE     CHOBUB. 

Noo ,  non  ;  c'est  une  injustice 
Que  nous  ne  sooflHroDS  pas. 

PLDTOII. 

Et  par  quel  droit  (aut-il  que  Jupiter  s'obstine 
'À  troubler  le  bonbeur  que  l'Amour  me  destine  ? 
Mon  pouvoir  n'est-il  pas  indépeadant  du  sien  ? 
Gardons  Proserpioe  ; 
hes  cote  ne  rcodeoi  rien.  ' 

LE    CHOBUB. 

Gardons  Proserpine ,  etc. 

LES  TBÙIS  JUGES  DES  ESFEBS. 

Proserpioe  a  goAté  des  fruits  de  Totre  empira  : 
Elle  est  d  vous  ,  on  ne  peut  vous  l'ôter  ; 

tàax  arrêts  du  Destin  les  Dieux  doivent  souscrire  : 
C'est  vainement  qu'on  y  veut  ré;iister* 

PLUTOS. 

Que  le  ciel  menace ,  qu'il  tonne  ; 

Il  faut  que'  rien  ne  nous  étonne  : 

Nous  avons  pour  nous  en  ce  jour 

Le  Destin  et  l'Amour. 

LE    CBGEUB. 

Que  le  ciel  tji^ace ,  qu'il  tonne ,  etc. 

LES  TBOIS  Fir&lES, 

Plutôt  que  de  soofirir  l'injure 
Que  le  ciel  vent  faire  aux  enfers  ; 
Beurrions  toute  la  nature  ; 
PérisM  l'uniTcrs! 


328  PROSERPINE. 

LE    CnCEUB. 

Renversons  toute  la  nature  ,  etc. 

USE  DES  FUBIES. 

Retirons  les  géants  de  leur  prison  obscure  ;' 
Des  Titans  enchaînés  il  faut  briser  les  fers. 

LES  FUBIES  ET  LE  CHŒUB. 

Renversons  tonte  la  nature ,  été. 

(Platon,  lei  Juges  des  enfers,  les  Furies  et  les  divinités 
infernales  disparaissent.) 

SCÈNE  II. 

(Le  théâtre  change,  et  représente  mie  solitude.) 
CÉRÈS. 

DÉSEBTS  écartés,  sombres  lieux, 
Cachez  mes  soupirs  et  mes  larmes. 
Mon  désespoir  a  trop  de  charmes 
Pour  les  impitoyables  Dieux. 
Déserts  écartés ,  etc. 

Les  Dieux  étaient  jaloux  de  mon  sort  glorieux  ; 

C'est  un  doux  spectacle  à  lenrâ  yeux 
Que  les  malheurs  cruels  dont  je  suis  poursuivie. 
Ils  se  font  un  plaisir  de  mes  cris  furieux. 
Jupiter  m'a  livrée  à  leur  barbare  envie  :  ' 

Jupiter  me  trahit  !  ma  fille  m'est  ravie  l 

Je  perds  ce  que  j'ainoaiis  le  mieux  ! 
Infortunée ,  hélas  1  le  jour  m'est  odieux  9 
Et  je  suis ,  pour  jamais ,  condamnée  à  la  vie  ! 


^  ACTE  V,   SCÈNE  IV.  Saij 

(âb!  je  ne  paî$  sooflrir  la  lumière  des  deux  ; 
MoQ  désespoir  a.  trop  de  cbarmcs 
Pour  les  impitoyables  Dieux. 
Déserts  écarté^ ,  etc. 

SCÈNE  III. 

CERÈS,  VOIX  I9FEIlBrALES. 

cÉBks. 
Qxjzts  abîmes  se  sont  ouverts  î 
Qu'enteods-je  ?  quel  alBVeus  mnnnnre  ! 

TOIS    inFEBVALES. 

Renversons  toute  la  nature  ; 
Périsse  l'univers! 
CE  nés. 
Le  ciel  n'est  point  toucbd  des  maux  que  j'ai  souflferts. 
L'eofer  prendrait-il  part  aux  peines  que  j'endure  ? 

VOIS   IBFEBSALES. 

Renversons ,  etc. 

Périsse  l'univers! 

SCÈNE  IV. 

ÂLJ^HËE,  ARÉTHUSE,  CERÈS. 

(Aipbée  et  Aféthace  sortant  des  enfers.) 

CÉnès. 
Ne  m'npprcndrefsvons  point  où  ma  fille  peut  être  ? 

28. 


i 


33d  PfiOSERPl^'E. 

ABÉTHUSE. 

Votre  ennemi  secret  veut  se  faire  connailre  : 

Eniin  vous  pouvez  tout  savoir. 
De  l'empire  infernal  le  redoutable  maître 

Tient  votre  tille  en  son  pouvoir. 

CÉBis. 

L'enfer  retient  ma  fille  !  ô  ciel  l  à  sort  barbare  ! 

L'éternelle  nuit  nous  sépare  1 
Ma  chère  Proserpine  !....  O  regrets  superflà»  ! 

Hélas  !  je  ne  la  verrai  plus  l 

Dieux  l  ma  fille  n'est  point  coupable  ; 

Pourquoi  Platon  inexorable 
Veut-il  dans  les  enferç  l'accabler  de  douleur  ?j 

ALPHES   ET   AB^THUSE. 

C'est  quelquefois  un  grand  maliieuc 
Que  d'être  trop  aimable. 

CÊB^S. 

Platon  l'aime  l  et  l'Amour ,  pour  me  désespérer , 
Fuit  soupirer  un  coeur  qui  doit  élre  inflexible  1 

AtPHÉE  ET    ABÊTQUSE.  , 

,  Quel  cœur  se  peut  assurer 
D'être  toujours  insensible  ? 
Quel  cœur  se  peut  assurer 
De  ne  jamais  soupirer  ? 

Al-PHèE. 
Le  ^cu  qui  pour  elle  soupire 
Est  un  des  Uôis  grands  dieux  maîtres  de  i'wt'veis. 

AnÉXHUSE. 

Elle  est  reine  d'un  vaste  empire. 


ALPHÉEET    AUÉTHUSE. 

Il  est  bcaa  de  régner  même  dans  les  enfers. 

cinès. 
Quelque  bonoejw:  qii'aax  eolècs  op  s'en^preese  ^  lui  rendre  ^ 
£ile  n'en  peut  sortir,  et  je  n'y  ppis  descendre. 

Je  la  perds ,  je  perds  tout  espoir  : 

Je  ne  pourrai  jamais  la  voir. 

ALPH^E    ET    ABÉTHUSE. 

lupîtcr  la  demande  ;  efr  l'enfer ,  plein  d'alarmes, 
Pour  la  garder  a  pris  les  armes. 

Jupiter n*est.doce  pas  iuse9si^le  aux. regce^ 

De  la  malheureuse  Qétès  î 
Obtenez,  Dieti  puissant,  que  ma  £Ue  revienne; 
Saus  troubler  vôtre  paix  j'ijrais  suivre  Ses  pas, 
Si  je  pouvais  passer  dans  la  nuit  du  trépas. 
Ne  souffrez  plus  que  l'enfer  la  retienne, 
Grand  Dieu  !  c'est  voire  ûile  aussi  bien  que  la  mienne; 
C'est  votriili  $(Ue,' bêlas! 
Ne  l'abandonnez  pas. 

(  Mercure  descend  du  ciel.  ) 

SCÈNE  V.  ' 

MERCUFE,  CÊRÈS,   âLPÏIÉE,  ARÉTHUSE, 

Tons  les  Dî«iit  soTit  dWrord  ^  poiïc  voiutout  »'inl*ï^=5^* 

PioSi^ipliK:  venu  le  jour; 
ÊUe  suivra  C^Pès  et  Piution  ioar^lo«tr« 


33a  PROSERPIRÉ. 

£lle  partagera  son  tems  et  sa  tendresse 

Entre  la  nature  et  l'amour. 
.Vous  verrez  votre  fille ,  et  Jnpiter  lai  même 
A  pris  soin  qu'à  vos  vœnx  le  sort  ait  répondu. 
cÉnÈs. 

(Après  une  peine  extrême, 

Qu'un  bien  qu'on  avait  perdu 

Est  doux,  quand  il  est  rendu 

Par  les  soins  de  ce  qu'on  aime  ! 

MEBCUBE. 

L'Hymen  assemble  tous  les  Dieux 
De  l'empire  infernal,  de  la  terre  et  des  cieux. 

(Le  ciel  »»ouvre,  Jupiter  parait  accompagne  des  divimités  cé- 
lestes. Plulon  et  Proserpine  sortent  des  enfers  sur  un  trône 
où  Cërès  va  prendre  place  près  de  sa  fille.  Une  troupe  de 
divinités  infernales  richement  parées  accompagne  Pluton  ; 
et  une  troupe  de  divinités  de  la  terre  vient  prendre  part  à 
la  joie  de  Cérès  ,  et  à  la  gloire  de  Proserpine.  ) 


SCÈNE  VI. 


JUPITER,  PLUTON,  PROSERPINE,  CÉRÈS, 
MERCURE,  ALPHÉE,  ÀRÉTHUSE;  tboupes 

DE  DIYlRITiS  CÉLESTES,  TEBBESTHES  ET  19- 
FEBNALES;  DIVINITÉS  CÉLESTeS|  qui  jouent  de 
divers  instrumens,  et  qui  accompagnent  Jupiter  dans  la 
gloire;  DiyiBiTÉS  CÉLESTES,  qui  chantent  dans  les 

machines.; TB OU PE  DE  DIVIRITES  DE  LA  TEBBE  ET 
IRFEBNALES,  chanUnt;  TBOUPES  PB  DlYIBilTÉS 
lit'EB {TALES,  dansant. 

JUPITEB. 

Ckuès  j  qD<3  de  VOS  pleurs  le  triste  cours  finisse  ; 


L 


ACTE  V,  SCÈNE  VI,     '  333 

^'avec  Platon  Proserpine  s'unisse. 

Que  Ton  enchaîne  poar  jamais 

La  discorde  et  Li  gaene. 

Dans  les  enfecs,  dans  les  cieax,  sur  la  terre, 

Tont  doit  jouir  d'une  éternelle  paix. 

LES   CHOeUBS. 

Qae  Ton  encbaine  pour  jamais,  etc. 

(Les  Divinités  célestes,  terrestres  et  infernales  témoignent  ^ 
par  leurs  chants  et  par  leurs  danses ,  la  }oie  qu'elles  ont  de 
voir  l'intelligence  rétablie  entre  les  plus  grands  dieux  du 
monde, par  le  mariage  dt  Pluton  ci  de  Proserpine.) 


FI5    DE    PnOSEBPlKE. 


J 


PERSEE , 

TRAGÉDIE-LYRIQUE, 
PAR  QUINAULT, 

Représentée  «  pour  la  première  fois ,  en  cinq  actes ,  le 
17  avril  1682;  arrangée  et  rédqite  en  quatre  actes, 
par  Marmontel ,  et  remise  le  17  mai  1770.  Musiqqe 
de  Pfailidor. 


SOTi.  Totit  ce  qui  est  de  Marmonlcl  est  précédé  degailtt' 


PERSONNAGES. 


CÉPHEE. 
CASSIOPE. 
MÉROPE. 
ANDROMÈDE. 
PHINÉE. 
Une  Éthiopienne. 
XJu  Ethiopien. 
Un  second  Éthiopien.^ 
Une  seconde  Ethiopienne. 
Un  troisième  Éthiopien. 
PERSÉE. 
MERCURE. 
Un  Cyclope. 
Une  guerrière. 
Une  Divinité  infernale. 
MÉDUSE. 
EURIALE. 
STÉNONE. 

Un  quatrième  Étlùopien. 
Un  Triton. 
VÉNUS. 

Éthiopiens  et  Éthiopiennes. 
Cyclopes, 

Nymphes  guerrières. 
Miuistres  du  Sommeil. 
Soldats  Ethiopiens. 
.  Soldats  indiens. 


PERSEE , 

TRAGÉDIE-LYRIQUE. 

ACTE   PREMIER. 

Le  théâtre  représente  une  des  cours  du  palais  de  Gcpliée. 

SCÈNE  I. 

CÉPHÉE,   CASSIOPE  et  leur  suite. 

CÉPH^E. 

J  E  crains  que  Jnnon  ne  refuse 
D'apaiser  sa  babe  pour  nous  ; 
Je  crains,  malgré  nos  vœux,  que  Taflreuse  Méduse 
Ke  revienne  servir. son  funeste  couiroui. 
L'ÉiLippte,  en  vain,  à  mes  lois  est  soumise  ; 

Quelle  espérance  m'est  permise , 
Si  le  ciel  contre  nous  veut  toujours  être  armé?. 
Abl  si  Jnnon,  que  votre  orgueil  ofiènse, 
N'arrête  sa  vengeance, 
Je  serai  bientôt  roi  d'un  peuple  inanimé. 

CASSIOPE. 
Heureuse  épouse,  heureuse  mère, 
Trop  vaine  d'un  sort  glorieux, 
Grands-Opéras,  i.  29 


338  PEKSEE. 

Je  n'ai  pii  m'empécber  d  exciter  la  colère  ^ 

De  Tépouse  du  dieu  de  la  terre  et  des  cieux. 

J'ai  comparé  ma  gloire  à  sa  gloire  immortelU;. 

La  déesse  punît  ina  fierté  briminelle  j 

Mais  i'esipère  flccbir  son  courroux  rigoureux. 

J'ordonne  les  célèbres  jeux 
Qu'en  rbonneùr  de  Jnm^n  6n  cos  lieux  cj^uipré^tare. 
Mon  orgueil  oflfensa  cette  divinité  : 

Il  &nt  qoa  mon  te^ect  répare 

Le  ciime  de  ma  vanité. 


Il  n'est  point  de  grandeur  qjiie  le  ciet  irrité 
li'abaisse,  quand  il  veut,  et  ne  réduise  en  poudre: 
^  Mais  un  prompt  repentir 
Peut  arrêter  la  foudre , 
Toute  prête  à  partir. 
»  Je  vais,  avec  Persée,  implorer  l'assistance 
»  Du  dieu  dont  il  tfébt  la  naissance. 
»  Il  est  fils  du  plus  grand  des  dteux  ; 
»  ÂpaisËz  de  Itmon  la  cfilère  ftftéle  : 

»  Ce  serait  pofur  die  tn  ces  \kxilK 
»  Un  objet  odieux 
»  Qu'un  fils  de  sa  rivale. 

(Il  son.) 


ACTE  I,  SCÈÎTE  III.  339 

SCÈNE  II. 

CAaSlOPE,  M^RQPE. 

CASSIQPE. 

Vous  savez  mes  desseins  pour  vons: 
Pbtnée  est  destin^  pour  épouser  ma  Hlle  ; 
Ma  soîur,  par  votre  Lymen ,  il  m'aurait  élc  doux 

D'unir  Persée  à  ma  famille  : 
Mais  je  le  veux  en  vain,  l'amour  n'y  consent  pas  : 
'Aux  yeux  de  ce  béros  ma  fille  a  trop  d'appas. 
MinoPE. 

Le  fils  de  Jupiter  Tadore  ; 

Croyez-vous  que  je  sois  encore 
A  m'en  apercevoir  ? 
J'y  prends  trop  d'iutérét,  pour  ne  le  pias  savoir.] 

CAS  SI  OPE. 

Quk  vaincre  cet  amour  la  gloire  vous  excite. 
Pour  prendre  soin  des  jeux,  il  faut  que  je  vous  quitte. 

(Elle  sort.) 

SCÈNE  IH- 

MÉROPE. 

ÀB  !  Je  gprde^î  bien  mon  coeur, 
Si  je  puis  le  reprcudre. 
Uélas!  moa  cœur  soupire,  cl  ce  soupir  trop  tendre 


J 


34o  P  ERS  SE. 

Va,  malgré  mon  dépit,  rappeler  ma  langueur: 
L'amonr  est  tocqonrs  mon  vaÛKpieur, 
Et  je  veux  en  vain  m'en  défendre. 

Ah!  j'ai  trop  engagé  mon  cœor  j 
Je  ne  puis  le  reprendre. 

Andromède  vient  voir  les  jeux; 
Phinéc  avec  elle  s'avance  : 
L'espoir  c^  leur  hymen  flatte  encore  mes  vœux, 
Et  c\si  ma  dernière  espérance. 

(Elle  sort.) 

SCÈNE  IV. . 

ANDROMÈDE,  PHINÉE. 

AnnnonièDE. 
»  A  calmer  vo$  chagrins,  à  vous  rendre  l'espoir 
»  Mon  devoir  ne  pent-il  suffire?. 

PHinÉE. 

E'amoor  n'a-t-il  rien  â  me  dire  ?. 
»  Ne  fertfx-vous  jamais  parler  que  le  devoir? 


Persée  a  su  vous  plaire ,  et  d'une  vaintf  excuse 
«Vous  voulez  éblouir  mon  amour  outragé  \ 

Mais  la  raison  me  désabuse. 

Ah!  puisqu'il  a  sitôt  changé. 
Non ,  jamais  votre  cœur  ne  fut  bien  engagé. 

AlfOnoMÈDE. 

Un  père  sur  mes  vœux  vous  donne  un  juste  empire  ; 


ACTE  I,  SCÈKE  IV.  341 

Vous  ne  devez  pas  craiodre  an  dangcfaoïi  iàul. 
Uo  amuMAy  awvé  do  boobear  qa^l  dé$iie, 
Peot-U  être  îiloiix  d'an  nuflMQrcax  rival  ?. 

Noo,  je  De  pois  sonfiHr  qu'A  partage  nne  diaîne 

Poot  le  poid»  me  pandt  channaot  : 
Qoaod  TOUS  f  accableriez  du  plas  cruel  tounncat, 

Je  aérais  jaloiis  de  sa  peinfi. 

Maïs  il  ne  fait  point  Toîr  de  dépit  éclatant. 

S'il  est  si  malheiirenx ,  sa  constance  métonnc  : 
L'amour,  que  l'eqx>ir  abandonne , 
Est  moins  tranquille  et  moins  constant* 

▲  VDBOMàSE. 

Qnel  plaisir  prenez-vons  i  vons  troubler  vous-àiémc  ? 
Et  de  quoi  votre  amour  peut-il  être  alarmé?   ' 
Je  fuis  votre  rival  avec  un  soin  extrême  : 

Est-t-on  accoutumé 

De  fuir  ce  que  Ton  aime? 

PHI5éE. 

Vous  suivez  h  regret  la  gloire  et  le  devoir, 
Ea  fuyant  un  amaui,  â  vos  yeux  trop  aimable. 

Vous  l'avez  trouvé  redoutable, 

Puisque  vous  craignez  de  le  voir. 

ABDBOMiDE. 

Tout  vous  blesse,  tout  vous  irrite  ; 
iVous  m'apprenez  à  craindre  un  béros  glorieux. 

Je  ne  veux  point  voir  son  mérite; 
Votre  importun  soupçon  veut-il  m'ourrir  les  yeux? 

29. 


J 


34a  PERSEE. 

^   PHiaÉE. 

Ah  !  $1  voos  le  flattiez  de  la  moindre  espérance, 
Le  dieu  qu'il  vous  fait  croire  auteur  de  sa  naiasâDce, 
Dîkt-il  faire  éclater  son  ^odroysnt  courroux , 
He  le  sauverait  pas  de  mon  transport  jaloux* 

luste  cieU  >  ^ 

PBIBÉE. 

Vous  tremblez?...  Persée  a  su  voos  plaire, 
Si  son  péril  peut  vous  troubler. 

AHDDOIlkOE. 

Le  ciel  n*est  que  trop  en  colère, 
Et  vous  bravez  un  dieu  qui  peoi  vous  accabler; 
»)  Cyejx,  est  trop  pour  np  pas  trembler.   , 
(  On  entend  une  symphonie.) 

»  Le  peuple  vient.  Je  vous  kî^e;  inhumaine  ! 
»  Je  voulais  ne  tenir  mon  bonheur  que  do  vous  ; 

»  Mais ,  puisque  ma  tendresse  est  vaine , 
»  Songez  qu'un  père  a  nommé  votre  époux. 

(  Il  sort.) 


ACTE  I,  SCENE  V.  343 

SCÈNE  Y. 

CASSIOPE,  ANDROMÈDE,  suivahs  de  cas- 

SIOPE  ,     QUADmiLES    DE     JEURËS     PEnSOBNES 
CHOISIES  POCn    LES    JEUX. 

(Marcb9  4  ppur  l'eiiUrée  d»  la  danie  et  des  choeun.) 

DEUX    É^HIOPIËSS    ET    USE    ETHIOPIEKRE,    AVEC 
LE    CHCBITR. 

n  Tout  un  peuple  ici  vous  implore , 
p  O  Déesse  î  veillez  sur  nos  jours  innocens  : 
»  Laissez-vous  désarmer  encore 
»  Par  DOS  respects  et  par  nos  chants. 

CASSIOPE. 

O  Junon ,.  puis^^p^  d^cs^ , 

Qu'on  pe  pe^^  as^  rév4rer, 
3'asscmhle ,  en  voire  nom ,  cette  aimable  jeunesse , 
Que  le  flambeau  dliymen  <jloit  biemôt  éclairer  : 

Chacun  va  montrer  son  adre^ , 
Poar  dbputer  les  prix  que  j'ai  fait  préparer  : 
Détournez  loin  de  nous  une  liainc  implacablo  : 

Si  l'orgueil  me  rendit  coupable  , 
Je  reconnais  mon  erime  et  vent  le  réparer. 

Voyez  d'un  regard  favorable 
Ces  jeax ,  qu'en  votre  honneur  nous  allons  célébrer. 

n  (Airs ,  pour  lu  dispale  des  prix  de  la  hitte  et  de  l'arc.) 
V  V9E  ÉTBlOPlENBE,  d*abord  seule,   et  en&uile   avec 

le  chœur. 
9  Des  beaux  nœuds  de  l'hymen  protectrice  adorable  , 

u  Sépaudeft  sur  nous  tos  faveurs  : 


344  PEBSEE. 

»  Que  vos  bîtofaits ,  de  sa  cbaine  darable 

»  Fasseot  poar  doos  une  chaîne  de  fleurs. 

l'CTHlOPIEflRE,  seule. 

»  Enyain  TAmour  Sait  dans  nos  âmes 
»  Faire  éclore  et  briller  ses  feax  : 
»  Dieu  d'hymen ,  sans  tes  douces  flammes , 
»  Pour  les  coeurs  innocens  est-il  des  {ours  heurenl  ?, 

»   l'ÉTHIOPIEUNE  ET  LE  CBCeu^. 

%  Des  beaux  nœuds  de  l'hymen ,  etc.* 

»  (Airs ,  pour  la  dispute  du  prix  de  la  danse.) 
»   LE    CHOEUn. 

n  Joignez  vos  sons  à  nos  chants  de  victoire  » 

»  Fièrc  trompeue ,  éclatez  dans  les  airs  : 

»  Des  vainqueurs  annoncez  la  gloire , 

»  De  leur  triomphe  instruisez  Tunivers  : 

»  Fière  trompette ,  éclatez  dans  les  aiis. 

»  (  Pendant  le  chuur  précédent  les  vainqueurs  reçolTent  les 
dilTérens  prix.) 

SCÈNE  .VI. 

LES  pBéCEOEHs,  ua  ETHIOPIEN. 

L'iTHIOPlES. 

Fdtobs  ,  nos  vœux  sont  vains ,  et  Junon  les  refuse. 
De  nouveaux  malheureux ,  en  rochers  transformes , 
>)  Ne  prouvent  que  trop  bien  à  nos  cœurs  alannés 

Qu'on  a  vu  paraître  Méduse  ;  , 

»  Méduse  revient  en  ces  lieux. 

tCASSiOPE.         *"     . 

.Gordons-nous  de  la  voir ,  la  mort  est  dans  ses  yeux. 


ACTE  I,  SCÈNE   VI.  345 

TOUS  ENSEMBLE,    enfuyant 
Payons  ce  monstre  terrible  ; 
SaavoBS-Dou9 ,  s'il  est  possible  : 
SanTOos-uous ,  hâtons  nos  pas , 
Payons  on  afireax  trépas. 


¥IV  DU  PnEMIER  ACTE. 


J 


ACTE  SECOND. 

Le  théâtre  représente  les  jardina  da  palais  de  G^thée* 

SCÈNE  I. 

CàSSiOPE,  PHINÉE. 
CASSIOPE. 

r  AUT-n.  que  contre  nous  tout  le  ciel  s'intéresse  ? 
Dieux ,  ne  pais- je  espérer  de  vous  fléchir  jamais  21 

PHISÉE. 

»  Vos  pleurs  désarmeront  leur  haine  vengeresse. 
Méduse  se  retire ,  elle  nous  laisse  en  paix. 

CissiopE. 

»  Elle  peut  reveùir ,  elle  peut  nous  surprendre  ; 

»  Junon  s'obstine  à  se  venger  : 
»  Contic  elle  aucun  des  dieux  n'a  soin  de  nous  déTendrc; 

»  Mon  seul  espoir  est  d'engager 

»  Jupiter  à  nous  protéger. 

PBIB^E. 

»  Je  vous  entends  :  je  sais  qu'elle  est  votre  espérance. 
»  l'crséc  a  beau  vanter  sa  divine  naissance  ;  4 

»  Après  votre  protnesse ,  après  le  cliotx  du  roi 
»  t>a  pruiccsse  doit  être  à  moi. 


ACTE  II,  SCEKE   II.  347 

SCÈNE  II. 

CEPHÉE,  PHIKÉe,  CÂSSIOVE,  ÀKDROMÈDE, 

S'PITE. 
PBINÉE. 

A  Hymen  fortimé  de  raimablc  Andromède , 

Seignenr,  Tt)ns  m'avez  destiné; 
A  Tamonr  de  Persec  on  veut  que  \e  la  cède  ; 
M'ôterez'-vt)!»  un  b!en  que  vous  m'avez  douné2 

CEPHÉE. 

Au  fils  de  Japîter  on  peut  céder  sans  Lonte. 

PHIBEE. 

Et  rroyez-vons  anssî  la  fable  qu'il  raconte?. 
Il  se  dit  fils  da  dieu  dont  le  ciel  suit  la  loi  ; 
Mais  je  ne  prétends  pas  l'en  /croire  sur  sa  foi. 

CEPHÉE. 

Votre  iodtédolité  n'anra  donc  pins  d'^ct^se, 
Mon  fi:ère ,  sa  valeur  va  vous  ouvrir  les  yeux: 
Reconnaissez  le  fils  du  plus  puissant  des  dkux^ 
U  oflie  de  couper  la  tête  de  Méduse. 

TOUS. 

La  tête  de  Méduse  !  6  cicox  ! 

CÉPHéE. 

Ma  fille  est  le  prix  qu'il  demande. 

CASSIOPE  ET    CÉPHISE. 

Quel  prix  peut  trop  payer  cci  effort  glorieux? 


348  PERSÉE. 

PBIRÉE. 

Le  succès  u'est  pas  s^,  souffrez  que  jo  I  attende  j 
Soufliez  que  cependant  mon  amour  se  dclbide 

D'abandonner  un  bien  si  précieux  : 

Fersétf.  encor  n'est  pas  Tiçtoiieux. 

*  Il  $ori.) 

dÉPHEE. 

La  vengeance  des  Dieux  n'a  que  trop  sti  paraître  : 
O  ciel,  favorisez  le  fils  de  votre  maître  ! 

(  Il  sort  avec  Cassiope.  ) 

SCÈNE  III. 

ANDROMÈDE,  rivant. 

IvFORTUSÉs,  qu'un  monstre  afîreux 
A  changés  en  rocbers  par  ses  regards  terribles , 
Vous  ne  reissentez  plus  vos  destins  rigoureux, 
•  Et  vos  cœurs,  endurcis  ,  sont  pour  jamais  paisibles.' 
Hélas!  les  ccsurs  sensibles 
Sont  mille  fois  pins  malheureux. 

Il  CBÈ  m'aime  que  tfop,  et  tout  me  sollicite 

ÛQ  l'aimer  à  mon  tour  : 
<T'eit  du  plus  grand  des  Dieux  qu'il  a  reçu  le  jour  ; 
Ikn >»  TI03  périls  mortels  Tamonr  le  précipite  : 
»  Comnimt  ne  pas  aimer  un  héros,  qui  mérite 
31  De  TuEiivers  entier  et  Tbommage  et  l'dmour? 

Il  vient...  Êiut-il  que  mon  cœur  se  trahisse?.. 
&cV.  il  va  partir...  il  me  cherche  en  ces  lieux.     . 


ACTE  II,  SCÈNE  IV.  349 

Que  loi  dirai-je ,  bélas  !...  et  quel  supplice 
De  ne  pouvoir  mêler  mes  pleurs  à  ses  adieux  ! 

SCÈNE  IV. 

Ï.£RSÉE,  AMDROMÈDE. 

PEBSÉE. 

Belle  princesse,  enfin  vous  souflrcz  ma  présence! 

ANOnOMÈDE. 

Seigneur,  on  me  Tordoone ,  et  je  suis  mon  devoir. 

PESSÉE. 

Pourquoi  me  êûk  apercevoir 
<^e  je  ne  dois  ce  bien  qu'à  votre  obéissance?,.. 
N'importe,  rien  ne  peut  ébranler  ma  constance  : 
JVi  su ,  jusqu'à  ce  jour,  vous  aimer  sans  espoir  ; 
le  vais  avec  plaisir  prendre  votre  défense , 

Quaod  je  n'aurais  pour  récompense 
Que  la  seule  douceur  que  je  sens  à  vous  voir. 

'      IVDBOMÈDE. 

Non ,  ne  tous  flattez  pas,  je  veux  ne  -vous  rien  taire; 
Vous  m'aimez  vainement,  Pbinée  a  su  me  plaire  : 

11  est  cboisi  pour  être  mon  époux  ; 
Nos  deux  cœurs  sont  unis  :  quel  prix  espérez-vous 

D'une  entreprise  dangereuse?,  ^ 

Quand  vous  seriez  vainqueur,  votre  ame  est  générense. 
Et  vous  ne  voudrez  pas  rompre  des  noeuds  si  doux  ?. 

PEBSÉE. 

le  serai  malheureux ,  désespéré ,  jaloux , 

Graods-Opéras.  i.  3o. 


35o  PERSÉE. 

Mais  je  moorroi  content ,  si  vous  vivez  bemeuse. 

AflDBOUtDE. 

O  Dieux! 

PBBIÉE* 

De  mes  regards  vos  bcanx  yeux  sout  i>losst5s) 
Vous  souflrez  à  me  voir,  moû  amour  vous  outrage  : 
Je  vais  chercher  Méduse ,  et  je  vous  aime  assez 
Pour  ne  vous  pas  contraiudre  à  souflrir  davantage. 

ABDttOMEDE. 

Quoi,  pour  jamais  vous  me  quittez? 
Pcrsée,  arrêtez,  an-étezî 

PEAS'ÉE. 

Qu'entends-je ?  6  cieuxl  belle  princesse^ 
Que  vois-je  ?  vous  VctSez  des  pleurs. 

AUDnOMÎlDE. 

Ah!  par  l'excès  de  mes  douleurs, 
Connaissez ,  s'il  se  peut,  Texcès  de  ma  tendresse. 

Voyez  à  quoi  j'avais  recours 
Pour  vous  ôter  l'ardeur,  qui  vous  fait  entreprendre 

Un  combot  (tuKste  à  vos  joars. 

Hélas  !  que  n'ai^jc  pu  me  n^dre 

Indigne  de  votre  secours  ! 

Que  u'étes-vous  moins  «agnttiîrtie  ! 
Méduse  d'un  regard  porte  un  trépnS  tettoin. 

^     PEnsiE. 
Vous  pourriez  être  sa  >'ictime. 
AvonoMÈDE. 
Tout  reffori  des  mortels  contre  cUc  serait  vain. 


ACTE  II,  SCÈNE  IV,  aSi 

PEBS£E.      . 

Le  Gis  de  Japiter,  lorsque  l'Amoar  Tanime, 
Doit  aller  au-delli  de  tout  effort  humain. 

Par  les  frayeurs  d'un  amour  tendre , 
Ne  seçez-voqs  poin^  ^iésanoe  l 

PEnsÉE. 
J'ignorais  votre  amour,  et  )  allais  vous  défendre  : 
Fuis-je  à  vous  secourir  être  moins  animé, 
Quand  je  sais  que  je  suis  aimé  l 
AHDROMÈDE, 

Quoi ,  vous  parte*  ? 

p.£itaÏE« 

L'.^iiour  m'appelle. 

AflonûMÈDS. 

Vous  méprisez  mes  pleurs  !  mes  cris  sont  snperfhis  ! 

PEKS^E. 

Vous  me  verrez  comblé  d'une  gloire  ii&mortcUe« 

AapBOHÈOE. 

Hélas  !  nous  ne  nous  verrou»  plus^ 

»         ESrSEMBlE. 

Ml  !  votre  péril  est  extrême  ! 
Je  rois  votre  danger,  je  ne  vois  pas  le  mien. 
Dieux ,  sauvez  ce  que  j'aime  ! 

El  pour  moi-même 

Je  ne  demande  rien. 

(Aqdrotnède    sort;  Persée,   qui   la   suit    vil   rtlcnii  par 
Mercure  sortaqt  des  enfers,  J 


352  PEBSÉE. 

SCÈNE  y. 

MERCURE,  PERSÉE. 

ME*BCDBE,  sortant  des  enfers. 
Pebsse  ,  où  coarez-TOQS  7  qa'allez-Yous  entreprenidre? 

PEBSÉE.        ^ 

Un  peuple  infortmié  m'engage  à  le  défendre  ; 

Cest  à  la  gloire  qae  je  cours. 
Si  je  meurs ,  mon  trépas  sera  digne  d'enVie  : 

Je  laisse  le  soin  de  mes  jours 

Au  dieu  qui  m'a  donné  la  vie. 

■.SBCUBE. 

Ce  dieu,  juste  et  puissant,  âvorise  vos  vœux, 

Et  c'est  par  ma  voix  qu'il  s'explique  : 
Il  reconnaît  son  sang  â  reffort  généreux 
Que  vous  allez  tenter,  d'une  ardeur  héroïque, 
Pour  secourir  des  malheureux  : 
Mais  ce  n'est  point  en  téméraire 
Qu'il  faut  dans  le  péril  précipiter  vos  pos  : 
L'assistance  des  Dieux  vous  sera  nécessaire; 
Ils  veulent  vous  Tofirir,  ne  la  négligez  pas. 

Je  viens  d'apprendre  à  toute  la  nature 
Que  Jupiter  s'intéresse  à  vos  jours f 
La  jalouse  Junon  vainement  en  murmure , 
Et  tout ,  jusqu'aux  enfers  |  vous  promet  du  secours. 


ACTE  II,  SCENE  VII.  ^53 

SCÈNE   VI. 

MERCURE»  PERSÊE,  cyclopes. 

(  Des  Cyclopes  vienseat»  en  dansant,  donnera  Persée  ,  de  la 
part  de  Vulcain,  une  épëe  et  des  lalonnières  ailées,  sem- 
blables à  celles  de  Mercure.  ^ 

VB^  DES    GTCtOPES.. 

Cest  pour  vous  que  Vnlcain  ,  de  ses  maios  immortelles , 

•A  forge  eelte  épée'  et  préparé  ces  aîlcs, 

Hatez-vous  de  yods  signaler 

Par  une  célèbre  victoire  : 

AUé«  cueillir  la  palme  de  la  gloire  : 

Digue  émule  d'Alcide ,  il  le  faut  égaler. 

(  On  danse.  ) 

SCÈNE  VU. 

MERCURE,  PERSÉE,  CTCLOPES   et   rtmpues 
GXJEBniEDES,  qui  arcivcnten  dansant. 

USE  STUPHE  GOERniÈR&y  présentant  à  Pcrsée  un 
bouclier  de  diamant. 

L  i  plus  Taillant  guerrier  s'abuse 
I/oser  tout  espérer  de  rcfTosl  de  soti  lira». 

Si  vous  voulez  Tnitîcirc  IVK^Jwse , 
Portez  le  bouclier  de  In  5ngc  PqIIbs. 

Que  la  valeur  ci  la  pmdencc  , 

Quand  elles  §oiii  â'mmUWeence  t 

I 


P 


[ 


35}  PERSÉE. 

Achèvent  d'exploits  glorieux  ! 
Le  monstre  le  plus  furieux 
Leur  fait  vainement  résistance, 

(  Les  nymphes  conlinuepl  leurs  danses  } 

SGÈNE  VIII. 

MER|CUBE,  PERSÉE,  cyclopes,  htmphes 

'         GVEnitlèVES  EX  DIVIKIT^S  iBfEaRAlES. 

(.Les  divinitds  infernales  sortent  des  enfers  et,  sur  no  ai'  ,. 
iipporient  le   casque    de  Pluton ,   qu'elles  prcsealenl   à 
;   Persée^)  ^ 

USE  DiviiriTlé  isf  KB^AI^^Ei^prés^taiitltjMiqn^ 
Ce  casque  vous  est  présenté 
Au  nom  du  souverain  de  l'emp're  des  ombres^ 
Au  milieu  du  péril ,  pour  votre  sAreté , 
Il  répendra  sur  vous  l'épaisse  obscurité 
Qui  règne  en  nos  demeures  sombres, 
C,:i  don  mystérieux  doit  apprendre  aux  h^ains 
Comme  on  peut  s'assurec  d'un  succès  favorable  : 
Il  faut  cacher  de  grands  desseins 
Sous  un  secret  impéiiélraW<\ 
(  Us  Cycloprs,  les  nymphe»  gnerricrcs  et  les  divinités  infcr4 
nules  se  réunissent  pour  former  uno.fcto  générale.) 
MEBCURE. 

Que  l'enfer ,  la  terre  el  les  cieiw , 
Que  tout  l'univers  fi^vorise 
Votre  généreuse  catre prise  : 
Que  l'enfer ,'  la  lerre^ct  les  cieux  y 
Que  tout  r^uiTCW  favoris*  j 


'ACTE  11,  SCÈNE  VIII.  355 

Le  ùh  dti  plas  puissant  des  dieux. 
I  £  n  C  u  B  E  et  les  autres  acteurs  qui  sont  sur  la  scène ,  avec  le 
CBCEun. 
Que  l'enfer ,  etc. 

MEBCURE,   àPersée. 
L'impatience  éclate  dans  vo9  yeux  : 
Suivez-œoi  ^  partons  de  ces  lieux. 

(  MeKure  et  Persée  »*pnvoleBt.  ) 

TOUS. 


ri9  PU   SECOND   ACTE. 


^^*^•^*é^  ■i^.^i^.i^^M»^ 


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ACTE   TROISIÈME.  t 

Le  tbéAtre  représente  l'antre  des  Gorgones.  V 


SCÈNE    I. 

MÉDUSE,    EURIALE,  STÉNONE. 

MÉDUSE. 

J  AI  perdu  la  beauté  qui  me  rendit  si  vaine  ; 

Je  n'ai  plus  ces  cheveux  si  beaux 

Dont  autrefois  le  dieu  des  eaux 
Sentit  lier  son  cœur  d'une  si  douce  chaîne  : 

Pallas ,  la  barbare  Pallas , 

Fut  jalouse  de  mes  appas , 
Et  me  rendit  afireuse ,  autant  que  j'étais  belle  : 
-   Mais  l'excès  étonnant  de  la  difformité 

Dont  me  punit  sa  cruauté, 

Fera  connaître ,  en  dépit  d'elle , 

Quelle  fut  l'excès  de  ma  beauté. 

Je  ne  puis  trop  montrer  sa  vengeance  cruelle  : 
Ma  têie  est  fière  encor  d'avoir  pour  ornement 

Des  serpens,  dont  le  sifflement 

Excite  une  frayeur  mortelle. 

Je  porte  l'épouvante  et  la  mort  en  tous  lieux  î 


ACTE  III,  SCÈNE  II.  Z5j 

Tout  se  change  en  rocher  &  mon  aspect  horrible  : 
/liCs  traits  que  Jupiter  lance  du  haut  des  cieux 
N'ont  rien  de  si  terrible 
Qu'un  regard  de  mes  yeux. 
Les  plus  grands  dieux  du  ciel ,  de  la  terre  et  de  Tonde , 
Du  soin  de  se  venger  se  reposent  sur  moi  : 
Si  je  perds,  la  douceur  d'are  l'amour  du  monde  , 
l'ai  le  plaisir  nouveau,  d'en  devenir  l'efiroi. 

MÉDUSE,  BUBIAI^S  ET   STÉVOBE. 

O  le  doux  emploi ,  pour  la  rage, 
De  causer  un  afireux  ravage  ! 

Heureuse  la  fureur 
Qui  remplit  l'univers  dlioveur  I 

(  On  entend  une  Sjrmpbome  agréable.  ) 
MÉDUSE,   EUBIALB  ET    STÉVOHE. 

Dans  ce  triste  séjour  qui  peut  nous  faire  entendre 
1^0  doux  bruit  qui  nous  vient  surprendre  2 
Jamais  ici  mortel,  avec  impunité. 
Ne  porta  sa  vue  indiscrète. 
Quels  concerts  ?  quelle  nouveauté  ! 
Qui  peut  chercher  Hiorreur  secrète 
De  notre  fatale  retraite  ?..,        * 
C'est  Mercure  qui  vient  dans  cet  antre  écarté. 

SCÈNE  II. 

MERCURE,  MÉDUSE,  EURIALE  ,  STÉRONE. 

MÉDtJSE. 

Mov  terrible  secours  vous  est-il  nécessaice  l 


36o  PtRSTEE.    , 

CHOCOI  DES  MINISTBES  DU  SOllMElL,  COUpé  par  clee 
traits  du  trio  précèdent. 
11  iaat  céder ,  il  faut  vous  rendre 
Au  cbaooe ,  qui  va  vous  suipreodre. 
11  faut  TOUS  rendre ,  malgré  vous, 
Au  charme  d'un  sonmieil  trop  doux. 
U  faut  céder ,  il  faut  vous  rendre. 

(Sur  deux  airs»  les  ministres  du  Sommeil  emploioril  les  mêmes 
charmes  pour  assoupir  les  Gorgones  >  qui  s'efforcent  de  s'en 
défendre.) 

»  LE  CfiOEcn.  ' 

»  Du  ^mnieil  â  tous  les  coeurs 

»  Nous  dispensons  les  biens  flatteurs  ; 
»  Soiqpirs  et  pleurs , 
»  Tout  cède  k  ses  dons  enchanteurs. 

»  Des  Êkveurs  qu'il' sait  répandre , 

»  Vous  cherchez  à  vous  défendre  : 

»  Mais  Tespoir  qui  vous  séduit 

»  K'est  qu'une  ombre  qui  s'enfuit .' 
»  Vos  vains  efforts  n'auront  produit  * 
»  Que  le  triomphe ,  qui  nous  suit. 

»  Des  faveurs  qu'il  fait  répandre, 

»  Vous  cherchez  à  vous  défendre ,  etc 

»   LES  TBÔIS  GOnCOBES. 

»  Il  £iut  nous  rendre ,  malgré  nous , 
»  Aux  charmes  d'un  sommeil  trop  doux. 
.)  (  Les  Gorgones  tombent  d'accablement  sur  des  rochers  ;  les 
ministres  du  Sommeil  achèvent  de  les  endormk,  «t  se  re- 
tirent ensuite ,  sur  les  sapeurs  qui  les  avaient  apportés.) 


ACTE  III,  SCÈNE  IV.  36i  ' 

SCÈNE  IV. 

PERSÉE,  MEKCUHE,  les  gobgoiies,  endormies. 

meucube. 
Pebsee,  approchez-votts  ;  Méduse  est  eadormîe: 

AvaDcex  sans  brait  |  surprenez 

Une  si  terrible  ennemie  : 
Si  Toos  osez  la  voir,  c'est  fait  de  votre  vie. 

PERSEE. 

Je  soivrai  les  eonseils  qae  vous  m'avez  donnés. 

MEBCUBE. 

7e  vous  laisse  au  milieu  d'un  péril  redoutable  î 
Je  ne  puis  plus  rien  pour  vos  jours  : 
Cherchez  votre  dernier  secours 
Dans  un  courage  inébranlable. 

PEBSÉE. 

X 

Un  prix ,  qui  me  doit  charmer, 
M'est  offert  par  h  Victoire  : 
Quel  péril  peut  m'alaimer  ?. 

L'Amour  et  la  Gloire 
S'unissent  pour  m'auimer. 

(  Uercure  se  retire  ;  Persée  tenant  son  bouclier  éevant  ses 
yeux ,  approche  de  Méduse ,  et  lui  coupe  la  tête.  ) 


Grands-Opéras.    !• 


3l 


J 


3G2  PEBStE. 

SCÈNE  V. 

PERSÉE,    LES    GOnCOKES. 

(  On  enlend  le  brTSil  du  tonnerre.) 

BCASÉE. 

Le  monde  est  délivré  d'ua  moDStr«  si  lenible  ; 

Le  ciel  s'est  servi  de  mou  bras. 
(EURiALe  ET  STÉNONX,s'ëveiIUot,  au  bruit  du  tonnsrre  et  à  )■ 

voix  de  Persée  cl  courant  vers  l'cudroit  où  elles  l'uul  en- 

teudu.  ) 

Tu  fais  pccir  Méduse  :  ah  ,  traître  !  tu  raonrras. 

Qu'il. meure  d'uu  trépas  horrible. 

(Les deux  Gorgonnes  veulent  allaquer  Persée  ;  mais  la  vcrlw 
secrète  du  casque  qu'il  poitu  les  empêche  de  le  voir.) 

Mais  qui  peut  le  rendre  invisible. 

(Chrisaor,  Pcguse  et  plusieurs  autres  monstres  de  figures  bi 
sarres  et  terribles,  se  forment  du  ^ang  de  Méduse, Cbnsaor 
et  Pcgasc  s'cuvuleat.  ) 

PEBS'ÉE. 
Méduse  après  sa  mort  trouble  cm  or  l'irnivers. 
C'est  son  sang  qui  produit  tant  de  moustius  divers. 

(  Sur  ua  air,  les  mouslres  chcrcbent  Persée  ,  qui  est  kuiours 
invisible.  ) 

EUriALE    ET    STÉNOKE. 

MonsUcs ,  chercher  votre  victime , 

Vengez  le  sang  qui  vous  anime. 

Sur vez  nos f tueurs- armez- vous;  ^ 

YengeoDS  Méduse,  vengeons-nous. 


ACTE  III,  SCÈNE   VI.  363 

SCÈNE  VI. 

MERCURE,  PERSÈE,    EURlALE,   et 
6TÉNONE. 

MEnCUBE. 

Pebsse,  allez,  voici  où  Tamour  tous  appelle. 
Gorgones  ,  désormais  tous  serez  sans  pouvoir  : 
Ce  lieu  n'est  pas  pour  vous  un  séjour  assez  noir  ; 
Venez  dans  la  nuit  étemelle. 

(  Persée  s'envole  ,  il  emporte  la  lê|e  de  Mdduse.  Les  mons- 
tres qui  s'efforcent  de  le  suivre  ,  tombent  av««  Euria'u  «t 
Slélone  ,  dans  les  enfers,  où  Mercure  les  coutrainl  de  des- 
cendre. ) 

EUBIALE    ET  8TÉVOBE,  s'aLîmant» 
Des  goufli«s  profpnds  sont  ouverts  : 
Ab!  nous  tombons  dans  les  epfers. 


Fin  DO  thoisieme  acte. 


^,^0.^>^^^^*S^.^«i*   l^^«^^i^^«»^I^^^S^«»>^<^'^^S# 


ACTE  QUATRIÈME. 


Le  théâtre  réprésente  la  mer  et  un  riyage  bordé  de 
rochers. 


SCÈNE  I. 

PHINÉE,  ÉTHIOPIENS,  qu'on  ne  toU  pas; 

CBCCVB  d'Éthiopiens,  qu'on  enlend,  et  qu'on  ne  Toit 
pas. 

v^ouROSS,  courons  tous  admirer 
Le  vainqueur  de  Méduse. 

pbihiSe. 

Persée  est  de  retour,  chacnn  roort  Hionorer, 

Et  le  bonheur  public  va  me  désespérer; 

^on ,  non ,  il  n'est  plus  tems  qu'un  vain  espoir  m'abuse, 

SCÈNE   II. 

PHINÉE,  MÉBOPE. 

vnivtt. 
Nous  ressentons  mêmes  doulcqrs. 


ACTt  IV,  SCÈKE  II.  365 

MÉBOPE. 

FajoDS  une  foale  impomiDe. 
Eirfsiiii.1. 

»  Une  ^le  iuibrtime  ; 
p  Blalgré  oons ,  fait  couler  nos  pleurs. 

MiBOPE. 

Persée  est  reveon*,  mais  c'est  pour  AQâromède. 
Ponr  m'ofl^  A  ses  yeax ,  l'ardeur  qui  me  possède 
M'a  fait  en|>resser  vainement  ; 
11  n'a  rien  tu  que  ce  qu'il  aime, 
^  Il  n'a  pas  daigné  m^e 
S'apercevoir  de  mon  empressement  ; 
Et  tous  les  soins  de  mon  amour  extrême 
N'ont  pas  été  payés  d'un  regard  seulement. 

PBIHéE. 

Que  le  ciel  pour  Persée  est  prodigue  en. miracles! 

Qui  n'eAt  pas  cru  qu'un  monstre  furieux. 
M'aurait  débairassé  d'un  rival  odieux  ? 
Cependant ,  malgré  mille  obstacles , 
Mon  rival  est  victorieux. 
11  s'est  fait  des  toutes  nouvelles , 
.   11  a  volé  pour  bâter  son  retour^ 

Et  Mercure  et  PÂmour 
Oot  pris  soin ,  à  l'envi,  de  lui  prêter  des  aileS. 

Le  peuple  croit  hit  tout  devoir; 
On  entend  de  son  nom  retentir  ce  rivage. 
Le  roi  s'est  empressé  d'honorer  son  courage  $ 
Cbacnn  jusqu'en  ces  lieu^  l'est  venu  recevoir  : 
Qu'Andromède  a  para  contente  de  le  voir! 


366  PERSÉE. 

Quel  tiiomphe  pour  luil  quel  cbanuant  avantage! 

Et  pour  moi  quelle  rage 

'    Et  quel  honâble  désespoir! 

(La  mer  s'irrite,  les  flots  s'ël^vent  et  s*étendeat  s»r  1© 
,  rivage.  ) 

PHIH^E   ET  MÉnOPE. 

Les  vents  impétueux  s'échappent  de  la  chaîne 
Qui  les  forçait  d'être  en  repos  : 
Une  tempête  soudaine 
Soulève  les  flots. 

SCÈNE  III. 

PHINÉE,  MERCURE,  ÉTHIOPIENS. 

CHCC  trn,  qu'on  entend  et  qu'on  ne  voit  pas.    ' 
O  ciel  inexorable! 
O  malheur  déplorable  ! 

PHISÉE  ET   BÉnOPE. 

Qui  pourrait  traverser  ces  trop  heureux  amant! 
(  Aux  Éthiopiens  qui  paraissent.  } 
D'où  nz^issent  vos  gémissemens  t 

UN    ÉTHIOPIER. 

L'implacable  Junon  cause  notee  infortune  ; 
Elle  arme  contre  nous  l'empire  de  Neptune  : 
Un  monstre  en  doit  sortir,  qui  Tiendra  dévorer 

L'innocente  Andromède; 

Il  n'est  plus  permis  d'errer 


ACTE  IV,  SCÈNE  HT.  367 

De  voir  fioîr  dos  maux  sans  ce  cruel  remède. 
C'est  inr  ces  bords  qu'au  monstre  on  la  doit  exposer  : 
Pour  son  secours ,  Persée  en  vain  veut  tout  oser. 

tHCBun. 

0  ciel,  etc. 

(  Lee  Éthiopiens  se  placent  sur  les  rochers  qui  bordent  le 
rivage.  ) 

pnmÉE. 
Le  plaisir  que  je  sens ,  avec  peine  se  cache. 

MÊROPE. 

Verrez* vous,  sans  douleur,  Andromède  en  danger! 

PBIBléE. 

Est-ce  à  moi  que  la  mort  Tarrache  ?, 
Cest  à  Persée  à  s'afQîger. 

L'Amour  meurt  dans  n^on  coeur,  la  rage  lui  succède  : 
^   J'aims  mieux  voir  un  monstre  afireux 
Dévorer  l'ingrate  Andromède , 
Que  la  voir  dans  les  bras  de  mon  rirai  heureux. 

MÉBOPE. 

»  Mais ,  si  pour  lui ,  le  souverain  des  cieux 
»  Signalait  de  nouveau  sa  puissance  suprême  ? 
»  Si  de  ce  monstre  encor,  et  malgré  Junon  m^e , 
»  Le  fils  de  Jupiter  était  vletorieux?. 

»  PHIJléE. 

»^Vou»  me  Entes' frémir!...  Courons  à  la  vengeance  j 
»  Frappons ,  sans  balancer,  un  rival  qui  m'offèusc  : 


368  ^  PERSÉET. 

»  Mes  soldats  sont  tout  prêts  profitoos  des  momensf 
}i  chaque  instant,  de  ma  ra^  accn>St  la  vîoleDce; 
n  Allons  hâter  Téclat  de  dos  lessentimens.    ■ 

^  (  Ils  sortent.  ) 

SCÈNE  IV. 

CÉPUÉE,  CASSIOPE,  éthiopiens,  placés  sur  les 
rochers,  TBiTOss,  ANDROMÈDE. 

(  Lés  Tritons  paraissent  dans  !a  mer,  environnent  Andromède 
et  i*aUacheni  à  un  rocber.  ) 

»       CAS»|0>¥, 

iQuE  j'expie,  en  mourant,  un  trop  funeste  crime; 
Que,  par  pitié ,  j'obtienne  une  mort  légitime! 

CASSIOPE  ET  CÉPBÉE. 

Cruels,  n'attachez  pas  ma  fille  à  ce  rocher. 

CASSlOPË. 

C'est  moi  qu'il  faut  y  attacher. 

ClÉPHéE    ET   CASSIOPE. 

C'est  moi,  c'est  nàoi  qu'il  y  fitfit  attacher.' 

CBCEUB  D'ÉTHIOPIESrS. 

Pivinités  des  flots  quel  courroux  vous  anime, 
CQutre  une  innocente  victime  2 

CiPBlÊE  ET  CASSIOPE. 

C'est  notre  unique  espoir;  fbut-il  nous  l'arracher  ?. 
&^QS  yçm% ,  nos  pleurs ,  nos  cris ,  rien  ne  ruas  peut  toucher, 
(  Le  choeur  répète  ce  4ernier  yers.  ) 


ACTE  IV,  SCjÈ^E  IV.  36^ 

us  TBXTOn. 

Tremblez ,  «qperbi^  reine  ! 
Tremblez,  morteis  audacieux! 

Que  vôtre  orgoeil  appremie 
Combien  rotre  grandeur  est  vaine. 
Tremblez ,  mortels  audacieux  ! 
Redoutez  le  courroux  des  cieux. 

ASDIlOMiDE. 

Dieux ,  qui  me  destinez  une  mort  si  cruelle , 

J9élas  !  pourquoi  me  flaltiez-vous 

De  l'espoir  d'un  destin  si  doux?... 
^el  souvenir  charmant  en  mourant  je  rappelle  \ 
Le  fils  de  Jupiter  eût  été  mon  époux  ^ 

Ah  !  qye  ma  vie  eût  été  belle  ! 
Vous ,  dont  je  tiens  le  jour ,  et  vous ,  peuple  fidèle , 
7e  vais  fléchir  les  Dieux  irrités  contre  nous  ; 

Et ,  si  ma  mère  est  criminelle , 
C'est  moi  qui  dois  calmer  le  céleste  courroux 

Par  le  sang  que  j'ai  reçu  d'efle  : 
Heureuse  de  périr  pour  lé  sabi  de  toMt 

CASSXOPE. 

(/kh  !  (^lle  vengeance  inhumaine. 

CÉPfliE. 
Andromède  1    . 

CASSIOPE. 

Ma  aile! 

AIDBOMÈPÇ. 
O  Pieux! 
(  L«  aM>Bitr«  paraU.  ) 


j 


370  PEPSKE. 

CHOEOB  d'ÉTHIOPIESS. 

Le  monstre  approche  de  ces  lieux  : 
Ah  !  quelle  vengeance  inhumaine  ! 

CHOEUR    DE   TRITOKS. 

Tremblez ,  mortels  audacieux  I 
Bedoutez  le  courroux  des  cicux. 

ARDUOMàDE. 

Je  ne  vois  point  Persée ,  et  je  flattais  ma  peine 
Du  triste  espoir  de  mourir  à  ses  yeux. 

CHCEUB   d'ÉTHIOPIEUS.     *   ' 

Voyez  ce  héros  glorieux. 

SCÈNE  y. 

LES  phécédebs,  persée  en  IVir. 

AIDRQMÈOE. 

A  s'exposer  pour  moi,  c'est  en  vain  qu'il  s'obstine. 
(  Persée  vole  et  combat  le  monstre.  ) 
CHàSUn   DE   TRITOSS. 

Téméraire  l^erséè  ,  arrêtez ,  respectez 
La  vengeance  divine.     ^ 

CHOEUR   D'éTHIOPIERS. 

Magnanime  héros ,  coxnbattez ,  remportez 
Le  prix  que  Tamonr  vous  destine. 

€5   TRITOW. 

Le  fils  de  Jupiter  brave  notre  courroux  : 
Le  mons^e  expite  sous  ses  coups. 


ACTE  IV,  SCÈNE  Vf.  S;! 

CHCeUB    DE   TRITOSS, 

Descendons  sous  les  ondes  : 
Kotic  hont»  se  doit  cacher. 
Allons  cbcrcher 
Des  reuaiies  profondes. 
Descend  ODS  sous  lés  ondes. 

(I  a  mer  s'apaise  et  les  flots  se  retirent.  ) 

SCÈNE   VI. 

PENSÉE,  ANDROMÈDE,  CÉPHEE ,  CASSIOPE, 
ÉIHIOPIENS. 

(Les  islhiopiens  descendant  des  rochers ,  et  viennent  se  mcier 
i  la  re^ouiiiûnce  publique.) 

CHCecR    d'éTHIOPIEXIS  ,    pendant  lequel  Percée  délie 
Andromède. 

Le  monstre  est  mort ,  Perséc  en  est  vainqueur  j 
Persée  est  invincible. 

PEnSÉE,   à'Andromifde. 
Ali  î  que  votre  danger  me  paraissait  terrible  l 

AKOBOMÈDE. 

Quand  l'amour  anime  un  grand  cœur , 
il  ne  trouve  rien  d'impossible.  - 

(Ou  entend  une  courte  cl  bruyante  symphonie  ) 
CÉPHJéB. 

(Apercevant  Phinée  et  ses  soldats.) 
D'où  naît  ce  bru't?....  Que  vois-je  ?....  (Juellc  horreur  l 


3^2  PERSEE. 

SCÈNE  yii. 

tESPRÊCÉDE«5,PHlKÉE,  SUITE  DE   PHIUÉE. 
PHiniBE. 

PEB8EE ,  il  fe«t  périr  ;  meurs,  et  laisse  Andromède 
Au  pouvoir  d'un  heureux  rival. 

CÉ,PHÉE   ET   PEBSÉE. 
(A  leur  suite.)  (^  Phinée  et  à  sa  suite.) 

lArmez-vous.  Recevez  le  châtiment  fatal 

TOUS  LES  COMBATTAirS. 

Cédez ,  cédez  â  notre  effort; 
Vous  n'éviterez  pas  b  mort. 
(Phiniîc  et  sa  suite  enfoncent  le  parti  de  Céphée  et  de  Pcrsëe, 
qu'ils  pouwoivent,  en  disparaissani.) 

SCÈNE  VIII. 

CASSIOPE,  ANDROMÈDE,  FEMMES  de  leiir suite. 

CASSIOPE. 

Leur  rage  croît....  ô  cîd  !  leur  nombre  ftogmente. 

ASDnOMiBE. 

Persée  en  vain  combat  avec  chaleur  : 
Que  servent  les  efforts  qu'il  tente  ; 
Le  nombre   loi  ou  lard  ,  accable  la  valeur. 


ACTE  IV,  SCÈNE  X.  3^3 

SCÈNE   IX. 

CÉPHÉE,  CASSIOPE,   [ANDROMÈDE, 
iTHIOPIENHES. 

CÉPHiSi  à  Cassiope. 

Le  soin  de  vous  défendre  en  ce  lien  me  rappelle. 

Craignons  tont  d'an  sujet  rebelle. 

Qael  sang  n'ose-t-on  pas  verseï  ! 
Un  trait ,  que  sur  Fersée  on  a  voulu  lancer , 
A  firappé  votre  soeur  d'une  atteinte  mortelle. 

CASSIOPE  ET  AannOMÈDE. 

Secourez-nous ,  à  justes  dieux  l 

SCÈNE  X. 

LESPRECÉDElis,PHINÉE,  PERSÉE,  leur  suite. 

CBCBVB ,  de  la  suite  de  Phinëe  /  en  rentrant  sur  le  théâtre 
cl  en  combattant.) 

j         Qu'a  n'échappe  pas ,  qu'il  périsse 
I        Cet  étranger  audacieux , 

Qui  prétend  régner  en  ces  lieux. 

(U  combat  continue  dans  la  plus  grande  force  jPersée  dd- 
sarbie  Pbinée. 

PEUSÉE,   désarmant  Phinee. 

»  le  te  laisse  le  jour  ;  il  sera  ton  supplice. 

Grands  Opéras.  1 ,  33 


i 


pniliE  ,  se  frappant  d'un  poignard 

)>  Et  moi ,  je  m'affranchis  d'où  specuicle  odieux. 

(  On  emporte  Phinëe  ;  son  parti  est  dispersé ,  et  le   comliat 
cesse.) 

(Vénus ,  l'Amour,  Hëbé ,  l'Hymen  et  leur  suiU  descendent 
dans  une  fXi/Hte.  ) 

PEB81SB. 

Cessons  de  redouter  la  fortane  cnielle; 

Le  ciel  nous  promet  d'heureux  jourt.  •" 

Vénus  vient  à  notre  secours  ; 
Elle  amène  l'Amour  et  l'Hymen  avec  elle. 
(Le  Ihéâtrc  change  et  représente  le  palais  de  PAmonr.) 

SCÈNE  XL 

VÉISTJS,  L'AMOUR,  HÉBÊ,  L'HYMEN,  itf 

GCACES  ,     LEr   AMOUXS  ,    ICS     JFEOX    ET     LES 

PfAisriis,  CÉPHÈE,  CASSIOPE,  PERSÉE. 
ANDROMÈDE,  éthiopiebs,  éthiopieiises. 

yÉ5US. 
MonTELS,  vivcx  en  paix ,  vos  malheors  sont  finis , 
Jupiter  vous  pxotége  en  faveur  de  son  fils  : 
A  ce  dieu  si  puissant  tous  les  dieux  veulent  plaire , 
Ht  JuDon  même  enfin  apaise  Ba  colère. 

Grâces ,  Jeux  et  Plaisirs,  vous ,  qui  formez  ma  cour, 
}>  A  nos  regards  oITrez  vos  plus  doux  channes  : 

»  Chantez ,  célébrei  le  beau  jour, 
»  Qui  du  mond«  à  jamais  doit  buKiir  les  alamies. 


*  ACTE  IV,  SCERE  XI.  375 

»  CHOBUB. 

»  GhaDUHis  f  célébrons  le  hfemi  jour 
p  Qai  du  monde  2i  jamais  doit  bannir  les  alarmes  ; 
^>  rhantons ,  chantons  le  plus  beau  jour. 
(Entrée  «tes  Jeux,  et  des  plaisirs.  ) 
Y  »  TÉHDS. 

a  Hymen ,  d'un  jour  si  beau  consacre  la  mémoire, 

>t  Unis ,  par  des  nœnds  enchanteurs , 

>»  L'aimable  Hébé,  le  dieçL  des  cqenrs 

»  T'offrent  la  plus  belle  victoire  : 
p  Que  les  Jeux ,  sous  tes  lois,  les  enchaînent  de  fleurs  : 

»  Eépands  sur  eni  tes  dons  ks  pkis  flatteun  l 
)»  Xe  mouds  attend  de  td  lear  hoiJienr  et  sa  gloire. 

<  Sur  me  passacaille  dansée ,  et,  chantée  en  partie ,  ks  grâces 
*  et  les  Plaisirs  conduisent  PAnjour  et  Hébé  «u  nxilieu  du 
^  (héâtre,  pour  7  être  unis  par  l*Hymen.  An  moment  de  cette 
union ,  des  lys ,  auxquels  sont  enlrelacét  4^1  hraBfhagcs  de 
roses,  semblent  naître  et  s'élever  PQUr  entpurçr  un  autel, 
qui  sort  en  même  tems  du  dessous  du  théâtre  et  sur  le- 
quel l'aigle  de  Jupiter,  planant'et  teoant  le  tbudre  dans  ses 
«erres ,  vient  allumer  le  feu  sacré.  Ces  différent  prodiges 
donnent  lieu  au  coeur  suivant.  ) 

»  G.BCBUB. 

»  Du  plus  douK  présage 
»  Cet  aigle  est  le  gage. 
»  Liens ,  embellis 
»  Par  les  lis, 
n  Des  Grâces  et  des  Ris 
»  Sojez  toujours  chéris. 
»  Ces  naissadtes  roses 
»  Sont  à  peme  écloses , 
»  Leur  éclat  touchant 


i 


3^76       PEKSÉE.  I^CTE  IV,  SOÈNE  XI. 
»  Est  g^raût 
»  Du  tendre  sentiment 
»  Dont  le  bonheur  dépend.  i 

»  O  fortuné  moment  ! 
»  Un  seul  regard  charmant 
»  D'Hébé  Élit  le  serment 
»  Qui  Tnnit  au  plus  digne  amant. 

I 

»  Que  ces  nœuds 
»  Sont  heureux  S 

»  A  nos  transports  les  dfeux 

»  S^nnissent  dans  les  deux. 
»  (  Les  Grâces ,  les  Jeux  et  les  Plaisirs  continaent  la  Nte.  ) 
»  PEAsiEi  d'abord  seul,  et  ensuite  avec  le  chœur.} 

»  Sur  l'univers  règne  à  jamais ,  ' 

»  Tendre  déesse  de  Gythère. 

»  Amour,  lance  sur  nous  tes  traits. 

»  Sentir  tes  feux,  aimer  et  plaire, 

»  Cfest  jouir  de  tous  les  bioifaits. 

»  (  Sur  la  fin  d'une  chacone ,  qui  termine  l'opéra^  les  Jeux  et 
les  Plaisirs  entourent  l'Amour  et  Hébë ,  qu'ils  enchaînent 
de  guirlandes  de  fleurs ,  en  même  tems  que  les  Qrâces  les 
couronnent  de  roses  et  de  myrte  fleuri. } 


FIR  DE    PEBSÉE. 


TABtE 

DES   PIÈGES   GOnTENrSS   BANS   CE   TOITJME. 


Paécis  BiSTOBiQUE  ET  uttéhaibe  sur  TOpéra.    .  .       i 

Notice  suc  Qninanlk 25 

Alcests»  tragédie  Ijriqae  en  cinq  actes,  parQuinault.  38 
{Thiésée,  tragédie-lyrique  en  quatre  actes ,  par  le  même.  8  7, 
làTTS,  tragédie-lyrique,  en  cinq  actes ,  par  le  même.    1 39 

Vabiastes  d'Atys 193 

Isis ,  tragédie-lyrique ,  en  cinq  actes,  par  le  même.  .217 
Prosebpqie  ,'trag.-lyrique  en  cinq  actes,  par  le  même.  277 
Pebsée,  lrag.4yriqae  en  quatre  actes  ^  par  le  même.  335 


FIN   DE  I.A  TABiS. 


SUITE 
DU  RÉPERTOffiE 

DU 

THÉÂTRE  FRANÇAIS» 
i3. 


i 


SENLIS 

IMPRIMERIE   DE  TREMBLAY. 


SUITE 

DU  RÉPERTOIRE 

DU 

THÉÂTRE  FRANÇAIS, 

AVEC  VK  GBOIX  DES   PIECES  DE  PLUSIEIIRS  AUTRES 
THÉÂTRES  ,  ARRANGÉES  ET  MISES  EN  ORDRE 

PAR  M  *  LEPEINTRE  ; 

KT  PHécÉDécS  DE  NOTICES  SUR  LES  AUTEUBS  ;  LE  TOUT 
TERMUÎÉ  PAR  UNE  TABLE  GÉNÉRALE. 

GRANDS-OPÉRAS.— TOME  II. 


A  PARIS,  . 


CHEZ  M«=  VEUVE  DABO, 

A  LA  LIBRAIRIE  STÉKÉOTYPE',   RUE  HAUTEFEUILLE  ,  N»    ï  6. 
1822. 


J 


PHAÉTON, 

TRAGÉDIE-LYRIQUE  EN  CINQ  ACTES  ; 

PAR  QUINAULÏ, 

Représentée,  pour  la  première  fois,  en  i683. 


à 


Grandi  Opéras.  2, 


PERSONNAGES. 

LYBIF. ,  fille  de  Mérops  ,  roi  d'Egypte. 

THÊCNE,  fille  de  Protce. 

PHAETON,  fils  du  Soleil  et  de  Climènc. 

CLIMÈNE ,  tille  de  l'Ccéan  et  de  Tholis. 

PBOTEE  ,    dieu  marin,  couducteur    des   troupeaux    de 

Pseptune, 
Troupe  de  suivaus  3e,  Prolée. 
TRITON  ,  dieu  maris  ,  frète  dt  GliuièDo. 
Tioape  de  suivftns  de  Ttiton. 
ÉPAPHUS,  fils  de  Jupiter  et  d'Isis. 
MÉROPS,  roi  d'Egypte,  qw  &  épeasô  Glimèiic,  dont  U  à 

eu  Lybic. 
Troupe  d'Égfypliens  et  d'Égyptiennes, 
Un  KOI  ÉTHIOPIEN,  tributaire  de  Mérops, 
Troupe  d'Éthiopiens  et  d'Etliiopiennes. 
Us  ROI  iSDiEîi,  tiibiitait-e  de  Mérops. 
Troupe  d'Indiens  et  d'Indiennes. 
Troupe  de  prêtresses  de  h  déesse  Isis. 
Tioupe  de  jeunet  personnes  choisies,  pour  porter  des  of- 

iModeS  au  temple  d'Isis. 
Des  fmies  et  des  fantômes  terribles. 

I  ES    VETÎTS    ET    LE    SOLEIL. 

Xes  heures  du  jour,  et  les  saisons  de  rannéc. 

Quatre   quadrilles,  dont  chacune  accompagne  une  des 

quaire  saisons.  >    « 

Troupe  de  pasteurs  égyptiens. 
Troupe  de  bergères  égyptiennes. 
La  déesse  de  la  Tf.rotE. 

"ITER. 


PHAETON, 

TRAGÉDIE-LYRIQUE. 

ACTE  PREMIER. 

"Le  théâtre  représente  un  jardin  sur  le  devant,  une  giotte 
dans  le  milieu ,  et  la  mer  dans  l'élorguement. 


SCÈNE  I. 

,       LYBIE. 

xIeubeuse  unfe  ame  indifférente  J 
Lé  tranquille  bonheur,  dont  j  étais  si  contente, 

Ne  me  sera-t-il  point  rencu  î 

Dans  ces  beaux  lieux  tout  est  paisible  ; 

Hélas!'  que  ne  m'est-il  possible 
D'y  trouver  le  repos  que  mou  cœur  a  perrîu  1 


4  '        PHAETOÎf. 

SCÈNE  II. 

THÉONE,LYBIE. 

TRÉOSE. 

Je  ne  vous  croyais  point  dan»  an  lieu  solitaire. 
Une  pompeuse  cour  ne  songe  qu'à  'vous  plaire , 
Et  vous  venez  rêver  ici? 

LTBIE. 

Vous  y  venez  rêver  aussi. 

THÉOKE. 

J'aime,  c'est  mon  destin  d'aimer  toute  ma  vie  ; 
.Votre  cœur  fuit  l'amour,  et  croit  s'en  garantir  : 

Il  faut  aimer  pour  ressentir 

Le  charme  de  la  rêverie.- 

LTBIE. 

Le  roi  doit  aujourd'hui  me  choisir  un  époux  : 

Ai-je  moins  à  rêver  que  vous? 
M'est-il  permis  d'entrer  dans  votre  confidence Z 

LYBIE. 

La  çincere  amiiié  doit  bannir  d'entre  nous 
Le  mystère  et  la  défiance. 

THÉOKE. 

Tvurquoi  ctercher  des  lieux  où.  règne  le  silence? 

Fst-:l  un  spectacle  plus  doux 
Que  de  voir  mille  amans  empressés  et  jaloux 

Dont  voire  hymen  fuit  l'espérance  ! 
Je  commence  à  douter  que  vous  les  voyiez  tou^ 

Avec  la  même  indifférence. 


ACTE  I,  SCENE    II. 

.     LYBIE. 

Je  sois  fille  d'an  roi  qui  commande  à  des  rois  : 

Après  lui ,  j'aurai  sous  mes  lois 
Les  pays  où  le  Nil  répand  son  eau  féconde. 

Un  grand  destin  m'est  préparé , 

Mais  le  premier  trdne  du  monde 
N'est  pas  contre  l'amour  un  asile  assuré, 

THÉOSE. 

Le  fils  de  Jupiter  vous  aime. 

LYBIE. 

Je  ne  serais  qu'à  lui ,  si  j'étais  à  moi-même. 

Mon  cœur  is'est  trop  pressé  de  choisir  un  vainqueur , 
Et  mon  timide  ampur  craint  un  devoir  sévère  : 
Que  deviendrai-je ,  ô  ciel  î  si  le  choix  de  mon  père 

Ne  suit  pas  le  choix  de  mon  cœur! 
Tous  ressentez  l'amour ,  sans  éprouver  ses  peines  ; 
Le  fils  du  dieu  brillant  qui  donne  In  clarté 

Tout  fier  qu'il  est ,  porte  vos  chaînes  i 
Vous  aimez  Phaéton ,  avec  tranquillité. 

THÉOSE., 

Hélas  !  un  tendre  cœur  est  toujours  agité. 

La  mer  est  quelquefois  dans  une  paix  profonde  ^ 
On  peut  après  l'orege  y  jouir  d'un  beau  jour  : 
Le  calme  règne  plus  dans  l'empire  de  l'onde , 
Que  dans  l'empire  de  l'Amour. 

ENSEMBLE: 

'Ah  î  qu'il  est  difficile 

De  bien  aimer 

Sans  s'alarmer! 
Ahî  qu'il  est  difficile 
Que  l'amour  soit  tranquille. 

r. 


I 


(3  PHAETON. 

Tnéonr.  \ 

Pliaéton  est  pour  moi  peu  sensible  aujourdljui. 
Que  je  ciains.... 

i   LTBIE. 

Je  vous  laisse  éclalrcir  avec  lui. 

SCÈNE   ni. 

PHAÉTON,  THÉONE.    • 

THÉOSE. 

VotJS  passez  sans  me  voir ,  craîgncz-vous  ma  présence  ? 

PHAÉTON. 

Je  vous  aime ,  Théone ,  et  ce  squpçon  m'offense. 

THÉONE. 

Que  ma  vue  aujourdliui  vous  cause  d'embarras! 
Avouez  qu'en  ces  lieux  vous  ne  me  cherchiez  pas, 

PE^ÀÉTON. 

.  Je  cherchais  la  reine  ma  mère  : 
Ce  soin  pourrait-il  vous  dcpluire  ?. 
Devez-\  ous  me  le  niprocher  ?, 

TUÉONE.      * 

C'est  toujours  ne  me  pas  chercher. 

Je  m'aperçois  sans  cesse 

<?uc  quL'lquc  soin  vous  presse , 
L[  par  malheur  je  m'apeiçoi 
Que  ce  soin  n'est  jamais  pour  moi. 


7 

,  PHAÉTdH. 

Vue  autre  amonr ,  à  votre  espoir  f^ttaJe , 
N'a  pas  cause  mes  nouveaux  soins  : 
Je  n'aime  point  ailleurs ,  les  Dieux  m'en  sont  témoin*;, 

THÉOEIE. 

Vous  changez ,  cependant ,  ma  peine  est  sans  égale  ; 
Peut-être  souâiirais-je  moins  ^ 
Si  je  pouvais  hair  une  rivale. 

Protée ,  à  qui  je  dois  le  jour, 
Du  plus  sombre  avenir  perce  la  nuit  obscure  ; 
Il  m*a  prédit  cent  fois  le  tourment  que  j'endure  : 
Vous  ne  me  parlez  plus  ni  d'hymen ,  ni  d'amour  ; 
De  tant  de  vains  sermens  vous  perdez  la  ménioiie. 

PHA12TON. 

Non ,  je  vous  aimerai  toujours. 

THÉOîïE, 

Ingrat ,  le  moyen  de  vous  croire  ? 
Vos  regards  inquiets  démentent  vos  discours. 
Avec  trop  peu  de  soin  votre  froideur  se  cache  ; 
Le  bonheur  de  ma  vie  i  votre  cœur  s'attache , 
Vous  me  laisse»  trop  voir  qu'il  chcvche  à  m'échapper  ; 

Ah  î  du  moins ,  ingrat  que  vous  ^les , 
'  Puisque  vous  me  voulez  tromper , 

Trompez-moi  mieux  que  vous  ne  faites. 

PHAÉTOV. 

Je  ne  sais  plus  comment  poaroir  calmer 
Mille  frayeurs  qui  vieiment  vous  sm  prendre  : 
Mon  cœur  vous  aime  autnnt  qu'il  peut  aimer , 
S'il  n'est  pr:is'nssez  tendre, 
C'est  a  rAmoyr  q|U*il  s'en  faut  prendra. 


3  PHAÉTOPC. 

THÉONE. 

Quand  vous  commenciez  d'être  amant , 
Vous  me  cherchiez  avec  empressement  ; 
Vous  ne  me  quittiez  point  sans  une  peine  extrême. 
Le  souvenir  fatal  d'un  amour  si  charmant 

Ne  sert  qu'à  faire  mon  tourment  : 
Vous  ne  savez  que  trop ,  comme  il  faut  que  l'on  aime  { 

Ah  !  deviez- vous  m'aimer  si  tendrement , 
Si  vous  ne  vouliez  pas  m'aimer  toujours  de  même  ? 

PHAETON. 

La  reine  tourne  ici  ses  pas. 

THÉ05E. 

Suivez  la  reine ,  allez ,  ne  vous  contraignez  pas. 

SCÈNE  IV. 

CLIMÈNE,  PHAÉTON. 

'      CLIMÈNE. 

Vous  paraissez  chagrin ,  mon  fils ,  ne  puis-je  apprendre 
D'où  vient  le  trouble  oii  je  vous  voi  ? 

PUAÉTON. 

Le  roi  va  faire  choix  d'ijn  gendre  ;^ 
L'époux  de  la  princesse  un  jour  doit  être  roi. 
Le  superbe  Epaplius  à  cet  honneur  aspire. 
Ah  !  faudra-t-il  le  voir  maître  de  cet  empire  ? 

Faudra -i-il  nous  voir  sous  sa  loi  ? 
Quelle  honte  pour  vous  1  f|uelle  rage  pour  moi  { 

Le  roi  fera  tout  pour  vous  plaiic....  ' 


AUlt   1,  ôlJfiJSE   IV. 

CLIMèRE. 

Mais  qael  autre  choix  doit-il  faire  ?i 
Le  fils  de  Jupiter  est-il  à  dédaigner  7, 

PHAÉT05. 

Qaoi  !  votre  fils ,  le  fils  du  dieu  (jui  nous  éclaire 
Est-il  indigue  de  régner?. 

CLIMÈNE. 

.Votre  gloire  ,  mon  fils ,  est  mon  unique  enrie, 
(Â.près  Tamour  du  dieu  dont  tous  tenez  la  vie. 
Jusqu'à  rbyraen  d'un  roi  j'eus  peine  à  m'abaisser  ; 
Mais  pour  vous  mettre  au  trône ,  il  fallait  m'y  placer. 
Le  roi  veut  vous  of&ir  sa  fille  et  sa  couronne. 

Je  sais  que  vous  aimez  Théone, 

Et  c'est  cet  amour  que  je  crains. 
Profitez  du  bonheur  que  je  mets  en  vos  mains ,' 

Méritez  la  grandeur  suprême. 
Vaincre  un  amour  charmant ,  est  un  eÛbrt  extrême  ; 
Mais  qui  veut  s'élever  au-dessus  des  humains , 

Doit  être  maître  de  lui-même. 

Il  ne  tiendra  qu'à  vous  de  régner  en  ces  lieux; 

PHAÉTOK. 

J'entends  mon  destin  qui  m'appelle , 
Je  brille  de  monter  dans  un  rang  glorieux  : 

Si  Théone  me  paraît  belle , 
La  couronne  est  encor  plus  charmante  à  mes  yeux. 

CLIMÈ9E. 

J'aime  ces  sentimens  d'une  ame  noble  et  fi^re. 
Ils  sont  dignes  du  fils  du  dieu  de  la  lumièro. 

D'une  amoureuse  ardeur  un  grand  ceeur  peut  brûler , 
C'est  un  amusement,  qu'il  faut  qu'on  lui  pardonne ^ 


Mais  il  faut  que  TAmour  soit  prêt  à  s'immoler , 
Sitôt  que  la  Gloire  rordooue. 

Tout  est  favorable  à  mes  voeux , 
Et  cependant  ma  joie  est  inquiète. 

Mille  présages  malheureux 
Troublent  mon  cœur  d'une  atteinte  secrète. 
C'est  ici  que  Protée  amène  les  troupeaux 

Du  dieu  de  l'empire  des  eaux. 

Il  se  plaît  sous  ce  frais  ombrage* 
L'avenir  est  pour  lui  sans  ombre  et  sans  nuage  : 
Je  yeux  sur  votn)  sort  le  contraindre  u  parler , 
Empêchez  qu'en  ces  lieux  on  ma  vienne  troubler. 

SCÈNE  V. 

Protée  sortant  dp  la  mer,  conduit  les  troupeaux  de  Neptunt* 
,  et  est  accoDipdgad  d'une  troupe  de  dieux  marins. 

PROTËE,SUIVAMS  DE  ^nOTEE. 

PBOTÉE. 

Heureux  ,  qui  peut  voir  du  rivage 
Le  terrible  océan ,  par  lés  vents  agite  î 
Heureux ,  qui  dans  le  port  peut  plaindre  en  sûreté 
Ceux  qui  sont  dans  l'horreur  d'un  dangereux  oiagc  ! 

Plaignons  les  malheureux  aman» ,  ^ 

Evitons  leurs  cruels  tourmeus. 

Gardons-nous  de  souOTrir  que  l'amour  nous  cnga^ 
Dans  SCS  trompeurs  eucbantemeus  : 


ACTE  1,  SCÈNE  VI.  it 

GardoDS-Dous  des  embarquemens , 
Où  le  repos  d'un  coeot  fait  un  fatal  naufrage. 

Plaignons  les  malheureux  amans , 

Evitons  leurs  cruels  tourmens. 
Prenez  soin ,  sur  ces  bords ,  des  troupeaux  de  Neptune  : 
Je  veux  fuir  du  soleil  la  chaleur  importune. 
Ici  y  Tombre  des  bois ,  le  murmure  des  flots , 
Tcftit  invite  à  goûter  la  douceur  du  repos. 

Protée  s'endort  dans  la  grotte  ,  et  ses  suivans  s'écartent  «or 
Je  rivage,  où  ils  vont  prendre  soin  des  troupeaux  d«  Nep- 
tune. 

SCÈNE  VI- 

CLIMèNEjPBOtÉË  endormi. 

CLIUÈNE. 

Vous ,  avec  qui  le  sang  me  lie^ 

Triton,  secondes  mon  envie  -,  * 

Donnez-moi  les  secours  que  vous  m'avez  promis. 

Des  décrets  du  destin  Frotée  a  conaaissaocc , 
Faites  lui  rompre  le  silence 

Qu'il  s'obstine  à  garder  sur  le  sort  de  moa  fils. 

(  Oiraêne  st  retire.  ) 


I 


ti  PHA^TOX. 

SCÈNE  VII. 

TRITON,  suivANS  DE  TniTO»,  PROTÉE. 

Triton ,  sort  de  la  mer  accorapagné  d'une  troupe  de  dieu 
^   marins,  dont  une   partie  fait  un  concert  d'instrumens/ et 
raùlre  partie   danse.  Ils  éveillent  Protée ,  et  l'invitent  à 
prendre  part  à  leurs  dÎTertissemens.  Triton  chante  au  mi- 
lieu de  ses  suivans.  >, 

TBITOBT. 

Qtte  Protée  avec  doqs  partage 
La  douceur  de  nos  chants  nouveaux. 
C'es^  de  tous  les  pasteurs,  le  pasteui-  le  plus  ^e  : 

Paissez,  heureux  troupeaux 
Du  dieux  des  eaux, 
Paissez  en  paix  sur  ce  rivage. 
Que* Protée  avec  nous  partage 
La  douceur  de  nos  chants  nouveaux. 

diantons  sous  cet  ombrage  : 
Répondez-nous,  cbannans  oiseaux  : 
ïoignez  à  nos  concerb  votre  plus  doux  ramage. 
Que  Protée  avec  nous  partage 
La  douceur  de  nos  chants  nouveaux. 

Les  suivans  de  Triton  continuent  leurs  concerts  d'instru- 
mens et  leurs  danses.  Triton  y  joint  lue  chanson  qu'i> 
chante,  en  s'adressant  à  Protée. 


TRITON. 
Le  plaisir  est  nécessaire  : 

La  sagesse  austère 
Peut  empêcher  d'y  courir  : 


ACTE  I,   SCÈNE   Vir.  «3 

Mais  le  plus  sévère 
Ne  refuse  guère 
Le  plaisir  qui  vient  s'offi-ir. 
1^    (Les  suivans  de  Triton  environnent  Protée,  en  dansant.) 

PBOTÉE. 

Tos  jeux  ont  des  appas  ;  je  les  quitte  avec  peine  : 
Mais  mon  troupeau  s'éloigne  de  ces  lieux. 

TRIT031. 

Du  sort  de  Phaéton  éclaîrcissez  Climène  j 
De  grâce ,  contentez  son  désir  curieux. 

PBOT^E. 

Ne  me  pressez  point  d'en  trop  dire. 
Le  sort  dans  l'avenir  permet  que  j'ose  lire , 

Mais  sous  un  silence  discret  ;  # 

Le  sort  veut  qu'avec  soin  je  garde  son  secret. 

(Protée  disparait ,  et  se  transforme  successivement  en  lion  , 
en  arbre ,  en  monstre  marin ,  en  fontaine  ,  et  en  flamme  -, 
mais  sous  ces  formes  différentes ,  il  est  suivi  et  environné 
par  les  suivans  de  Triton.) 


C'est  un  secret  qu'il  faut  qu'on  vous  arrache. 

Votis  vous  transformez  vainement. 
Nous  vous  suivrons  avec  empressement, 

Sous  quelque  forme  qui  vous  cache. 

'Non,  ne  croyez  pas  nous  tromper  j 

N'espérez  pas  nous  échapper. 
Non ,  de  ces  changemens  l'étonnant  artifice 

N'aura  rien  qui  nous  éblouisse. 

Non,  ne  croyez  pas  nous  tromper; 

N'espérez  pas  nous  échapper, 

*  Grands  Opéras.  2» 


14      PHAÉTOH,  ACTE  I,  SCÈHE  VIII, 

SCÈNE  VIII. 

TRITON,  CLIMÈNE,  9tiVASs  de  TniïOiff 
PBOTÉE. 

trit'os. 

It  reviendra  bi^tôt  daos  sa  forme  ordinaire* 

Ma  sœar,  venez  l'entendre ,  il  cède  à  notre  effort  : 

Il  va  de  votre  fils  vous  déclarer  le  sort. 

(Protée,  après  plusieurs  métamorphoses,  reprend  enfin  sa 
forme  naturelle.  ) 

PBOTEE. 

Puisque  vous  me  forcez,  il  faut  ne  vous  rien  taire. 

Le  sort  de  Phacion  se  découvre  à  mes  yeux. 

Dieux  !  je  frémis  !  que  vois-je  !  à  dieux  ! 
Tremblez  pour  votre  fils ,  ambitieuse  mère. 

Où  vas-tu ,  jeune  téméraire  ? 
l'u  dois  trouver  la  mort  dans  la  gloire  où  tu  cours. 

En  vain  le  dieu  qui  nous  éclaire , 
En  pâlissant  pour  toi,  sç  déclare  ton  père  ; 
Il  doit  servir  h  terminer  tes  jours. 
Tu  vas  tomber ,  n'attends  plus  de  secours. 

Le  ciel  fait  tonner  sa  colère. 
Tremblez  pour  votre  fils ,  ambitieuse  mère. 

TBITOS 

Quel  oracle! 

CLïVlkHtE, 

Quelle  terreur 

TBITOS,  ET  CLIMÈSE. 

'Ail  !  je  me  sens  saisir  dliorreur  î 

FIN   DV    PBEMIEB    ACTE. 


ACTE  SECOND. 

Le  théâtre  change,  et  représente  un  endroit  du  palais  da 
roi  d'Egypte ,  orné  et  préparé  pour  une  grande  céré^ 
monie. 


SCÈNE  I. 

CLIMÈKJS,  PHAÉTON. 

X  nOTÊB  en  a  trop  dît,  ]e  frémis  du  danger 
Qu'il  prévoit,  et  qu'il  vous  annonce, 

PHAÉTON. 

A  rbymen  de  sa  fille ,  il  me  veut  engager  ; 
Son  intérêt  a  dicté  sa  réponse. 

CLIMLÈNE. 

Je  vois  que  j'ai  trop  entrepris. 

PHAÉTON. 

Quoi ,  ma  grandeur  n'est  pas  votre  plus  chtfre  envie  ? 

CLlHàSE. 

Il  VOUS  en  coûterait  la  vie , 
Je  ne  veux  point  pour  vous  de  grandeur  à  ce  prix. 

PHAÉTON. 

Protée  a-i-ii  le  dioit  suprême 


ti6  PHAÉTON. 

De  donner  des  arrêts,  ou  de  vie,  ou  de  mort? 

Est-ce  h  lui.  de  régler  mon  sort  ? 
Un  cœur  comme  le  mien  fait  son  destin  lui-même. 

Croycz-en  mon  courage ,  il  vous  doit  rassurer. 

CLIMS5E. 

Vous  êtes  digne  de  Tempire  ; 
Mais,  si  vôtre  grand  cœur  me  force  à  l'admirer, 
C'est  en  tremblant  que  je  l'admire. 

yivoz ,  et  bornez  vos  désirs 

'^ux  tranquilles  plaisirs  t 

D'une  amour  mutuelle  : 

Aimez,  contentez-vous 
De  régner  sur  un  cœur  fidèle , 
Il  n'est  pomt  d'empire  plus  doux. 

PHAÉTOH. 

Vous  m'en  désavoûriez,  si  je  pouvais  vous  croire. 
Je^veux  me  faire  un  nom  d'éternelle  mémoire. 
J'ai  déjà  trop  langui  dans  un  honteux  repos  : 

La  plus  forte  amour  d'un  héros 

Doit  être  l'amour  de  la  gloire. 

CLIMÈBE. 

Vous  êtes  menacé  du  céleste  courroux, 
Et  j'entends  la  foudre  qui  gronde. 

PHAÉTON. 

Elevez  votre  fils  au  premier  rang  du  monde , 
Laissez  tonner  les  dieux  jaloux. 

CLIMÈNE. 

Une  secrète  voix,  qui  dans  mon  cœur  murhiure. 
Me  dit  que  le  trépas  au  trône  vous  attend  ; 
Puis-je  n'écouter  point  la  voix  de  la  nature  ? 


ACTE  JI,  SCÈNE  II.  i-j 

PBAÉTOa. 

Le  fils  du  dieu  du  jour  doit  être  plus  couteot 
D*un  trépas  éclatant, 
Que  d'une  vie  obscure. 

CLIHÈNE. 

J'espère  que  l'Amour  pdurra  vous  arrêter  j 
Théone  vient,  je  me  retire. 

PHAI^TON. 

Non,  non,  je  ne  puis  vous  quitter 
Que  vous  De  m'assuriez  du  bonheur  où  j'aspire. 

SCÈNE  II. 

THÉONE.  . 
Il  me  fuit,  l'inconstant,  il  m'ôte  tout  espoir  ! 
O  ciel!  tant  de  froideur  succède  à  tant  de  flamme! 
Ah!  que  n'a-t-il  toujours  évite  de  me  voir! 
Qu'il  aurait  épargné  de  tourmens  h.  mon  ame  ! 

Sur  la  foi  des  sermons,  dont  il  flattait  mes  vaux^ 

J'espérais  un  destin  heureux  ; 
Je  croyais  voir  toujours  nos  cœurs  d'intelligence  ; 
Je  m'assurais  que  jamais  l'incondtance 
Ne  briserait  de  si  beaux  nœuds  : 

Ah!  qu'il  est  dangereux 
De  sVrtg.^frci.-^  sur  b  vau^iï  aî^jfonce 
Des  WTmii'nï  aiuouieut. 
L'infidèle  îinitiJalt,  pnuf  én^indre  sel  f^ît 
Qu'il  m'en  eût  fait  seniir  touti?  h  v'iqI^îiv.g, 
Que  le  choruit;  fainl  J'iiac  Uaufi;  c^pccLUCC 


i8  PHÀETOÎT. 

Expose  on  cœar  crcdnW  k  4e9  imiux  rigoureux! 

^Âh!  qu'il  est  dangereux 
**         De  s'engager,  sur  la  vaine  assurance 

Des  sermens  amoureu^^! 

SCÈNE  III. 

LYBIE,  THÉONE. 

LVBIE. 

QcE  l'incertitdde 
Est  un  rigoureux  tourment! 
Non,  on  h'a  point,  en  aimant, 

De  peine  plus  rude 

Que  Tincertitude. 
Je  sens  croître  â  tout  moment 

Mon  inquiétude. 

Que  rincenitude 
Est  un  rigoureux  tourment! 

THÊ05E. 

Que  ma  disgrâce,  bêlas I  n'est-elle  cncor  douteuse  | 
Vous  espérez  de  voir  vos  désirs  satisfaits  : 

Vous  pouvez  être  heureuse, 

Et  je  ne  le  serai  jainais. 

Dans  mes  malheurs,  que  faut-il  que  j'espère! 
3'aime  un  ingrat  qui  trahit  nos  amours  : 
Et  je  sens,  malgré  ma  colère, 
Que  ,  tout  iu^t  qu'il 'est,  je  Tainierai  toujour:». 

I.Y«IE. 

Mon  sort  était  dî^e  d'envie. 


ACTE  11,  SCÈNE  IV.  '    19 

Avant  qae  par  Tamour  mon  ccenr  fôt  tounnentc. 

thIone.   . 
Noos  ne  savons  le  prix  ds  notre  liberté , 
Qu'après  qu'elle  nous  est  r^vie. 

ERSEMBItÇ. 

r  Amoar,  cruel  vainqueur,' 
Ah!  pourquoi  troublais-tu  le  repos  de  ma  vie  ! 

Amour,  cruel  vain(piear, 
Ah!  pourcpiûi  troublai3-tu  h  repos  de  mon  cœur  ! 

tTBIE. 

^'attends  le  choix  du  roi. 

TIIÉ09E. 

Je  vais  cacher  mes  larmes, 

LYBIE. 

Mon  cœur  est  agité'  de  mortelles  alarmes  : 
Le  roi  déjà  peut-être  a  nommé  mon  époux. 
Vous  me  laissez?. 

THÉONE. 

Je  laisse  Epaphus  avec  vous. 

SCÈNE  IV. 

ÉPAPJIUS,  LVBllj:. 

ÉPAPH'US. 

Quel  malheur^ 

lYBIE. 

Dieux!  quelle  tristesse! 


AO  PHAÉTON. 

épAPHUS. 

Qael  malheur!  quel  supplice!  hélas I 

LYBIE. 

Que  TOUS  alarmez  ma  tendresse  ! 
épAphus. 

Je  vous  perds ,  charmante  princesse  l 

Quel  malheur!  quel  supplice!  hélas! 

De  perdre  un  bien  si  plein  d'appas  ! 
C'est  en  vain  que  pour  moi  votre  cœur  s'mtéresse  : 
Le  roi  m'a  prononcé  l'arrêt  de  mon  trépas  ; 
.Votre  époux  est  choisi ,  je  ne  le  serai  pas  ; 

Je  vous  perds ,  charmante  princesse , 

Quel  malheur!  quel  supplice!  hélas! 

De  perdre  un  bien  si  plein  d'appas  l 

Se  peut-il  qu'une  loi  si  dure 
Ne  vous  arrache  aucun  murmure  ! 
,Un  doux  espoir  m'a-t-il  trompé  ?j 
Pelle  princesse ,  est-il  possible , 
Que  votre  cceur  soit  insensible 
Au  coup  moitel  qui  m'a  frappé? 

LTBIE. 

Votre  douleur  n'a  point  à  craindre 
De  blesser  du  devoir  les  droits  trop  absolus  ; 
Votre  nmûur  malheureux  se  plaint ,  sans  se  contraindre  ; 
1^1:115  r^moùr  qui  se  plaint  le  plus, 
W  est  piis  toujours  le  plus  à  plaindre. 

ÉPAPHUS. 

ï^iviniii.%  dont  j'ai  reçu  le  jour, 
tï  mon  désespoir,  et  vengez  mon  amour  !  ^ 


ï    ■  -J 


ACTE  II,  SCÈNE  ly.  j, 

Contre  un  roi  si  crael  armez  votre  colère.... 

LYBIE. 

îAh î  tout  cruel  qull  est,  songez  qu'il  est  mou  père: 
N  attirez  pomt  sur  lui  le  céleste  courr/oux. 

épaphus. 
Vous  ne  demandez  point  qui  sera  votre  époux  l 

LÏBIE. 

Hélas!  pour  m^accablcr,  c'est  assez  de  connahie     " 
Que  )e  ne  serai  point  à  qui  je  voudrais  être. 

EPAPHUS. 

Piiaéton  est  choisi...  ' 

I.ÏBIE. 

Trop  rigoureuse  loi! 
'AL!  qu'il  m'en  coûtera  de  larmes; 

^PAPHIJS. 

Que  le  bien  qu'il  m'ôte  a  de  charmes? 
11  n'en  connaîtra  pas  le  prix  si  bien  que  moi. 

tïBlE. 

Funeste  choix! 

ÉPAPJIUS. 

Pouleur  mortelle } 

lYBlE. 

Jour  infortuné  î 

ÉPAPHUS. 

Jour  ^Jlreuxï 
r  M  s  L  ai  E  t  j. 
O  lort  trop  m^iliLntrrtuL 


r 


%9  PH^ETO^. 

D'un  amour  si  &dèle  I 

ÉPAPHDS. 

.Votre  ecettr  pau-il  suivre  une  loi  si  cruelle?, 

LTBIE. 

Mon  cœur  tremble ,  soupire ,  et  Se  sent  déchirer  ; 
Mais  il  doit  obéir,  en  dût-il  étirer. 

EHSEMBLE. 

Faut^il  que  le  devoir  barbare 
Pour  jagoai^  nous  sé|»arc  ?. 

éPAPHUS. 

Je  vous  perdrai  dans  un  moment  : 
L'Amour,  le  tendre  Amour  gémira  vainement  j 
iVous  Tabandonnere?. 

LYBIE. 

Que  ne  puis-je  le  suivre  l 

éPAPBCS, 

Faut-il  que  ce  que  faîme  à  mon  rival  se  livre  ? 

LYBIE. 

Plaignez-moi  de  soufirir  un  si  cruel  touimenc. 
épAPHns. 
Vous  vivrez  pour  un  autre  amant , 
Et  sans  vous  je  ne  saurais  vivre. 

ENSEMBLE. 

Que  mon  sort  serait  doux 
Si  je  vivais  pour  vous  î 

(Épaphusse  relire.) 


ACTE  II,  SCÈNE  V.  23 

SCÈNE    V. 

LYBIE,  MÉROPÔ,  CLIMBNE,  PHAÉTON,  un 
ROI  ÉTHiopiEK,  un  ROI  iKDiER,  troupe  d'é- 
GXP¥iEiis  et  d'éGTPTiEHiiEs,  froupe  d'ÉtHio- 
piESS  et  d'ÉTHiopiESBREs  troupç  d'isoisNS  et 

d'iRDIESBES. 

MÉnops. 
Bois  ,  qui  pour  sou v  drain  devez  me  reconnaître  : 
Et  vous ,  peuples  divers ,  dont  les  dieux  m'ont  fait  maître, 

Soyez  attentif  à  ma  voix. 

Dans  ma  vieillesse  languissante, 
Le  sceptre  que  je  tiens  pèse  à  ma  maàn  tremblante , 
7e  ne  puis  sans  secours  en  soutenir  le  poids. 

Pour  le  (ils  du  Soleil  n^on  choix  se  détermine  : 

Cest  Phaéton  que  je  destine 
!A  tenir,  après  moi,  l'Egypte  sons  ses  lois. 
J'accorde  à  ce  béros  ma  fille  qu'il  dem  ande. 

Que  de  tous  côtés  on  entende 
Le  nom  de  Pbaéton  retentir  miUe  fois. 
Est-il  pour  nous  une  gloire  plus  grande  ? 
Le  sang  des  Dieux  s'unit  au  sang  des  rois. 
Mérops,  Climènô ,  Phaëtou  elLybie  se  placent  sûr  un  trône, 
et  les  peuples  tëmoigneat  leur  )oie  par  des  danses;  aux-^ 
quelles  ils  mêlent  des  acclamations,  en  faveur  d«  Pbaéton.) 
LE   CHGEun. 
Que  de  tous  côtés  ob  entende 
Le  nom  de  Pbaéton  retentir  mille  fois. 
Est-il  pour  nous  une  gloire  plus  grande?. 
Le  sang,  des  Dieux  s'unic  au  sang  des  rois. 

FIN  Dtt    SECOND   ACTE.    - 


i 


ACTE    TROISIÈME. 

Le  théâtre  change ,  el  représente  le  temple  d'Isis. 

SCÈNE    I. 

XHÉONEj  PHAÉTON,  suivAss  de  phaéto». 


Ah  î  Phaétoo ,  est-il  possibie 

Que  vous  soyez  sensible 

Pour  une  autre  que  moi?, 
'Ah  1 5^haéton ,  est-il  possible 
Que  vous  m'ayez  manqué  de  foi?, 

Tout  'm'annonce  un  malheur ,  dont  je  frémis  d'eflroi  : 
Si  vous  hie  trahissez ,  ma  mort  est  infaillible  : 
Nous  devions  vi\Te  heureux  sous  une  même  loi  ; 
Avec  ce  que  Ton  aime  un  sort  doux  et  paisible 
.Vaut  bien  le  sort  du  plus  grand  roi. 

Ah  !  Phaéton ,  est-il  possible 

Que  vous  soyez  sensible 

Pour  une  autre  que  moi  ? 
Ah  !  Phaéton .  est-il  possible 
Que  vous  nx'ayez  manqué  de  foi  ï 


ACTE   III,  SCÈNE  I.  iS 

'      PHAÉT05. 

Pour  régir  l'univers ,  les  destins  m'ont  fait  naître  : 

Sr  TAmour  m'en  rendait  le  maître , 

Que  mon  bonheur  serait  charmant  ! 

Pour  être  heureux  parfaitement , 
Ce  serait  avec  vous  que  je  le  voudrais  être. 

THÉOSE.      ^ 

I. 'hymen  de  la  princesse  a  pour  vous  des  appât , 
Vous  Taimex,  votre  cœur  m'oublie. 

PHAÉTOH. 

Non ,  la  seule  grandeur  avec  elle  me  lie , 
Et  l'amour  ne  s'en  mêle  pas. 

THÉOSE. 

Quoi  !  malgré  ma  douleur  mortelle , 
Au  mépris  de  mes  pleurs ,  votre  cœur  infidèle 
Fompt  des  nœuds  qui  devaient  à  jamais  nous  unir  ?. 

La  couronne  vous  parût-elle 
Cent  fois  cncor  plus  belle , 
Quel  bien  peut  être  doux,  quand  il  faut  l'obtenir 

Par  une  trahison  cruelle  ?  - 

PHÀÉT02I. 

Aux  lois  de  mon  destin  j'ai  regret  d'obéir. 
Je  suis  touché  de  \otre  peine. 

THÉOVE. 

Hélas  1  vous  me  plaignez ,  et  vous  m'allez  trahir*.     > 
yous  m'offrez  une  pitié  vaine. 

PHAÉTON. 

Punissez-moi  par  votre  haine. 

TUÉOSE. 

Ai-je  un  cœur  fait  pour  vous  haïr  ?, 
Grande  Opéx'a$.    a.  3  ' 


q6  PHAÊTON. 

rnAitù9. 

3e  mtê  iodigoe  de  vous  plaire  ; 

Je  mérite  vcftte  colère , 
Je  ne  mérite  pas  1«8  pleors  que  to&s  Verses. 

« 
Peifide ,  il  est  donc  vrai  que  vous  me  trabissez  ?, 

Tiimoin  dé  ma  constance 
Et  de  son  changement  : 

Ciel,  qai  vois  la  cruelle  ofiènse 

Que  me  fait  ce  pai^ure  amant , 

O  ciel  !  j'implore  ta  vengeance. 
Que  la  foi  méprisée  arme  les  justes  Dieux! 
Que  l'amour  soit  vengé  !  qnll  allume  la  foudre  ! 

Que  ce  superbe  ambitieait 
iTorobe  avec  sa  grandeur,  et  Sôit  réduit  en  poudre!... 

Que  dis-(e ,  ftudfieuteûSé  !  hélaS  I 

t)e  perfide  m'est  cher  encore , 

Et  je  mourrais  de  son  trépas  : 

Justice  du  ciel  que  j'implore , 

Dieux  vengeurs ,  ne  m'exaucez  pas. 

Vous  voyez  èobl  fiiibiessc  extrême , 
In3rat ,  vous  triomphez  ^  mon  juste  conrroiir.    - 
Non ,  si  je  me  venge  de  vous , 
Ce  ne  sera  que  sur  moi-même. 


ACTE  III,  SCÈNE  II.  %f 

SCÈNE  II. 

t 

PHAETON^  mvtm  de  PHAiTOV. 

Suivez-la  ,  ma  présence  irrite  ses  doulears. 

Je  plains  ses  malbeurs , 
Je  m'attendris  par  ses  larmes  ; 
'Ah  !  que  deux  beaux  yeux  en  pleins , 

Ont  de  poissans  charmes  ! 

/         . 
le  n'avais  jamais  vu  l'éclat  du  sort  des  rois , 

Quand  je  m'engageai  sons  ses  lois  ; 
Rien  n'était ,  à  mes  yeux ,  si  beau  qu'un  amour  tendre  : 

La  grandeur  m'appelle  aujourd'hui , 
L'amour  me  parle  en  vain ,  je  ne  puis  plus  l'enteodre , 
La  fière  ambition  parle  plus  haut  que  lui. 

L'Egypte  adora  Isis  ;  la  coutume  m'engage 
A  rendre  un  solennel  hommage 
•    A  son  divin  pouvoir  ; 
Acquittons-nous  4c  ce  devoir. 


aS  PHAÉTOH. 

SCÈNE  III. 

/ 

ÉPÀPHUS,  PHAÉTON,  suitass   de  phàétos. 

EPAPHUS. 

So»GEî-vous  qu'Isis  est  ma  m^e  ? 
Jusqu'au  temple  où  Ton  la  révère , 
yenez-vous  insulter  à  son  fils  malheureux  ?, 

PHAÉTOÎI. 

Par  nos  ofTrandes ,  par  nos  vœux , 
Nous  allons  calmer  sa  colère. 
bpAphus. 
Vous  m'ôtez  un  bieu  qui  m'est  dû  ; 
Croyez- vous  qu'à  vos  vœux  le  juste  ciel  réponcV? 

PHAÉTON. 

Peut-il  â  mes  désirs  avoir  mieux  répondu  2 
Je  deviens  le  maître  du  monde. 

Quel  sort  est  plus  beau  que  le  mien  ? 
Est-il  une  gloire  plus  grande  ? 
Non ,  que  les  Dieux  ne  m'ôtent  rien , 
C'est  tout  ce  que  je  leur  demande. 

épAphus» 
Votre  orgueil  pourrait  s'abuser  ; 
Uo  rival  tel  que  moi  n'est  pas  à  mépriser. 
PHAÉTOV. 

Tout  suit  mes  désirs ,  tout  me  cède , 
Que  peut  votre  vain  désespoir  ?. 
11  ne  sert  qu'à  me  faire  voir 


ACTE  m,    SCÈNE   lit,  >9 

Le  prix  du  bien  que  je  possède  ; 
Plus  mon  rival  est  jaloux , 
£t  plus  mou  boubeuir  «^st  doux^ 
ÉPApnus. 
Craignez  le  dieu ,  dont  je  liens  la  naissacccY 
Craigaez  sou  foudroyant  courroux. 

VHAéTON. 

Je  me  flatte  de  Tespérance , 
*    Que  tous  les  dieux  ne  seront  pas  pour  vous. 

Mon  père  est  le  dieu  favoraMe , 
Qui  répand  le  jour  en  tous  lieux  : 
Tout  s'anime  par  lui,  sans  lui,  ripn  n'est  aioiablc  ^ 
Sans  son  divin  éclat ,  une  nuit  eÛroyabU 
Couvrirait  h  jamais  nos  yeux.. 
Non,  rien  n'est  conrparable 

Au  destin  glorieux 
Du  plus  brillant  des  Dieux^ 

EPÂPHUS. 

Mon  père  est  le  dieu  redoutable. 
Qui  régit  la  terre  et  les  cieux  :. 
Il  peut,  quand  il  lui  plaît ,  d'un  coup  inévitable,. 
.Renverser  les  audacieux. 
Non ,  rien  i^'est  comparable , 

Au  destiv  glorieux 
Du  plus  puissant  des  Dieux. 

ENSEMBLE. 

Non ,  rien  n'^est  comparable 

Au  destin  glorieux 

FHA.       )    «       ,        {  brillant     ï    j      ,»■ 
'  J    Du  plus   \       .  î   dc5  Ueît%. 

ifAfiH.   y  ^        l  puissant  J 


Zo  PHAETON. 

ÉTAPHt7  8. 

Jupiter  pour  son  fils  m'a  daigné  reconnaître  : 

On  peut  douter  encer  qu'un  dieu  vous  ait  fait  naitre« 

PBAÉTOlf. 

C'est  Iq  Soleil ,  vous  le  savez, 

ÉPAPHU8. 

Climène  nous  le  dit,  est-ce  assez  pour  te  croire 2 

PHAëTOK. 

Osez-vous  attaquer  ma  gloire  ?, 

éPAPUUS. 

Défendez-b ,  si  vous  pouvez. 

PHAÉT05. 

Vos  yeux  sont  fermés  par  l'envie. 

Malgré  vous,  ils  seront  ouverts  : 
ï 'espère  que  le  dieu  qui  m'a  donné  la  vie 
M'avoûra  poi^r'son  fils  aux  yeux  de  l'uni  vers. 

SCÈNE  IV. 

PHAÉTpN,ÉPAPtiUS,  MÉROPS.CtIMÈNE, 
LYBIE,les  deux  ROIS  tributaires  de  Mifnop s, trou- 
pes de  PEUPLES  ciffércns,  troupes  de  jeunes  Éotp- 
TiEîis,  et  de  jeunes  Égyptiennes,  qu  on  a  pris  soin 
de  choisir  et  de  parer  magnifiquement,  pour  porter 
de  riches  ofïrandes,  troupe  de  pbêtbesses  de  la 
déesse  Isis.  / 


à 


(ïût  i«iiiifïi  Kg^-ptienSf  elles  jeunes  Égyptiennes  <|ui  portent 
le»  DJVruudes,  approrheot  du  temple  d'Isis  en  dansant.)     , 

laÉROPS. 
1^,  ^luiu-  qui  r Amour,  du  plus  beau  de  ses  noeiidS) 


ACTE  m,  SCÈNE  IV.  3ii 

Sat  enchaîner  le  dieu  qui  lance  le  tonnerre  : 
Isis ,  aimex  toujours  ce  séjour  bienheureux. 
Le  ciel  y  Bt  cesser  votre  sort  rigoureux , 
Lorsque  Junon  partout ,  vous  déclarait  la  guerre.   . 
'Approuvez  nos  desseins ,  favorisez  nos  vœux  : 
Etendez  cet  empiré  aux  deux  bonts  de  la  teire. 

MÉnOPS  ET  CMMÈNE. 

Nous  lèverons  ^ 
Votre  puissance  ; 
Nous  implorons  * 

Votre  assistance  : 
Isis ,  nous  espérons  en  vous , 
Isis,  exauce^nous.. 

|,C   CBOBUn  DES   rEPI^|.ES. 
Nous  révérons 
Voire  puissance  ; 
Nous  implorons 
Votre  assistance  : 
Isis,  nous  espérons  en  votis, 
isis,  exaucez-nous. 

tE    CHGEUR   DES    PBÊTIIESSES. 

Recevez,  à  grande  déesse, 
Les  vœux  qu'on  vous  adresse. 

LE    CHGËUR  DES   PEUPLES. 

Nous  reviirons 
Votre  puJïçypcc  ; 
Nous  implorons 
Vôtre  asfiifiaïirc  : 
bis,  nous  esp^runs  en  vous, 


la  PHAET05. 

Isis,  exaacez-oous. 

LE    CHŒUR   DES    PRÊTRESSES.. 

Recevez,  6  grande  déesse, 
Les  vœux  qu'on  vous  adresse. 

LE    CHŒUR    DES  PEUPLES. 

Nous  révérons 
Votre  puissance  ; 
Nous  implorons. 
Votre  assistance  j  , 

Isis,  nous  espérons  en  vous  ^ 
Isis,  exaucez-nous. 

ÉPAPHUS. 

Vous  qui  servez  Isis ,  avez-vous  la  faiblesse 

D'être  éblouis  de  la  richesse 

-Des  oflrandes  qu'on  vous  fait  voir? 
Et  vous  ,  Divinité,  dont  je  tiens  la  na'ssance. 

Consentez-vous  h  recevoir 

Des  don^de  la  main  qui  m'offense  ? 

(On  entend  du  bruit  dans  le  temple,  et  lN)n  en  voit  les  i)orus> 
»e  fermerd'elJes-mûmes.) 

MÉROPS., 

Dieux  !  le  teople  se  ferme  ! 

PHAET09.. 

Allons,  il  faut  l'ouvrir.  ^ 
Les  Dieux  veulent  souvent  qu'on  ose  les  contraindre^ 
A  recevoir  les  vœux  que  Ton  doit  leur  oflrir., 

CLIUÈ-NE.. 

'Ah  î  mon  Els ,'  arrêtez» 


ACTE  111,  SCÈNE  VI.  J3 

PHAÉTOn. 

Saivez-moi,  sans  rien  craindre, 

•   ÉPAPHUS. 

Vengez- vous,  ô  !  puissante  Isis, 
Vengez-Tous,  vcngtz  votre  fils. 


SCÈNE   V. 


L«s  portes  du  temple  «'ouvrent ,  et  ce  lieu  qui  avait  paru 
magnifique ,  n'est  plus  qu'un  goufîre  effroyable  qui  vomit 
des  flammes,  et  d'où  sortent  des  furies  et  des  funtôrae< 
terribles,  qui  renversent  et  brisent  les  offrandes,  et  ^ui 
menacent  et  écartent  l'assemblée.  Phaéton  s'obsline  à  de' 
meurer,  et  Cliraène  ne  peut  quitter  son  fils. 

SCÈNE  VI. 

CLIMÈNE,  PHAÉTON. 

,  CLIMÈaS. 

Le  ciel  trouble  votre  bonheur  ; 
Un  péril  mortel  vous  menace. 

PHAÉTOïl, 

L'envie  ose  attaquer  ma  gloire  et  votre  honneur , 
C'est  Tunique  pénl  dont  mon  cœur  s'embarrasse. 
Partagez  un  aflront  dont  le  seul  souvenir 
Me  feit  rougir  de  honte  et  fréirir  de  colère  ; 

Epaphus  ose  soutenir 

Que  le  Soleil  n'est  pas  mon  père. 

CLIMÈ  5E. 

O  Dieux  ï 


;J4  I  tnAt^lurt^ 

C'est  de  vous  que  j'attends 

Des  témoignages  éclutans 

De  la  grandeur  de  ma  naissance. 
Je  sens  qu'elle  est  divine,  et  j'ai  dû  m'en  vanter; 
Mais  c'est  peu  que  mon  cœur  m'en  donne  l'assurance  i 
Il  faut  foi-cer  l'envie  à  n'en  pouvoir  douter 
Prenez-en  soin ,  au  nom  du  tendre  amour  de  mère ,    ' 
Qui  s'est ,  en  ma  faveur ,  signalé  tant  de  fois  ; 

An  nom  de  ce  qui  peut  voua  plaire  ;, 

Au  nom  du  dieu  qui  nous  éclaire , 
Ue  ce  dieu  «  que  l'Amour  sut  nnger  sous  vos  lois. 

Mon  fils,  n'en  doutez  point,  vous  confondrez  l'envie ,  - 
C'est  du  père  du  jour  que  vous  tenez  k  vie , 
Vous  pouvez  vous  vanter  d'un  sort  si  glorieux. 

Vous  êtes  son  fils ,  je  le  jure , 
Far  ce  dieu  qui  nous  voit ,  qui  nous  entend  des  cieux  i 

Et  par  la  splendeur  vive  et  pure 
Dont  il  sait  obscurcir  l'éclat  des  plus  grands  dieux. 

Si  je  soutiens  une  imposture , 

Puisse-t-il ,  pour  jamais ,  refuser  à  mes  yeux 

La  lumière  qu'il  donne  à  toute  la  nature. 

(DuK  ^  ctils  sortent  d'un  nuage,  et  viennent  prendre  PhAeto», 
pour  le  conduire  au  palais  du  Soleil.) 

€e  èicn  semble  approuver  le  serment  que  je  fais  : 

Il  y  joindra  son  témoignage. 
C'cât  laî  qui  fait  sortir  ces  Vents  de  ce  nuage, 

l^onr  vous  conduire  à  son  palais. 

PHAÉT05. 

Igloire  éclatf'ra  de  l'un  à  l'autre  pôle  ; 


ACTE  III,  SCÈNE  Y  h  35 

L'envieux  Epaphus  se  verra  démentir, 
Je  ne  puis  assez  tôt  partir. 

CtlMÈNE. 

!ÂJ]es ,  mon  Ois ,  allez. 

PHAÉTO». 

Je  vole. 
(Le»  Vents  enlèvent  Phaëton  et  le  conduisent  au  palais  du 
SoleU,  )  .  , 


FIS  DU  rnoisikuz  acte. 


à 


ACTE   QUATRIÈME. 

Le  théâtre  change  et  représente  le  palais  du  Soleil. 

SCÈNE  1. 

LE    SOLEIL,   LES    HEURES   du     joub,  LE 
PRINTEMS,  L'ÉTÉ,  L'AUTOMNEjL'HlVER, 

SUITE   PES    QUATRE    SAlSOSS. 

LE    CBGEUB   DES    HEUKES. 

!^Ai93  le  dieu  qui  nous  éclaire , 
■Tout  languit ,  rien  ne  peut  plaire. 
Chantons ,  ne  cessons  jamais 
De  publier  ses  bienfaits. 

UNE   DES    HEURES. 

O  dieu  de  la  clarté ,  tous  réglez  la  mesure 

Des  jours ,  des  saisons  et  des  ans  : 
C'est  vous  qui  produisez,  dans  les  fertiles  champs, 

Les  fruits ,  les  fleurs  et  la  verdure  : 

Et  tonte  la  nature  x 

N'est  riche  que  de  vos  prësens. 

LES    CHOEURS. 

Sans  le  dieu'  qui  nous  éclaire 
Tout  languit,  rien  ne  peut  plaire  j 
Chantons,  ne  cessons  jamais 
De  publier  ses  bienfaits. 


ACTE  IV,  SCÈNE  II.  37 

l'automne^       ' 
C'est  par  vous,  à  Soleil,  qae  le  ciel  slllamine ^ 

Et,  sans  votre  splendeur  divine , 
La  terre  n'aurait  point  de  climats  fortunés. 

La  nuit ,  l'horreur  et  l'épouvante , 
S'emparent  du  séjour  que  vous  abandonnez  : 
Tout  brille  ,  tout  rit ,  tout  enchante 
Dans  les  lieux  où  vous  revenez, 

LES    CHOEUBS. 

Sans  le  Dieu  qui  nous  éclaire , 
Tout  languit ,  rien  ne  peut  plaire  ; 
Chantons,  ne  cessons  jamais 
De  publier  ses  bienfaits. 

LE    SOLEIL. 

Redoublez  la  réjouissance 
Que  vous  me  faites  voir. 
Phaéton  vient  ici ,  c'est  mon  fils  qui  s'avance  ; 
Prenez  soin  de  le  recevoir. 


SCÈNE  II. 


LE  SOLEIL,  PHAléfrON,  LES  HEURES  do 
joun,  LES  QUATRE  SAISONS,   soitb   des 

QUÂTBE   SÂISOSS. 

Le  printems  et  sa  suite  dansent ,  et  les  autres  saisons  chantent 
avec  les  heures ,  pour  témoigner  qu'ils  se  réjouissent  de 
l'arrivée  du  fils'^du  Soleil ,  dans  le  palais  de  son  père. 

uvE  DES  HEURES,  ET  LES  CHOEURS  qui  Itti  Fepo&denL 

D  A  US  ce  palais,  ^É 

Bravez  l'envié,  ^H 

Grands  Opéras.  2 .  4 


38  PHAETON. 

Dans  ce  palais 
Vivez  en  paix.    , 
Soyez  content  ^  tout  vous  y  convie  ; 
Goûtez  toujours  les  biens  les  plus  parfaits , 

L'honneur  qui  suit  une  illustre  vie , 
Est  un  bonheur  qui  ne  finit  jamais. 

Ne  tardez  pas , 

La  gloire  est  belle  ; 

Ne  tardez  pas , 

Suivez  ses  pas. 
Vous  la  cherchez ,  et  sa  voix  vous  appelle , 
Vous  êtes  fait',  pour  aimer  ses  appas  ; 

L'amour  constant  que  Ton  a  pour  elle , 
Porte  un  ^and  nom  au-delà  du  trépas. 

LES   CHŒURS. 

Dans  cette  demeure  charmante, 
Venez  jouir  d'une  gloire  éclatante  ; 
Jeune  héros ,  tout  répond  à  vos  vœux , 

Venez  jouir  d'un  sort  heureux. 

LE  SOLEIL. 

Approchez,  Phaéton,  que  rien  ne  vous  étonne  ; 
J'adoucis ,  en  ces  lieux ,  l'éclat  qui  m'environne. 
Vqus  soupirez  l  mon-  fils ,  qui  peut  vous  inspirer 

Tant  de  trouble  et  tant  de  tristesse  ? 

Le  sang ,  qui  pour  vous  m'intéresse , 

Vous  permet  de  tout  espérer. 

PHAÉTON. 

Ame  de  l'univers ,  source  vive  et  féconde 
De  tons  les  biens  du  monde, 
Père  du  jour,  s'il  m'est  permis 
D'oser  vous  appeler  mon  père , 


ACTE  IV,  SCÈNE  II.  3o 

Ne  me  refusez  pas  le  secours  que  j'espère 

Contre  mes  jaloux  ennemis. 
Le  reproche  honteux  d'une  naissance  obscure 

M'a  Eût  une  cruelle  injure  ; 

'An  nom  de  Tamour  paternel , 
Imposez  à  l'envie  un  silence  étemel. 

LE   SOLEIL. 

L'envie  accuse  à  tort  Climène. 
.Vous  n'êtes  point  trompé,  j'approuverai  sans  peine 

Le  grand  nom  que  vous  avez  pris  ; 
Ma  tendresse  pour  vous  ne  craint  pas  de  paraître  j 

Phaéton,  vous  êtes  mon  fils, 

Et  vous  êtes  digne  de  l'être. 
Quel  gage  voulez-vous  du  sang  qui  vous  fit  naître? 

Quoi  que  vous  puissiez  deçiander , 

Je  promets  de  vous  l'accordet. 

C'est  toi  que  j'en  atteste , 

Fleuve  noir  et  funeste. 
Que  l'éternelle  nuit  doit  cacher  à  mes  yeux  ; 
J'en  jure  par  l'horreur  de  tes  eaux  efiioyables , 
Styi,  ô  Styx!  dont  le  nom  attesté  par  les  dictkx 
Bend  leurs,  sérmens  inviolables. 

'Tous  mes  trésors  vous  sont  ouverts , 
Tout  est  permis  à  votre  noble  audace. 

PHÂ^TOIï. 

Sur  votre  cliar ,  en  votre  place , 
Permettez-moi  d'écl^er  l'univers. 

LE  SOLEIL. 

'Ah  !  mon  fib ,  qu'osez- vous  prétendre  ? 


j 


'4o  PHAÉTON. 

PHAÉTOfl. 

Si  je  suis  votre  fils,  puis-je  trop  entreprendre 2 

tE  SOtEIK. 

Malgré  mon  sang ,  la  loi  da  sort 

.Vous  assujétit  à  la  mort. 
Vos  désirs  vont  plus  loin  que  la  puissance  humaine^ 
C'est  trop  pour  un  mortel  de  tentei*  un  e0brt 
Où  les  forces  d'un  dieu  ne  suffisent  qu'à  ^eine. 

PHAÉTOB. 

La  mort  ne  m'étonne  pas 
Quand  elle  me  parait  belle; 
Je  suis  content  du  trépas , 
S'il  rend  ma  gloire  immortelle. 

LE  SOtEIt. 

J'ai  fait  un  indiscret  sennent* 
Voyez  mon  triste  coeur  saisi  d'étonnement  ; 
De  l'amour  paternel  faut-il  un  autre  gage  ?, 

Hélas!  ma  crainte  en  dît  assez, 
Un  dieu  tremble  pour  vous ,  mon  fils ,  reconnaisses 

Votre  père  à  ce  témoignage. 

PHAiÊTOlf. 

Je  dois ,  par  un  courage  incapable  d'eflroi, 
Mériter  les  fiayeurs  que  vous  avez  pour  moi. 

LE  SOLEIL. 

Déjà  la  nuit  descend ,  et  fait  place  à  l'aurore , 

Il  faut  bientôt  faire  briller  mes  feux. 
"^  'Abandonnez  un  dessein  dangereux, 
Évitez  votre  perte, il  en  est  tems  encore. 

PHAÉTOV. 

Mon  destm  sera  beati|  dusse- je  y  succomber. 


fACTE   IV,  SCÈNE  II.  4r 

QaeUe  gloire  si  je  l'achève  ! 
Il  est  beau  qa'un  mortel  jusques  aux  cieux  s'élève , 
Il  est  beao  même  d'en  tomber. 

LE  SOLEIL. 

Poisçpie  je  l'ai  juré ,  je  dois  vous  satisfaire. 
Fortune ,  s'il  se  peut ,  prends  soin  d'un  témérmre  \ 

Mon  fils  veut  se  perdre  aujourd'hui , 

Conserve  ses  jours  malgré  lui. 

.     LES  CHŒUBS. 

!A.llez  répandre  la  lumière. 

Puisse  un  heureux  destin 

Vous  condOire  à  la  fin 
De  votre  brillante  carrière  ! 
Allez  répandre  la  lumière. 


FIS   DU   Q.UÂ^BIÈME   ACTE. 


ACTE  CINQUIÈME. 

Le  théâtre  change  et  représente  une  campgne  agréable  ;  la 
nuit  se  dissipe  insensiblement,  et  cède  au  jour  qui 
commence  à  paraître  ;  Phaéton ,  assis  sur  le  char  du  So- 
leil f  s'élève  sur  Itorizonp 


SCÈNE  I. 

CLIMÈNE,   et  un  des  deux  ROIS  tributaires  de 
Mérops. 

CLIMÈNE. 

A.SSËMBLEZ-VOUS ,  habitaus  de  ces  lieux , 
Le  sonuneil  qui  ferme  vos  yeux  ' 

Vous  retient  trop  long-tems  dans  une  paix  profonde  : 

Mon  fils  fait  voir  qu'il  est  du  sang  des  dieux. 
Sur  le  char  de  son  père,  il  brille  dans  les  cieux. 

Que  votre  xèle  me  seconde. 
Célébrez  avec  moi  son  destm  glorieux. 
Que  Ton  chante ,  que  tout  réponde  ; 

C'est  un  soleil  nouveau, 
,Qui  donne  la  lumière  au  monde  -, 
C'est  un  soleil  nouveau , 
Qui  donne  un  jour  si  beau. 

TOUS  DEUX. 

C*est  un  soleil  nouveau , 
Qui  donne  la  lomiète  an  monde  : 


I  . 


ACTE  V,  SCÈNE   II.  43 

Cest  un  soleil  nouveau , 
Qui  donne  un  jour  si  beau. 

(Glimène  transportée  de  joie»  court  de  tous  côtés  publier  la 
gloire  de  son  fils  ;  les  peuples  d*Égypte  qui  entendent  sa 
voix  ,  s'empressent  de  la  suivre.  ) 

SCÈNE  II. 

ÉPAPHUS,  tboupe  de  peuples  qui  suivent 

CLIMèBE. 
ÉPAPHV8. 

Dieu  ,  qui  vous  déclarez  mon  père , 
Maître  des  dieux,  c'est  en  vous  que  j'espère! 
M'abandonnerez-vous  au  dése^oir  fataj 

De  voir  triompher  mon  rival  ?, 

On  suit  les  transports  de  sa  mère  ; 

On  me  méprise ,  on  le  revête  : 
Tout  sert  à  son  bonheur ,  tout  irrite  mon  mal. 

U  obtient  ce  qui  m'a  su  plaire , 

U  monte  au  ciel ,  il  nous  éclaire , 
Il  me  voit  accablé  d'un  tourment  sans  égal  ; 

Dieu ,  qui  vous  déclarez  mon  père , 
Maître  des  dieux ,  c'est  en  vous  que  fespère  l 
M'abandonnerezrvous  au  désespoir  fatal 

De  voir  triompher  mon  rival  ?■ 


44  phaeton. 

SCÈNE  m. 

ÊPAPHUS,  LYBIE. 


O  rigoureux  martyre 
De  n'oser  découvrir  de  mortelles  douleurs  ! 
Mon  destin  paraît  beau ,  tout  le  monde  l'admire , 

Cependant ,  je  soupire  , 

Je  pleure  mes  malheurs  : 
Du  sévère  devoir  le  tyrannique  empire 
Me  contraint  à  cacher  mes  soupirs  et  mes  pleurs« 

O  rigoureux  martyre 
De  n'oser  découvrir  de  mortelles  douleurs  I 
(  Apercevant  Épapbus.  ) 
Dieux!  épaphus!... 

lÊPAPRUS. 

Belle  princesse.... 

tTBIE. 

N'augmentez  pas  le  désordre  où  je  suis, 
ÉPAPBUS. 

Vous  me  fuyez? 

LTBIE. 

Quelle  faiblesse  ! 
Je  le  devrais ,  mais  je  ne  puis. 
Hélas  !  en  nous  voyant  ^  nous  redoublons  nos  peines.. 

ÉPAPHtrs. 
Qwej  dans  mes  maux ,  il  m'est  doux  de  vous  i:oijtl 


'ACTE  V,  SCÈNE  III.  45 

lVbie. 
Je  sub  à  PhaétOD  par  des  lois  souveraines. 

éPAPBUS. 

Vods  n'êtes  pas  encore  en  son  pouvoir. 
Mon  père  est  souverain  du  ciel  et  de  la  terre , 
Espérons  au  secours  qu'il  peut  nous  réserver  : 

Plus  mon  rival  s'empresse  à  s'élever, 

Plus  son  orgueil  l'approche  du  tonnerre. 

L7BIE. 

Je  n'ose  plus  songer  qu'à  suivre  mon  devoir, 
L'espérance  nous  est  ravie. 
i^pApnus. 

lÀh  !  si  vous  m'ôtez  tout  espoir , 
Vous  m'ôtfitez  la  vie. 
J'ose  attendre  du  sort  quelque  heureux  changement , 
L'amour  doit  espérer  juscp'au  dernier  moment. 

&TBIE. 

Notre  disgrâce  -est  certaine , 
Vous  espérez  vainement. 

ÉPÀPBUS. 

L'espérance  la  plus  vaine 

Flatte  un  malheureux  amant. 
EEI8EMBLE. 
Hélas!  une  chaîne  si  belle 

Devait  être  étemelle  : 
Hélas  !  de  si  tendres  amours 

Devaient  durer  toujours. 


d 


46  phAeton. 

SCÈNE  IV. 

MÉROPS,CLIMÈNE^  les  deux  ROIS  tributaires  de 
M  é  B  o  p  s,  troupes  de  divers  peuples,  troupes.de  pasteurs 
ÉGYPTIENS  et  de  bergères  égtptiehses. 

Mérops  et  Climène  invitent  leur  suite  à  se  réjouir  de  la  * 
gloire  du  hëros  qui  doit  être  un  jour  roi  d*Égypte.  Les 

I  pasteurs  égyptiens  et  les  bergères  égyptiennes  dansent, 
et  les  autres  peuples  chantent. 

MÉnOPS   ET    CLIUfesiE. 

Que  Ton  chante ,  que  tout  réponde  j 

C'est  un  sçleil  nouveau, 
Qui  donne  la  lumière  au  monde  ; 

C'est  un  soleil  nouveau, 

Qui  donne  uu  jour  si  beau. 

LE    CHCEUn. 

Que  Ton  chante ,  que  tout  réponde  ; 

C'est  un  soleil  nouveau , 
Qui  donne  la  lumière  an  monde  ; 

C'est  un  soleil  nouveau , 

Qui  donne  un  jour  si  beau. 

MÉnOPS  ET   CLIMÈNE. 

Jamais  le  céleste  flambeau  ' 
ïfe  sortit  si  brillant  de  l'onde  : 

C'est  un  soleil  nouveau , 
Qui  donne  la  lumière  au  monde  ;  ' 

C'est  un  soleil  nouveau, 

Qui  donne  un  jour  si  beau. 

LE    CHOEUB. 

Que  l'on  chante,  que  tout  réponde  j 


ACTE  V,  SCENE  IV.  47 

C*esi  un  soleil  nouveau , 
Qui  donne  la  lumière  au  monde  ; 
C'est  un  soleil  nouveau , 
Qui  donne  un  jour  si  beau. 

(  Les  pasteurs  égyptiens  et  les  bergères  égyptiennes  tëmoi- 
gaent  leur  joie  en  dansant,  et  une  de  ces  bergères  chante.  ) 

uns   BERGÈRE. 

Ce  beau  jour  ne  permet  qu'à  TÀurore 
De  s'occuper  à  répandre  des  pleurs. 
Que  d'éclat!  que  de  vives  couleurs T 
Mille  fleurs  vont  éclore  ; 

Tout  charme  nos  coeurs  ; 
Il  naîtra  plus  encore 
D'Amours  que  de  fleurs. 

L'Amour  me  plaît ,  je  consens  qu'il  m'enchante , 
Lorsqu'il  suivra  les  ris  et  les  jeux  ', 
Mais  s'il  me  tourmente , 
Je  romprai  ses  nœuds. 

Un  amant  qui  toujours  soupire 
Doit  alarmer; 
Ce  n'est  qujB  pour  rire. 

Qu'on  doit  fomier 
Le  dessein  d'aimer. 

Jeunes  cœurs  qui  cherchez  k  votis  rendre ,     i 
N'aimez  pas  tant  : 
Un  amour  trop  tendre 
N'est  jamais  content. 

Puisqu'il  faut  qu'une  chaîne  nous  lie , 


48  PHAÉTON. 

Ne  faut-il  pas  cboisir  un  noeud  cbannaDt  ? 
Moquoos-Dons  de  soufirir  coDStanunent  ; 
On  doit  rendre  la  vie 

Plus  douce  en  aimant , 
Ce  n'est  qu'une  folie , 
,    D'aimer  son  tourment. 

L'Amour  plaît,  je  consens  qu'il  m'encbante 
Lorsqu'il  suivra  les  ris  et  les  jeux  ] 
Mais  s'il  me  toiïnnente 
Je  romprai  ses  nceuds. 

IJn  amant  qui  toujours  soupire 

Doit  alarmer  : 
Ce  n'est  que  pour  rire , 

Qu'on  doit  former 
Le  dessein  d'aimer. 

Jeunes  cœurs  qui  cherchez  â  vous  rendre , 
N'aimez  pas  tant  : 
Un  amour  trop  tendre 
N'est  jamais  content. 

SCÈNE  .V. 

THÊONE,  MÉROPS,  CLIMÈNE,les  deux  ROIS 
tributaires  de  Mérops,  troupes  de  divers  ^uples, 
troupes  de  pasteurs  égyptiens,  et  de  bergères  egtp- 

TIESSES.  >. 

TRÉOKE. 

Cbasgez  ces  doux  concerts  eu  des  plaintes  funèbres. 


'A<:TE  V>  scène  VI.  49 

X^uistant  fatal  arrive  où  d'épaisses  ténèbres 
Coavriront  pour  jamais  le  soleil  qaî  nous  luit  ; 
iPhaétoQ  va  tomber  dans  Téternelle  nuit. 
Mon  père  m'en  assure ,  et  la  piti^  rappelle 
,Un  trop  fidèle  amour  pour  un  amant  sans  foi  ; 
B^las!  je  ne  vois  plus  sa  trahison  cruelle , 
Son  funeste  péril  est  tout  ce  que  je  voi. 

CLIMàHE. 

Une  eflroyable  flamme 
Se  répand  dans  les  airs. 

THioSE. 

Que  la. crainte  trouble  mon  amé! 

PbaétoUj  tu  te  perds; 
Tu  va»  embraser  l'univers. 

LE    CHOEUB. 

Dieux  !  quel  feu  vient  partout  s'étendre  ! 
Dieux!  tout  va  se  réduire  en  cendre  ! 
Quelle  ardeur  pénètre  en  tous  lieux  1 
Où  foirons-nous  1  6  justes  Dieux! 

SCÈNE  VI. 

I.A  DÉESSE  DE  LA  TERRE,  THÉONE,  MÉ- 
HOPS,  GLIMÈNE,  les  deux  ROIS  tributaires  de 
^ÉBOPS,  troupes  de  divers. peuples,  troupes  de  pas- 
seurs ÉoTPTiERs  et  de  bergères  égtptiehnes. 

I.A  déesse  dd  la  tebre. 
^     C'est  votre  secours  que  j'iôa^otei 

Grands  Opéras  i  d.  '5 


5o  PHAÉTON. 

Japiter,  saavez-moi  du  feu  qui  me  dévore. 
Ai-je  pu  mériter  un  si  cruel  touiment  ?. 

Ah  !  s'il  faut  qu'un  embrasement 

A  la  fin  me  réduise  en  poudre , 
Que  je  ne  brûle  au  moins  que  du  feu  de  la  foadrel 

Grand  Dieu|!  no  me  refusez  pas 
La  gloire  de  périr  d'un  coup  de  votre  bras.    . 
Boi  des  Dieux,  armez-vous,  il  n'est  plus  tems  d'attendre  : 

Tout  l'empire  qui  sait  vos  lois, 
Bientôt  ne  sera  plus  qu'un  vain  monceau  de  Cendre; 
les  fleuves  vont  tarir;  les  villes  et  les  bois,  ' 

Les  monts  les  plus  glacés,  tout  s'embrase  à  la  fois^ 

Les  cieux  ne  peuvent  s'en  défendre.... 

Ab  !  je  sens  suffoquer  ma  voix , 
Ai^cc  peine  je  respire, 
Au  milieu  de  tant  de  feux. 
Il  fniii  que  je  me  retire 

Lbtis  mes  antres  les  plus  creux. 

SCÈNE  VII. 

THAETOK,    MÉROPS,    CLlMÈNEj  LYBlEj 

THÈONl^^lcs  deux  ROIS  tributaires  de  Ménops, 
ironpos  de  divers  peuples,  troupes  de  pasteors  égtp- 
Tï£7(B  £i  de  bergères  ÉGTPTiEUHE s. 

Pli  au  Lan  païuiLcn  désordre  sur  le  char  du  Soleil»  qu*U  ne 
[peut  plus  conduire. 

K  LE    CHCEUB. 

O  Dieu  ^  qui  lancez  le  tonnerre , 
Li^z-Tau9  de  sauver  la  terre  : 


\ 


^ 


'ACTE  V,  SCÈNE-VIII.  5i 

Nous  brûlons,  nous  allons  périr; 
^eoez,  6  Jupiter,, venez  nous  secourir. 

SCÈNE  yiii. 

CïUPlTER,  PHAÉTON,  MÉROPS,  CLIMÈNE, 
LYBIE,  TH^O^E  ,  les  deux  ROIS  uributaires  de 
MÉBOPS,  troupes  de  divers  peuples,  troupes  de  pas- 
teurs éorpTiSHs  et  des  bergères  égtptiesbes 

JUPITEB. 

(An  bien  de  l'univers  ta  perte  est  nécessaire , 

Sers  d'esemple  aux  audacieux  : 
ITombe  avec  ton  orgueil,  expire,  téméraire; 
Laisse  en  paix  la  terre  et  les  cîeux. 

(Jupiter  foudroie  Phaëlon  «t  l'antanlil.) 
CLIMÈNE  ET  THÉOBE. 

O  sort  fatal  l 

UÉBOPS,    LTBIE   ET  LE    CHGEUn. 

O  chute  affi-euse  ! 
O  témérité  malheureuse  ! 


FIN    DE    PHAETOS. 


AMADIS , 

TRAGÉDIE-LYRIQUE  EN  CINQ  ACTES; 
PAR  QUINAULT, 

Beprésentée,  pour  la  première  fois,  en  i684)  et  remise 
en  1 77 1 ,  avec  la  masiqae  de  Laborde. 


jfY'ft 


PERSONNAGES  DU  PROLOGUE. 

!àLQtnlP ,  câèbre  enchantear ,  époax  d'CatTAiiDE. 
X7RGANDE ,  célèbre  enchanteresse  ^  épouse  n'Augoir. 
Soivans  d'Alqttif.  ' 
Suivantes  DiJiKïÂinDE. 
CTronpe  d'Amours  et  de  Jeux. 


PROLOGUE. 

Le  théâtre  représente  les  lieux  qu'Alquif  et  Urgande  ont 
choisis  pour  y  demeurer  enchantés  et  assoupis  avec  leur 
suite.  Un  éclair  et  un  coup  de  tonnehre  commencent  à 
dissiper  Tassoupissemeut  d'Alquif,  d^Urgande,  et  de 
leur  suite. 


ALQUIF  el  URGANDE  j  ensemble ,  sous  un  riche  pavillon. 

An  !  j'entends  un  bruit  qui  nous  presse 
De  nous  rassembler  tous  : 
Le  charme  cesse  i 
Éveillons-nous. 

(  liCs  suivans  d'Alquif  et  les  suivantes  d'UrgancLe  s'ëveilient 
et  répètent  les  deux  derniers  vers.  ) 

ALQUIF  ET  UBGASDE,    ensemble. 

Esprits  empressés  à  nous  plaire  , 
Vous  qui  veillez  ici  pour  notre  sûreté, 

Votre  soin  n'est  plus  nécessairq  ; 
Vous  pouvez  désormais  partir  en  liberté. 

Que  le  ciel  annonce  h  la  terre 
La  fin  de  cet  enchantement  : 
Brillans  éclairs,  bruyant  tonnerre , 
Marquez  Bvcc  éclat  ce  bienheureux  moment. 

(L«  chœur  répèle  les  quatre  derniers  vers.  ) 


55  -      AMADIS-  . 

(  Les  statues  qui  soutiennent  le  pavlUon  l'emportent  en  vo^ 
lant  au  bruit  du  tonnerre  et  à  la  lueur  des   éclairs.  Le» 

*  suivans  d'Alquif  et  lessivantes  d^Urgîinde  se  ré] ouïssent 
de  n'être  plus  enchantés  ,  et  une  partie  d'entre  eux  en  U- 
moigne  sa  joie  en  dansant.  ) 

USE  DES'SUIVASTES   d'CUGAHOE.  , 

Les  Plaisirs  nous  suivront,  désormais  \ 
Nous  allons  voir  nos  désirs  satisfaits. 
Vivons  sans  alarmes  ; 
Vivons  tous  en  paix. 
Bevenez ,  reprenez  tous  vos  charmes  ; 
Jeux  innocens,  revenez  pour  jamais. 
Il  est  tems  que  l'Ànrore>  vermeille 
Cède  au  Soleil  qui  marche  sur  ses  pas  :  . 
Tout  brille  ici-bas. 
Il  est  tems  que  chacun  se  réveille  ; 
L'Amour  ne  dort  pas  ; 
Tout  sent  ses  appas. 
L'^mable  Zéphire 
Pour  Flore  soupire  : 
Dans  un  si  beau  jour 
Tout  parle  d'amour. 

DRGANDE. 

Lorsqn'Amadis  périt ,  une  douleur  profonde 

Nous  fit  retirer  dans  ces  lieux. 
Un  charme  assoupissant  devait  fermer  nos  yeux 
Jusqu'au  tems  fortuné  que  le  destin  du  monde 
Dépendrait  d'un  héros  eocor  plus  glorieux. 

ALQUIF. 

Ce  héros  triomphant  veut  que  tout  soit  tcanquiUe  '. 
En  vain  mille  envieux  s'arment  de  toutes  parts  \ 

D'un  mot ,  d'un  seul  de  ses  regards  ; 
Il  sait  rendre ,  à  son  gré ,  Icup  fureur  inutile. 


PROLOGUE.  5- 

AÏ.ÇI7IF  BT   UBCfANDB,    membîe. 
C'est  â  loi 'd'enseigaer    ♦ 
Abx  noSiiPes  de  la  terre 
Le  grand  art  <îe  la  gaerre  : 
C'est  h  hn  d'enseigner  * 

Le  grand  art  .'de  régner. 

UBGABDE. 

Retirons  Amadis  de  la  nuit  éteraeDe  : 
Le  ciel  nous  le  permet  ;  an  sort  nouveau  l'appelje 
Où  son  sang  régnait  auurefois. 

ALQUIF. 

Wous  ne  saurions  choisir  de  demeure  plus  belle. 
•Allons  être  témoin  de  la  gloire  immortelle 

D un  roi,  l'ëtonnemeot  <ies  rois, 
Et  des  plus  grands  héros  le  plus  parfait  modèle. 
oncÂROE    ET   ALQUIF,  ensemble 
Tout  l'univers  admire  ses  exploits  ; 
Allons  vivre  heureux  sous  ses  lois. 

(  Le  chœur  répète  les  deux  demie»  vers.  ) 
(On  danse.) 

USE   DES    SUIVARTES   d'ubgAHDE   ET   LE   CHCEÙR^ 
ensemble 
Suivons  l'Amour ,  c'est  lui  qui  nous  mène  ; 
Tout  doit  sentir  son  aimable  aideur. 
X      Un  peu  d'amour  nous  (bit  moins  de  peine 
Que  l'embarras  de  garder  notre  ccçur. 
Malgré  nos  soins,  l'Amour  nous  enchaîne  j' 
On  ne  peut  fuir  ce  channant  vainqueur. 
Un  peu  d'amour  nous  fait  moins  de  peine 
Que  rembarras  de  -garder  noue  cceur. 


bH   -  'AMADIS.  PROLOGUE, 

AX.QQIF  EX  UBGASDE,    ensemble, 
yolez,  tendres  Amoars ,  Aimadis  va  cevivie  p 
Son  grand  cœnr  est  fait  pour  tous  suivie. 
Volez,  volez,  aimables  Jeux 2 
Conduisez  Amadis  en  des  climats  heureux. 

(Le  chœur  répète  les.deux  derniers  vers^) 
(  Les  Amours  et  les  Jeux  paraissent ,  et  s'envolent  pour  pré- 
céder les  pas  d*Ainadis.  ) 


FIB  DU  PBOLOCUB. 


ACTEURS  DE  LA  TRAGÉDIE. 

■AMADIS,  fils  du  roi  PérioD  de  Gaule. 

ORIANË,  fille  de  LisDart,  roi  de  la  Grande-Bretagne. 

FLORESTAN,  fils  naturel  du  roi  Périon  de  Gaule. 

CORISAi^DE  ,  souveraine  de  Gravesandc. 

HYoupe  de  chevaliers ,  combattans  dans  les  jeux  à  liions 

neur  d'Oriaoe. 
ARC  AL  AUS ,  chevalier  enchanteur ,  frère  d'Arcabonne  ec 

d'Ardan  Ganile. 
ARCABONNE ,  enchanteresse ,  sœur  d'Arcalaiia  et  d'Ar« 

dan  Ganile. 
Troupe  de  suivans  et  de  suivantes  d'Arcalaiis. 
Tronpe  de  démons ,  sous  la  figure  de  monstres  terribles î 

*  de  nymphes  agréables,  de^ bergers  et  de  bergières. 
Troupe  de  captifs. 
Troupe  de  captives. 
Troupe  de  geôliers. 

Démons  volans,  qui  conduisent  Ârcabonne. 
L'ombre  d'Ardan  Ganile. 
Vrgande,  célèbre  enchanteresse,  amie  d'Amadis. 
Troupe  de  suivantes  d'Urgande, 
Troupe  de  démons  infernaux. 
Troupe  de  démons  de  Tair. 
Troupe  de  héros  et  d'héroïnes, enchantés  dans  la  chambra 

.défendue  du  palais  d'ApoUidon, 


AMADIS , 

TRAGÉDIE-LYRIQUE. 

ACTE  PREMIER. 

Le  tb^trc  représente  le  palais  du  roi  Lisnart ,  père 
d'Oriane. 

SCÈNE  I. 

AMADIS,  FLORESTAN. 

FLORESTAR. 

J  E  reviens  dans  ces  lieux  pour  y  voir  ce  que  j'aime  ; 

Chaque  moment  est  cher  pour  moi  ; 
M^is  au  sang  qui  nous  joint  je  sens*^  ce  que  je  doi  ; 
Je  ne  puis  vous  laisser,  sans  une  peine  extrême, 

Dans  la  douleur  où  je  vous  voi. 
Le  grand  cœur  d'Amadis  doit  être  inébranlable  ; 
Quel  malheur  peut  troubler  un  héros  indomptable^ 
Yamqueur  des  iici-s  tyrans  et  des  monstres  aflrcux?, 

AMADIS. 

}'aime,  hélas!  c'est  assez  pour  être  malheureux. 

PLOBESTAN. 

Sans  cesse  vous  volez  de  victoire  en  victoire  ; 
GratMls  Opéras;  a.  6 


6%  amadis. 

Votre  grand  nom  s'éteqd  aussi  lom  que  le  jour. 
Si  vous  vous  plaignez  de  Tamour, 
Consolez-vous  avec  la  gloire. 

ÂMÂDIS. 

Ah  !  que  l'amour  paraît  charmant  ï 
Mais,  hélas!  il  n'est  point  de  plus  crael  tounnent. 
Que  je  trouvais  d'appas  dans  ma  naissante  flamme  ! 
Que  j'aimais  à  former  un  tendre  engagement  l 

.     Ah  !  je  pairai  bien  chèrement 
Les  trompeuses  douceurs  qui  séduisaient  mon  ame. 

Ah  !  que  l'amour  paraît  charmant! 
Mais ,  hélas  !  il  n'est  point  de  plus  cruel  tourment. 

J'ai  choisi  la  gloire  pour  guide  ; 
J'ai  prétendu  marcher  sur  les  traces  d'Alcide  : 

Heureux ,  si  j'avais  évité 
Le  charme  trop  fatal  dont  il  fut  enchanté  ! 

Son  cœur  n'eut  que  trop  de  tendresse, 

Je  suis  tombé  dans  son  malheur  *, 

J'ai  mal  imité  sa  valeur. 

J'imite  trop  bien  sa  faiblesse. 
J'aime  Oriane,  hélas!  je  Taime  sans  espoir. 

FLOItESTAH. 

Elle  dépend  d'un  père ,  elle  suit  son  devoir. 

AMÂDIS. 

Oriane  m'aimait ,  je  l'aimais  sans  alarmes. 

•  FLOnESTAN. 

Que  vous  peut-elle  offrir  que  d'inutiles  larmes? 
L'empereur  des  Romains  sur  son  trône  l'attend. 

AMADIS. 

'^  pourrais  l'obtenir  par  la  force  des  armes , 
Si  son  amour  était  constant  ; 


ACTE  I,  SCENE  I.  63 

Et  je  croyais  son  cœur  à  l'cpreave  des  charmes 

Du  trône  le  plus  éclatant. 
Fat-il  jamais  amant  plus  fidèle  cl  plus  tendre  ? 
Fat-il  jamais  amant  plus  malheureux  que  moiZ 

La  beauté  dont  je  suis  la  loi 
Me  bannit  pour  jamais  sans  me  vouloir  entendre  : 
Hélas  !  est-ce  le  prix  que  je  devais  attendre 

De  mon  amour  et  de  ma  foi?. 
Fut-il  jamais  amant  plus  fidèle  et  plus  tendre?) 
Fut-il  jamais  amant  plus  malheureux  que  moi  Z 

FLOBESTASr. 

Quand  on  est  aimé  comme  on  aime, 
Cfest  une  trahison  que  de  se  dégager  ; 

Mais  c'est  une  faiblesse  extrême 
D'aimer  une  inconstante  et  de  ne  pas  changer. 
Vous  serez  plus  heureux  dans  une  ameuc  nouvelle. 

AMADIS. 
Oriane ,  ingrate  et  cruelle , 
M'accable  de  mortels  ennuis  ; 
Mais  j'ai  juré  de  conserver  pour  elle 
Une  amour  étemelle, 
T0ut  infortuné  que  je  suis, 
J'aime  mieux  être  encor  malheureux  qu'infidèle. 
C'est  trop  vous  arrêter  j  allez ,  suivez  l'amour. 
Corisande  en  ces  lieux  attend  votre  retour. 

FLOBESTAS, 

Vous  puis-je  abandonner  à  votre  ioqmétude  ^ 
AMADIS. 

Un  amour  malheureux  cherche  la  solitude. 


64  AMADIS. 

SCÈNE  II. 

CORISANDE,  FLORESTAN. 

COBISABDE. 

Flobestas  l  ' 

FLOBESTAII. 

ConsSEOuie  ! 
FLOBESTAS  ET  COatSASDE  ,  ensemble. 
O  bienhetircax  moment 
Qui  finit  mon  crael  tounnent  l 
Après  k  rigttear  extrême 
D'un  fatal  éloignement , 
Qqs  c'est  OD  plabir  channaot 
De  revoir  ce  que  l'on  aime  l 

FtOBESTAN, 

11  faut  unir  votre  cœur  et  le  mien 
D'un  éternel  lien. 

COBI8À19DE. 

Venez  régner  aux  lieux  où  je  coitynande. 

FLOBESTA5. 

Aimons-nous  belle  Corisande, 

Et  comptons  la  grandeur  pour  rien. 

FLOBESTAS   ET    CO  B  IS  A  H  D  E  enSCinJ>lc. 

Vous  êtes  le  seul  bien 
Que  mon  amour  demande. 

C0RISA9DE. 

Que  ne  puis-jc  arrêter  l'ardeur 


ACTE  I,  SCÈNE  II.  65 

Qui  vous  porte  ^  chercher  les  périls  de  la  guerre  l 
Que  ne  vous  pnis-jc  oflrir  l'empire  de  la  terre 
Avec  l'empire  de  mon  cœur  ? 

FLÔBESTÂV. 

Trop  heureux  que  l'Amonr  avec  moi  vous  engage , 

Trop  heureux  de  porter  vos  fers , 
J'estioie  plus  cent  fois  un  si  doux  esclavage 

Que  Tempire  de  l'univers. 

GORISASIDE. 

Si  votre  coeur  eût  été  bien  sensible 

Au  tendre  amour  quTme  tient  sous  sa  loi, 

Vous  eût-il  été  possible 

De  vous  éloigner  de  moi  l 

FLOBESTÂSr. 

Fils  d'un  roi  dont  le  nom  partout  s'est  Ùh  coonaitre , 
Et  &ère  d'Aroadis  le  plus  grand  des  héros, 
Pouvais-je  demeurer  dans  un  honteux  repos  7 
Aurais-je  démenti  le  sang  qui  m'a  fait  naître  ?. 
Pour  mériter  de  plaire  aux  yeux  qui  m'ont  charmé  p 
J'ai  cherché  tout  l'éclat  que  donne  la  victoire. 

Si  f'avais  moins  aimé  la  gloire, 

Vous  ne  m'auriez  p  as  tant  aimé. 

COniSÂSDE. 

La  loi  que  fait  l'Amour  doit  être  enfin  snivor 
Quand  on  a  satisfait  la  gloire  et  le  devoir. 

FtOBESTAS  ET  cORifAfllDE,  en»emWe. 
C'est  ma  plus  chère  envie 
,     De  vous  aimer  toute  ma  vie  ; 
C'est  mon  plus  doux  espoir 
De  vous  aimer  et  de  vous  voir. 


à 


66  AMADIS. 

SCÈNE  III. 

ORIANE,  FLORESTAN,  CORISANDE. 

COBI8ÂKDE,  àOristné. 
Je  revois  Florestan  ;  je  le  revois  fidèle. 

OBIASTE. 

Ah  !  qu'il  est  beau  d'aimer  d'une  ainour  étemelle  ! 

FLOBESTÂV. 

C'est  en  vain  qu'Amadis  vous  aime  constamment , 
Et  vous  l'avez  banni  par  une  loi  cruelle. 

oniASE. 
Non ,  ne  défendez  pomt  un  si  volage  amant  j 
Sa  première  amour  est  finie  : 
Il  adore  Briolanîe. 
Le  confident  de  sa  nouvelle  ardeur 
N'a  que  trop  bien  su  m'en  instruire  ; 
11  n'est  plus  permis  à  mon  cœut 
De  ^  laisser  séduire. 

FLORESTAN. 

Se  peut-il  qu'Amadis  vous  ait  manqué  de  foi  ? 

OBIASE. 

Ma  rivale  n'est  que  trop  belle. 

COBISANDE. 

Etes-vous  moins  aimable  qu'elle  ? 

OBIAHE. 

Elle  a  l'avantage  sur  moi 
D'être  une  conquête  nouvelle. 


ACTE  1,'S^GÈNE  111  67. 

FLORESTAS. 

Amadis  est  saisi  d'un  mortel  désespoir. 
oniÂSE. 

Non ,  non  ;  ce  n'est  qu'un  artifice 

Dont  il  couvre  Son  injustice  : 
Il  sera  trop  content  de  ne  me  jamais  voir. 

COnisASDE. 

L'injustice  serait  étrange 
De  vouloir  ajouter  la  feinte  au  changement  : 

Au  moins  un  grand  cœur ,  quand  il  change , 
Doit  changer  sans  déguisement. 

OBIASIE. 

L'ingrat ,  un  peu  plus  tard ,  aurait  changé  sans  crime. 

Je  vais  devem'r  h  victime 

Du  devoir  qui  règle  mon  sort. 
L'inconstant  n'a-t-il  pu  se  ûiire  un  peu  d'effort? 
De  lui-même  bientôt  son  cœur  allait  dépendre  :         / 
£h  !  que  n'attendait-il  mon  hymen  ou  ma  mort  ?i 

U  ne  devait  plus  guère  atteindre. 

F^tODESTAB. 

Ainadis  punit  les  ingrats  ^ 
L'innocence  opprimée  a  recours  â  sou  Kvas , 
La  justice  trop  faible  à  son  secours  l'appelle  : 
Jamais  tant  de  vertu  n'a  si  bien  méi:ité 

Une  glpire  immortelle. 
I7u  héros  ennemi  de  l'infidélité 

Peut-il  être  amant  infidèle  ?. 
oniAiiE. 
L'éclat  de  tant  de  gloire  avait,  jusqu'à  ce  jour^ 

Ô)loui  mon  ame  crédule. 


6d  AMÀDIS. 

!Ah  !  les  plus  grands  héros  ne  font  pas  grand  scrupule 

D'une  infidélité  d'amour. 

Pourquoi  me  plaindre  d'une  offense 

Qui  met  mon  cœur  en  mon  pouvoir? 
Que  je  profite  mal  d'une  heureuse  inconstance , 

Qui  m'aide  à  suivre  mon  devoir,,.! 

Juste  dépit ,  brisez  ma  chaîne. 

J'allais  finir  mes  tristes  jours , 
Plutôt  que  de  trahir  de  si  belles  amours  j 

Amadis  les  trahit  sans  peine. 

Juste  dépit ,  htiset  ma  chaîné  ; 

C'est  à  yo\\s  seul  que  j'ai  recotirs. 
Hélas  !  vous  m'agitez  d'une  colère  vaine. 
Que  je  me  sens  tremblante ,  iaquiète ,  incertaine  ! 
Que  je  suis  faible  encore  aveo  votre  secours  I 

Juste  dépit ,  brisez  ma  chaîne. 

FtOBESTAU  ET  COBiSAUDEj  ensemble. 

Non ,  on  ne  sort  pas  aisément 

D'un  amoureux  engagement. 

OBXA.9E. 

Malheureux  <|ai  s'engage 
"   'Avec  un  cœur  volage  ! 
0BIA9E,  FtOBESTAS,  COBISASDE,  ensemble. 
Trop  heureux  qui  peut  s'engagjec 

Pour  ne  jamais  changer. 

COBISAirsE. 

Deux  paitîs  vont  ici  disputer  la  victoire  ; 
Ces  jeux  guerriers  se  Ibnt  à  votre  ^oire» 

OkfAVÉ. 

Que  j'ai  de  peine  à  cacher  mes  emmis! 
Ne  m'abandonnez  pas  dans  le  trouble  où,  }•  suis. 


ACTE  I,  SCÈNE  IV.  6g 

SCÈNE  IV. 

OBIANE,  CORISANDE,  FLORESTAN; 
TROUPE  DE  C0BIDATTAB9  de  deux  différcos 
partis.  , 

(Lef  deux  partis  font  divers  combats ,  et  les  Tlctorieux  por  < 
tent  aux  pieds  d'Oriaue  les  armes  qu'ils  ont  gagnées.) 

LE  CHOEUR. 
Belle  princqsse ,  que  vos  charmes^  / 

Ont  cDchauté  de  cœurs  ! 
.Vous  forcez  les  plus  &ecs  vainqueurs 

A  vous  rendre  les  armes. 

Les  plus  grands  rois  de  l'univers 
Font  gloire  de  porter  vos  fers. 


FIN    DU    PREMIER    ACTE. 


ACTE  SECOND. 

Le  tbéâtre  change ,  et  représente  une  forêt  dont  les  arbres 
sont  chargés  de  trophées  ;  on  y' voit  un  peut  et  ou  pa- 
pillon au  bout. 


SCÈNE  I. 

ABCABOBNE. 

xjLmoITB,  que  veux-tu  de  moi? 

Mon  coeur  n'est  pa^  fait  pour  toi. 
Non ,  oe  t'oppose  point  au  penchant  qui  m'entraîne  : 
Je  suis  accoutumée  à  ressentir  la  haine  ; 
Je  ne  veux  inspirer  que  l'horreur  et  reflroi. 

Amour ,  que  veux-tu  de  moi? 

Mon  ame  aurait  trop  de  peine 

A  suivre  une  douce  loi; 

C'est  mon  sort  d'être  inhumaine. 

Amour,  que  veux-tu  de  moi?, 

Mon  cœur  n'est  pas  fait  pour  toi. 

SCÈNE  II. 

ABCALAUS,  A^RCABONNE. 

ARCAEAUS. 

Ma  soeur  I  qui  peut  causer  votre  sombre  tristesse? 


L4rCTE  II,  SCÈNE  II.  '^ii 

^e  silence  des  bois  sert  à  l'entretenir. 

ABCÂBOBBE. 

Il  faat  avouer  ma  faiblesse 
Pour  commencer  à  m'en  punir. 
Un  héros  contre  un  monstre  un  jour  prit  ma  défénisé  ;? 
J'étais  morte  sans  son  secours. 
Il  ne  voulut  pour  récompense 
Que  le  plaisir  secret  d'avoir  sauvé  mes  jours. 
Je  n'ai  point  su  quel  héros  m'a  servie  : 
Je  m'informai  de  son  nom  vainement; 
Mais  son  casque  tomba,  je  le  vis  un  moment... 
Ce  moment  fat  fatal  au  reste  de  ma  vie.  ' 

Cet  inconnu  si  généreux 
Ne  me  parut  que  trop  aimable^ 
11  m'en  revient  sans  cesse  une  image  agréable 
Qui  me  plaît  plus  que  je  ne  veux, 
J'ai  honte  de  mon  trouble  extrême  : 
Je  fuis  partout  l'amour  ;  je  sens  partout  ses  traits. 
Je  cherche  en  vain  les  paisibles  forêts  : 
Hélas!  jusqu'au  silence  même, 
Tout  me  parle  ici  de  ce  que  j'aime. 
:àRCÂZ.Ans. 

L'amour  n'est  qu'une  vaine  erreur; 
On  n'en  est  point  surpris  quand  on  veut  s'en  défendre. 

Est-ce  à  vous  d'avoir  un  cœur  tendre  ?, 
Votre  cœur  tout  entier  n'est  dû  qu'à  la  fureur* 

ABCABOSBE. 

Non ,  je  ne  connais  plus  mon  cœur  ; 
L'Amour,  qu^  a  bravé ,  le  réduit  â  se  rendre ;^ 
Tout  barbare  qu'il  est ,  il  se  laisse  surprendre 


i 


72  AMADIS. 

D'une  douce  langueur, 
Non  I  je  ne  connais  plus  mon  cœur. 

arcalAc». 
Délivrezr.vous  de  l'esclavage 
Où  TAmour  vous  engage. 
Vous ,  qui  savez  commander  aux  enfen , 
lïe  sauriez-vous  briser  vos  fers  ? 

'AnCABOHSE. 

Vous  m^vez  enseigné  la  science  terrible 

Des  noirs  enchantemens  qui  font  pâlir  le  jour; 

Enseignez-moi ,  s'il  est  possible , 
Le  secrel  d'éviter  les  charmes  de  TAmour. 

ABCALAUS. 
Songez  que  notre'  sang  nous  demande  vengeance. 
!Àmadis  Ta  versé  ;  sa  valeur  nous  offense  : 
he  superbe  Amadis  a  tenniné  le  sort 
Du  redoutable  Ardan,  notre  malheureux  frère.... 

AncABOSNE. 

Que  le  nom  d'Amadis  m'inspire  de  colère  ! 
Quand  pouirai-je-  goûter  le  plaisir  de  sn  mort  ? 

,     AACALAUS. 

Que  j'aime  A  voir  en  vous  ce  généreux  transport  ! 

ABCALAUS   ET   ABCABONHE  enfieinblfi. 

Iiritong  notre  barbarie  ; 
Écoutons  notre  sang  qui  crie  : 
Périsse  Vennemi  qui  nous  ose  outrager  ! 
Ah!  qu'il  est  doux  de  se  venger  ! 

AnCABOVSE. 

L'espoir  de  la  vengeance  aujourd'hui  me  console 
De  tout  ce  que  l'amour  m'a  causé  de  tourme us. 


ACTE  lî,  SCÈNE  IV.  78 

Hâtez-vous  de  livrer  à  mes  ressentimens 
L'enoemi  qu'il  faut  que  j'immole. 

ABCAXAUS. 

Laissez-moi  l'engager  dans  mes  cnchantemens. 
(  Arcabomie.se  retire;  ArcaUiîs  demeure  dans  la  forêt,  et 
aperçoit  Amadis  qui  s'avance.  ) 

SCÈNE  III. 

ARCALABS. 

i 

Daïis  un  piège  fatal  son  manyais  sort  l'amèDc. 

Esprits  malheureux  et  jaloux, 
Qui  ne  pouvez  souffrir  la  veitu  qu'avec  peine, 

Vous,  dont  la  fureur  inhumaine 
Dans  les  maux  qu'elle  fait  trouve  un  plaisir  si  doux , 

Démons ,  préparez-vous 

A  seconder  ma  haine  ; 

Démons,  i)rép.  rez-vous 

A  servir  mon  courroux. 
(  Arcaliis  se  retire  dans  le  pavillon  qui  est  au  bout  du  pont.) 

SCÈNE  IV. 

AMADIS. 

Bois  épais ,  redouble  ton  ombre , 

Tu  ne  saurais  êtxe  assez  sombre; 
Ta  ne  peux  trop  cacher  mon  malheureux  amour. 
Je  sens  un  désespoir  dont  l'horreur  est  extrême  ! 

Je  ne  dois  plus  voir  ce  que  j'aime , 

Je  ne  veux  plus  souffirir  le  iour. 
Grands  Opéras.  2.  7 


J 


74  AMADIS. 

SCÈNE  V. 

CORISANDE,  AMADi;5. 

COBISASDE)  à  part,  sans  voir  Amadis. 

O  fortune  coot lie , 
Tu  prends  plaisir  à  me  troubler  ! 
Tu  me  flatrais  pour  m'accallAr 
D'une  peine  mortelle. 
O  ifftone  cmelle! 
AMADIS,  à  part,  sans  Toir  Goriamide. 
Ciel  I  par  un  prompt  trépas  finissez  ma  douleur,   v 

GOJ^ISASDE,  à  pari. 
Ciel  !  par  un  prompt  secours  finissez  mon  malheur. 
AMAI>I9  ET  COBISASDE-,  en  même  tems ,  mais  à  part , 
et  sans  se  voir. 
Hélas  !  cpeU  soupirs  me  répondent  ! 
Uélas  I*  quels  soupirs ,  quels  regrets 
Avec  mes  plaintes  se  confondent  !        - 
Hélas!  quels  soupir»^  quels^re^ts 
Me  répondent  dans  ces  forêts  ! 

COltisAVDE,  apercevant Amâdis. 
Que  vois  je?  Amadis! 

AMADIS. 

Qui  m'iippelle?. 

COnjSASDE. 

Parcel  soi^piisrie  ici  ycm  voir? 


yiqTE [II,  SCÈNE  V. 

▲  MADI8. 

Vous  voyez  im  amant  tidèle 
Réduit  au  dernier  désespoir. 

COAXSARDE. 

Protégez  la  vertu ,  que  TinjuBtice  opprime  ; 
Secourez  Floiestau ,  même  sang  vous  «nime  : 
Il  était ,  comme  vous ,  l'appui  des  malbënietUL 
Je  n'ai  pu  retenir  son  cœur  trop  généreux  ;        \ 
'Aux  pleurs  d'une  inconnue ,  il  Vost  laissé  séduire^ 

La  peifide  a  su  le  conduite 

Dans  des  enchantemeos  affîreux. 

AUAbiS. 

Pour  l'aller  secourir  quel  «heami  faut^il  pceodèe  ? 

GOBISASDJE. 

y^  dliorribles  dangers  vous  deves  vous  attendre, 

AMApiS. 

J'ai  vu  le  danger  sans  efiroi 
Lorsque  mes  jours  beureui  étaient  dignes  d'envie  i 
Puis-je  craindre  la  mort  dans  un  tems  où  la  vie 

n'est  plus  qu'un  supplice  pour  moi  ?. 

COniSASDE. 

Florestan  est  tombé  dans  un  triste  esclavage , 
En  voulant  passer  dans  ces  lieui. 

AMADIS. 

Allons. 


76  AMADIS. 

SCÈNE  VI. 

AMADlS,  CORISANDE,  ARCALAUS,  sxjxvAas 

D'AnCALAUS. 

'  AbCALAUS,  empêchant  Amadis  de  passer  sur  le  pont. 
Abrête,  audacieux! 
Arrête  î  j'entreprends  de  garder  ce  passage. 

Vois  ces  marques  de  mes  exploits , 
.Vois  combien  de  guerriers  m'ont  cédé  la  victoire  ; 
Joins  un  nouveau  trophée  à  ceux  que  dans  ces  bois 
J'ai  fait  élever  à  ma  gloire. 
AMADIS. 
Cesse  de  m'arréter  ;  ne  force  point  mon  bras 
A  tourner  sur  toi  ma  vengeance. 
AncALAus. 
Si  tu  cherches  ton  &ère ,  il  est  en  ma  puissance.  ' 

COniSAHOE. 

Rendez-moi  Florestan. 

Aj\CALAUS,  à  ses  suivans. 

Allez ,  suivez  ses  pas.... 
(A  Corisande.) 

Suivez  votre  amant  au  trépas. 
(Les  suivans  d'Arcalaiis  emmènent  Corisande.) 
COHISAbide,  à  Amadis ,  en  s'en  allant. 
Amadis ,  Amadis ,  notre  unique  espérance , 
Ah  !  ne  nous  abandonnez  pas. 


SCÈNE  VII. 

AMADIS,  ARCALAlTS. 

AMÂDIS. 

pERFTOE  !  il  faot  que  je  punisse 
Ta  barbare  injustice  ! 
'    (Amadis  combat  contre  Arcalaiis.) 

ABCÂLÂUS,  en  s'en  allant. 
Esprits  infernaux ,  il  est  tems 
De  me  donner  le  secours  que  j'attends. 

(  Il  sort.  ) 

SCÈNE  VIII. 

AMADIS,  TnoupE  de  démons  infernaux. 
(Plusieurs  démons,  sous  la  figure  de  monstres  terribles,  s'ef- 
forcent ten  vain  d'étonner  et  d'arrêter  Amadis  -,  puis  ils  dis- 
■    paraissent.) 

SCÈNE  IX. 

AMADIS,  TROUPE  DE  DÉMONS   ENCHANTEURS. 

(Une  troupe  de  démdns,  sous  la  forme  de  nymphes,  de 
bergers ,  et  de  bergères ,  vient  enchanter  Amadis.  ) 


LE  CHOEUR  DES  DÉMONS  ENCHANTEURS. 

Non  ,  non ,  pour  être  invincible 
On  n'en  est  pas  moins  sensible. 

7- 


J 


70  'AlllaLFl^. 

Quel  vainqueur  a  résisté 
(Au  cbaime  de  la  beauté  Z 
DEUX  DéMOBS ,  &om  la  forme  de  bergerr. 
*Aimez ,  soupirez ,  coeinrs  fidèles  ; 
L'Amour  dans  ces  bois 
Prend  des  forces  nouvelles. 

Heureux  mille  fois 
Ceux  qa*\\  tient  sous  ses  lois  !. 
Il  Élit  disparaître  ,  « 

Llioireur  des  déserts  ; 
Tout  le  suit  :  c'est  le  maître 

De  tout  l'univers  : 
Quel  empire  doit  être 
Plus  doux  que  ses  fers  7 

DEUXDÉMOBtS)  SOUS  la  forme  de  nymphes,  et  LE  CBCÊUBs 
eùsemble. 
Vous  ne  devez  plus  attendre 
Rien  qui  trouble  vos  désirs  : 

Cédez  aux  plaisirs 
Qui  viennent  vous  surprendre  ; 
Cédez  ^  il  est  tems  de  vous  rendre , 
Cédez,  rendez-vous 
Aux  cbarmes  les  plus  doux  -, 
L'Arooti^  est  pour  nous. 
C*est  en  vain  que  l'on  veut  s'en  défendre  : 
Cédez ,  il  est  tems  de  vous  rendre  ( 
Cédez ,  rendez-vous 
Aux  charmes  les  plus  doux. 
C'est  l'Amour  qui  doit  prétendre 
De  savoir  \pm  désarmer  : 
L'Amoar  doit  former 
Les  obafo^s  d'us  c«eiir  tondirf . 


MlCTE  II,  scène  IX.  79 

Cédez ,  il  est  tems  de  voas  rendre  i 
Cédez ,  rendez-vous 
'Atts  charmes  les  plus  douy  i 
L'Amour  est  pour  nous. 
C'est  en  vain  que  Ton  veut  s'en  défendre ,  cte. 
(  Amadis  enchanté  croit  voir  Oriané.  ) 
AMADIS. 
Est-ce  TOUS,  Oriane?  6  ciel  !  est-il  possible?] 
Votre  coeur  contre  moi  n'est-il  plus  irrité  ? 
ti'éclat  de  vos  beaux  yei» ,  dans  ce  bois  écarté , 
Chasse  ce  que  l'enfer  a  formé  de  terriblç. 
Que  vivre  loin  de  vous  est  un  supplice  horrible  1 
Qnetplaisir  de  vous  voir  !  que  j'en  suis  enchanté  ! 
Dispoéèz  tie  ma  vie  et  de  ma  liberté. 
(  itia^^É  m«t  son  épée  aux  pieds  de  la  nympbe  qa*il  prend 
pour  Oriane  >  et  la  suit  avec  empres&ement.  ) 

LE  CfiCEUB. 

Non ,  non ,  pour  être  invincible 
On  n'en  est  pas  moins  sensible  ; 
Quel  vainqueur  a  résisté 
Au  charme  de  la  beauté  ?. 


v.ik  DU  SECOîin  acxe. 


ACTE  TROISIÈME. 

Le  théâtre  change,  et  représente  un  vieux  palais  mioé 
on  y  \oit  le  tombeau  d'Ardau  Ganile ,  et  plusîeuzs  dif^ 
féreos  cachots. 


SCÈNE  I. 

FLORESTÂN,  enchaîné  et  enfermé  dans  on  cacfaot; 
COKISANDE,  enchaînée  et  enfermée  dans  un  aatn 
cachot;  troupes  de  captifs  et  de  captiver 
enfermés;  tdoupede  geoiiebs. 

I.E    CHGBVB    DES    CAPTIFS    ET   DES    CAPTIYES, 
ensemble. 

ViiEL  !  finissez  nos  peines. 

CROEUB  DES  GEOLIE&S, 

Vos  clameurs  seront  vaines. 

CHGBUA  DES  CAPTIFS  ET  DES  CAPTIVES,  emfmUd. 

Ciel  !  6  ciel  !  quel  supplice ,  hélas  I 

CHQEUn  DES  GEQI.IEB8. 

lie  ciel  ne  vf>us  écoute  pas. 
UN  CAPTIF  ET  UNE  CAPTIVE,  ensemble. 
Soufirirons^nous  toujours  ces  rigueurs  iidiumaines  ? 

UN  DES  CEOLIEnS, 

Vous  ne  sortirez  de  vos  chaînes 


ACTE  i;il,  SCENE  I.  81 

tQue  par  le  secours  du  trépas. 

FLonESTAN,  àCorisaDde. 
Que  devient  ce  bonheur  si  rare  ' 

Dont  l'Amour  nous  avait  flattés  ? 

COniSÂSDE. 

Sont-ce  là  les  liens  que  l'Hymen  nous  prépare  ! 

FLOBESTÂR. 

Je  ne  sens  que  le  poids  des  fers  que  vous  portez. 
FL0RESTÂ9  ET  CORiSANDE,  ensemble. 
Que  devient  ce  honîieur  si  rare 
Dont  l'Amour  nous  avait  flattés 

Ua    DES    CAPTIFS. 

O  mort  !  que  vous  êtes  lente  I 
Q  mort  !  ô  funeste  mort  ! 
Répondez  à  mon  attente. 
O  mort  !  ô  funeste  mort  ï 
Terminez  mon  triste  sort. 

us    AUTRE    CAPTIF. 

La  mort ,  toujours  cruelle , 
Aime  &  trancher  des  jours  heureux , 

Et  n'entend  point  les  vœux 
D'un  infortuné  qui  l'appelle. 

UN    DES    GEOLIERS. 

Tel  s'empresse  d'appeler 
La  mort ,  quand  elle  est  absente  j 
Qui  commence  de  trembler 
Sitôt  qu'elle  se  présente. 

LE  CHOEUR    DES    CAPTIFS   ET   DES    CAPTIVES 
ensemble. 

O  mort  !  que  tous  êtes  lente  !  etc. 


8a  AMADIS. 

SCÈNE  II. 

ARCABONNE,    FLORESTAN,    CORISANDE, 

TBOOPBS    DE     CAPTIFS,    DE    CAPTIVES,     ET     DE 
GEOLIEBS. 

(  Arcabonne,  conduite  et  portée  en  l'air  par  des  démons» 
descend  dans  le  palais  miné.  > 

ABCABOSSE. 

Il  est  tems  de  finir  votre  plainte  importune  ; 

Sortez,  traînez  ici  vos  fers. 
(  Les  geoliers^ouvrent  les  cachots,  et  les  captifs  on  sortent.)- 

lES    CAPTIFS. 

Contentez-vous  des  maux  que  nous  avons  souSorts  ; 
Faites  cesser  notie  infortune. 

ABCABOnSE. 

Vous  allez  cesser  de  souflHr , 
Malheureux  !  vous  allez  mourir. 
Bientôt  l'ennemi  qui  m'eutrage 
Sera  remis  eu  mon  pouvoir  ; 
Et  plus  je  suis  près  de  le  voir , 
Plus  je  sens  augmenter  ma  rage. 
Le  sang  on  l'amitié  vous  unit  avec  lui , 
Vous  périrez  tous  anjdurdliui. 

X.ES    CAPTIFS. 

La  mort  est  plus  digne  d'envie 

Qu'une  si  déplorable  vie. 

ABCABQAVE  ET  LES  GEOLIEBS,   ensemLle. 

Vous  allez  cesser  de  sooflrir, 


ACTE  m,  SCÈNE  II,  83 

MaQieureux  !  voas  allez  motirîr. 

CORI8ASDE»  ^Florestan, 
Florestan  !  ^ 

FLOSESTAII. 

Corisande  ! 
plo'bestas  et  cobisasde,  ensemble. 
Quel  sort  ponr  dos  tendres  amoors! 

COBISASDE. 

Faat-il  que  votre  sang  à  mes  yem  se  lépende  !! 

FtOBESTAS. 

Faat-il  voir  ce  que  j'aime  expirer  sans  seopors  I 
cobisabde. 
Qne  le  jiiste  ciel  vous  défende  ! 
C'est  Vunique  Êivear  qa'en  moncant  je  demande  ! 

FtOSE8TA9. 

Non ,  non ,  le  coup  fatal  qai  doit  trancher  mes  jours 
N'est  pas  celui  que  j'appréhende. 
cobisasde. 
Florestan! 

FLOBESTAS. 

Corisande! 
'  FLOBESTAB  ET  COBISAUDE,   ensemble. 
Quel  sort  pour  bos  tendres  amours  ! 
(AArcabonne.)  ^ 

Cruelle  \  que  votre  colère 
Se  contente  de  mimmoler. 

ABCAB05irE. 

Non  ;  trop  de  sang  ne  peut  couler 
Pour  venger  le  sang  de  mon  frère. 
Consolez-vous  dans  vos  tonnnens ,  ' 


84  AMADIS. 

La  mort  o^est  pas  an  mal  si  crael  qu'il  le  semble  : 
C'est  unir  deax  amans 
Que  de  les  immoler  ensemble. 

ConiSASDE,  à  FJorestan. 
Puisque  le  ciel  ne  permet  pas 
Que  je  vive  avec  vous  dans  un  bonheur  extrême. 
Avec  vous  la  mort  même 
A  pour  moi  c^es  appas  : 
La  douceur  de  mouiir  avec  ce  que  l'on  aime 

Dissipe  1  horreur  du  trépas. 
(Florestun  et  Corisande  reflètent  ensemble  les  deux  derniers 
vers.  ) 

FLORE^STAH. 

Heureux ,  dans  nos  malheurs ,  que  rien  ne  nous  sépare  ! 
Kon  pas  même  la  mort  barbare. 

C0RISA9DE. 

Portons  un'  nœud  si  beau 
Jusque  dans  le  tombeau. 

(Florestan  et  Corisaode  répèlent  ensemble  ces  deux  dernier* 

vers.) 

AIICABOKNE* 
Ah  !  c'est  trop  entendre 
Un  amour  si  tendre  : 
Vous  m'importunez  ; 
Taisez-vous,  infortunés! 

LES    CAPTIFS. 

Quelle  rigueur  de  nous  contraindre 
A  souffrir  sans  nous  plaindre  ! 
O  juste  ciel  ï  vengez-nous. 

LES  geoliehs. 
Infortunés»  taisez- vous  ! 


ACTE  III,  SCÈNE  III.  83 

ARCABONSE. 

Toi  ,  qui  dans  ce  tombeau  n'es  plus  qu'un  peu  de  cendre , 
Et  qui  fus  de  la  terre  autrefois  la  terreur, 
Reçois  le  sang  que  ma  fiu-eur 

S'empresse  de  répandre... 
Qu'entends-je  ?  quel  gémissement 
Sort  de  ce  monument  ?.. . 
Je  vais  répondre  à  votre  impatience , 
Mânes  pla'mtifs,  cessez  de  murmurer; 
Je  punirai  qui  vous  oflènse  , 
Par  la  plus  cruelle  vengeance 
Que  la  rage  puisse  inspirer. 
Je  vais  répondre  à  votre  impatience , 
Mânes  plaintifs,  cessez  de  murmurer. 

SCÈNE  III. 

L'OMBRE  D'ARDAN  CANILE,  ARCABONNE, 
CORISANDE,    FLORESTAN;   troupes   de 

CAPTIFS,   DE    CAPTIVES    ET   DE    GEOLIERS. 

l'ombre    d'ardAV    c  asile,    sortant  de  son  tombeau^ 
à  Arcaboone 
Ah  !  tu  me  trahis ,  malheureuse  ! 

arcabonke. 
3'ai  juré  d'achever  une  vengeance  affreuse  î 
Voyez  quelle  est  l'ardeur  de  mes  resscntimens. 
l'ombre.  - 
Ah  !  tu  me  trahis ,  malheureuse  ! 
Ahî  tu  vas  trahir  tes.sermens. 
Je  retombe  ;  le  jour  me  blessCi 
Grands  Opéras,  a.  8 


86  A  MA  DIS. 

Tu  me  suivras  dans  peu  de  tems. 
Pour  tè  reprocher  ta  faiblesse , 
C'est  aux  enfers  que  je  t'attends. 

ABCABOSVC. 

Non ,  rien  n'atrétera  la  fureur  qui  m'anime... 
On  vient  me  livrer  ma  victime 

(L*ombre  rentre  dans  le  tombeau.) 

SCÈNE  IV. 

(Â.MADIS,  enchaîné;  tboupe  de  soldats  qni  gar- 
dent Amadis;  ARCABOWNE,  CORISANDE, 
FLORESi'AN;   tboupes   de    captifs,    de 

CAPTIVES,   ET  DE    GEOLIEBS. 

ABCAB095E,   à  Amadis ,  »*ap|>roclKmt  de  lui  le  poignard 
levé. 

'  Meubs...  Que  mes  sens  sont  interdits  ! 
O  ciel  I  que  vois-je  ?  est-ce  Amadis  ? 
AMADIS. 
Je  suis  un  malheureux  qui  n'ai  plus  d'autre  envie 
Que  de  trouver  la  fin  de  mon  funeste  sort. 

ABCAB055E,àpart. 

Quoi  î  Tennemi  dont  j'ai  juré  la  mort 
Est  le  héros  qui  m'a  sauvé  la  vie  ? 
Qu'est-ce  que  j'entreprends?...  Un  trépas  inLamaÎB 
De  mon  libérateur  serait  la  récompense  U. 
(  A  Amadis.) 
Non ,  une  cruelle  vengeance 
Contre  vos  jours  m'a  fait  armer  en  vain  ; 
Une  juste  reconnaissance 


■ACTE  111,  SCÈNE  V.  .     87 

Me  fait  tomber  les  armes  de  la  main. 
'Wivez,  quittez  vos  fers;  ne  craignez  plus  ma  haiue. 
^uel  prix  tous  puis-je  of&ir  pour  ce  que  je  vous  doi  ?, 

AMADIS. 

nyioDocens  malbeureni^  ont  trop  soufl^  pour  moi  ; 
Le  seul  prix  que  je  veux ,  c'est  de  briser  leur  chaîne. 
ABCABOHSE,  aux  captifs  et  aux  captives. 
Allez,  en  libeité  goûter  un  doux  repos  ; 
Rendez  grâces  à  ce  héros. 
(Ârcabonne  fVit  remettre  en  liberté  Florestan,  Gorisande, 
et  les  autres  captifs  et  captives;  mais  elle  {retient  Amadis 
et   Pemmèue^  avec    elle.  Les  geôliers  et  les  soldats   se 
retiraot.) 

SCÈNE 'y- 

CORISANDE ,     FLORESTAN,    troupes   de  captifs 
ET  CAPTIVES,  remis  en  liberté. 

(LescaptiTs  et  les  captives  se  réjouisssent  de  la  liberté  qui 
leur  est  rendue.) 

FLOBESTAS)  COBISASIDE,   ET  LE  CBCBUB,  ensemble. 

SoBTONS  d'esclavage  ; 
Profitons  de  l'avautage 
Qu'Aroadis  a  remporté. 

Notre  liberté 
Est  le  prix  de  son  courage. 

Sortons  d'esclavage  ', 
Amadis  a  suimooté 

L'envie  et  la  rage  ; 
Amadis  a  surmonté 

L'enfer  irrité. 


88        AMADIS.  ACTE  III, SCÈNE  V. 

Sortons  d'esclavage. 
Profitons  de  l'avantage 
Qa'Amadis  a  remporté  : 

Notre  liberté 
Est  le  prix  de  son  courage.  ' 

Sortons  d'esclavage.  '. 


riH  DU  TROISIÈME   ACTE. 


ACTE  QUATRIÈME. 

Le  théâtre  change ,  et  représente  une  ile  agréable. 

SCÈNE  L 

'ARGALAUS,  ARCABONNE. 

ASCALAUS. 

Jr  Alt  mes  enchantemens  Oriane  est  captive  ; 

Sa  beauté  causa  nos  malheurs  : 
Di^  ces  lieux,  sans  pitié,  f  entends  sa  voix  plaintive  g 

Et  j'aime  à  voir  couler  ses  pleurs. 
Notre  ennemi  Taimait  :  il  a  tout  fait  pour  elle  ; 

U  combattait  pour  l'obtenir. 

ABCABOKSE. 

Je  viens  de  la  voir  ;  qu'elle  est  belle  î 
.Vous  ne  la  sauriez  trop  punir. 

ABCALAUS. 

Ne  permettons  pas  qu'elle  ignore 
La  perte  d'un  amant  dont  son  cœur  est  charme  : 
Il  faut  qu'après  la  mort  Amadis  souffre  encore 

Dans  ce  qu'il  a  le  plus  aimé. 
Aux  regards  d'Oriane  exposez  la  victime 
Çii'à  nos  ressentimens  vous  venez  d'inomoler. 
Un  soupir  vous  échappe  !  et  vous  n'osez  parler  ! 

8. 


A 


90  AMÀDIS. 

Est-ce  par  des  soupirs  que  la  baioe  s'exprime  ? 

AnCABOSlTE. 

Que  TOUS  êtes  heureux  de  n'avoir  à  songer 
Qu'à  haïr  et  qu'à  nous  ven^r  î 
Hélas  !  dans  notre  ennemi  même 
J'ai  tcouvé  l'inconnu  que  j'aime. 

ABCALAUS. 

Vous  aimez  Amadîs  !  il  voit  encor  le  jour  ! 

Quoi  !  sur  votre  vengcauce  un  lâche  amour  l'emporte  ! 

ABCABOVKr. 

La  vengeance  la  plus  forte 
Est  foible  contre  l'Amour. 

ABCALAtr8« 

Quelle  feibliesse  est  plus  étrange? 
Tïotre  ennemi  mortel  devient  votre  vainqueur  ! 
Malgré  tant  de  seimens ,  vôtre  pelade  cceur 

Du  parti  d'Amadis  se  range  I 
Parjure  l  ah  !  c'est  de  vous  qu'il  faut  que  je  me  venge. 

ABCABOlSSE. 

Je  l'aime  malgré  moi ,  cet  ennemi  chaimant  : 
Je  n'en  puis  être  aimée  !  une  antre  a  su  lui  plaire. 
Je  vous  défie ,  avec  votre  colère , 
D'inventer  t  pour  mon  châtimeot, 
Vn  plus  cruel  tourment  ! 

ABCAZ.AU8. 

Pour  augmenter  voire  supplice , 
Il  faut  vous  faire  voir  ces  deux  amans  heureux'; 
Avant  que  ma  vengeance  en  fasse  un  sacrifico , 

Il  faut  que  l'hymen  les  unisse.... 


ACTE  IV,  SCENE  II.  c)v 

ABCABOMSEt 

•Ah  l  que  pluuSt  cent  fois  ils  périssent  loua  deux. 
Entre  l'amour  et  la  haine  cruelle 

J'ai  cru  pouvoir  me  partager  ; 
Mais  dans  mon  cœur  Tamour  est  étranger,' 

Et  la  baine  m'est  naturelle. 

(voyant  approcher  Oriane.) 
Ma  rivale  gémit;  que  ses  mauï  me  sont  doux  ! 
Pour  punir  ces  amtuM,  j'imagine  un©  peine 
Digne  de  ma  fureur  et  de  votre  courroux  : 

C'est  peu  d'une  mort  inhuma  ine..«, 

AnCALAUS. 

Puis-jc  encor  me  fier  à  vous  ?, 

ABCAB0II5E. 

Fiez'-vous  â  l'amour  jaloux , 
Il  est  phis^cruel  que  la  baine. 

(  Ils  sortent.  ) 

SCÈNE  IL 

ORIANE. 

A  qui  pouttpî-je  avoir  recours? 
C'est  de  tous  ,  juste  ciel ,  que  j'attends  du  secotus. 
Sur  ces  boi  ds  inconnus ,  un  enchanteur  barbare 

Dispose  de  mes  tristes  jours  : 

L'enfer  contre  moi  se  déclare. 

A  qui  poui  rai-je  avoir  recours  ? 
C'est  ds  vous,  ju«e  cielî  que  j'attenfls  da  Secours. 

^Autrefois  Amadis  aurait  ptts  ma  défense  j 


93  ÂMADIS. 

Mais  l'inconstant  m'oublie  et  suit  une  autre  loi. 

Pourquoi  m'en  souvenir?  pourquoi 
If 'oublier  pas  de  lui  jusqu'à  son  inconstance  ?> 

Ici ,  loin  de  toute  assistance , 

Je  tremble  d'un  mortel  efïroî. 

Eh  !  faut-il  encor  que  je  pense  ^ 

!A  qui  ne  pense  plus  à  moi  ? 

SCÈNE   III. 

ARCALAUS,  ORIANE; 

AnCALÂUS.  ^ 

Je  vous  entends ,  cessez  de  feindre  ; 
Plaignez- vous  d'Amadis  :  je  ne  veux  pas  contraindre 
Un  si  juste  courroux. 

OBIÀSE. 

J'ai  tant  de  sujets  de  m'en  plaindre, 
Que  j'ai  presque  oublié  de  me  plaindre  de  vous. 
Non ,  ce  n'est  peint  ici  son  secours  que  j'implore  ; 
Il  est  allé  chercher  la  beauté  qu'il  adore , 
Et  je  l'appellerais  par  des  cris  superflus. 

ABCALAUS. 
Lorsque  vous  le  verrez,  vous  l'aimerez  encore. 
oniASE. 
Non ,  non ,  je  ne  le  verrai  plus  : 
Je  dois  trop  le  haïr  pour  renouer  la  chaîne 
Dont  il  a  dégagé  son  cœur. 

ABCALAUS. 

Si  vous  le  haïssez ,  j'ai  servi  votre  haine  ; 


ACTE  IV,  SCÈNE   IV.  o3 

A  !3  fin  jiii  vaincu  ce  superbe  vainqueur. 

OBIANE. 

Vous    vainqueur  d'Anuidis  !  non ,  il  „'est  pas  possible 

Qu  il  au  cessé  d'être  invincible  : 
Tout  cède  à  sa  valeur  ^  et  vous  la  connaissez. 
AncALÂus. 

Et  c'est  ainsi  que  vous  le  baissez? 

OniANE. 

Je  veux  haïr  toujpurs  un  amant  si  volage , 
Et  je  me  le  suis  bien  promis  ; 
Mais  ses  plus  cruels  ennemis        '  ♦ 

Peovent-ils  s'empécber  d'admirer  son  couiâge  ?. 
Non ,  rien  ne  peut  être  assez  fort 
Pour  sum^onter  ce  bérbs  indomptable. 
abcalaus. 
Voyez  si  je  me  vante  à  tort 
D'avoir  vaincu  ce  vainqueur  redoutable. 

(Il  sort,  et  Amadi5,  étendu  sur  ses  armes  ensanglantëei , 
parait  morl.  ) 

SÇÉNE  IV. 

AMAPIS,  qui  paraît  mort,  ORIANE. 

OUI  A  SE,  apercevant  Amadis. 
Que  vois-je  ?  6  spectacle  effroyable  î 

O  trop  funeste  sort  ! 
Ciel  I  6  ciel  !  Amadis  est  ntortî 

Ma  colère  lui  fut  (atale  j 


94  AMADÎS. 

J'eus  tort^de  Taccnser  de  snivre  on  autre  amour. 

Que  se  pub-jc ,  eo  mouraot ,  le  rappeler  au  jour , 

Dût-il  vivre  pour  ma  rivale  ! 

Ciel ,  qui  nous  donnas  ce  héros , 

Que  ne  prenais-tu  sa  défense 

Contre  l'infernale  puissance? 
L'univers  a  perdu  l'honneur  de  son  repos.... 

Pleure ,  gémis ,  faible  innocence  ; 

Fleure ,  hélas  !  tu  n'as  plus  d'appui. 

Tu  vois  expirer  aujourd'hui 
Ton  unique  espérance.... 
O  ^p  funeste  sort  î 

Ciel  î  ô  ciel  !  ^Amadis  est  mort  I 

U  m'aj^lle ,  je  vais  le  suivre  : 

Le  sort  qui  nous  rejoint  m'est  doux....^ 

Amadis ,  je  vivais  pour  vous  ; 

Vous  mourez,  je  ne   puis  plus  vîvrej 

(  Oriane  tombe  évaaouie.  ) 


SCÈNE  V. 


'ARCALAUS,  ARC  ABONNE,  AMADIS,  guipa, 
rait  mort  ;  O  R I  AN  E  ,  évanouie. 

ABCALAU8  ET  ABCABOffSE, emembH. 

QcEL  plaisir  de  voir 
Vn  si  cruel  désespoir  ! 

AncABoniTE. 
Joignez  votre  fureur  à  ma  rage  inhumaine. 
Il  faut  que  ces  amans  revivent  tour-â-tour, 
Pour  souffrir  une  aflireuse  peine. 


!àCTE  IV,  SCÈNE  VI.  9$ 

ARCÂLAUS. 

Il  faut  faire  de  lear  amour 
Le  ministre  de  notre  baine. 
ÀncALAus  ET  AncABossE  ensemble.    • 
Quel  plaisir  de  voir 
Un  si  cruel  désespoir  I 

AnCABOSSlE. 

U  faut  qu'Âmadis  sorte 
Du  profond  assoupissement 
Où  le  tient  notre  tncbantement  ^ 
Et  qu'il  pleure  Oriane  morte... 
Mais  pour  eux  contre  nous  quel  pouvoir  s'est  armé?. 

ABCALAUS. 

<^i  peut  conduire  ici  ce  rocher  enflammé  ? 

SCÈNE  YI. 

{  Un  rocher  environné  de  Gammes  s'approche.  Les  flammes 
se  retirent,  et  laissent  voir  un  vaisseau  sous  la  figure  d'un 
serpent,  ce  qui  Ta  fait  appeler  la  grande  serpente  ;  Ur- 
gande  et  ses  suivantes  sortent  de  ce  vaisseau.  ) 

URGANDE,  troupe  de  suivantes  d'Ubgasde, 
ARCALAUS,ARCABONNE,AMADlS,qui 
paraît  mort;  ORIANE,  évanouie.    ' 

UBGANDE. 
Je  soumets  à  mes  lois  l'enfer,  la  terre  et  Tonde  : 
Sans  qu'on  sache  où  je  suis,  je  parcours  tout  le  monde , 

Et  je  connais  des  secrets  que  les  cieux 

N'ont  jusqu'ici  dévoilés  qu'à  mes  yeux. 


96  AMADIS. 

Maïs  j'anne  seulemeot  nia  fatale  paissance 

Contre  Tinjuste  violence. 
J'ai  soin  de  lelever  le  mérile  abatta  . 
Et' je  lais  mon  bonlieur  de  servir  la  vertu... 
Tremblez ,  tremblez ,  reconnaissez  Urgande  ; 
Tout  obéit  sitôt  que  je  commande  : 
Barbares  !  laissez  pour  jamais 
Ces  fidèles  amans  en  paix.1 

(Urgande  touche;  de  sa  l)nguelte  Arcalaiis  et  Arcabouie, 
qui  restent  sans  mouvemenl.  ) 
ABCALAUS  ET   ARCABONBE  ensemble. 
Tout  mon  eflfoit  est  inutile , 

Je  demeure  immobile  : 
Je  cède  aux  charmes  trop  puissans 

Qui  saisissent  mes  sens. 
LES  suivABTES  d'u  n  G  A  B  D  E ,  ensemble. 
Tremblez ,  tremblez ,  reconnaissez  Urgande  j 
Tout  obéit  sitôt  qu'elle  commande  ; 
Barbares  !  laissez  pour  jamais 
Ces  fidèles  amans  en  paix. 
(Les  suivantes  d'Urgande  jeUenLdes  fleurs,  et  répandent  des 
parfums  sur  Aniadis  el  Oriane  pour  commencer  à  dissiper 
Pencbanlémcnt  dont  ils  sont  saisis.  Une  partie  de  ces  sui- 
vantes dansent,  et  les  autres  cbantcnt.  ) 

DEUX  SUIVANTES  D*u a© ASDE,  ensemble. 
Cœui-s  accablés  de  rigueurs  inhumaines , 
Ne  cessez  point  d'espérer  en  aimant. 
Il  est  fâcheux  de  porter  des  chaînes . 
C'est  un  cruel  tourment  ; 
Mûjs  qujiîjd  l'Amour  en  veut  payer  les  peines  , 
fucai  un  plaisir  charmant. 

"1  Tient  un  jour  où  les  cramtes  sont  vaines; 


ACTEÏV,  SCÈNE  VII.  97 

XJa^  triste  sort  diaiige  dans  on  moment. 
Il  est  Êdieiix  de  porter  des  chaînes  , 
C'est  na  cruel  tourment  ; 
Biais  qo.»oi  i' Amour  co  veot  payer  les  peines  , 

C'est  im  plaisir  charmaut. 
(  I..es  sa  vitnies  d'Urgande  emportent  Âmadis  et  Oriane  dam 
le  -va^sean  de  la  grande  serpente.  Urgande,  avant  que  d'| 
rentrer  ,  touche  une  seconde  fuis  de  sa  baguette  ArcoUUl 
et  Arcaboone ,  qui  cessent  d'cire  immobiles.  ) 

n  iaot  que  de  vos  sens  je  voas  rende  l'usage  ; 
Perfides  î  je  vous  livre  à  votre  propre  rage, 

(Urgande  rentre  dans  [le  vaisseau  de  la  grande  serpenta  qui 
s'éloigne  ea  se  couvrant  de  flammes.) 

SCÈNE  VII. 

ARCALAUS,  ARCABONNE. 

ABCALAUS, 
t)éMOBS ,  soumis  à  nos  lois , 
Volez ,  vecez  nous  défiendre  : 
N'osez-vous  rien  euirepreudre  ? 
Méprisez-vous  notre  voix  ? 
Hâtez-vous ,  c'est  trop  attendre. 
Démons,  soumis  à  noî  lois, 
Volez ,  venez  nous  défendre. 


Grands  Opéras,  a. 


109  AMADIS. 

Vous  pourrez  trouver  plus  d'appas  ; 
lirais  vous  n'y  trouverez  pas 
Uo  coeot  plus  ti'dèie. 

▲  HADIS. 

Oriane ,  m'accnsez-vous?. 

OniAVE. 

Briolaoîe  a  des  charmes  trop  doux  ; 
Je  n'empêcherai  pas  que  votre  amour  la  suive. 

AMADIS. 

Ah!  ne  reprenez  plus  votre  fatal  courroux, 
Si  TOUS  souhaitez  que  je  vive. 

OBIAIIE. 

Vous  aurez  peu  de  peine  à  me  désabuser  : 
Amadis ,  contre  vous  k  regret  je  m'irrite  ; 

Le  dépit  que  l'Amour  excite 

Ne  demande  qu'à  s'apaiser, 

AMADIS. 

Faut-il  que  votre  cœur  se  soit  laissé  surprendre 
D'un  soupçon  qui  nous  coûte  un  si  cruel  tourmenta 

OBIAIIE. 

C'est  le  défaut  d'un  cœur  tendre 
De  s'alarmer  aisément. 

ESISEMBLE. 

Ma  douleur  «ût  été  mortelle  ; 
Hélas  !  j'allais  y  succomber. 
Ah!  gardons-nous  de  retomber 
Dans  une  peine  si  cruelle  l 
oniANE. 
Tout  vous  a  dit 


^      ACTE  V,  SCÈNE  m.  iio3 

Que  je  TOUS  ahne  ;  | 

Mes  larmes,  ma  douleur  extréi&e  j 

Et  jusqu'à  mon  d^t ,  | 

Tout  vous  a  dît  ! 

Que  je  TOUS  aime. 

I^AMADIS.  _  I 

Je  vous  promets 
De  n'éteindre  jamais 
Une  flamme  si  belle  ; 

Je  vous  promets 
Une  amour  étemelle. 
(  Amadi»  et  Oriane  répètent  ensemlile  ces  derniers  vers.  ) 

SCËNE  III. 

URGANDE,  AMADIS,  ORlAKEj 

UnGAHDE. 

Evrm  vos  cceurs  sont  léuntst 

AMADIS. 

Far  votre  heureux  secours  nos  troubles  sont  finis. 

UBGASIDE. 

11  est  aisé  d'apaiser  les  querAlcs 

Dont  les  amans  fidèles 

Ve  sont  troublés  que  trop  souvent  : 

L'amour  chassé  par  la  colère 

Ne  manque  guère 

De  revenir  plus  fort  qu'auparavant. 

OBIABE. 

Je  désespère 


i 


«o4  AMADIS. 

D'un  devoir  sévère  j 
Mon  père  a  fait  un  choix  qui  s'oppose  à  mes  Tcruz. 

URGABDE. 

J'aurai  soin  d'obtenir  l'aveu  de  vott«  père. 

AMADiS  ET  oniAllE,  ensemble. 
Que  ne  devons-nous  pas  à  vos  soins  généreux? 

UBGANDE. 

Un  si  parfait  amour  mérite  d'être  heureux. 

Il  faut  vous  ôter  tout  ombrage  ; 
Les  amans  dans  ces  lieux ,  sous  cat  arc  enchanlé 

Trouvent  le  juste  témoignage 
De  leur  fidélité. 

OBIAVE. 

Il  me  suffît  de  l'assurance 
Qu'Amadis  me  donne  «n  ce  jour. 

UBGASDE. 

Peut-on  trop  rassurer!' Amour?..., 
Mais  Florestan  ici  vient  montrer  sa  constance.. 

SCÈNE  IV. 

FLORESTAN,  CORISANDE,  tJRGANDE, 
AMADIS,   ORIANE; 

URGANDE,  àFldr««tan. 
It  est  tems  de  vous  arrêter. 

FLORESTAS. 

La  valeur  et  l'amour  doivent  tout  surmonter.... 


ACTE  y,  SCÈ-NE  ly.  i«5 

où  sals'je?  d'où  vient,  ce  nuage?" 
Quel  pouvoir arréto  mes  pas? 
Mille  et  mille  invisibles  bras 
Défendent  ce  passage. 

URCAKDE. 

Soyez  content  de  Tavantage 
Qa'aucan  autre  avant  vous  n'ait  pu  passer  si  loîo. 

COnisAVDE,  à  Florestan. 
Je  connais  votre  amour. 

A.MADIS ,  à  Florestan. 
L'univers  est  témoin 
Des  efforts  de  votre  courage. 

CBGAllDE,     COBISAUjTDE,     AMADIS   [l^T    ORIAUC. 

Ensemble ,  à  Florestan. 
%nrgnez-voas  un  inutile  soîn. 

URGAEiDE,  à  Florestan. 
(Ainadis  va  tenter  l'aventure  fatale  ; 
U  doit  l'achever  aujourd'hui. 
En  amour ,  en  valeur ,  nul  auue  ne  l'égale  ; 
C'est  un  sert  assez  beau  de  ne  céder  qu'à  lui, 

AMADIS. 

Pour  rendre  tout  possible  à  mon  amour  extrène-« 
U  suffit  d'un  regard  de  la  beauté  que  j'aime. 

UBOAVDE,  OBlANEy  FtOn«STAV  ET  CO^BISAHDK*. 
ensemble ,  à  AmadU» 

Héros  favorisé  des  cieux , 
Soyez  toujours  victorieux. 
Âmadis ,  votre  amour  fidèle 
Mérite  une  gloire  immortellfl| 


J 


t%o6  'AMKDIS. 

(Un  chœur  de  peKonnes  invisibles  répète  .ces  quatre  ven, 
,.  pendant  qu'Âmadis  passe  sous  l'arc  des  loyaux  uHiUis.  ) 

UBGASDE,  àOriane. 

Suivez  be  héros  glorieux  ; 

Vers  la  chambre  enchantée  avancez  sans  alarmes. 

A mAD IS ,  conduisant  Oriane: 

Venez  en  surmonter  les  channes. 

Quels  charmes  sont  plus  forts  que  ceux'de  vos  beaux  jeatl 


SCÈNE  .V. 


(  La  chambre  défendue  s'ouvre ,  tit  une  troupe  de  héros  et 
d'héroïnes ,  qu'ApoUidon  y  avait  autrefois  enchantés  ponr 
y  attendre  le  plus  fidèle  des  amans  et  la  plus  parfaite  des 
aunantes ,  reçoit  Amadis  et  Oriane ,  et  les  reconnaît  éigies 
de  cet  honneur.)  | 

UBGANDE,  amadis,  ORiANE,FLORESTA» 
CORISANDE;  tboupe  de  héros  ei  o'nÉ- 
boîhes. 

USE  DES  nénoi5E9. 
FmÈi£S  cœurs ,  votre  conistance 
Ne  sera  pas  sans  récompense; 
Un  sort  heureux  suit  vos  toutmens  : 
<        A  la  fin  l'Amour  couronne 

Les  par&itsr  amans. 

Que  les  prix  qu'il  d(mne 

Sont  doux  et  cbarmans  li 
-A  la  fin  TAmour  couronne 

Les  parfidts  amans. 

(  Le  grand  chœur  répète  ces  derniers  vers.)  ' 

(  Les  héros  et  les  héroïnes  témoignent  leur.  |oie  par  des 
,  danses  mêlées  de  chants.  ) 


ACTP  V.  SCÈNE  V.  107 

LE  GBÂHD   CBOEUB* 

Chantons  tous  eu  ce  jocir 

La  gloire  de  rAmour. 
iGardézrVous  bien  de  briser  tos  chaînes , 
Voiis^qtu  soof&ez  de  craelles  peines;^ 
Ne  cessez  point  d'être  constants , 

E%  Ycas  serez  contens. 

UN   PETIT  CH€BUB. 

Noi;is  devons  suivre 
Des  lois  qui  doivent  nous  charmer; 

Ce  n'est  pas  vivre 
Que  vivre  sans  savoir  aimer. 

Fi.OBESTAg,  à  Corltande. 
Tout  suit  nos  vorax, 
Bien  ne  trouble  notre  vie  ; 

J>es  plus  beaux  nœuds 
Four  jamais  l'Amour  nous  lie  : 
Je  puis  vivre  pour  vous; 
Que  mon  bonheur  est  doux! 

COBISAHDE. 

Il  n'est  plus  tems  de  répandre  des  larmes; 
Nous  aimerons  désormais  sans  alarmes. 
Que  de  plaisirs ,  que  de  beaux  jours 
Vont  s'dêm  à  nos  amours  l 

£B  bBÂND   CHCeUB. 

Tout  charme  ici  nos  yeux; 
Où  peut-on  être  mieux  ?. 

LE  PETIT   CHCC17B. 

OÙ  peut-on  être  mieux 
Que  dans  ces  beaux  lieux?. 


1^  AMADIS. 

LE    6RAKD    CHCCbll. 

Les  plus  diannaus  plalsiis 
Suivront  tous. dos  désirs. 

LE   PETIT    CHOC  On. 

Les  parfaites  douceurs 
Sont  pour  les  tendres  cceors. 

UB  DES   BiROt. 

Jouissons  à  jamais 
De  la  douce  paix 
Qui  nous  appelle  ; 
Jouissons  à  jamais 
De  la  douce  paix 
D'une  amour  fidèle. 

LE   enAUD    CHCeOR. 

Cest  assez  d'entreprendre 

Do  £kire  un  beau  choix  ; 
Il  suffit  qu'un  cœur  tendre 
S'engage  une  fois. 

conisÂnDE. 

Quel  tourment ,  quand  l'amour  est  extrême , 
De  trembier  pour  l'eblet  que  l'on  aime  ! 

Quel  plaisir  de  se  voir  hors  d'un  mortel  danger! 

Quand  les  maux  sont  finis ,  qu'il  es^doux  d'y  songer! 

LE   GRAND    CHOBUB. 

A  la  fin  nous  aimons  sans  rien  craindre  ; 
Ce  n'est  pins  la  saicon  de  nous  plaindre: 

Ou  fuirait  les  Amours , 
S'ils  ^;«'mi^aicnt  toujours. 


ACTE  V,  SCÈNE  V  lop 

Un  des  HÉBos  enchantés  flobestas  et  COBisAîidç, 
ensemble. 
Un  tendre  amour  ne  plaît  pas  moins, 

Lorsqu'il  tourmente  ; 
î*lus  un  plaisir  coûte  de  soins , 
Plus  il  enchante* 
Que  le  bonheur  est  charmant, 
Après  un  long  tourment  ! 

tZ   GITARD    CHOEUII4 

Mille  jeux  innocens 
Vont  enchanter  nos  sens. 
(  Le  petit  chœur  répèle  ces  deux  derniers  vers.  ) 
us  DES    HÉB08  ENCHAHTÉS* 

Amans  incoostans ,  n'espérez  pas 

De  jouir  d'un  sort  si  plein  d'appas.  "     ^ 

LE  GBARD    CHOEUB* 

Loin  de  nous,  infidèles, 
Fuyez  loin  de'dotis  ; 
■  Ces  demeures  si  belles 
^    Ne  sont  pas  pour  vous. 

COBISANDk. 

Au  milieu  d'un  tourment  sans  égal 

L'Amour  sait  plaire  j 
Il  lui  faut  pardonner  tout  le  mal 
Qu'il  nous^veut  faire. 
Je  n'ai  point  de  regret  aux  pleurs  que  j'ai  versés  | 
Le  bonheur  qui  les  suit  les  récompense  assez. 

LE    GBA9D    CHOCUn. 

chantons  tous  en  ce  jou^ 
La  gloire  de  l'Amoui^. 
Grands  Opéras.  Z,  iXO 


J 


.no        AMADIS"   ACTE  V,  SCÈNE  V. 
Gar(îcz-vous  bien  de  briser  vos  chaînes , 
Vous  qui  souflicz  de  cruelles  pciues  ; 
Ne  cessez  point  d^re  constans , 
Et  vous  serez  contens. 


F  I  îl    D  'a  M  A  D  I  s. 


ROLAND, 

TRAGÉDIE-LYRIQUE, 
PAR  QUINAULT; 

MISE  EN  TROIS  ACTES,  PAR  MAR^IONTEL•, 

I 

Représentée,  poar  la  première  fois,  eu  cinq  actes ,  eu  i685 
et  en  trois  actes;  le  27  janvier  1778". 

MUSIQUE  DE  PICCINI. 


}^i't) 


PERSONNAGES. 

I 

\ 

B0LÂI7D ,  Devea  de  Charlemagne  et  le  plas  renomma 

des  paladins. 

IAN6ÉLIQUE,  reine  de  Gatay. 

THÉMIRE ,  confidente  d'Angcliqne. 

BvivAvs  ET  suiyAHTBS  d'Angéliqoe, 

IVIEDOR,  saivant  d'an  des  rois  africains. 

IAjiaiis  et  amAbtcs  enchantés. 

Peuples  de  Cntay. 

Sujets  d'ÂngélJqoe. 

tÂSTOLFE,  ami  de  R^nd. 

CORIDON ,  berger,  amant  de  Mise, 

BÉLISE ,  bergère ,  amante  de  Corîdon. 

TERSAKDRE,  berger,  père  de  Mise. 

Un  insulaire. 

liOGTSTILLE,  Tune  des  plus  puissantes  fëes,  et  celle 

qui  a  la  sagesse  en  partage. 

Bergers  et  bergères, 

Fées  de  la  suite  de  Logistille. 

PERSONNAGES  DAIfSAKS, 

Indiens  et  Indiennes. 
(Amans  heureux. 
IVTatelots  chinois. 
Bergers  et  bergères. 
Chevaliers  et  dames  françaises* 

Nota.  Les  vers  préc^dësrde'gaillemets  ontëtë  afontësoii 
changés  par  M armontel.  Les  variantes  sont  placées  à  la  !6n  da 
la  pièce ,  pour  les  lecteurs  qui  voudraient  connaître  le  teite 
de  Quinaiilt  en  entier. 


ROLAND, 

THAGÉDIE-lYRIQUE. 

ACTE  PREMIER. 

Le  théâtre  représeate  on  hameao. 

SCÈNE  I. 

ANGELIQUE  (i),  THÉMIRE. 

Al!loél.IQUE. 

Ah!  que  mon  cœur  est  agité! 
L'Amoar  y  combat  la  Fierté. 
]e  ne  sais  qui  des  deux  l'emporte. 
»  Tantdt  la  Gloire  est  la  plus  forte  (2)  ;     * 
n  Et  tantôt  fAmour  est  vainqueur, 
n  Dans  mon  sein,  leur  guerre  moitelle 
»  A  chaque  instant  se  renouvelle. 
Quel  trouble,  hélas!  quelle  rigueur! 
»  Funeste  Amour ,  Gloire  cruelle  (3)  ; 
Ne  cesserez-vous  pas  de  déchirer  mon  cceur(4)?. 

THÊMinC. 

)»  Vous  négHigez  les  dons  du  héros  ^t  vous  aime  (5). 

10, 


ii4  ROLAND. 

AUG^LIQUE. 

L'invincible  Bohuid  n'a  que  trop  fait  pour  moi. 
Fais-moi  r^ouvenir  de  ce  que  je  lui  doi. 

a  Que  De  d«Yez-Y0us  pas  à  son  amour  extrême  (6)? 

ANGÉLIQUE. 

»  J'y  pense  autant  que  je  le  puis  (7); 
Mais,  malgré  tous  mes  soins ^  dans  h  trouble  où  je  sois^ 

Je  crains  de  m'oubiier  moi-même, 
le  crains  que  Qia  fierté  ne  succombe  eu  ce  )our^ 

THÉHIBE.^ 

■Aimez  Roland  à  votre  tour. 
Il  n'est  point  de  climats  où  sa  gloire  ne  volcv 

Du  moins  la  fiiertése  console,. 
Quand  la  Gloire  l'oblige  à  céder  à  l'Amour. 

»  BçlaïKl  soumet  tout  à  ses  armes  (8)  j. 
Son  bras  sait  affermir  un  trône  chancelant.. 

ANGÉLK^UE. 

Hélas  î  hélas  i  que  Médor  a  de  cbannes  !. 

Ah  1  que  n'a-t-il  la  gloire  de  Roland  (9)  ! 
Mon  cœur  était  tranquille  et  croyait  toujours  l'être ,. 
Quand  je  trouyai  Méclor  blessé ,  près  de  mourir 
La  pitié ,  daos  ce  lieu  cliampêlre  ^ 
M'arrêta  poqr  le  secourir^ 
Le  prix  de  mon  secours  est  le  nuilque  j'endure,  (lo) 

)ï  J'ai  guéri  sa  blessure  ; 
M  Et  je  suis  Qn  danger  de  ne  jumais  guérir., 

XH.ÉMir.E. 
Eloignez  de  vos  yeux  ce  qiii  peut  trop  vous  plaire. 

j  ANGÉLIQUE. 

Ma  gibire  le  demande  ',  il  faut  la  satisfaire  ;. 


ACTE  I,  SCÈNE  II.  Ii5 

U  faut  bannir  Médor...  bauuir  Médor!  hélas! 
C'est  me  condamner  au  tiépas  (i  i). 

».  Oui ,  je  le  dois  :  je  suis  reine. 
»  Du  doux  penchant  qui  m'entraîne  , 
»  Oui ,  je  dois  me  gai:antir. 

»  Tu  le  veux ,  Gloire  inhumaine  J 
»  Mais  pôurrai-je  y  consentir? 
»    D'une  trop  indigne  chaîne 
»  Viens  donc  m'aider  à  sortii*. 
»    O  sang,  dont  j'étais  si  vaine, 
M  Je  ne  puis  te  démentir. 
»  Quel  supplice  I  quelle  ^ne! 
»  Pour  bien  juger  de  ma  peine  ^ 
.  U.  Héla^  !  il  fayit  la  sentir. 

».  Je  ne  veux  plus  le  voir.  Qu'il  parte ,  qu'il  m'évite. 
»  Ah  î  je  le  vois.  »  Il  rêve ,  il  «  porte  »  ici  ses  pas. 

Que  je  suis  interdite  ! 

Ne  iio'abtaDtlocme  pas. 

(EUqs  s'éloignent.  ^ 


SCÈIN-E  II  (12). 


RtÊOOR.  (i3) 

Malheureux  que  je  suis  !  par  quel  enchantement  {i/Q 
Ai-jc  donc  oublié  son  rang  et  ma  naissance  (i5}? 
X'aime  une  reine ,  hélas  î  j'aime  un  objet  chai-mant  (i  6)  ^ 
Que  tdtttdc  cws  ont  aimé  vainement  (i^)l 


Ii6  ROLAND, 

Malhenreaz  que  je  suis  I  un  étemel  sileoce , 
D'un  amour  sans  espoir ,  fera  donc  le  tounuent? 

»  Je  la  verrai  :  c'est  assez  \)out  ma  flamme  (i8}, 
»  Esclave  heureux  de  servir  tant  d'appas , 
»  L'amour ,  caché  dans  le  fond  de  mon  amc  , 
»  Peut  l'adorer ,  et  ne  Toficnser  pas. 
»  Je  mourrai  de  lefibrt  pénible 
M  Que  vont  me  coû-ter  mes  combats. 
to  Mais ,  à  ma  mort  que  son  cœur  soit  sensible  ; 
))  Je  meurs  contrat  ;  et  jusqu'A  mon  trépas ,  - 
)>  Je  la  verrai  :  c'est  assez  pour  ma  flamme,  etc, 

SCÈNE  III  (»9). 

MEDOR,  ANGÉLIQUE,  THEMIRE, 

MiÎDon. 
De  la  part  de  Roland ,  on  vient  jusqnVn  ces  lieux 

Vous  oflrir  un  don  précieux, 
Il  vous  aime,  il  vous  seit,  son  amour  peut  paroître  (20)  J 
Bos  travaux ,  quels  qu'ils  soient ,  sont  trop  récompensés, 
U  trop  heureux  Rolaud  ! 

A5G1ÊLIQUE.        > 

Roland  sera  peut-être 
Moins  bettreux  que, vous  ne  pensez, 
M  Pour  moi  plus  son  ambur  éclate  (21} , 
it  Plus  je  rougis  de  lui  devoir. 
«  Vc  j^ùitez  point  epvie  au  ^nheur  qui  le  flatte, 
MÉDOIt, 

\\  tax  vrai  ^'il  ta'a  pas  le  plaisir  de  vous  voir. 


ACTE  I,  SCENE  III.  aig» 

ABOÊE.XQUE. 

JTe  le  fnîs  ;  et,  sans  lui ,  désormais  je  ii'aspir« 
Qn'â  retoarner  ^ans  mon  empire. 
Enfin ,  Médor,  enfin ,  je  veux  savoir 
Si  j'ai  sur  tous  iln  absohi  pouvoir. 

MénoB. 
tVoos  êtes  de  mon  sort  maîtresse  souveraine. 
3e  servais  un  grand  n>i  ;  j'avais  suivi  ses  pas 
Des  rivages  du  Nil  jusqu'aux  bords  de  la  Seine. 
U  est  mort  en  cherchant  la  gloive  et  les  combats  ; 
Sans  TOUS ,  j'allais  le  suivre  au-delà  du  trépas. 

.Vous  servir  est  ma  seule  envie. 
J'en  fais  mon  espoir  le  pliâ  doux. 
Vous  m'avez  conseivé  la  vie  ; 
»  Je  ne  la  chéris  que  pour  vous  (aà). 

Médor,  vous  avez  fiett  4e  croire 

Quç  je  ro'intéreSte  à  vois  jours; 
3'en  ai  pris  soin;  le  ciel  a  béni  raoa  secours. 
!Â.  la  fin  il  est  tems  d'avoir  soin  de  ma  gloire, 
par  pît'é,  près  de  vous  j'ai  voulu  demeurer, 
ïandis  que  mon  secours  vous  était  ncc^saire. 

Ma  pitié  n'a  plus  rien  à  faire  { 

U  est  tems  de  nous  séparer. 
Partez  Médor^ 

MÂDOB. 

O  ciel! 

Partez  sans  diflTérer. 


I 


MEDOn. 

Hélas!  ai-je  pu  vous  déplaire? 
augélique. 
Non ,  non ,  je  n'ai  point  de  colère. 

MEDOB. 

»  Puis-je  vivre ,  et  ne  vous  voir  plus? 

ABGÉLIQUE. 

M  Laissons  les  regrets  superflus  (23). 
>  Choisissez  où  vous  voulez  vivre  ; 
Je  prendrai  soin  de  votre  sort.^ 

HÉDOB. 

Vous  me  défendez  de  vous  suivre  ; 
Je  ne  veux  chercher  que  la  mort. 

ANGÉLIQUE  (24). 
»  Puisse  Médor,  loin  d'Angélique^, 
»  Jouir  en  paix  d'un  heureux  sort! 

MEDOB. 

»  Non,  non,  Médor,  loin  d'Angélique, 
»  Ne  demande  au  ciel  que  la  mort. 

ANGÉLIQUE. 

»  Vivez  heureux  loin  d'elle. 
»  Mais  ne  l'oubliez  pas.. 

MÉOOB. 

»  Qu'en  esclave  fidèle, 
»  Je  suive  au  moins  vos  pas. 
»  SsDfi  vous  je  ue  puis  vivre^ 

ANGÉLIQUE,  à  part. 
»  Sans  lui  je  ne  puis  vivje. 


ACTE   I,  SCÈNE  III.  .119 

(  A  Médor.) 
»>  Je  ne  dois  plas  vons  voir. 

ENSEMBLE.  (Angélique  à  part.) 
M  A  quel  tourment  nous  livre , 
î)  Un  trop  cruel  devoir?  , 

»  Non ,  je  n'y  puis  survivre. 
»  A  quel  tourment  nous  livre 
»  Un  trop  cruel  devoir. 

MEDOB.  \ 

»  Qu*en  esclave  £dèle , 

»  Je  suive  au  moins  vos  pas. 

ASGELIQVE. 

»  Suivez'  ma  loi  cruelle  ; 
»  Mais  ne  m'oubliez  pas. 
MÉDon, 
»  Sans  vous  je  ne  puis  vivre. 

ASGÉLIQUE. 

»  Je  ne  dois  plus  vous  voir, 
<A  part.) 

î)  Je  sens  que  je  l'adore  ; 
»  Et  je  le  fais  souiîrir! 

MÉDon. 
»  Au  trépas  que  j'implore 
»  Je  n'ai  plus  qu'à  m'offrir. 

ENSEMBLE.  (Angëliqiw  à  part.) 
»  O  contrainte  fatale 
»  O  -cruelle  rigueur  î 
»  Quelle  peine  est  égale  î 
»  Aux  peines  de  mon  cœur  ?. 


„ao  ROLAND^ 

SléDOR. 

»  Ne  puis-je-aU  moins  vous  suivre?! 
»  Sans  vous  je  ne  puis  vivre. 

AKOÉLIQUE. 

»  Pourquoi  vouloir  me  suivre  ?i 
}}  3e  dois  ne  plus  vous  voir. 

HCDOB. 

».  Sans  vous  je  ne  puis  vivre* 

ASoéLH^VC,  à  part. 
»  Sans  lui  je  ne  puis  vivre. 

lléDOll. 

»  Hélas!  ne  plus  vous  voir! 

ENSEMBLE.  (Angélique^ à  pari.) 
»  O  contrainte  fatale! 
»  O  funeste  rigueur  ! 
i  »  Quelle  peine  est  égale 
»  Aux  peines  de  moji  cœur? 

>  ,        ASofetIQBE. 

Terminons  des  regrets  qui  pourraient  trop  s'étendre. 
Ne  me  dites  plus  rien.  Je  ne  veux  rien  entendre, 

11  est  tems  de  nous  séparer. 
Partez  Médor. 

MÈDOB. 

O  ciel! 

ASGéLIQUE. 

Partez  sans  différer. 

fil  sort.) 


ACTE  i,  SCÈNE  IV.  i2« 

SCÈNE  lY  (25). 

ANGÉLIQUE,  THÊMIRE. 

ANGÉLIQUE. 

ÎE  ne  verrai  plus  ce  que  j'ahne. 

»  Quel  efibrt  je  (àis  sur  moi-même  (26)  l 

»  Que  je  me  prépare  d'eimai! 
Il  part  désespéré;  tu  vois  où  je  l'expoae; 

Il  va  mourir  r  j'en  suis  la  cause  j 

Je  mourrai  bientôt  après  lui, 
Non ,  un  trop  tendre  amour  à  ses  jours  m'intéresse. 
Non  !  qu'il  ne  parte  point.  Allons  le  rappeler... 

Infortunée!  où  veux-jc  aller? 
Je  vais  uahir  ma  gloire  et  montrer  ma  faiblesse. 

»  Non,  rien  n'égale  mon  malheur  (27). 

S'il  faut  que  l'Amour  me  surmonte,  , 

»  Quelle  est  ma  faiblesse  et  ma  honte  (28)  ?. 

»  Quelle  est  sa  peine  et  ma  douleur, 

S'il  faut  l'arracLer  de  mon  cœur?. 

THÉMIBE. 

Le  secours  de  l'absence 
\  Est  un  puissant  secoms  (29). 

ASGÉLIQUE. 

Le  secours  de  l'absence  ^ 

Est  un  cruel  secours. 
*  AJjî  quelle  violence, 

t)e  fuir  inccisamment  ce  qu'on  aime  toujoursl 
Quoi!  Mcdor,  pour  jamais,  d'avec  moi  se  sépare! 
Levais-tu  ra'inspirer  un  dessein  si  barbare? 

Cruudâ  0|>cras.  2  r  ,1  |i 


n22  •  ROLAND. 

Cruelle!  j'ai  suivi  tcs  conseils  rigoureux. 
'  Fais  revenir  Médor.  Que  rien  ne  te  retienne. 
.Va ,  cours....  Mais  s'il  revient  I...  N'importe ,  qu'il  rcvieime. 
Attends.  Je  veux^....  hélas!  sais-je  ce  que  je  .veux?, 

»  Je  renonce  à  ce  que  j'aime. 

»  Médor  n'est  plus  rien  pour  moi. 

»  Pnis-je  me  faire  à  moi-même 

»  Une  plus  funeste  loi  ? 

»  Est-ce  le  ciel  en  colère, 

»  Est-ce  un  tyran ,  est-ce  up  père , 

»  Qui  me  sépare  de  toi?. 

»  Non ,  Médor,  c'est  ton  amante , 

»  Qui  t'afflige  et  se  tourmente, 

»  Mais  pardonne  :  je  le  doi. 

»  Je  le  dois!  rigueur  extrême! 

»  Je  renonce,  etc. 

TBéMIBE, 

Voyez  ces  étrangers  ;  contraignez-vous  pour  eux. 

ANGÉLIQUE. 

Ne  puis-je  en  liberté  soupirer  et  me  plaindre  ? 

Faudra-t-il  toujours  me  contraindre  ? 

Sans  Médor ,  tout  me  semble  affreux. 
Va  le  voir ,  et  du  moins  console  un  malheureux. 

SCÈNE  Y  (30). 

ANGÉLIQIJE,  troupe  d'iNSULAiHES  orientoux. 

UN    INSULAIRE. 

Au  généreux  Roland  je  dois  ma  délivrance. 


ACTE  I,  SCÈNE  V.  ;i23 

D'un  charme  aflQ:eiix  sa  valeur  m'a  sauvé. 
Il  n  a  voulu  de  ma  reconnaissance , 
Que  ce  présent ,  c[u'il  vous  a  réservé. 
(  Il  lui  présente  un  brassclet  de  pierreries.  ) 
le  viens ,  pour  vous  Tofirir  ,  du  rivage  où  l'Auroca 

Ouvre  la  barrière  du  jour. 
.Vous  embrasez  Roland  d'un  feu  qui  le  dévore  j     ,     . 

Mais  qui  peut  voir  la  beauté  qu'il  adore, 
iVoitsans  étonnement  Texcès  de  son  amour  (3i). 
'  cnccuB. 

Triomphez,  charmante  reine , 
Triomphez  des  plus  grands  cœurs.. 
»  Que  les  plus  fameux  vainqueurs.  (Sa) 
))  Se  disputent  votre  chaîne.  ^ 

Triomphez ,  etc.  (33). 

(  On  danse.) 


piH  DU  phebiieb  acte. 


w^'^^  ^^■*'*"#^*^^^^*'^^«* 


»^«#4»«^«l<».^.^ 


ACTE  SECOND. 

Le  diéâtre  représente  la  footaine  de  FÂmoar  aa  imlieo 
d'une  fbrét. 


»  SCÈNE  I. 

»  CHOEUR  D'AMANS  enchanlés. 

i^ouBCE  encbanteresse  ; 
»  Quels  sont  tes  attraits! 
»  Eedouble  k  jamais 
»  Notre  heureuse  ivresse. 
»  Aimons ,  aimons-nous. 
n  L'Amour  nous  appelle. 
»  Jamais  un  rebelle 
H  N'évite  ses  coi^. 
»  Quel  bien  est  plus  doux 
»  Qu'un  amour  fidèle? 
»  Aimons ,  aimons-nous. 
»  De  cette  eau  si  belle 
»  Enivrons-nous  tous. 

(Pendant  ce  chœar ,  les  amans  puisent  à  la  fontaine  et  se  pré* 
•entent  la  coupe  l'un  à  l'autre.'  La  danse  exprime  Irur 
enchantement.  Une  amante  ialouse ,  et  qui  dans  son  dépit 
Ta  s'ëniTrer  à  la  fontaine  de  la  Haine ,  se  laisse  enfin  per- 
suader de  boire  à  celle  de  l'Amour.^ 


ACTE  II,  SCENE  II. 

.      SCÈNE  II  (54). 

ANGÉLIQUE,  THÊMIRE. 
ANGÉLIQUE  (35). 

'Ah  !  j*ai  banni  Médor.  Ma  tristesse  est  mortelle, 
Que  ne  le  pressais-tu  de  me  désobéir! 

THÉUIBE. 

Je  devais  vous  être  fidèle. 

AVGÉLr^tJÏ. 

Pour  empécber  ma  mort ,  n'osais-tu  me  trabir  ? 

O  fidélité  trop  cruelle  ! 
lie  trouble  de  mon  cœur  ne  peut  plus  se  calmer, 
îîon ,  je  n'espère  plus  de  remède  ^  mes  peines. 
Merlin ,  dans  ces  forêts ,  enchanta  deux  fbntaincs , 
Dont  Tune  fait  baîr ,  et  l'autre  fait  aimer. 

C'est  la  fontaine  de  la  baine 

Que  je  viens  cbcrcber  en  ce  jour  ; 
9e  m'égare  en  ces  bois ,  et  ma  rccberche  est  vaine  : 
.'toujours  tm  sort  &tal ,  malgré  moi ,  me  ramène.' 

A  la  fontaine  de  l'Amour  (36). 

fîon ,  je  ne  cherche  pbs  cette  source  terrible , 
Qui  fait  d'un  tendre  amour ,  une  haine  iA(Iiexible« 
C'est  un  secours  cruel  :  je  n'y  puis  recourir. 
Aux  charmes  de  Médor  je  serais  insensible  ! 
H  haii-ais  Médor!  non, il  n'est  pas  possible  (37). 
3  e  consens  plutôt  à  mourir  (381). 

Çwltju'miw  vient.. 


1126  ROLAND. 

Angélique;. 
C'est  Roland. 

THEMIBE. 

Ce  héros  invincible 
'Abandonne  tout  pour  vous  voir. 

,       »  ANGÉLIQUE. 

Il  se  flatte  d'un  vain  espoir  : 
Cet  anneau ,  quand  je  veux ,  peut  me  rendre  invisiWe[(4oï. 

SCÈNE  III  (40. 

ROLAND,  ANGÉLIQUE,  THÉMIRE. 

nOLAND. 

Belle  Angélique ,  enfin ,  je  vous  trouve  en  ces  lieux. 

»  (  Angélique  met  dans  sa  bouche  l'anneau  qui  la  rend 
'  imisible.  ) 

Ciel  !  quel  enchantement  vous  dérobe  à  mes  yeux  ? 

Angélique  !  cbarmante  reine  î 
Mes  cris  font  vainement  retentir  ces  forêts» 

Angélique  l  ingrate  !  inhumaine  ! 
»  Quel  barbare  plaisir  trouvez-vous  dans  ma  peine  (4^)2 

Angélique  I  ingrate  î  inbumainé  ! 
»  Quel  plaisir  trouvez-vous  dans  mes  tristes  regrets  H^)l 

»  Tu  sais  ce  que  j'ai  fait  pour  elle  (44)  j 
Tu  connais  mon  amour  fidèle  ; 
Et  tu  vois  quel  en  est  le  prix  (45). 
»  Angélique!...  envain  je  Tappelle. 
»  Elle  est  sans  pitié ,  la  cruelle  ; 
,      xt  Elle  est  Insensible  â  mes  cris,. 


ACTE  II,  SCENE   ÏII.  11271 

}y  Quelle  rigueur  !  ab!  quel  mépris! 
»  Tu  sais  ce  que  j'ai  Tait  pour  elle?. 
»  Tu  coDDais  mou  amour  Bdèle  ; 
»  Et  tu  vois  quel  en  est  le  prix. 
?>  Quelle  rigueur  î  ah  I  quel  mépris  î 

■     THÉMIBE. 

»  Eh  quoi ,  seigneur  î  pouvez-vous  croire 
»  ?)  Que  Ton  méprise  tant  de  gloire  ?, 

nOLAMD. 

»  Que  lui  Élit  cette  gloire ,  hélas  î  que  je  flétris?. 
Que  devient  ma  vertu?  ma  force  est  inutile  .(4^'i 

Je  laisse  mon  roi  sans  appui. 
Il  n'a  plus  désormais  que  Paris  pour  asile» 
Les  cruels  Africains  vont  triompher  de  lui. 
Je  vois  le  sort  aflreux  de  ma  triste  pairie  ; 
Elle  est  prête  à  tomber  sous  de  barbares  lois  ; 
'  J'entends  sa  gémissante  voix  ; 
Mais  c'est  vainement  qu'elle  crie« 
Un  malheureux  amour  m'enchaîne  dans  ces  bois«     ^ 

\ 
(Angélique  L..  envain  je  l'appelle. 
Elle  est  sans  pitié ,  la  cruelle. 
Et  pourquoi  tant  souffrir  ?  pourquoi 
N'aurai-je  pas  pitié  de  moi? 
C'en  est  fait ,  et  je  veux  que  l'ingrate  le  sache  : 
C'en  est  £ait ,  pour  jamais  mes  liens  sont  rompus^ 
îîon,  je  ne  la  chercherai  plus. 
C'est  vainement  qu'elle  se  cache. 
Non ,  )e  ne  veux  plus  voir  sa. fatale  beauté.     ^ 
Il  ne  m'en  a  que  trop  coûté  (47)«      ^     ' 

»  Je  me  reconnais  ;.  je  respire  j. 


iià8  ROLAND. 

»  Je  reprends  snr  moi  mon  empire  ; 
»  Je  retrouve  enfin  ma  vertu. 
»  Honteux  d'avdir  tant  combattu , 
»  Je  crois  sortir  d'un  long  délire. 
»  L'honneur ,  la  gloire  qui  mlospire , 
»  Relèvent  mon  coeur  abattu. 

»  Je  me  reconnais  ;  je  respire  ; 

»  Je  reprends  sur  moi  mon  emmure  ; 

»  Je  retrouve  enfin  ma  vertu. 

Malheureux  !  je  me  flatte  :  et  ma  colère  ésl 'Vainc. 
»  Lâche  !.  tu  ne  peux  rompre  une  bomense  cboîi^e  (48)  :  » 
Ton  coeur  suit,  malgré  toi ,  de  fonestes  ammts  ; 
Il  cède  au  charme  qui  l'entraîne. 
^  Angélique!  ingrate!  inhumaine! 
<}uel  barbare  plaisir  troutez-vons  dans  ma  peine  ? 

Angélique!  ingrate!  inhumaine! 
Quel  plaisir  trouvez<vons  dans  mes  tristes  {«pgreCs  ?. 

(  Il  tort.  ) 

SCÈNE  IVi  (49). 

ANGÉLIQUE,  THÉMIRE. 

TBÉAIXIIE  (^). 

^RoLAiTD  TOUS  cherche  en  vain  dans  ce  bois  solitaire. 

ASO^IrlQCE. 

Mon  cœur  est  engagé.  Roland  ne  peut  me  ploiie^ 

Quel  espoir  lui  pourrais-je  offrir  ? 
la  le  fuis  par  pitié.  Je  ne  saurais  mieux  faire 

Que  de  l'aider  â  se  guériç. 


•ACTE  It,  SCÈNE  V.  laO 

OÙ -pcul-étrc  Médw?  Le  désesponr  le  presse;  \ 

^  Que  ne  puis- je  le  retrottyer  (5 1)  2 

THéMlHE. 

i)  Rotancl  tous  nixne  arec  tant  de  tendresse  î 
Votre  cceùr  pour  Roland  devrait  se  réserver. 

Parle-moi  de  Médor ,  ou  laisse-moi  rêver. 

C'est  PAmoar  qui  prend  aoit  ^inoàne 

D'embellir  ces  paisibles  lieux. 

Mais  je  n'j  vois  point  ce  que  j'aime  ; 

Bien  n'y  saurait  plaire  â  mes  yeux. 

»  Source  des  amoureux  désirs, 
»  Âli  !  qu'il  vienne  avec  moi  s'enivrer  de  Ion  oodc. 

»  Sans  lui  pour  moi  plus  de  plaisirs  ; 

»  Sans  lui  plus  de  boubeur  au  monde. 

tt  C'est  l'Amour ,  etc. 

SCÈNE  V.  (52).  ■  / 

MÉDOR,  ANGÊLîQUE,  THÉMIRE. 

nêcon  avant  de  paraître. 
»  SÉJOUR  si  tranquille  et  si  beau , 
1»  D'un  amant  malheureux  vous  serez  le  tombeau*  (53). 

AR^ttlQUE. 

C'est  Médor  que  je  viens  d'entendre. 
Ociel! 

TBétflhE.  y 

Vous  le  vtrfoi! 

AirctllQUE. 

Eh!  paisse  m'en  àihndee  ? 


itSo  ROLAND. 

C'est  trop  ^ivre  on  crael  devoir. 
Je  retrouve  Médor.  L'Amoar  veut  me  ie  rendre. 

Je  ne  puis  vivre  sans  le  voir. 
Eloigne-toi.  (|Thëmire sort. )  Rendons-nous  invisible; 

Et  d'un  malheureux ,  trop  sensible , 
Soyons  où  peut  aller  le  cruel  désespoir. 

»  SCÈNE  yi. 

:«  ANGÉLIQUE,  MÉDOR. 

"(c  MÉDOB,  se  croyant  seul. 
)»  Toxrr  respire  en  ces  bois  une  volupté  pure  j 
»  Et  j'y  meurs  accablé  d'un  désespoir  afireux. 
»  Il  ne  manquait ,  hélas  !  au  tourment  que  j'endure  , 
»  Que  de  voir  des  amans  heureux  (53). 

ICe  que  j'aime  me  fuit ,  et  je  fuis  tout  le  monde. 
Pourquoi  traîner  plus  loin  ma  vie  et  mes  malheurs  ?. 
Rtiissean ,  je  viens  mêler  mon  sang  avec  votre  oade. 

C'est  trop  peu  d'y  mêler  mes  pleurs. 
(Médor  tire  son  épée  pour  s*en  frapper  ;  Angélique  l'arrête.  ) 
ABGÉLIQUE. 

yivez,  Médor  I 

MÉDOB. 

Reine  adorable , 
iVoas  prenez  trop  de  soin  des  jours  d'un  misérable. 

ANGELIQUE. 

Pourquoi  courez-vous  au  trépas  ?. 

N  MÉDOn. 

C'est  un  supplice  insupporuble 


,    'ACTE  It,  SCENE  Vt.  ,3,1 

De  vîvrfe  et  de  ne  vous  voir  pas. 

ANGELIQUE» 

Je  croyais  que  sur  vous  J'avais  plus  de  puissance. 

MEDOn. 

Hélas  î  si  vous  pouviez  savoir 
Jusqu'à  quel  point  je  vous  offense! 

ÂSaÉLIQVE. 

Rîen  ne  m'oficnse  tant  que  votre  désespoir.  ' 

MÉDOB. 

Je  vivrai ,  si  c'est  votre  envie. 
Je  vous  vois  ;  mon  sort  est  trop  àowcs 
Mais  s'il  faut  m'éloigner  de  vous , 
Je  ne  réponds  pas  de  ma  vie. 

ANGELIQUE. 

Prenez  soin  de  vos  jours ,  Médor  ;  vous  le  devez.  . 
Il  m'en  coûte  assez  cher  de  les  avoir  sauvés. 
Ils  me  sont  précieux  ;  je  vous  l'ai  fait  connaître, 

MÉDOB. 

Généreuse  reine,  achevez. 
Sans  vous  puis-je  vivre  ? 

ANGÉLIQUE. 

Vivez ,  ^ 

A  quelque  prix  que  ce  puisse  être. 

MÉDOB. 

»  Ciel,  qu'entends- je?  à  vos  pieds....  (55); 

ANGÉLIQUE. 

»  En  me  donnant  un  roi  (56), 
»  Jurriiai  Sous  la  même  loi 
Votre  destinée  et  la  mienne. 


«3a  BOLA5D. 

M£BOR. 

•Ah  !  plas  TOUS  onbUes  roue  gnuMSrar  pour  moi , 
Plus  il  laot  qoe  je  m'en  somienne. 

ABGÉLIQDC  (.57). 

»  Roland  est  encor  daus  ces  lieax. 
»  Un  moment  avec  loi  laissez-moi  me  contraindre  - 
n  El  dérobez-vous  à  ses  yeox. 
(58)  (Mééor  s'éloigne  }. 

SCÈNE  Vil. 

»  ASG^LIQUE  «eule. 

»  Il  en  coûte  h  mon  cceiir  de  s'abaisser  à  feindre  ; 
»  Mais  Roland  m'y  r<5duit  ;  il  n'a  pas  à  se  plhindre. 
»  A  ses  transports  jaloux  il  s'agit  d'échapper. 

))  L'amant  'qui  nous  force  à  le  craindre , 

»  Nous  autorise  à  le  tromper. 

SCÈNE  VIII  (59). 

ROLAND,  ANGÉLIQUE  (60). 

ROLANC. 

Faut-il  encor  que  je  vous  aime? 
Je  dois  rougir  ce  «ia  lUblesse  extiéme, 
Ingrate  :  vous  en  abusez  ; 
»  Et  plus  je  fuis  pour  vous,  plus  vous  me  méprisez  ;6i). 
Quelle  boule  à  mon  cœur  d'eue  encor  si  lidèie  ! 

Pourquoi  vous  trouvé-je  si  belle  ? 
Aon  ,  .-iwc  tciui  J'aïuaits,  si  louclumi  el  ^  dooi, 


ACTE  If,  SCÈNE  VIII.  i33 

Votis  ne  méritex  pas,  cmelle , 
L'omoar  dont  je  brâle  pour  vous. , 

^  ASGÉLIQUE. 

»  Que  n'ai-je.  pas  fait  pour  Téteindre  (6a]  ^ 
noLASD. 

'Ah  !  |e  ne  sais.que  trop  avec  quelle  rigueur 

Vous  punissez  mon  lâche  cœur. 
Votre  mépris  écbte  ;  il  n'est  plus  tems  de  feindre  j 

Tous  vos  déguisemens  sont  vains. 
Je  pardonne  an  mépris  du  reste  des  humains  : 
Je  l'ai  bien  mérité  ;  j'aurais  tort  de  m'en  plaindre. 

J'abandonne  ma  gloire  et  la  laisse  ternir. 
Je  chéris  le  trait  qui  me  blesse. 
De  mon  égarement  je  ne  puis  revenir. 

Mais  vous,  qui  causez  ma  faiblesse , 
Ah!  cruelle,  est-ce  à  vous,  à  voua  de  m'en  punir  (  63}? 

Dans  vos  yeux  inqnietB  je  lis  mon  infortune. 
Ma  présence  vous  importune. 
Vous  ne  songez  qu'à  me  quitter. 

ASGELIQUE. 

»  Oui ,  Roland,  je  vous  crains,  je  dois  vous  éviter  (6^  ). 

BOI.A»I>. 

Ah  !  du  moins  laissez-moi  le  seul  bien  qui  me  reste. 

Laissez-moi  la  douceur  funeste 

De  voir  de  si  charmans  apj)as. 

C'est  sans  espoir  que  je  suivrai  vos  pas. 
Vous  ne  serez  jamais  à  mes  v<rux  favoiïible  ; 

Je  vous  verrai  toùjouis' inexorable  ;\ 
Mais  le  plus  grand  des  ir.aux  est  de  lae  vous  voir  pas. 
Giuuds  Oprras.  2,  la 


i34 


ROLAND. 

ANGÉLIQUE. 

»  Mon  coenr,  libre  encore  (65) , 
»  Veut  fuir  un  vainqueur. 
•     noiiAND. 
))  Fuir  qui  vous  adore  ! 
»  Auriex-vous  encore 
)>  Assez  de  rigueur?, 

î>   AS&ÉLrQÛE. 

»  Que  ne  puis-je  encore 
»  Défendte  mon  cœur  1 

»  Faut-il  que  la  Gloire 
»  Le  cède  à  l'Amour?. 

)>  noiAND. 

»  Cédez  la  victoire 

))  Au  plus  tendre  amour. 

»   AUGÉLIQUB. 

»  Mon  peuple,  ma  cour 
»  Attpnd  mon  retour. 

bolAud. 

»  D'un  roi  plein  de  gloire , 

»  Venez  voir  la  cour. 

»  O  reine  charmante  ! 

»   ANGÉLIQUE. 

»  L'Amour  nous  tourmente ,. 
»  Je  veux  fuir  TAmour. 

»   nOLAND. 

»  Rigueur  inflexible  î 
»  Ne  m'accablez  pas. 


ACTE  II,   SCÈNE  IX.  ;n35 

»   ASGÉLIQUE. 

»  Que  ne  suis-je ,  hclas  î 
»  Encor  moins  sensible! 
»  Ne  roe  suivez  pas.    f 

»   nOLÀRD. 

»  Ne  me  fuyez  pas. 

»  ENSEMBLE.  (Angélique  à  part. 
»  O  Dieà  queb  combats! 
»  Quel  cbarme  invincible 
»  M'encbaîne} 
}>  L'encbaîne  \ 
(Le  tbëâtre  change ,  et  représente  un  port  de  mer.) 


e)        (  vos    )         , 
>  h  \  >  pas! 

î  )       (  mes  ) 


»  SCÈNE  IX. 

Troupe  de  MATELOTS  chinois. 

.  )>  LE    CHCEUB. 

»'  Les  vents  nous  appellent  sur  Tonde. 
»  Heureux  amans,  que  tardez-vous; 
»  Venez ,  fuyez  loin  des  jaloux. 
»  Les  airs ,  les  flots  tout  vous  seconde. 

»  Que  tardez-vous? 

»  Embarquons-nous. 

(On  danse*} 


ACTE  TROISIÈME  (66). 

Le  théâtre  représeme  une  grotte,  au  milieu  d'un  bocage. 

SCÈNE  I. 

ROLAND,  ASTOLFE, 

BOXA  WD  (67). 

»   V  Œss^  Je  sais  quelle  route  Angélique  a -dû  prendre. 
Nous  Dous  sommes  promis  d'être ,  à  la  fin  du  jour , 

A  la  fontaine  de  l'Amour  (65). 
Je  viens  au-devant  d'elle  j  ennuyé  de  l'attendre , 

Je  parcours  les  lieux  d'alentour. 

»  De  l'aimable  objet  qui  m'enchante  (69)  , 

»  Jamais  je  ne  fus  si  charmé. 

»  Qu'une  beauté  fière  est  touchante , 

V  Quand  son  orgueil  est  désarmé  ! 
»  Dans  les  regards  de  mon  amante, 
»  Quel  nouveau  feu  s'est  allumé  l 

»  On  a  beau  se  croire  enflammé; 
»  Le  plus  ardent  amour  s'augmente 
))  Par  le  doux  plaisir  d'être  aimé^  ; 
S 

V  Jamais  je  ne  fus  si  charmé 

^  De  l'aimable  objet  qui  m'enchante^ 
m  i^u'we  beauté  fière  est  toqchapte^ 


ACTE  III,  SCÈNE  t.  ii39 

»  Quand  son  orgueil  est  désarmé  ! 

ASTGLFE. 

Cet  empire  en  vous  seul  a  mis  son  espérance. 
Si  vous  n'embrassez  sa  défense, 
.   Il  tombera  dans  peu  de  tems , 
Sous  une  barbare  puissance. 
Songez  que  vous  perdez  de  précietiac  instans.  ^ 

BOLAND. 

Je  songe  au  bonheur  que  j'attends.    / 

ASTOLFE' 

»  Ah!  d'un  laurier  immortel  (70) 
>)  Venez  ceindre  votre  tête. 

nOLASD. 

9)  li'Amour  m'attend  h  l'autel  ; 
»  J'y  vole ,  et  rien  ne  m'arrête, 

A&TOLFi;.^ 

»  C'est  un  laurier  immortel 
»  Que  la  Gloire  vous  apprête. 

BOLAND. 

d.  C'est  la  plus  belle  conquête 
})  Qui  va  me  suivre  à  l'autel, 

.      ASTOLFE.  ' 

»  "Un  héros  fait  pour  la  Gloire ,, 
»  Va  languir  dans  le  repos  ! 

BOLAND. 

»  Hé  quoi  ?  faut-il  qu'un  héros 
»  Renonce  à  tout  pour  la  Gloire  ? 
»  La  plus  charmante  victoire 
»  M'appelle  au  sein  du  repos. 

Lorsque  des  rigueurs  inhumaines 
Qnt  payé  mon  ttnour  d'un  si  -cruel  tounuent  > 


fl4o  ROLAND. 

Je  n^ai  pu  sortii-  de  mes  cbaûies. 
Puis-je  me  dégager  d'un  lien  si  charmant , 

Quand  je  tauobe  k  l'benreux  moment , 
OÙ  ie  dois  recevoir  le  prix  de  tant  de  peines  2 

Va ,  laisse-moi  seul  en  ecs  lieux. 

Angélique ,  à  mes  veuix  sensible , 
Pour  tout  auir«  que'  moi  veut  se  rendre  invisible. 
,Va ,  ne  Tempéche  point  de  paraître  à  mes  yeux. 

SCÈNE  II  . 

ROLAND,  seul. 

Au  !  j'attendrai  long-tems  :  la  nuit  est  loin  encore. 

Quoi,  le  Soleil  veat-iMuire  toujours! 
Jaloux  de  mon  bonheor ,  il  polongesoo  cours. 

Pour  retarder  la  beauté  que  f  adore 

O  Nuit  !  favorisez  mes  désirs  amoureux. 
Pressez  Tastre  du  jour  de  descendre  dans  Tende. 
Déployez  dans  les  airs  vos  voiles  ténébreux. 
Je  ne  troublerai  plus ,  par  mes  cris  douloureux , 

Votre  traùquillité  profonde. 

Le  charmant  objet  de  mes  vopux 

N'attend  que  vous ,  pour  rendre  heureux 

Le  plus  iidèle  amant  du  monde. 

O  Nuit  l  favorisez  mes  désirs  amoureux. 

Que  ces  gazons  sont  verts  î'  c|ue  celle  grotte  est  belle  î 

(  Il  lil  tout  bac  des  v«rs  écrits  sur  U  groUe.  ) 
Ce  que  je  \t9  m  apprend  qiw  TAmour  a  evndtiit 


ACTE  III,  SCBNE    II.  i/|i 

Dans  ce  bocage ,  ioiu  du  bt  uit , 
otmx  aoiaos  qpi  brûiaieiu  d'une  aidcur  mutuelle , 
J 'espère  qu'avec  moi ,  l'amour  bicutôt  ici 
Conduiia  b  beauté  que  j'aime.  • 

Encbantés  d'un  bonheur  extrême  ^ 
mr  ces  grottes  bteotdt  nons  écriroxu  aussi  : 

»  B.*aux  lieux ,  doux  asiles 
n  De  uos  heureux  amours , 
»  PuiisicK-vous  être  toujours 

)>  Charmons  et  tranquilles  !  >» 

Voyons  tout....  Qu'est-ce  que  je  vois? 
Ces  mots  semblent  tracés  de  la  main  d'Angélique. 
Ciel  !  c'est  pour  un  autre  que  moi 

Que  son  amour  s'explique  ! 
«  Angélique  ei^age  sou  ooïiir  ; 
»  Médor  eu  est  vainqueur.  » 

Elle  m'aurait  flatté  d'une  vaine  espérance  ! 
L'ingrate!...  n'est-ce  point  un  soupçon  (]ui  lofTeosc? 
<c  Médor  en  est  vainqueur!...  »  Koo,  je  n'ai  poiiU.  eacor 

Entendu  pailer  de  Médor. 
Mou  amour  aurait  lieu  de  prendre  des  alaimcs  , 

Si  je  trouvais  ici  le  nom 

De  l'intrépide  iils  d'Aymon , 
Ou  d'un  autre  guerrier  célèbre  par  les  annes.... 

Angélique  n'a  pas  osé 
Avouer  de  son  cœur  le  véritable  maître  : 

Et  )e  puis  aisément  conuaitre 
Qu'elle  pade  de  moi ,  sous  jun  nom  suppose. 

C'est  pour  moi  seul  qu'elle  soupire. 


ii42  ROLAND, 

Ella  me  l'a  trop  dit ,  et  j'en  suis  trop  certain. 

Lisons  ces  autres  mots.  Ils  sont  d'une  autre  main. 

Qu'ai-je  lu?...  Ciel'...  il  faut  relire. 

>;  Que  Médor  est  heureux  ! 
»  Angélique  a  comblé  ses  vœux.  » 

Ce  Médor,  quel  qu'il  soit,  se  donne  ici  la  gloire 
D'être  Theurcux  vamqueur  d'un  objtt  si  cbarmant  ! 
*  'Angélique  a  comblé  les  vœux  d'un  autre  amant  !     ^ 
Elle  a  pu  me  traliir  !...  non ,  je  ne  le  puis  croire. 
Non ,  non ,  quelque  envieux  a  voulu ,  par  ces  mots , 
Noircir  l'objet  que  j'aime ,  et  troubler  mon  repos. 

»  Que  l'insolent  qui  m'outrage , 
»  Tremble ,  et  redoute  ma  fitreur. 
»  Ah  î  quelle  insulte  î  ah  '.  quelle  boireur  ! 
»  Tout  mon  sang  bouillonne  de  rage. 

»  Que  l'insolent  qui  fn'outrage , 
»  Tremble ,  et  redoute  ma  fureur. 
-  »  Elle  aurait  trahi  sa  gloire  ! 
»  C'est  un  crime  de  le  croire. 
»  Par  l'injure  la  plus  noire , 
»)  C'est  offenser  tant  d'appas. 
»  D'où  vient  donc  celte» tristesse, 
»  Cette  frayeur  qui  me  presse , 
»  Et  qui  cause  à  ma  tendresse 
»  Tant  dç  troublç  et  de  combats? 

Que  l'insolent ,  etc. 

J  entends  un  bruft  de  musique  champêtre  ^ 


'* 


ACTE  HT,  SCÈNE  HT.  i43 

Il  faut  chercher  Angélique  en  ces  lieux,  (ji) 
Mes  noirs  soupçons  vont  disparaître ,      ' 
Au  premier  regard  de  ses  yeux. 

(  Il  sort.  ) 

SCÈNE  III. 

Troupe  de  bebgers  et  de  bekoèbes. 

LE   CROEUn. 

»  QuA5D  on  vient  dans  ce  bocage ,  (7  2J 
»  Peut-on  s'empêcher  d'aimer  ?, 
»  Qu'aisément  sous  cet  ombrage, 
»  L'Amour  sait  nous  désarmer  ! 
»  Que  d'oiseaux  sous  ce  feuillage  ! 
))  Que  leur  chant  nous  doit  charmer! 
}>  Que  dans  leur  brillant  ramage , 
•     »  L'Amour  sait  bien  s'exprimer  ! 

»  Quand  on  vient ,  etc. 

(On  danse.) 
ConiDON. 
J'aimerai  toujours  ma  bergère. 

BÉLISE. 

J'aimerai  toujours  mon  berger.         1 

COniDON. 

»  Fût-elle  inconstants  et  Icgère. 

;  BÉLISE. 

»  Fut-il  inconstant  et  léger. 

ENSEMBLE. 

|-       »  Mais  je  n'en  crains  pas  le  t.ûngcr. 


i^  HOLANB. 

COBIDOI». 

»  Qui  ?  mi  bcrgife  î 

BCLISF. 

»  Mon  berger  f 

ENSEMBLE. 

»  Sérail  capable  He  cban^  ! 
»  A  cpiel  malbeor  j'allais  ^ongerJ 

C01IID05. 

»  Non ,  ^c  nç  seras  point  légère, 

BiLISE. 

»  Non ,  tu  ne  seras  point  léger. 

COBID^OH. 

l'ainnerat  toujours  ma  bergère. 

BÉirISE. 

J'aimerai  toujours  mon  berger. 

ENSEMBLE. 

»  Aurun  des  deux  ne  peut  changer» 

SCÈNE  IV. 

HOLAND    ET   LES  lERGEBS. 
CORIOOII. 

AnGÉLiQtE  est  reine ,  elle  est  belle  4 
Mais  sa  grandeur ,  ni  ses  appas 
Me  me  rendraient  point  inlidèle. 

Je  ne  quitterais  pas 

Ma  bergère  pour  elle. 
n  Non ,  je  ne  la  quitterais  pas^. 

B  élise: 
»  Quand  des  ri<J-^.  houh  Ao  la  Seine 
Le  cbarmart  Mécbr  serait  ici , 


ACTE  lïl,  SCÈNE  IV.  l45 

n  Et  me  dirait  :  Je  te  fais  reine ,  (73) 
»  le  quitte  Angélique  pour  toi  ; 
lïoD ,  je  ne  voudrais  pas  encor 
Quitter  inôn  berger  pour  Médor. 

hOtAND. 

Que  dites-vous  ici  de  A{éddr ,  d' Angélique  ? 

COfilDOV. 

Ce  sont  d'hefireux  amans ,  dont  Thistoire  est  publique 
Dans  tous  les  hameaux  d'âleutour. 

BÉX.SSE. 

Ils  ont  avec  regret  quiué  ce  beau  séjour. 
Ces  aibres^  Ces  rochers ,  cette  grotte  rustique , 
Tout  parle  ici  de  leur  amour. , 
BÔLÂfilD,  à  part. 
lAh  !  je  succombe  au  tourment  que  j'endure. 

r  GOBIDOW. 

Réposez'vous  sur  ce  lit  de  verdure. 

BÉLISC. 

Vous  per^isseE  chagrin  ;  écoutez  à  loisir 
De  ces  hturieux  éonans  Tagréable  avenuire. 
Vous^Tenteûdrex  àveè  plaisif  (74). 
(  Roland ,  accablé  de  douleur ,  i*assied  sur  un  gftxon.  ) 
BÉLISE. 

D'un  grand  empire  Angélique  est  maîtresse. 
Elle  est  charmante  ;  elle  avait  b  son  choix 
Des  héros  et  des  rois. 
Médor  est  sans  biens ,  sans  noblesse  ; 
Mais  Médof  est  si  beau ,  qu'elle  Ta  préféré 
A  cent  rois,  qui  pour  elle  ont  eu  vain  soupiré. 
LÉ  CHCEVB  (75)." 
On  ne  peut  s'aimer  davantage. 
Grands  Opéras.  2*  tl  3. 


i46.  ROLAND. 

Jamais  boobeur  ne  fut  plus  doux. 
»  L'bymeD  a  fonaé,  àffrmd  nous, 
»  Le  nœud  qui  les  engage. 

.     CORIDOV. 

Quand  le  festin  fut  prêt ,.  il  &Uut  les  chercher. 

lE  GHŒUV  (76). 
Ils  étaient  enchantés  dans  ces  beUes  retraites. 

COaiDOS  EX  BléllSE  (77). 

On  eut  peine,  à  les  arracher 

De  Tendroit  chaimant  où  vous  êtes. 

BOLASB),  §e  levant  avec  hoirenr. 
Où  suis-je  /  juate  ciel  î  pu  suisse  ?  malheureux  ! 

LE  GHOEUB. 

Demeurez,  et  voyez  nos  danses  et  nos  jeux  (78), 

SCÈNE  y. 

LES  PBÉCÉDEBS,  TERSANDRE. 
'     tEnSANDBE    (79). 

J'ai  va  partir  du  port  cette  reine  si  belle. 

nOLASO,  à^part. 
Angélique  est  partie  ! 

TERSAVDBE. 

Et  Médor  avec  ell<>. 
Elle  en  fiait  un  grand  roi  :  c'est  son  unique  soin. 

BOLArd,  à  part. 
Us  sont  partis  ensemble! 

TEBSASDBE,  aux  bergers. 

Jls  sont  déjà  bien  loin.  (80) 


ACTE  111,  SCÈNE  V.  i^ 

BO&AKJE),  à  part. 
Us  se  sont  dérobés  tous  deux  â  ma  veugeaoce  ! 

TEBSAHDBB^  aux  bergers. 
Angélique  a  voulu  passer  noire  espérance. 
Voyez  ce  bracelet. 

BOLARD ,  à  part. 
Que  vois-je  infortuné! 
J'ai  fait  mettre  en  se»  mains  ce  pnx  de  iboh  courage  ! 
De  mon  fidèle  amour  c'esi  le  précieux  gage. 

TEBSARDBE,  ftux  Itergers. 
Pour  le  prix  de  nos  soins-,. eBe  boos  l'a  donné. 

BO&ABD. 

Ciel! 

TBBSAHDBB  (8l). 

Quel  est  ce  guerrier?  Il  menace ,  il  soupire  ! 
qobidIon. 
Nous  l'avons  trouvé  dans  ces  Keux. 
bélise. 
Le  trouble  de  son  cœur  se  montre  dans  ses  yeux.  (82) 
tebsasdbe. 
Son  cœur  soufli'e  un  amoureux  martyre. 
Je  suis  touché  de  ses  douleurs. 

bélise. 
Quels  teiribles  regards? 

BOX.AND. 

La  perfide! 

TEnsANDBE, 

1)  murmuic:  1 


( 


«48  ROLAND. 

coniooN. 
Il  frémît. 

BÉLISE. 

Il  répand  des  pleurs. 

nOLARD. 

Tant  de  sennen&i..  afai  la  pvjure! 

TEBSAHDRE. 

Ve  rabandoQDOofi  pas  dans  un  ckagrîn  st  noir. 

BOLARD. 

Ellej^t  de  mon  désespoir. 
56  raimais  d'an  amour  si  tendit ,  «i  fidèle! 

TEBSANDRE. 

Ses  regards  sont  plus  doux. 

COniDOI!!. 

Il  est  moins  agiié. 

nOLAUD. 

J'ai  cru  vivre  heureux  avec  elle  ! 
Hélas!  queUe  félicité! 

TERSASDBE, 

Non,  J9  n'en  doute  poîqt  :  c'est  l'amour  <|ui  le  blesse. 

BALISE. 

L'Amou»  peut-il  causer  cette  sombre  tristesse  (831)  1 

COniDON. 

Son  trouble  est  i^aîsé^ 

TEBSANDRE. 

J'espère  qu'à  la  fin 
Nous  adoucirons  son  chagrin. 
Bénisàons'l'amour  d'Angélique , 
Bénissons  l'amour  de  Médor. 
Dans  le  brillant  séjour  d'une  cour  magnifique ,    ^ 


ACTE  m,  SCÈNE  VI.  ;i49 

Puissent  ils ,  sar  un  trdne  d'or , 
S'aimer  comme  ils  s'aimaient  clans  ce  séjour  ru$t!quc« 

LG   CBGEUB. 

Bénissons  l'amour  d'Angélique , 
]3énissons  l'amour  de  Médor. 

.     BOLABD. 

Taisex-Yous ,  malbeni<eux.  Osenez-Fous  Sans  cesse 
Percer  mon  triste  coeur  des  plus  sensibles  cou{>s2 
Malheureux ,  Uiisez^vous. 
Bendez  grâce  ù  votre  bassesse , 
Qui  vous  dérobe  à  mon  courroux. 
t£  cuŒun. 
Fuyons  tous ,  Fuyons  tous ,  etc. 

SCÈNE  yi. 

ROLAND,  seul. 

Je  suis  trahi.  Ciel  !  qui  l'aurait  pu  croire  l 
O  ciel  \  je  suis  trahi  par  l'ingrate  beauté , 

Pour  qui  l'Amour  m'a  fait  trahir  la  Gloire  î 

O  doux  espoir  dont  j'étais  enchanté  ^ 
Dans  quel  abîme  aflreia  m'as-tu  précipite  ?. 

Témoins  d'une  odieuse  flamme , 
Vous  avez  trop  blessé  mes  yeux, 
Que  tout  ressente  dans  ces  lieu^ , 
L'horreur  qui*  règne  dans  mon  ame. 

(  Boland  brise  les  intcriptloiM  ,  détache  les  rochers  de  la 
grotte,  déracine  les  arbres,  et  retombe  dans  l'accabla» 
Ki«nt. } 

x3. 


l5o  ROLASD. 

Ali!  jetais  drtccodq  dans  hnàtàal 
Faoi^L  encor  qoe  rAmoar  me  pooanrae? 
Ce  Set  n'est  plus  qa'on  rain  ùrdeaa 
Pour  une  ombre  plaintÏTe. 

(  n  jette  soD  épée.) 
Quel  gooflre  s'ett  ouvert!  qu'est-ce  que  j'aperçoi? 
Qoelle  Toix  fooèbre  s'écrie  ? 
L00  cniBfS  amèot  contre  noi 
Vm  iiBpift>ydM(0  fvic. 
Barbare  !  ta  me  reaè»  fe  joor  ! 
Qae  prétends-m?  parle....  O  supplice  kmrible  î 
Je  dois  montrer  im  etenipie  tenôble 
Des  tounnens  âSm  taaostm  amour. 
(La  fympbonie  annonce  farrivée  de  Lo^sftUe.  ) 

SCÈNE  VII.'  (84) 

LOGISTILLE,  ROLAND. 

LOOlSTIIiLE,  suroQ-ehar. 
»  Amouh!  cruel  amour  !  voilà  donc  ton  ouvrage. 
»  Invincible  Roland,  queUe  erreur  t'a  surpris? 

»  Rendons  le  calme  à  ses  esgénSê  ; 
»  Et  par  un  nouveau  charme  ;  enflammons  Le  cours^ 

»  De  ce  héros  que  je  chéiris.  » 


'ACTE  m,  SCÈNE  vm.  i5i 

«SCÈNE  VIII. 

'  Le  théâtre  change  jet  représente  un  camp 

»  LOGlSTlLLEjRaLAWDjtronpesde  ciTevaliers 

et  de  DAMES  FRANÇAISES. 
»  LOGISTIZ.LE,  ET  LE  CHOEUB. 

RotAiiD ,  courez  aux  aimes. 
Que  la  Gloire  a  de  charmes! 

LES  CHEVALIEBS. 

»  Guidez  nos  pas ,  volez  à  de  nouveaux  exploits. 

LOGISTILLE. 

Roland ,  courez  aux  armes. 

TOUT  LE  CBOEGB. 

Roland  ^  eonrez  aux  aimes^ 
Que  la  Gloire  a  de  charmes! 
»  Guidez  nos  pas ,  volez  à  de  nouveaux  exploits* 

BOLASO. 

»  Queb  sons  éclatans  !  quelle  voix  f 
»  Dans  quel  état  je  me  revois  I 
))  (  Il  reprend  son  épée ,  son  casque  et  son  bouclier.  ) 
»  Mes  armes  !  mes  armes  ! 
»  Quel  supplice  pour  moi , 
»  De  survivre  â  ma  gloire  ! 

LE  CHGEUB. 

»  Le  chemin  de  la  Gloire  ! 
»  S'ouvre  encor  devant  toi. 

LOGISTILLE. 

.  »  Suis-moi ,  Roland ,  suis-moi. 

LOGISTILLE  ET  LE   CHCEUB. 

»  Au  champ  de  la  Victoire  , 


ftSa   ROLAND.  ACTE  III,  SCÈNE  VIII. 

»  Viens  la  rendre  2k  ton  roi. 

DOLAmD. 

»  Fol  Amour ,  loin  de  moi. 
»  3e  ne  vois  que  la  Gloire , 
»  Ma  patrie  et  mco  roi. 

I.OGISTILI.E. 

»  Suis-moi,  Roland,  suis-moi. 

LE    CHGEUn. 

»  Ne  vois  plus  que  la  Gloire , 
»  Ta  patrie  et  ton  roi. 

BDLASn. 

»  9e  De  vois  que  la  Gloire  , 

»  Ma  patrie  et  mon  roi. 

))(LiBS  chevaliers  et  les  dames  se  félicitent  de  voir  que  Roland 

leur  est  rebdu  ;  ils  le  ramènent  en  triomphe.  ) 

(La  danse  termine  le  spectacle. > 


riîf  DE  R0LA5D. 


yARIANTES  DE  ROLAND. 
ACTE  PREMIER. 

(i)  ANGÉLIQUE,  «eûle. 

(a)  UuEiQUÉPOis  la  Fîçrté  dcroeare  la  plas  forte, 
Quelquefois  FAi?aour  est  vainqueur  ; 
De  moment  en  moment  une  guerre  mortelle  ^ 

Dan^  mon  ame  se  renouvelle. 


(3)  Funeste  Amour,  Fierté  cruelle, 
Ne  cesserez-vous  point  de  déchirer  mon  cœur?, 

(4)  SCÈNE  II. 

^        ANGÉLIQUE,  TÉMIRE. 

Ta  MI  HE. 

(5)  Vous  avex  peu  d'impatience , 
De  voir  le  ricbe  don  qu'on  va  vous  présenter. 
C'est  un  prix  que  Roland  vous  a  fait  apporter 
Des  rivages  lointains  où  le  jour  prend  naissance. 
Pour  vous ,  par  mille  exploits ,  il  a  su  Tacheter , 

Serez- vous  sans  rcconnaiisance  ? 
Faut-il  que  tant  d'amour  ne  puisse  mériter 

Qu'une  étemelle  indiflKrence  ? 


J 


i54  VARIANTES  DE  ROLAND. 

j(6)  Pourriez-yous  oublier  l'ardeur  dont  H  vous  aime  ? 


(7>  Je  9oage ,  autant  qhe  je  te  puis , 
A  sa  rare  valeur,  â  son  amour  extrême  : 


fi)  Roland  renvetsè  tout  par  l'efiort  de  ses  aimes. 

(9)   T^MIBB. 

Blédor! 

Ma  fiûbleflse  t'étonoe. 
Ne  me  dègnisc  rien ,  parle ,  je  te  l'ordonne , 
Représente  à  mon  cceur  la  honte  de  Son  choix. 

rÉMIBE. 

Médor  d'un  sang  obscur  a  reçu  la  lumière. 
Pourrait-il  être  aimé  d'une  reine  si  fière?. 

D'une  reine  qui  sous  ses  lois 
Ne  voit  qu'avec  m^s  les  héros  et  les  rois. 


{lo)  La  piti^,  pour  Blédor  a  su  trop  m^attendrir. 
Ma  funeste  langueur  s'augmentait  à  mesur6 
Qu'il  guérissait  da  sa  blessure. 


(il)  Il  n'importe ,  il  le  faut ,  qu'il  parte ,  qu'il  me  quitte... 


(la)  SCÈNE  m. 

(i3)  An!  quel  tourment 
De  garder  ^cn  aimant , 


ACTE   ï,  SCÈNE  IV.  i55 

Un  étemel  silence  ! 

.Ah  !  quel  toonBent 
D'aimer  sans  espérance! 

,(i4)  Malheureux  que  je  suis,  j'aime  un  objet  charmant, 

(i5)  Ai-je  oublié  son  rang  et  ma  naissance, 
,{i6)  J'aime  une  reine  !  hélas  !  par  quel  enchantement, 
(17)  Et  combien  entre  nous  le  soit  aietde  distance?. 

(18)  Je  dois  cacher  un  amour  qui  l'offense  ; 
Il  faut  me  faire ,  à  tout  moiAent , 
Une  cruelle  violence. 

(19)  SCÈNE  IV. 

(20)  Et  tout  absent  qu'il  est,  il  vous  le  fait  connaître. 


(21)  l^lns  son  amour  éclate,  et  plus  il  m'importune^ 
J'ai  honte  de  lui  trop  devoir. 
Non ,  n'enviez  point  sa  fortune. 


(22)  Heureux!  si  je  la  perds  pour  vous. 

(23)  Laissons  des  discours  superflus. 
Parlez. 

vtiDon, 
Je  ne  vous  verrai  plus  ! 


(24)  Vivez ,  conservez  mon  ouvrage , 


Ii56        VARIANTES  DE  ROLAND. 
Songez  que  c'est  me  faire  outrage 
De  voir  vos  jours  avec  mépris , 
Après  le  soin  que  j'en  ai  pris 

MÏDOB. 

.Vous  voulex  <yie  je  vive,  et  votre  arrêt  me  cbasse , 
Mes  jours  k  vous  servir  ne  sont  pas  réservés 

Eh  î  que  vonlet-vous  que  je  fiisse 
De  ces  jours  malhieureux  que  vous  m'avez  sauvés?. 

Puissie^vous ,  loin  de  moi ,  jouir  d'un  90rt  paisible  ! 

MBDOB. 

Loin  de  vous  !  ciel  !  est-il  possible  ?. 

Ah  !  fallait-il  me  secourir? 

Que  ne  me  laissiez-vous  mourir? 

• 

(a6)  SCÈNE  V, 

(a6)  Cowçois-iu  bien  Teffort  extrême 
Que  pour  bannir  Médor  je  me  fais  àujourd^ui  ? 


K27)  Ciel!  quel  est  mon  malheur  ! 


(28)  Je  dois  lïiourir  de  honte  ; 
S'il  feut  Tarracher  de  mon  eœur , 
Je  mourrai  de  douleur. 


(29)  C'est  l'unique  espérance 
Des  coeurs  qui  veulent  fuir  les  fimestes  amours. 


ACTE  I,  SCENE.VI.  i57 

(3o)  SCÈNE  VI, 

(3i)  TmoMPHEz ,  charmante  reine , 

Triomphez  des  pins  grands  coeurs. 
Ce  n'est  qu'aux  plus  fameux  vainqueurs 
Qu'il  est  permis  de  porter  votre  chaîne. 

(32)    DEUX   ISSULAIBES. 

Dans  DOS  climats 
Sans  chagrin  l'on  soupire , 
L'Amour  dont  nous  suivons  l'empire 
N'a  que  des  appas. 
Fuyons  les  belles 
Craelles , 
Craignons  leur  pouvoir , 
Que  sert-il  de  les  voir  ? 
'Ah  !  gardons-nous  d'un  amour  sans  espoir. 
Quelle  peine  î 
Quel  tournîent! 
D'être  amant 
D'nhe  inhumaine! 
Si  nous  devenons  amoureux , 
Aimons  pour  être  heureux. 

Sans  les  Amours , 
On  s'ennuîrait  de  vivre  ; 
Mais  nous  devons  crsser  de  suivre 
Qui  nous  fuit  toujours. 

Fuyons  les  belles ,  etc. 


FIN    DU    PnCUIEB   ACTE. 

Grands  opéras.  2,  i4 


«M»^»^^'^»^^'^»^^'^»^'-^»^»^'^"»'-^»^^  ^^»l»>^«^»^^rf»^i^K^ 


ACTE  SECOND. 


(35)  SCÈNE  I. 
(34)TÊMIBE. 

TJr  charme  dangereux  dans  ces  bois  tous  attire, 

Il  faut  en  détourner  vos  pas  ; 
L'Amour  règne  en  ces  lieux ,  évitez  ses  appas , 
'     Heureux  qui  peut  fuir  son  empire  ! 

kTUGihiqVE. 

Je  porte  au  fond  du  coeur  mon  fimeste  martyre. 
Hélas!  où  pnis-)c  aller?  où  puis-je  fuir,  hélas! 
OÙ  TAmour  ne  me  suive  i>as  ? 


(35)  TÉMIUE. 

Vous,  devez  vous  guérir  du  mal  qui  vous  possède  ; 
N'ayez  rien  à  vous  reprocher. 
Vous  en  trouverez  le  remède , 
Si  vous  le. voulez  bien  chercher. 


(36)  Par  ce  remède  aflreux  je  ne  veux  point  guérir. 

(37)   TÉMIIWE. 

Non,  on  ne  peut  trop  plaindre , 
Un  cœur  qui  se  laisse  enflammer  : 


ACTE  11,  SCÈNE  IL  i59 

Ah  !  qael  tounnent  d'aimer  \ 
Qae  le  feu  d'amour  est  â  craindre  ! 

Qu'il  est  aisé  de  Tallmner! 
Qu'il  est  malaisé  de  l'éteindre  ! 

;(38)  AlSGéLIQUE. 

(39)  Angéliq[ue  met  dans  ta  boncBe  un  anneau  dont  la  puis- 
sance magique  la  rend  invisilile. 

(40)  SCÈNE  n.     » 

1(4 1)  Quel  plaisir  frouves-vons  dans  mes  trbtes  regrets  ? 
(4^)  Quel  barbare  plaisir  trouve^Toas  dans  ma  peine 


{43)  Quelle  ctnanté!  quel  mépris, 

(44)  tÉMlBE. 

Peut-on  vous  mépriser  sans  crime  ? 
La  valeur  vous  a  fait  un  mérite  éclatant  ; 
Si  vous  n'aviez  jamais  voulu  que  de  l'estime , 

Quel  mortel  serait  plus  content? 


(45)' Eh!  que  «e  sért-il  aujourd'hui 
D'avoir  les  dons  du  ciel,  qu'eut  autrefois  Achille? 


(/^6)  Le  dépit  éteint  ma  flamme  : 

Heureuse  la  cruauté 

Qui  rend  la  paix  h  mon  ame  ! 

Heureuse  la  cruauté 

Qui  me  rend  la  liberté! 


(xGo  VARIANTES  DE  ROLANa 

(47)  Lâche]  ne  puis  je  rompre  aoe  houtease  chaîne? 
Qqe  je  sens  de  troubles  secrets! 

(48)  SCENE  ni 

i^O)  ^  àois-ie  aller?...  je  tous  revoi. 

▲  BGtLIQDE. 

Je  ne  me  cache  pas  poar  toi. 
.(5o)  An  moins  j'y  veux  fooger  sans  cesse. 
(5i)  SCÈNE  IV. 

(52)  AoBÉABLEs  retraites, 
L'Amonr  qni  vous  a  fiiites 

.Vous  destine  aux  amans  contents. 
Je  trouble  vos  douceurs  secrètes  : 
Mais  dans  mon  désespoir,  mes  plaintes  indisctèlet 
Ne  TOUS  troubleront  pas  loug-tems^ 

(53)  Fontaine ,  qui  d'un  eau  si  pure 
Arrosez  ces  brillantes  fleurs. 

En  vain ,  votre  charmant  murmure 
Flatte  le  tourment  que  j'endure; 
Rien  né  peut  enchanter  mes  mortelles  douleurs. 

(54)  O  ciel  !  qu'entends-)e! 

.  ARGiLIQUE. 

^  Il  n'est  phis  tems 

Que  nous  craignions  tous  deux  de  nous  en  trop  apprendre: 
Nous  n'en  disons  que  trop;  Mcdor,  je  vous  cutouds, 
Et  je  vous  permets  de  m'eutendre. 

.UéDOIL 

A  vos  pieds... 


ACTE  II,  SCÈNE  V.  .i6i' 

(55)  Levez-vous,  j'ai  droit  de  faire  un  roi. 
Je  veux  unir,  sous  même  lo*. 

(56)  Ma  gloire  murmure  en  ce  jour, 
Je  vois  mon  sort  trop  au-dessus  du  vôtre  ; 

Mais  qui  peut  empéclier  l'Amour 
lyunir  deux  cœurs  qu'il  a  fa  ils  l'un  pour  l'autre? 

MÉDOU. 

Tëmoina  du  désespoir. dont  mon  coenr  fut  pressé, 
liienx  où  la  mort  fut  ïnon  unique  attente , 
Qui  Taurait  dit  l  qui  TeAt  jamais  pensé 
Que  vous  seriez  témoins  du  bonheur  qui  m'eucbantsl 

(5^)  SCÈNE  V. 

L'AMOUR;  troupe  d'^^mours,  troupe  de  sihèhe's  , 
troupe  DE  DIEUX  des  eaux,  troupe  de  vymphes, 
et  de  SYLVAiRs,  troupe  d'amâss  enchantés,  et 
d'amastes  enclpntées. 

CHGEOB  DES  AMOUlts  qui  sont  autour  de  Id  Ibntaine. 
AiMEi ,  aimez-vous. 

A90ELIQUE,  M£DOIt,ETLES  CHOECHS. 

Aimons,  aimons-nous. 

CHOEUR  DES   AMOURS. 

L'Amour  vous  appelle. 
Que  sa  flamme  est  belle  ! 
L'Amour  vous  appelle  tous  ; 
Aimez ,  aimez>vous. 

AUGihlQVtt  MÉDOR,  ET  LES  CHCEUAS. 

L'Amour  nous  appelle. 
Que  sa  flamme  est  belk  ! 
L'Amour  nous  appelle  lous^ 

114* 


il6a  VARlAHTKb  ujc  n^juawi/. 

Aimons ,  aimons^noos. 

CHOEUBDES  ABIOUnS^ 

Il  punit  un  cœur  rebelle 
On  n'évite  point  ses  coups. 

ASGÉLIQUE,  MÉDOn,  ET  LES  CHCEURS. 

Quel  bien  est  plus  doux 
Qu'un  amour  Édèle?. 

CHQBUn  DES  ÀHOUBS. 

Aimez ,  aimez-vous. 

ASOÉIIQUE,  M^DOBjET  LES  CHŒtBS. 

Aimons  y  aimons-nous. 

L'Amour  noos  appelle.  ' 

Que  sa  flamme  est  beUe  l 

L'Amour  nous  appelle  tous. 

Aimons,  aimons-nous. 

(  Le*  amans  enchantés  et  les  amantes  enchantées  dansenf  au- 
tour de  Médor  et  d»Aagélîquc.) 

DEUX  AMANITES  enchantées. 

Qui  goûte  de  ces  eaux  ne  peut  plus  se  défendre 

De  suivre  d'amoureuses  lois  : 

Goûtons  en  mille  et  mille  fois  ; 
Quand  on  prend  de  l'amour ,  on  n'en  saurait  trop  prendre. 

LE  PETIT  CHOEUB. 

Que  pour  jamais  un  noeud  charmant  nous  lie. 

LE   l&BAND   CB06UB. 

Tendres  Amours, 
Enchantez-nous  toujours. 
Triste  raison,  nous  fuyons  ton  secours. 

LE   PETIT  CBCBVB. 

O  douce  vie , 
Digne  d'envie! 


ACTE  II,  SCÈNE  V,   '  i63 

lE   OBAITD    CnCETJR. 

O  jours  heureux ,  que  Ton  vous  trouve  courts  1 

LE   PETIT    CHOeUB. 

Sans  rien  aimer,  comment  peut-on  vivre? 

tE   GBAHD    GHCeUB. 

Que  de  plaisirs ,  que  de  jeux  vont  suivre  ! 
tE  PETIT  CHceuB. 
Tendres  Amours, 
Enchantez^nous  toujours. 
Fermons  nos  cœurs  &  des  fisomnes  nouvelles. 

LE   GBÀSD   CHCEUB. 

Gardons-nous  bien  d'éteindre  un  fed  si  beau. 

LE   PETIT    CHCEUB. 

Vivons  heureux  dans  des  chaînes  si  belles. 

LE   GBASD    CBCeUB. 

Portons  nos  fers  jusque  dans  le  tombeai; , 

LE   PETIT    CHCEUB. 

o  douce  vie, 
Digne  d'envie  î 

LE  GQASD    CHCEUB. 

Tendres  Amours, 
Enchanlez-nous  toujours. 
(T.cs  amans  enrhrinti^s,  et  les  amantes  enchantées  accompa- 
gnent en  dansant,  Médor  et   AngëliqueV.   l'Amour  et  les 
Amours  volent,  «t  leur  servent  de  guides.) 


FIN   DU    SECOSD    ACTE. 


(58)  ACTE  TROISIÈME. 

Le  théâtre  change  et  représente  un  port  de  mer. 


SCÈNE  I. 

MÉDOR,  TÊMIRE. 

BlÉDOn. 

JN  os  ;  je  n*cntends  vos  conseils  qn'avec  peine  : 
Pour  nuire  à  mon  amour ,  vous  avez  tout  tenté. 

TÊMIRE.  * 

Vos  Jours  sont  en  péril ,  ils  sont  chers  â  ma  reine , 

Ne  doutez  point  de  ma  tidéllté.  > 
Roland  est  dans  ces  lieux ,  c'est  un  rival  terrible , 

Et  votre  perte  est  infaillible 
Si  vous  vous  exposez  à  son  &tal  courroux, 

MéooR. 
Un  malheureux  doit  voir  le  trépas  sans  alarmes. 

TéMIRE. 

Votre  bonheur  fera  mille  jaloux , 
Une  tière  beauté  vous  a  rendu  les  annes , 
Vos  deux  cœurs  sont  unis  par  les  nœuds  les  plus  doui.] 
Ah  !  si  la  vie  est  sans  appas  pour  vous , 
Pour  qui  peut -elle  avoir  des  charmes  ? 
Regardez  le  glorieux  sort 
Que  la  reine  avec  vous  partage» 
Ses  plus  zélés  sujets  Tattendaient  dons  ce  port  ;  « 


ACTE  m,  SCÈNE  I.  ii65 

Avant  qae  d'en  psutir,  son  ordre  les  engage 

A  vous  rendre  un  pompeux  hommage! 
Commq  leur  souverain  ils  vous  vont  recevoir, 
uénon. 
La  reintf  m'a  quitté ,  Roland  e^st  avec  elle. 

TÉMIBE, 

Il  Ta  verra  fiëre ,  et  cruelle. 

V  HI^DOB. 

N'importe,  c'est  toujours  la  voir, 
Mon  inquiétude  est  mortelle  : 
Eh  î  ne  craint-elle  point  Roland  au  désespoir  l 

xiMIBE. 

Elle  le  craint  pour  vous ,  c'est  son  unique  envie 
De  mettre  ,  en  Téloiguant,  vos  jours  eu  sûreté. 

MénoB. 

S'il  &ut  que  ma  félicité 
Par  mon  rival  me  soit  ravie , 

Cest  une  cruauté 

D'avoir  sob  de  ma  vie. 

TÉMIBE. 

De  ces  sombres  chagrins ,  il  faut  vous  délivrer. 

uénoB. 

Je  n'osais  pa^  espérer 
Le  bien  que  l'amour  me  donne  ; 
Un  si  grand  bonheui>  m'jétonne  . 
Et  j'ai  peine  h  m'assurer 
Qu'il  paisse  long-tems  durer. 

T^MIBE. 

Betirons-nons ,  Roland  s'avance. 
S'il  a  de  votre  amour  la  mobdre  connaissance , 
Rieo  oe  tous  pouria  secourir. 


/ 


Ii66  VARIANTES  DE  ROLAN  D. 

BIÉDOI. 

Je  le  vecix  observer ,  en  dussé-jc  périr, 

(Hëdorse  tient  à  l'écart,  et  écoute  R(rfaiid  et  AngéKqne.) 

(59)  SCÈNE  IL 
(60)  Puis  je  vous  sers,  plus  vous  me  méprisez  : 

AVGSLZQUE. 

{61  )  Je  n'ai  point  perdu  la  mémoire 

De  ce  que  je  vous  dois. 
.Vous  seriez  délivré  du  trouble  où  je  vous  vois , 

Si  vobs  aviez  voulu  me  croire. 

Vous  fe  savez ,  c'est  voB^é  moi 
Qu'un  si  grand  cœur  s'obstine  à  languir  souS  ma  kn , 
J'ai  Élit  ce  que  j'ai  pu  pour  le  rendre  à  la  gloire. 


(62)  ASGttiqvt. 
Hélas  I 

SOLARD. 

Dans  ce  soupir  quelle  part  puis-je  prendre  ? 

Peut-être  un  soupir  si  tendre 

S'adresse  â  quelqu'aotre  amant  : 

Me  le  faites-vous  entendre 

Pour  redoubler  mon  tourment  ?. 

Inhumame ,  ah  !  s'il  est  possible 
Qu'au  mépris  d'un  amour  qui  n'eut  jamais  d'égal , 
Pour  un  antre  que  moi  vous  deveniez  sensible , 

Tremblez  pour  mon  heureux  rival. 

(63)  Si  je  voulais  vous  fuir,  q^à  pocuraîl  m'arréler? 
Je  voua  9à  défit,  ùât  connaître 
Qu'il  m'est  aisé  dis  disfeiaitre        , 


ACTE  III,  SCÈNE  II.  idj 

lèùsOi  tegards  nnportans  qae  je  veox  éviter. 

iOA)  QQc  ^  (Niis^e  TOUS  (nk  encore  ?i 

BOtAND. 

Ponrqaoi  craindre  qui  vous  adore  ?, 

ASGIÉLIQITE. 

Hélas!  pourquoi  m'aime^vous  tant?j 

Un  biéros  indomptable 

N'est  qae  trop  redoutable 
Avec  on  amour  si  constant, 

B0LA21D. 

Ciel  !  à  ciel  !  c'est  poof  moi  qu'Angélique  soupire  ! 

ASGÉLIQUE. 

Tous  me  contraignez  d'en  trop  dire. 

BOLAND. 

y  oos  m'aimez  \ 

AaaiLiQUE. 
Je  ne  puis  l'avouer  qu'à  regret. 
Votre  constance  est  triomphante , 
N'en  Élites  point  un  éclat  indiscret , 

Epargnez  ma  fierté  mourante  ; 
Contentez-vous  d'un  triompbe  secret. 

BOLAND. 

En  des  lieux  écartés,  dans  une  paix  profonde. 
Allons  jouir  du  sort  qui  va  combler  nos  rceux. 

Que  deux  cœurs  unis  sont  heureux 

D'oublier  le  reste  du  monde  ! 

AHOÉLIQUE. 

Laissez-moi  renvoyer  des  peuples  empressés 
Dont  nous  serions  embanassés  ; 


il68  VARIANTES  DS  ROLAND. 

Attendeft-moi  plus  loin ,  j'irai  partout  vous  suivre 
C'est  pour  vous  seul  que  je  veux  vivre. 

.    SCÈNE  III. 

ANGÉLIQUE,  MÊDOR,  TÉMIRE. 

MéDon. 
Ah  !  je  sonflre  un  tourment  plus  £roel  que  la  mort  ! 

TÉMIRE. 

Où  voulei-voûs  aller?  que  pouvez-vous  pcétendre  ?. 

ÀSGÉLIQUE. 

Laisse-moi  calmer  sou  transport  : 
Vois ,  si  Roland  ne  peut  point  nous  entendre. 
(Témire  va^du  côté  où^Roland  est  passé.) 

SCÈNE  IV. 
ANGÉLIQUE,  MÉDOR. 

MED  OR. 

Se  peut-il  qu'h  ses  vœux  vous  oyez  répondu  7. 

ANGÉLIQUE. 

Voulez-vous  m'offenser ,  quand  vous  devez  me  plaindre  l 
Pour  léblouir  Roland ,  je  suis  réduite  k  feindre  ; 
Il  le  faut  éloigner,  Ou  vous  êtes  perdu. 

ME  DUR. 

Vous  le  suivrez?  non ,  non,  q^ue  plutôt  je  péris^  f 

ANGÉLIQUE. 

Hélas  !  tout  le  pouvoir  humain 
Contre  lui  s'armerait  en  vain  ; 
Ne  nous  armons  que  d'artiiicc. 
Médor ,  je  tremble  pour  vos  jours , 


ACTE   III,  SCÈNE  IV.  ^lOg 

*     '     Ils  sont  dans  an  péril  extr^e  : 
A  quoi  n*a-t-on  pas  recours 
Pour  sauver  ce  que  Ton  aime  }, 

HÉDOB. 

Rolaud  va  m'ôter 
L'objet  que  j'adore  ; 
Qu'ai-jc  à  redouter 
Que  de  vivte  encore  ? 

âlIGÉLIQtJB. 

C'est  k  vous  que  mon  cœur ,  pour  jamais  s'est  donné  ; 

le  ne  rendrai  Roland  que  trop  infortuné  : 

L'amour  lui  vendra  cher  mie  vaine  espérance. 

Je  puis ,  par  cet  anneau ,  disparaître  à  ses  yeux  ; 

Bientôt ,  vous  me  verrez  ;  bientôt ,  loin  de  ces  lieux , 

lïos  Bdèles  amours  seront  en  assurance  ; 

Je  veux  mettre  i  en  vos  mains ,  ma  suprême  puissance. 

ENSEMBLE. 

Je  ne  veux  que  votre  cœur ,' 

Cest  l'unique  empire 

Pour  qui  je  soupire , 
Je  ne  veux  que  votre  cteur , 
C'est  assez  pour  mon  bonheur. 

MéDOtl. 

Vous  me  quittez ,  et  je  demeure 

Troublé  du  chagrin  le  plus  noir  ; 
Ma  vie  est  attachée  au  plaisir  de  vous  voir  ; 

Ne  vaut-il  pas  mieux  que  je  meure 
Par  la  main  de  Roland  que  par  mon  désespoir  ?. 

ANGÉLIQUE. 

Vivez  pour  moi ,  qu'il  vous  souvienne 
Que  votre  destinée  est  unie  à  la  mienne , 
Ma  mort  suivrait  votre  trépas  : 
Evitons  un  destin  tragique  ; 
Grands  Op<}rai.  2.  fl5 


(tyo  VARIANTES  DE  ROLAND. 

Mèdor  ne  Teut-il  pas 
Vivre  poar  Aogeliqoe  ?. 

MÉDOR. 

Si  je  ne  vivais  pas  pour  vous , 
Je  ne  pourrais  souffîir  la  vie. 

ARGiLIQVJE. 

Vivons ,  l'Amour  nous  y  convie  ; 

Réservons-nous 
Pour  nous  aimer  malgré  l'enyie  ; 

Réservons-nous 
Pour  vivre  heureux  loin  des  jaloux. 
Je  ne  pourrais  son&ir  la  vie , 
Si  je  ne  vivais  pas  pour  vous. 

MÉOOB. 

Vivons ,  l'Amour  nous  y  convie  , 
Réservons-nous 
Pour  un  amour  si  doux. 

EmSElIBLE. 

Vivons ,  TAmour  nous  y  convie , 
Réservons-nous 
Pour  un  amour  si  doux. 

SCÈNE  V. 

Troupe  de   peuples  de  Catay,  sniets  n'ARGiLiQUE, 
AN<ÎÊLIQUE,  MÉDOR. 

ANGÉLIQUE,  parlant  à  ses  SU)  els. 

Vous ,  qui  voulez  fïtire  paraître 
Le  zèle  ardent  que  vous  avez  pour  moi , 
Reconnaissez  Médor  pour  votre  maître  ^ 

Rendez  hommage  â  votre  roi. 

(  Angélique  va  retrouver  Roland ,  pour  l»éloigner  du  port  où 
elle  veut  venir  s^embarquer  avec  Mëéor. 


ACTE  m,  SCÈNE  VI.  171' 

SCÈNE  VI. 

Les  peuples  ^e  Catay,  sujets  d'Angélique,  rendent  hommage 
àMëdor;  ils  rélèvent  sur  un  trône,  et  témoignent  par 
leurs  chants  et  par  leurs  danses  la  joie  qu'ils  oat  de  le 
reconnaître  pour  leur  souverain. 

LE    CHOBUB. 

C'est  Mé^or  qiï'une  reine  si  belle 
A  dioisi  pourtégner  avec  elle. 
Est-il  un  morlel  an}oard'biii 
Plus  heureux  que  lui. 

us   DES   SUJETS   d'AETGÉLIQU  C. 

Malgré  Torgueil  du  grand  nom  de  reine , 

Elle  se  rend ,  et  l'Amour  l'enchaîne  ; 
De  mille  et  mifle  amans  son  cceur  s'était  sauvé  ; 
Pour  l'aimable  Médor  il  était  réservé. 

URB   DES   SUIVAHTES   d'ASGÉLIQUE. 

Trop  heureux  un  amant  qui  s'exempte 
Des  chagrins  d'une  ennuyeuse  attente  I 

Que  l'amour,  pour  Médor,  a  Eût  d'aimables  noeuds  ! 

  peine  est-il  amant ,  qu'il  est  amant  heureux. 

LE    CHGEUB. 

Ses  rivaux  n'ont  plus  rien  à  prétendre , 
Que  de  plaintes  se  vont  faire  entendre  ! 

Au  premier  bruit  d^ln  choix  si  doux ,         , 
Que  de  n^is  seront  jaloux  ! 
Nous  venons  tous 
Vous  présenter  notre  hommage  : 

Régner  sur  nous , 
Est  votre  moindre  avantage. 
L'Amour  donne  un  bonheur  qui  vaut  mieux  mille  fois 
Que  la  pompe  qui  suit  les  plus  superbes  rois. 
un  des  sujets  d'asgélxque. 
Angélique  n'est  plus  insensible , 


17»  VARIANTES  DE  ROLAND. 

Sa  Eert  se  CTOjait  invincibla  r 
Elle  fuyait  l'Amour ,  et  le  fuirait  encor , 
Sans  le  charme  puissant  des  regards  de  Médor. 
LE  chÔeub. 
Heureux  Médor  î  quelle  gloire 

D'avoir  remporté  , 

Uoe  entière  victoire 
Sur  tant  de  fierté  ! 
^  Quel  bonbeur  est  plus  rare  ! 

Que  vos  feux  son£  beaux  ! 
Que  l'Amour  vou?  prépare 

De  plaisirs  nouveaux  ! 
C'est  pour  vous^que  sont  faits 
Les  plus  doux  de  ses  trai^. 

UHB   DES   SUIVANTES   d'ANGI^LIQC  F. 

Un  cœur  si  fier  est  à  son  tour , 

Sensible  et  tendre  : 
Médor  l'obtient ,  quand  son  amour 

N'osait  l'attendre. 
Mais  un  bonheur  qu'on  n'attend  pas 

N'en  a  que  plus  d'appas. 

LE    CHOEUB. 

Vpus  portez  une  riche  couronne , 

Un  ol^et  plein  d'attraits  vous  la  donne. 

*  un  DES    SUJETS   d'ASGÉLIQUE. 

Qu'il  est  doux  d'accorder  l'Amom*  et  la  Grandeur  l 
Quand  on  peut  les  unir ,  c'est  un  parfait  bonheur. 

USE   DBS    SUIVANTES  o'ANofeUQtJF. 

Tendres  cœurs  puissiezrvous  aimer  tranquillement  : 
Il  n'est  point  de  sort  plus  charmant. 
LE   CHoeun. 
Que  l'Amour,  en  tous  lieux,  vous  enchante. 
Qu'à  jamais  votre  ardeur  soit  constante. 
Oublie»  vos  grandeurs ,  plutôt  que  tos  amours , 


ACTE  III,  SCÈNE  VI.  173 

Votre  bonheur  dépend  de  vous  aimer  toajourg. 
Aimez,  régnez,  en  dépit  de  Tentie; 
Goûtez  let  biens  les  plas  doax  'de  la  vie  ; 
La  Fortunç  et  rAmonr ,  la  Gloire  et  les  Piaisics , 
Piiisseot'ils  à  jamais  combler  tons  vos  désirs  1 
Dans  la  pais ,  dans  la  gaeiyQ , 

Dans  tous  les  climats , 
Jusqu'au  bout  de  la  terre,  ' 
Nous  suivrons  vos  pas. 
Puisse  llienreux  Médor  être  un  des  pki9  grands  rob  ! 
Puisse-t-il  rendris  hfiureux  ceux  qui  suivront  les  lois  ! 


PIR   ou    THOlSlèMK   ACTE. 


»s. 


(65)  ACTE  QUATRIÈME. 


(66)    y  A ,  ton  soin  m'importune ,  Astolfe ,  loisse-raoi. 

ASTOLFE. 

Quel  ckarme  vous  retient  dans  ce  Heu  solitaire  ?. 

nOLAlilD. 

•Ami ,  )e  n'ai  point  pour  toi 
De  secret ,  ni  de  mystère. 

Angélique  ne  me  fuît  plus  : 
J'étais  content  de  voir  sa  rigueur  adoucie , 
Quand  nous  avons  trouvé  le  roi  de  Circassie , 

Et  le  superbe  Ferragus. 
Tous  deux  jaloux  de  mon  bonheur  extrême  , 
M'ont  abordé  les  armes  â  la  main  : 
^'allais  les  en  punir  ,  mais  la  beauté  que  j'aime , 
Par  son  anneau  magique ,  a  disparu  soudain. 

Mes  rivaux  Tout  suivie  en  vain  : 

Elle  avait  eu  soin  de  m'apprendre 

Le  chemin  qu'elle  voulait  prendre. 


(67)  Je  suis  venu  trop  tôt  m'y  rendre. 


(68)  L'objet  qui  m'enchante 
Ne  m'a  jamais  tanU  charmé  : 

Que  l'amour  s'augmente , 
Pat  le  plaisir  d'être  aimé  ? 


ACTE  IV.  175 

(69)  Venez  couroDner  votre  lêle 
Du  laurier  immortel  qui  vous  est  présenté^ 

ROLAND. 

Je  vois  rAmonr  qui  s'aj^réte 
  combler  raa  félicité  ; 

Je  vais  jouir  de  la  conquête 
D'un  cœur  qui  m'a  tast  coûté. 

ASTOLFE. 

L.e  grand  cœur  de  Roland  n'esi  fait  que  pour  la  gloire  , 

Peut-il  languir  dans  un  bonteux  repos  ? 
Triomphez  de  T Amour ,  il  n'est  point  de  victoire 

Qui  montre  mieux  la  vertu  d^uu  héros. 


(70)  Elle  s'arrêtera,  peot-^e, 
A  voir  danser ,  au  son  des  chahimeaux , 
Les  bergers  des  prochains  hameaux. 

(  Une'^.troupe  de  bergers  et  de  bergères,  prend  part  à  la  joie 
de  Coridon  et  de  Bélisç ,  qui  doivent  élre  mjirifis  le  lende- 
main ,  et  s'approche  de  la  grotte  en  damant  et  en  chantant. 
Roland  n'aperçoit  point  Angélique ,  et  va  la  chercher  dans 
les  lieux  d'alentour. 

1(7 1  )  Quand  on  vient  dans  ce  becage , 
Peut-on  s'empêcher  d'aimer? 
Que  l'Amour ,  sous  cet  ombrage , 
Sait  bientôt  nous  désarmer  ! 
Sans  efibrt  il  nous  engage 
Dans  les  noeuds  qu'il  veut  former. 
Quand  on  vient  dans  ce  bocage , 
Peut-on  s'empêcher  d'aimer?. 


Nuit  et  jour ,  par  leur  ramage , 
Leur  amour  veut  s'exprimer. 


Quand  il  pomrait  quitter  Angélique  pour  moi , 


^ 


B^O  VARIANTES  DE  ROLAND. 

Et  me  ùke  une  gntndft  ceine  ; 


(-a)  cowDOS. 

En  des  lieux  où  Médor  niourait  sans  assistance  , 

Angélique  adressa  ses  pas; 
EUb  sut  se  servir  d'jin  art ,  dont  la  puissance 

Garantit  -Médôr  du  trépas. 


(73)  COBIDOn. 


BÉLISE. 

Uf  se  som  donné ,  devant  nous , 
La  foi  de  mariage. 


(74)  BéLISt. 
(75)  COBIDOir. 


(76)   COBIOO». 

On  n/a  promis  cette  belle  bergère  ; 
fSoootw  notre  noce ,  on  la  fera  demain. 

BOlASn. 

OÙ  vont^ils  ces  amans  2" 

BéLlSE. 

Us  <^  prié  mon  père 
De  les  conduire  au  pott  le  plus  prochain. 
Le  Toici.  Demeurez  |  si  vous  voulez  m'en  croire , 
Vous  àppreodcez  de  lui  le  reste  de  rhistoke,. 


(7  7)  Allez ,  iaissez^notiâ ,  soins  fâcheux , 
SleSgnez-TQUs  de  nos  paisibles  jeax  : 
Nous  possédons  on  -bien  inestimable 
Qui  combleta  pos  vœux. 

Laissez  couler  nos- jours  heureux 

Dans  un  loisir  doux  et  durable. 

CORIDOII,  BÉtISE,  ET  tB  CHOEtlII. 

Allez ,  laissezr-nous ,  soins  fâcheux , 
lÈloignez-vous  de  nos  paisibles  jeux. 

(78)  Dans  les  climats  les  plus  heureux  du  monde , 
Ils  vont ,  çn  paix ,  goûter  mille  plaisirs. 
Jusqu'au  vent  qui  règne  sur  l'onde , 
Tout  favorise  leurs  désirs. 

(79)  J'ai  reçu  cg  don  de  sa  main  même  : 
Kous  fûmes  les  témoins  de  son  bonheur  extrême  ; 
Elle  a  voulu  nous  rendre  heureux. 

BOLABD. 

Ciel  !  puis-je  être  accablé  par  un  coup  plus  affireux  ! 

TEBSAaDnE. 

Mais ,  quel  est  ce  guerrier  ?  aisément  on  devine 
Qu'il  sort  d'une  illustre  oiiglne. 


Il  s'agite. 

Il  menace. 


(80)  COBIDOir. 

BiLISE. 

CORIDOET. 

Il  pâlit. 

séLISE^ 

Il  soupire. 


^ 


1^8  VARIANTES  D&  ROLAND.  ACTE  IV. 

BELISE. 

(8i)  Oo  a  VU  des  amans  si  contens  daos  ces  bois. 

TEBSÀNDB^ 

Qui  snit  les  amaorenses  lois, 

S'expose  â  des  roanx  redooiabtes. 
Pour  denx  amans  beureiu  qa'Amoar  fait  quelquefois, 
Il  en  fait  tous  les  jours  plus  de  cent  misérables. 


FIH   ou   QUATmEME   ACTE. 


(82)  ACTE  CINQIJIÈME. 

Le  théâtre  change,  et  teprésente  le  palais  de  la  sage  §^ 

I.OGISTILLE. 


SCÈNE  I. 
ASTOLFE,  LOGISTÏLLE. 

'  ASTOLFE. 

i3age  et  divine  fée ,  à  qpi  tout  est  possible, 

Vous,  dont  le  généreux  secours 
Pour  les  infortunés  se  déMarç  toujours, 
Au  malheur  de  Roland  serez-vons  infensible?, 

Ce  héros  que  l'Amour  a  rendu  furieux. 

Traîne  une  déplorable  vie  : 

Son  sort  qui  fut  si  glorieux, 
Fait  autant  de  pitié  qu'il  avait  Eût  d'envie. 

LOGI9TILLE. 

Vos  justes  voeux  sont  prévenus  ; 
Déjà  par  des  chemins,  aux  mortels  inconnus, 
J'ai  fait  passer  Roland  dans  cet  heureux  asile. 

Le  charme  d'un  sommeil  tranquille 

Suspend  le  mal  de  ce  héros; 
Mais  il  est  difficile 

De  lui  rendre  un  parfait  repos. 

ASTOLFE. 

Je  sais  votre  pouvoir,  i)  faut  que  tout  lui  cède. 
Votre  soin  m'a  sauvé  dç  cent  périls  aflkux. 


•8o  VARIANTES  D£  BOLÀND. 

K'bflHriex-Toas  qu'on  'vaiû  remédie 

An  tmoble  fatal  qui  possède 
L«  plus  grand  des  héros ,  et  le  pins  malbeureiix?. 

LOGISTILLE. 

le  paîs  des  élemens  iDterrom|)re  la  goetre, 
^  Mb  rùv%  fait  trembler  les  enfin». 
J%npos<i  silence  au  tonnerre , 
Et  i'éteîns  le  fea  des  éclairs  : 
Mais  je  cafaneV'aTec  moins  de  peine. 
Les  "TCDO  éd&îppés  de  leur  çhaine, 

Et  i'erpaistt  phl^  l'océan  iirtté, 
Qu'un  coeur  par  l'Amour  agité. 

âSTOlFB. 

J'attends  coui  pour  Boland  de  vos  soins  salutaires. 

LOGiSTlllE. 

Nm  eflRyrts  yont  se  redoubler  t 
'AIWb  ,  êloigneï'TOus  de  nos  secrets  mystères , 
Vos  regards  pourraient' les  troubler. 

SCÈNE  II. 

LOGISTlCLfi,  ROLAND,  endoimi,  truope  <?e 
FÉES; 

lOGlSTILLE. 

Pab  le  Secours  d'une  douce  harmonie 

Calmons  ce  grand  coeur  pour  jamçiâ. 

Rendons-lui  sa  première  paix. 
Puisse-t-elle  chasser  l'Amour  qui  Ta  bannie  r 

Heureux  qui  se  défend  toujours 

IXi  tharmt  fiital  des  Amours! 
i£  cHoeun. 

Heureux  qui  se  défend  toujours 

Du  channe fatal  des  Amours! 


ACTE  V|  SCÈNE  IlL  <i8i 

(  Les  fées  dansent  ^atour  de  Roland,  et  font  des  cétëmonies 
mystérieuses,  pour  lui  rendre  la  raison.) 

'  LOGISTILLE. 

Rendez  h  ce  héros  votre  clarté  céleste, 

Divine  Èaison,  revenez. 
Qa'un  cœur  est  malheureux  quand  vous  l'abandonnez 

Dans  un  égarement  fimeste. 

LOGISTILLE    ET    LE    CBCEUB. 

Heureux  qui  se  défend  toujours 
Du  charme  fatal  des  Amours! 

(  Les  fées  continuent  leurs  danses  autour  de  Boland,  et  Logis- 
tille  ëvoqudles  ombres  dos  nncâens  héros,  pour  l'aider  à 
f»ire  sortir  Koiund  de  &on  cgaremeut.  ) 

LOGISTILLE.  v  x^ 

O  vous ,  dont  le  nom  plein  de  ^ire 
Dans  la  nuit  du  trépas  ^'est  point  enseveli  ; 

Vous ,  dont  la  célèbre  mémoire 
Triomphe  pour  jamais  du  tems  et  de  l'oubli , 
Venez,  héroîqiies  ombres, 
Venez  seconder  nos»  efforts  : 

Sortez  des  retraites  sombres 
Du  profond  empire  des  morts. 
(Les  ombres  des, anciens  Itéros  paraissent.  ) 

SCÈNE  III. 

LOGISTILLE,  troupe  de  fées,  uoupc  d'ombres 
OE  nÉnos. 

•  LOGISTILLE. 

RoLAiHD  ,  coûrei  aux  ormes. 
Que  Li  gloire  a  de  charmes  ! 
.  L'Amour  de  ses  devins  appas  , 
Fait  vivre  au-delà  du  trép;i3. 
Grands  Opéras.  :ïi  iS   . 


À 


iSt  TABïAKTES   DE  KOLAND. 

LII6ISTILLE  et   L£  CH0Et7K    DES  OUBBES  DE   IIiEbOS. 

Ilolmid ,  courei  txnx  ftrroes* 
Que  b  gloire  a  de  charmes  I 

(  ▲  la  Toix  de«  lidr-u««  Holand  «ort  de  son  sommeil,  cl 
iiicûc«  à  se  servir  de  &a  m«on.  ) 

BOLASID. 

Qae)  Jecoiuff  vient  me  dé^iger 

De  ma  &ta!i  flamme  ? 
Ciel  i  saoi  liori-cur ,  pais-je  songer 
Au  désordre  nti  l'Amoui  avait  réduit  mon  «me  ! 

Erraut,  tosensé,  furieux, 
J'ai  fait  de  ma  Êûlflcsie  uu  spectacle  odieux  ; 
^  Quel  reproche  à  jamais  ne  dois- je  point  me  faire  ? 
Malheureux  !  la  raibon  m'éclaire 
Pour  oHHr  ma  honte  à  mes  yeux  ! 
i^e  survivre  à  ipa  glout  est  un  supplice  extrâne  ! 
Inlbttuoc  Holaud,  cheichu  mi  àjtre  écarte  ; 
Va  ,  s'il  se  peut ,  te  cacher  a  toi-même 
Daiâs  rétcrnelle  obicuiil^. 

t.OGiSTiLX»£,  arrûtiiBl  Roland. 

]^!odérei;  la  tristesse 
Qui  saisit  votre  cœur  : 
Quel  faéroi» ,  quel  vainqueur 
Est  excnipt  de  iiùbleii^ic  ? 

X£  CfiOECB  X)E8  0119B£S. 

Sortes ,  pour  jamais ,  en  ce  jour , 
Uei  Ueiu  honteux  <k  1  Amour. 

tOOISTILLX» 

Allez ,  suivez  lu  Gloire  : 

AOLAVO* 

Allons ,  couions  aux  «rrnes. 
Q«ie  i«  gloire  b  cIb  ch^nmcâ  ! 


ACTE  V,  SCÈNE  ir.  «83 

LES  CHOeUBS. 

Roland ,  coarez  aux  amies. 
Que  la  gloire  a  de  diarmes  ! 
(  L,es'fëes  et  les  ombres  des  hi^ros  témoignent,  par  des  danses, 
la  }oie  qu'elles  ont  de  la  guérison  de  Roland  ;  la  Gloire 
suivie  de  la  Renommée ,  et  précédée  de  la  Terreur,  Tient 
presser  Roland  d'aller  délivrer  fon  pays«)  ^ 

SCÈNE  IV. 

LA  GLOIRE,  LA  RENOMMÉE,  LA  TERREUR, 
suite  de  la  gloire,  ROLAND,  LOGISTILLE, 
troupe  de  fées,  troupe  d'ombbes  de  H]£nos« 

LA  G|.OXB£. 

BoLAHO ,  il  faut  armer  votrç  invincible  bras. 

La  Terreur  se  prépare  à  devancer  vos  pas  ; 

Sauvez  votre  pays  d'une  guerre  cruelle  : 

9f e  suivez  plus  TAmour ,  c'est  un  guide  infidèle  ; 

Non ,  n'oubliez  jamais 

Les  maux  que  l'Amour  vous  a  ùixta, 

(  Roland  rei>rend  ses  armes  que  les  fées  et  les  Héros  h|i  pré- 
sentent, il  témoigne  l'impatience  qu'il  a  de  partir  cour 
-obéir  à  la  Gloire ,  et  la  Terreur  vole  devant  lui.  ^es  fées  et 
les  héros  dansent  pour  témoigner  leur  joie  ;  Logistille ,  la 
chœur  de  la  suite  de  la  Gloire ,  les  chœurs  des  feas  al  des 
béros  chantent  ensemble.  ) 

LOGISTILLE   et  LES  CHOBUBS. 

La  Gloire  vous  appelle , 
Ne  soupirez  plus  que  pour  elle , 

Non ,  n'oubliez  jamais 
Les  maux  que  l'Amour  vcus  a  faits. 


rm  Bit  vAaiAiiTEt  be  kblakd. 


ARMIDE, 

TRAGÉDIE-LYRIQUE  EN  CINQ  ACTES; 
PAR   QUINAULT; 

Jlepréseniée ,  pour  la  première  fois,  en  i68C;  et  remise 
au  théâtre  eu  1777,  avec  la  musique  de  Gluck. 


l6. 


PERSONNAGES. 

-^BMIDE ,  roagicienoe ,  luècc  d^idraot- 
VHÉNICE ,  contidente  d'ArmSde. 
SI  DOME,  antre  confidente  d'Armidc. 
HIDRAOT,  magicien,  roi  de  Damas. 
Troupe  de  PscptEs  du  royaume  de  Damas. 
(ÀROf^TE ,  conducteur  des  CÉievalieis  qu'Annide  a  fait 

mettre  aux  (ers. 
KENAUD ,  le  plus  renommé  des  cbevaiiers  du  camp  du 

Godefroy,  général  des  Croisés,  assiégeant  la  villa    de 

Damas. 
ABTEMIDOR,  un  des  cbevaiiers  captiis  d'Armide ,  otque 

Benaud  a  délivrés. 
Un  Démoii,  transÊ>nné  on  Naïade. 
!Xroupe  de  Démoss  transformés  en  Nymphes,  en  bergers , 

et  en  bergères. 
Troupe  de  D^MOitf  volans  et  transfismés  en  Zépfai^s. 
LA  HAINE. 
Svrrz  de  LA  HmE,ies  Fubies,  ki  CfiuAurÉ,kiVEVGEA9cc,. 

la  Bagc. 
UBALDE  ,  cbe^alier  qui  va  chercher  Benaud. 
Le  chovalier  Davois,  qui  va  avOc  Ubolde  chercher  Ko- 

naud. 
Un  DÉMo:i,  sous  la  figure  de  Lacindc ,  fillv  Danoise,  aiméa 

du  chevalier  Danois. 
Troupe  de  Démons  ,  transformés  en  habitons  chapip^as^e^ 

Tîle  où  Armide  tient  Benaud  enchanté. 
Vn  VivoVi  sous  la  figuie  de   Mélisse,,  fille   Halifimie  ^ 
I  dllbalde. 


à 


•i88  PERSONNAGES. 

Les  Plaisirs.  i 

Troupe  de  Démons,  qui  paraissent  soos  la  figure  d'imiaos 

fortuDés  et  d'amantes  heurcnses  qui  accon^agoent  Ke* 

naud   dans  le  palais  enchanté. 
Troupe  de  Di^novs  volans,  qui  détruisent  le  palais  en* 

chanté. 


ARMIDE , 

TRAGÉDIE-LYRIQUE. 

ACTE   PREMIER. 

Le  théâtre  représente  une  grande  place  ornée  d'an  arc  da 
triomf^e. 

SCÈNE  I. 

ARMÏDE,  PHÉNICE,  SIDONIE.        « 

fHÉNl&E,  à  Annide. 

JJâss  un  jour  de  triomphe ,  au  milieu  éffi  plaisirs , 
Qui  peut  vous  inspirer  une  sombre  tristesse  ?.  . 
La  gloire,  la  grandeur,  la  heauté,  la  jeunesse; 
Tous  les  biens  comblent  vos  désirs. 
SIDUNIE,  ik'Armide. 
Vous  allumez  une  fatale  flamme , 
Que  vous  ne  ressentez  jamais  :  . 

L'amour  n'ose  troubler  la  paix 

Qui  règne  dans  voire  ame. 
PHÉBICE  ET  8IDORIE,  ensemble  à  Armide* 
Quel  sort  a  plus  d'appas? 
Et  qui  peut  être  heureux  si  vous  ne  Têtes  pas  ?< 


J 


190  ARMIDE. 

P  B  é  9 1  c  C  ,  à  Armfde. 
Si  b  gacrro  aijoordliui  fait  craindre  ses  rsTages  * 
C'est  aux  bords  du  Jourdain  qu'ils  doivent  s'arrêter  ; 
Nos  tranquilles  rivages 
N'ont  rien  à  redouter. 

iiDOSriE  à  Armide. 
Les  enfers  ;  s'il  le  faut ,  prendront  pour  nous  les  armes , 
Et  vous  savez  leur  imposer  la  loi. 

PHÉSICE,  à^Amoide. 
Vos  yeux  n'ont  eu  besoin  que  de  leurs  propres  cfaamies 
Pour  aâkiblir  le  camp  de  Gudefroj. 
SIDOHIB,  à  Armide. 
Ses  plus  valllans  guerriers ,  contre  vous  sans  défense , 
Sont  tombés  en  votre  puissance. 

AnMiDE. 
le  ne  triomphe  pas  du  plus  vaillant  de  tons. 
Beiiaud  \  pour  qui  ma  baine  a  tant  de  violence , 
L'indomptable  Renaud  échappe  à  mon  courroux.. 
.Tout  le  camp  ennemi  pour  moi  devient  sensible , 

Et  lui  senlgAoujours  invincible, 
Fait  gloire  de  me  voir  d'un  oeil  indifiërent. 
Il  est  dans  l'igo  aimable  ou  sans  efibrt  on  aime... 
Non,  )e  ne  puis  manquer,  sans  un  dépit  extrême, 
La  conquête  d'un  cœur  si  superbe  et  si  grand. 

SIDOSIE. 

Qu'importe  qu'un  captif  manque  à  votre  victoire  2 
On  en  voit  dans  vos  fers  assez  d'autres  témoins  j 

Et  pour  un  esclave  de  moins  ^ 
Un  trioBipbe  si  beau  perdra  peu  de  sa  gloire. 

'    PB^ICE,  à  Arniid*. 

Poqr<|uoî  voul«z-voui  songoc 


ACTE  I,  SCÈNE  1.  19* 

A  ee  qui  peut  vous  déplaire?, 
11  est  plus  sûr  de  se  venger 
Par  l'oubli  que  par  b  colère. 

ARMU>E. 

Les  enfers  ont  prédit  cent  feis 
Que  contre  ce  guerrier  nos  aimes  seront  vaines, 

Et  qu'il  vaincra  nos  plus  grands  rois. 
'Ah!  qu'il  me  serait  doux  de Taçcabler  de  ohaiocfl,. 
£t  d'arvéter  le  cours  de  ses  exploits! 
Que  je  le  hais  !  que  son  mépris  m'outrage l 
Qu'il  sera  fier  d'éviter  l'esclavage 
Où  je  tiens  tant  d'autres  Léros! 
Incessamment  son  irop<Mulie  image 
Malgié  moi  trouble  mon  repos. 
Un  songe  aâreux  m'inspire  une  fureur  nouvelle 
Contre  ce  funeste  ennemi. 
J'ai  cm  le  voir,  j'en  ai  frémi  ; 
3'ai  cru  qu'il  me  ftappait  d'une  atteinte  mortelle. 
Je  suis  tombée  aux  pieds  de  ce  cruel  vainqueur  : 
Bien  ne  fléchissait  sa  rigueur  ; 
Et,  par  un  charme  inconcevable, 
3e  me  sentais  contrainte  h  le  trouver  aimable. 
Dans  le  (atal  moment  qu'il  me  perçait  le  cœur. 

SIDONIE. 

Vons  troublez-vous  d'une  image  légère 

<Jue  le  sommeil  produit? 

Le  beau  jour  qui  vous  luit 
Doit  dls^ipôr  cette  vainc  cbimci  c , 

Ainsi  qu'il  a  dcuuit 

Les  ombres  de  la  nuit. 


{192  ARMIDE. 

SCÈNE  II. 

HIDRAOT,  SUITE  d'Hidbaot,  ARMIDE,  PHÉ- 
NlCE,SIDONIE* 

BIDBAOT,  à  Armide. 
UbmiDE,  qae  le  sang  qui  m'unit  avec  tous 
Me  rend  sensible  aux  soins qat  Tonpiend  pour  tous  plaire  ! 

Que  TOlre  triomphe  m'est  doux  ! 
Que  )  aime  a  voir  briUer  le  beau  jour  qui  Téclaire  ! 

Je  n'aurais  plus  de  vœux  à  faire    ' 

Si  vous  choisissiez  un  ^onx. 
Je  vois  de  près  la  mort  qui  me  menace  ; 

Et  bieutât  l'âge  qui  me  glace 
Va  m'accabler  de  son  pesant  Êirdeau. 

C'est  le  dernier  bien  où  j'aspire 
Que  de  voir  votre  hymen  promettre  à  cet  empire 

Des  rois  formés  d'un  sang  si  beau. 
Sans  me  plaindre  du  sort ,  je  cesserai  de  vivre , 

Si  ce  doux  espoir  peut  me  suivre 

Dans  l'affreuse  nuit  du  tombeau. 

AltMIDE^ 

La  chaîne  de  Thymen  m'étonne; 
Je  crains  les  plus  aimables  noeuds. 
Ah!  qu'un  cœur  devient  malheureux. 
Quand  la  liberté  l'abandonne!  « 

HIDRAOT. 

Pour  vous,  quand  il  vous  plaît ,  tout  l'enfer  est  arme  ; 
Vous  êtes  plus  savante*  en  mon  art  que  moi  même  : 
De  grands  rois  à  vos  pieds  mettent  leur  diadème  ; 


■ACTE  I,  SCÈNE  If.  193, 

Qui  vous  Tolt  un  moment  est  pour  jamais  cbanné. 
Pouvez-vous  mieux  goûter  votre  bonheur  e^^ti^e 

Qu'avec  un  époux  qui  vous  aime, 

Et  qui  soit  digne  d'être  aimé  2 

ABMIOE. 

Contre  mes  ennemis  à  mon  gré  je  déchaîne 

Le  noir  empire  des  enfers; 

L'Amour  met  des  rois  dans  mes  fers  : 
7e  SUIS  de  millie  qmans  maîtresse  souveraine  ; 

Mais  je  fais  mon  plus  grand  bonlieur 

D'être  maîtresse  de  mon  coeur 

HIDnAOT. 

Bornez-vous  vos  désirs  â  la  gloire  cruelle 

Des  maux  que  Êiit  tofre  beauté  1 
Ne  fijrez-vous  jamais  votre  félicité 

Du  boi&eur  d'un  amant  fidèle  î^v 

'  ABMIDE. 

Si  je  dois  m'engager  un  jour , 

Au  moins  vous  devez  croire 
Qu'il  faudra  que  ce  soit  la  Gloire 
•     Qui  livre  mon  cœur  h  l'Amour. 
•     Pour  devenir  mon  maître , 
Ce  n'est  point  assez  d'être  roi  ; 
Ce  sera  la  valeur  qui  me  fera  connaître 

Celui  qui  méiite  ma  foi. 
Le  vainqueur  de  Renaud ,  si  quelqu'un  le  peut  être , 
Sera  digne  de  moi.  ' 


Graods  Opéras.  2.  iij. 


i]94  ARMIDE. 

SCÈNE  III. 

TBOUPE    DE    PEUPLES   DD    ROTAUME   DE    DAUAS, 

HIDRAOT,  ÀRmOE,   PHÉNICE,   SIDONIE, 

SUITE   O'OIPJIAOT. 

(Les  peuples  du  royaume  de  Damas  témoignent ,  par  des 
danses  cl  pur  des' chants ,  la  joie  qu'ils  oui  de  l'avantage  que 
la  beauté  d^Armîde  a  remporté  sur  les  chevaliers  du  camp 
de  Godefroy.) 

BIOBAOT. 

AsMiDE  est  encor  pins  aimable 
Qu'elle  n'est  redoutable; 
Que  son  triomphe  est  glorieux  ! 
Ses  charmes  les  plus  forts  sont  ceux  de  ses  beaux  yeux. 
Kilo  n*a  pas  besoin  d'emprunter  Tart  teiriblc 
Qui  sait ,  quand  il  lui  plaît ,  faire  armer  les  enfers  . 

Sa  beauté  trouve  tout  possible  ; 
Kos  plus  fiers  ennemis  gémissent  dans  ses  fers. 

hiduaOt,  et  le  choeub,  ensemble. 
Armide  est  encor  plus  aimable ,  etc. 

PHÉSICE  ET  LE   CHGEUB,  ensemble. 
Suivons  Ârmide ,  et  chantons  sa  victoire  ^ 
Tout  Tunivers  retentit  de  sa  gloire. 

PBÉSICfi. 

'         Kos  ennemis ,  aflàiblis  et  troublés , 

K 'étendront  plus  le  progrès  de  leois  aimes. 
Ah  !  quel  bonheur  !  nos  d^irs  sont  comblés. 
Sans  nous  coûter  ni  de  sang ,  ni  de  iannes. 

LE    CHCBCR. 

Suivons  Annide,  et  chantons  sa  victoire ,  etc. 


ACTE  1,  SCÈHE  III.  ,g5 

PHÉllCE. 

L'aiident  Amour ,  qui  la  suit  en  tons  lieux 
S'attache  aux  cœurs  qu'elle  veut  qu'il  enflimme  ; 
Il  est  conte«  de  régner  dans  SCS  yeux, 
Et  n'0se  encor  passer  jusqu'à  son  ame/ 

LE     CHCEDK. 

Suivons  Arroide,  et  chantons  sa  victoire,  etc. 

8IDOSIE   ET   tECHCEl,B,  ensemble. 
Que  la  douceur  d'un  triomphe  est  extrême 
Quand  on  n'en  doit  tout  l'hommeur  qu'à  soi-m^e  ! 

SIDONIE. 

Nous  n'avons  point  fait  anner  nos  soldats  ; 
Sans  leur  secours  Armide  est  triomphante': 
Tout  son  pouvoir  est  dans  ses  doux  appas  j 
lUen  n'est  si  fort  que  sa  beauté  charmante.  ' 

LE    CHCEUn. 

Que  la  douceur  d'un  triomphe  est  extrême ,  etc. 

SIDOSIE. 

La  belle  Armide  a  su  vaincre  aisément 
Us  fiers  guerriers  plus  craints  que  le  tonnerre  ; 
l^^tses  re^rds  ont,  en  moins  d'un  moment, 
Donné  des  lois  aux  vainqueurs  de  la  terre. 

LE    CHGECn. 

Qne  la  douceur  d*un  triomphe  est  extrême ,  eic. 
<Le  trionlphe  d»Annide  est  interrompu  par  l'arrivée  d'A- 


i 


,Qr,  'AU Ml  DE.      > 

SCÈNE  IV. 

ÂBONTE,    Uoape   de   soldats,    HIDRAOT, 
ARMIDE,   PHENICE,  SIDONIE,  troape   de 

PEUPLE  DE   DA9IA6. 

AnOSTE. 

O  ciel  !  &  disgtâee  craelle  ! 
3e  condaisais  vos  captifs  avec  soin. 
J'ai  toat  tenté  pour  vous  marquer  mon  zèle  } 

Mon  sang  (jui  coule  en  est  témoin. 

ABMIDE. 

Mais  Qu  8QDI  Oftes  captifs?. 

AnoSTE. 

Un  gueirier  indomptable 
Les  «  délivrés  tous. 
ABSflDE  ET  HIDBAOT,  ensemble. 
Vn  seul  gaeirier  î  que  dites-vous  3) 
Ciel! 

ABOSTE. 

De  nos  ennemis  c'est  le  plus  redoutable  ; 
Nos  plus  vaillans  soldats  sont  tombés  sous  ses  coups, 
Rien  ne  peut  résister  à  sa  valeur  ei^tréme, 

ABMIDE. 

O  ciel  !  c'est  Renaud. 

ABONTE. 

C'est  lui-même. 
ABlllDE  ET  HIDBAOT,  ensemble. 
Poursuivons  jusqu'au  trépas 


ACTE  I,  SCÈNE  IV.  iigj 

L'ennemi  qni  nous  offeuse , 
Qu'il  n^échappe  pas 
A  notre  vengeance. 

LE   CBCEUn. 

Ponrsoîvons  jusqu'au  trépas ,  etc.  " 


Plir  DC    PREMIER   ACTE. 


i»7- 


J 


4 

ACTE  SECOND. 

Le  ibtiâtre  change  ,  et  représente  une  campagne ,  où  mte 
rivière  foime  une  île  agr^ibie. 


SCÈNE  I- 

RENAUD,  ARTÉMIDORE. 

ABT^SIIDOnE. 

JLsvwciBLE  héros ,  c'est  par  votre  courage 

Que  j'échappe  aux  rigueurs  d'un  funeste  esclavage* 

Après  ce  généreux  secours , 
Puis-je  me  dispenser  de  vous  suivre  toujours  ?. 

nEBAUD. 

Allez ,  allez  remplir  ma  pkce 
Aux  lieux  d'où  mon  malheur  me  chasse« 
Le  iier  Gerhand  m'a  contraint  à  punir 
Sa  téméraire  audace  : 
D'une  Indigne  prison  Godefroy  me  menace , 
Et  de  son  camp  m'oblige  à  me  bannir. 
Je  m'en  éloigne  avec  contrainte  : 
Heureux  si  j'avais  pu  consacrer  mc9  exploit!» 
A  délivrer  la  cité  mainte 
Qui  gémit  sous  de  dures  lois! 
Suivez  les  guerrier»  qu'un  beau  zèle 
Presse  de  signaler  leur  valeur  et  Icuit  foi  { 


ACTE  II,  SCÈNE   I,  tOO 

Chercbei  une  gloire  immortelle, 
f  «  veux  dans  moo  exil  o'eoveîopper  que  moi, 
Autémidobe. 
Sans  voas  que  peut-on  entreprendre  ? 
Celui  qui  vous  bannît  ne  pourra  se  défendre 

De  souhaiter  votre  retour. 
S'il  faut  que  je  vous  quitte ,  au  moins  ne  pnis-je  apprendre 
£o  quels  lieux  vous  allez  choisir  votre  séjour  ? 

BERADD. 

Le  repos  me  fait  violence  ; 
La  seule  gloire  a  pour  moi  dés  appas  : 

Je  prétends  adresser  mes  pas 

OÙ  la  justice  et  l'innocence 
'Auront  besoin  du  secours  de  mon  bras. 

AftTÉBflDORE. 

Fuyez  les  lieux  où  règne  Armide  , 
Si  vous  cherchez  à  vivre  heureux  ; 
Pour  le  cceur  le  plus  intrépide 
Elle  a  des  charmes  dangereux. 

C'est  une  ennemie  implacable  ; 

Évitez  ses  ressentimens  ; 
Puisse  le  cie! ,  à  mes  vœux  ÊivorabW , 
Vous  garantir  de  ses  enchantemens  « 

BEHAUD. 

Par  une  heureuse  indifférence 
9Ion  cœur  s'est  dérobé  sans  peine  à  sa  puissanee  ; 
Je  la  vis  seulement  d'un  regard  curieux. 
Ifst-il  plus  mal-aisé  d'éviter  sa  vengeance 
Que  d'échapper  au  pouvoir  de  ses  yeux  î 

S'aime  la  liberté  ;  rien  ne  m'a  pu  contraindre 
A  ra'co^iQpr  Jusqa'h  ce  jour. 


aoo  ARMtDE. 

Quaod  on  peut  mépriser  le  charme  de  rAmour , 
Quels  enchaDtemens  peut-on  craindre  ? 
(  Artémidore  se  retire ,  et  Renaud  s'éloigne  un  moment.  ) 

SCÈNE  II. 

HIDRAOT,  ARMIDE. 

BIDnAOT. 

AiiAéTo5S-BODS  ici  ;  c'est  dans  ce  lieu  &tal 
Que  la  fureur  qui  nous  anime 
Ordonne  à  l'empire  infernal 
De  conduire  notre  victime. 

ABMIDE. 

Que  l'enfer  aujourd'hui  tarde  à  suivre  nos  lois  ! 

HIDRAOT. 

pour  achever  le  charme ,  il  faut  unir  nos  voix. 
HiDnAoT  ET  AHMIDE,   ensemble. 
Esprits  de  haine  et  de  rage  , 
Démons,  obiéissez-nous ; 
Livrez  à  notre  courroux 
L'ennemi  qui  nous  outrage. 
Esprits  de  haine  et  de  rage , 
Démons,  obéissez-nous. 

AnMIDE. 

Démons  nflreux  ,  cachez- vous  '   * 

Sous  une  agréable  unage  : 
Knchautez  ce  fier  courage 
Par  les.  cliarmcs  les  plus  doux. 

HIDRAOT    ET    ARMIDE,  cn^eoible. 

Esprits  de  haine  et  de  rage ,  elc. 


'ACTE  II,  SCÈNE  III.  aaii 

'AbMIDE  ,  apercevant  Renaud  qui  s'approche  des  bords 
de  la  rivière. 
Dans  le  piège  Êital  notre  ennemi  s'engage. 

HinnAOT. 
Nos  soldats  sont  cachés  dans  le  prochain  bocage  ; 
11  Êoit  que  SOT  Renaud  ils  viennent  fondre  tous. 

ABMIDE. 

Cette  victime  est  mon  partage  ; 
liaissez-moi  l'immoler  :  laissez-moi  l'avantage 
De  voir  ce  cœur  superbe  expirer  de  mes  coups. 

(Hidraot  et  Armide  »e  retirenl.) 

SCÈNE  III. 

(  Renaud  5*arrête  pour  considérer  les  bords  du  fleuve ,  «t 
^       quitte  une  partie  de  ses  armes  pour  prendre  le  frttis.) 

RENAUD. 

Plus  j'observe  ces  lieux ,  et  plus  je  les  admire. 

Ce  fleuve  coule  lentement , 
Et  s'éloigne  à  regret  d'un  séjour  si  charmant  : 
Les  plus  aimables  fleurs  et  le  plus  doux  zéphiro 

Parfument  l'air  qu'on  y  respire. 
Non ,  je  ne  puis  quitter  des  rivages  si  beaux  : 
Un  son  harmonieux  se  mêle  au  bruit  des  eaux  ;    . 
Les  oiseaux  enchantés  se  taisent  pour  l'entendre.     . 
Des  charmes  du  sommeil  j'ai  peine  à  me  défendre  ^ 

Ce  gazon ,  cet  ombrage  frais , 
Tout  m'invite  au  repos  sous  ce  feuillage  épais. 

(  Renaud  s'endort  sur  un  gazon  au  tord  de  la  rivière.) 


J 


aoa  ARMIDE. 

SCÈNE  IV. 

HENÂUD,  endormi;  U5E  HAIADE,  qui  sort  duBeare, 
troupe  de  iitMPHES,  troope  de  beboebs»  troupe  do 

BEBGÈBES. 

LA   BAIADE. 

An  tems  heureux  où  Ton  sait  plaire , 

Qu'il  est  doux  d'aimer  tendrement  ! 

Pourquoi  dans  les  périls  avec  empressement , 

Chercher  d'un  vain  honneur  Téclat  imaginaire  ?. 

Pour  une  trompeuse  chimère 

Faut-il  quitter  un  bien  charmant  ï 

Au  tems  heureux  où  Ton  Sait  plaire  , 

Qu'il  est  doux  d'aimer  tendrement  ! 

lES  en  CE  un  s,  ensemble. 

Ah  I  quelle  erreur ,  quelle  folie 

De  ne  pas  jouir  de  la  vie  ! 

C'est  aux  jeux ,  c'est  aux  amours 

Qu'il  faut  donner  les  beaux  jours. 

(  Les  démons ,  sous   la  figure .  de  nymphes  ,  de  bergers  et 
^     de  bergères  ,  enchantent  Renaud  et  renchainent,  doraot 
son  sommeil ,  avec  des  guirlandes  de  fleurs.  ) 

'  USE    BERGèBE. 

On  S  étonnerait  moins  que  la  saison  nouvelle 
Revînt  sans  amener  les  fleurs  et  les  zéphirs , 
Que  de  voir  de. nos  ans  la  saison  la  plus  beUc 

Sans  l'amour  et  Sans  les  plaisirs. 
Laissons  an  tendre  Amour  la  jeunesse  en  partie^  ; 
La  Sagesse  a  son  tems  ;  il  ne  vient  que  tn^  tdt  : 
Ce  n'est  pas  être  sage 


ACTE  II,  SCÈNE  V.  ao3 

D'être  plus  sage  qu'il  ce  faiit. 

LES  CBOEuns,  ensemble. 

Ab ,  qaelle  erreur ,  quelle  folie ,  etc. 

(  "La  naïade ,  les  uymplies ,  le»  bergers  et  les  bergères  se     • 
retirent.  ) 

SCÈNE  ,  y. 

ARMIDË,  RENAUD,  endormi. 

AnMlI>;B  ,  tenant  un  dard  à  la  main. 

Ebfib  il  est  en  ma  puissance , 

Ce  fatal  ennemi,  ce  superbe  vainqueur;  • 

Le  charme  du  sommeil  le  livre  à- ma  vengeance  : 

Je  vais  percer  son  invincible  cœur. 

Par  lui  tous  mes  éaptifi)  sont  sortis  d'esclavage  ; 

Qu'il  éprouve  toute  ma  rage.... 

(  Armide  va  pour  frapper  Renaud ,  et  ne  peut  exécuter  le 
dessein  qu'elle  a  de  lui  ôter  la  vie.  ) 

Quel  trouble  me  sai^t!  qui  me  fait  hésiter? 

Qu'est-œ  qu'en  sa  faveur  la  pi^ié  me  veut  dire  ?. 

Frappons....  Ciel  î  qui  peut  m'arr^er  ? 

Achevons...  Je  ftéraisî....  Vengeons-nous...  Je  soupire.... 

Est-ce  ainsi  que  je  dois  me  venger  aujourd'hui  ?. 

IVIa  colère  s'éteint  quand  j'approche  de  lui. 

Plus  je  le  vois ,  plus  ma  colère  est  vaine*^ 

Mon  bras  tremblant  se  refuse  à  ma  haine. 
Ahî  quelle  cruauté  de  lui  ravir  le  jour  1 
A  ce  jeune  héros  tout  cède  sur  la  terre. 
Qui  croirait  qu'il  fat  né  seulement  pour  la  guerre?. 

Il  semble  être  feit  pour  l'Amour. 
THe  puis-je  me  venger  à  moins  qu'il  ne  périsse  l 


1 


ao4       ARMIDE.  ACTE  II,  SCÈNE  VI. 

Eh  !  ne  suffit-il  pas  que  TAmour  le  punisse  ? 
Puisqu'il  n'a  pu  trouver  mes  yeux  assez  channans , 
Qu'iK  m'aime  an  moins  par  mes  «nchaotemeos  ; 
•  Que ,  s'il  se  peut ,  je  le  baisse^... 

(  Aux  démons ,  qui  viennent  àt  s*ëloigaer.  ) 
Venez ,  secondez  mes  désirs  ;     . 
Démons ,  transformez^vous  en  d'aimables  zépbir^. 
Je  cède  à  ce  vainqueur  ;  la  pitié  me  sannonte  : 
Cachez  ma-  faiblesse  et  ma  honte  ' 
Dans  les  pins  reculés  déserts; 
Volez ,  condniâez-nous  au  bout  de  ToDivers. 

SCÈNE  VI. 

!ARMID£,  RENAUD,  endonni;  troupe   de  i 

transforméi  en  zéphirs. 
(Le»  démons  enlèvent  ilenaud  et  Annide  dans  une  gloire.) 


PIM  DU  SECOBD  ACTE^ 


ACTE  TROISIÈME. 

Le  théâtre  change ,  et  représente  un  désert. 

SCÈNE  I. 

1A.RMIDE. 

Ah  1  si  la  liberté  me  doit  être  ravie , 

Est-ce  k  toi  d'être  mon  vainqueur  ? 
Trop  fimestè  emiemi  du  bonheur  de  ma  vie , 
Fatit-il  que  malgré  moi  tù  règnes  dans  mon^cceor  ?. 
Le  désir  de  ta  mort  fut  ma  pkis  dière  envie  ; 
Gomment  as-tu  changé  ma  colère  en  langueur  7, 
En  vain  de  mille  amans  ^e  me  voyais  suivie  : 

•Aucun  n'a  fléchi  ma  rigueur. 
Se  peut-il  que  Renaud  .tienne  Armide  asservie! 
-Ahl  si  la  liberté  me  doit  être  ravie ,  etc. 

SCÈNE  II. 

PHÉNICE,  SIDONIE,  ARMIDE, 

PBÉKICE  j   à  Armide. 
Que  ne  peut  point  votre  art  ?  la  force  en  est  extrême. 
Quel  prodige!  quel  changement  î 
Renaud ,  qui  fut  si  fier,  vous  aime  : 
On  n'a  jamais  aimé  si  tendrement. 

Grands  Opéras.  2.  Il  8 


306  'ÂRMIDE« 

5IDOEIIE,  à  Armide. 
Montrez- voQS  A  ses  yeux  ;  soyet.  témoiu  voii»-iiiéiiie 
Do  menreilleux  efict  de  votre  enchantemeot. 

ABMIDE. 

L'enfisT  n'a  pas  encor  rempli  mon  espérance  ; 

Il  fimt  qa'un  nouvean  charme  assure  ma  vengeance^ 

SIDOBTIE. 

Sur  des  bords  séparés  du  sé)Oiir  des  kimains , 

Qui  pent  arracher  de  tos  mains 

Un  ennemi  qui  tous  adore? 
Voos  enchantez  Renand  ;  que  craignez-Yons  encore  7, 

ABMIDE. 

Hélas  !  c'est  mon  cceur  qae  je  cnûns. 

Votre  amitié  dans  mon  sort  s'intéresse  ; 
Je  vous  ai  £iit  conduire  avec,  moi  dans  ce»  lieux  : 
Au  reste  d^s  mortels  je  cache  ma  faiblesse  ; 

Je  n'en  veux  rougir  qu'à  vos  yeux. 
De  mes  pins  doux  regards  Benaud  sût  se  déEsndre  i 
Je  ne  pus  engager  ce  cœur  fier  à  se  rendre  j 

Il  m'échappa  malgré  mes  soinSi 
Sous  le  nom  du  dépit  l'Amour  vint  me  surprendre, 

Lorsque  je  m'en  gardais  le  moins. 
Plus  Renand  m'aimera ,  moins  je  serai  tranquille  ; 

J'ai  résolu  de  le  haïr  : 
Je  n'ai  jamais  tenté  rien,  de  si  difficile  ^ 
Je  crains  que,  pour  forcer  mou  cœur  à  m'obéif  ^ 

Tout  mon  art  ne  soit  inutile. 

PHÉSICE. 

,  Que  TOtre  art  serait  beau  !  qu'il  serait  admiré  f 
S'il  savait  garantir  des  trouble»  de  la  vie  ! 


'ACTE  III,  SCéiCE  11.  ,        107 

Heureux,  qui  peut  être  assuré  ^ 

Pe  disposer  de  son  cœur  à  son  gré  t 
C'est  un  secret  digne  d'envie  ; 
Mais  de  tous  les  secrets  c'est  le  plus  ignoré. 

SIDONIE. 

La  Haine  est  afireuse  et  barbare  : 
li'Âmonr  contraint  les  cœurs  dont  il  s'empare 

A  soufii-îr  des  maux  rigoureux. 
Si  votre  sort  est  en  votre  puissance, 

Faites  cBoix  de  rindifféren'ce  ; 

Elle  assure  un  repos  heureux. 

▲BUIDE. 

Nouj  non,  il  ne  m'est  plus  possible 
De  passer  de  mon  trouble  en  un  état  paisiblq  ; 

Mon  cœur  ne  se  peut  plus  calmer. 
Benaud  m'ofl^e  ttop  ;  il  n'est  que  trop  aimable  : 
C'est  pour  moi  désormais  un  choix  indispensable 

De  le  haïr  ou  de  l'aimer. 

PHÉNICE. 

^ous  n'avez  pu  lasÂv  ce  héros  invincible , 
Lorsqu'il  était  le  plus  terrible 

De  tous  vos  ennemis. 
Il  vous  aime  ;  l'amour  l'enchaîne. 
Garderiez-vous  mieux  votre  haine 
Contre  un  amant  si  tendre  et  si  soumis?. 

ADMIDE. 

il  m'aime?...  Quel  amour!...  ma  honte  s'en  augmente, 
Dois-je  être  aimée  ainsi  ?  puis-je  en  être  contente  2, 

Cest  un  vain  triomphe ,  un  faux  bien. 
Hélas  \  que  son  amour  est  diflTércnt  du  mien  ï 
l'ai  recours  aux  enfers  pour  allumer  sa  flamine  : 


Ao8  (àRMIDE.  ' 

C'est  l'efiort  de  mon  art.  qui  peut  tout  $ar  soa  ame  : 

Mu  faible  beauté  n'y  peut  rien. 
Par  son  propre  mérite  il  suspend  ma  vengeance  ^ 
Sans  secours,  sans  efibit .  même  sans  qu'il  y  pense , 
11^  enchaîne  mon  cœur  d'un  trop  charmant  lien. 
Hélas  !  que  mon  amour  est  difiërent  du  sien  ! 

Quelle  vengeance  ai- je  à  prétendre , 

Si  je  le  veux  aimer  toujours  ? 

Quoi!  céder  sans  rien  entreprendre?.*. 
Non ,  il  faut  appeler  la  Haine  à  mon  secours. 

L'horreur  de  ces  lieux  solitaires 

Par  mon  art  va  se  redoubler. 
Détournez  vos  regards  de  mes  af&eux  mystères , 
Et  surtout  empêchez  Renaud  de  me  troubler. 

(  Phënice  et  Sidonit  f ortsnt.  ) 

SCÈNE  in. 

(A.RMIDE. 

•Vesez  ,  venez ,  Haine  implacable  j 

Sortez  du  gouflre  épouvantable 
OÙ  vous  faites  régner  une  étemelle  horreur  : 
Sauvez-moi  de  l'Amour  ;  rien  n'est  si  redoutablo. 

Contre  un  ennemi  trop  aimable  , 
Rendez-moi  mon  courroux ,  rallumez  ma  foreur. 

.Venez ,  venez ,  Haine  implacable  ; 

Sortez  di^  gouflre  épouvantable. 
Où  vous  faites  régner  une  étemelle  hon^ur. 
(  La  If  aine  sort  des  enfers  accompagnée  des   Furies ,  de  la 
Cruauté,  de  la  Vengeance,  de  la  Rage ,  tt  des  patsiooi  qui 
4épeQd«nt  de  la  Haine.  ) 


"     SeÊNE  IV. 

(àRMI^DE,  LA  HAINE,  ioxte  QB  LA  qaise. 

LA  ^AIHÇ,  àArmide. 
lE  réponds  à  tes  Tœax  :  ta  voix  s'est  jEait  mtendta. 

Jusque  dans, le  fond  des  enfers. 
Cour,  toi  contre  TAinoiir  je  vais  tout  entrepreadi6  \ 

Et ,  quand  on  veut  bien  s'ep  défendre  ^ 
On  peut  se  garantir  de  sqs  indigq^^s  fers, 

LA  BAiVE  ET  SA  SUITE,  «osemble. 
^las  on  connaît  TAmour,  et  plus  on  le  déteste  r 
pétruisons  son  pouvoir  funeste  ; 
Bompons  ses  nœuds ,  déchirons  son  bandeau  ; 
Brûlons  ses  tcaits ,  éteignons  son  flambeau. 

LE  CHOeCB. 

^lus  on  connaît  l*Ainour ,  et  plus  on  Iç  déteste ,  etc. 

(La  suite  delà  Haine  s'empresse  à  briser  et  à  ])riUer  leji. 

armes  dont  PAmour  se  sert.  ) 

LA  HAIHE  EP8A  SpiTE,  ensemble. 

'Ainour  )  sors  pour  jamais,  sors  d'im  coeur  (pu  t»  cbass»; 
Que  la  Haine  règne  en  ta  place,; 
Tu  fais  trop  soufinr  sous  ta  loi  : 
Non,  tout  l'enfer. n\ rieq  de  si  cruel  que  toi! 
(La  suite  de  la  Haine  témoigne  qu'elle  se  prépare  avec  ; 
plaisir  à  triompher  de  l'Amour.) 
L  A  H  A I N  E  ,  s'approchant  d' Arniide. 
Sofê ,  5QIS5  du  soin  d'Armide ,  Amour  ^  brise  ta  <^aîiie. 

ABJdIDE«. 

Arrête  ^  arrête  >  aflreuse  Haine  i 

18. 


À 


mto    làBMIDB.  ACTE  III,  SCÈNE  VI. 

liBisse-moi  aoqs  les  lois  d'un  si  chonnaiit  valiufoeor } 
Laisse-moi  ;  Je  reoooce  à  ton  secours  borrible. 
^OD ,  non ,  D'^chève  pas  ;  non,  il  n'est  pas  possibk 
Pe  m'^tev  moo  amour  sans  m'arracher  le  cCBurl 

LA  BAIBE. 

Vimplores-tu  mon  assistance 
Que  pour  mépriser  ma  puissance  ?. 
|Suis  l'Amour ,  puisque  to  le  veux , 
Infortunée  Armide  ; 
Suis  l'Amour  qui  te  guide 
Dans  un  abîme  affreux. 
Sur  ces  bords  écartés  c'est  en  vain  que  tu  caches 
fie  héros  dont  ton  coeur  s'est  trop  laissé  toucher  : 
La  gloire ,  à  qui  tu  l'acracbes  , 
Doit  bientôt  te  Tarracher. 
Afalgré  tes  soins,  au  mépris  de  tes  larmes , 
Tu  le  verras  échapper  à  tes  charmes. 
f  u  me  rappelleras  peut-être  dès  ce  jour , 
Et  ton  attente  sera  vaine  ; 
le  vais  te  quitter  Sans  retour  : 
Se  ne  te  puis  punir  d'une  plus  rade  peine 
QU9  d?  l'abandonner  pour  jîtniais  à  l'Amour, 
(  L|i  Haine  et  m  fwie  s'abiment.  ) 


riH  DP  TBO|S|èlIE.ÂCTE« 


ACTE  QUATRIÈME. 
SCÈNE  I.      ' 

UBALDE,  LE   CBEYALIEB  DASOIS. 

<  Ulbade  porte  un  bondier  de  diamant ,  et  tient  un  sceptr« 
d'or,  qui  lui  ont  été  donnés  par  un  magicien,  pour  dis- 
siper les  encbantemens  d'Armide,  et  pour  délivrer  Renaud. 
Le  Chevalier  danois  porte  une  épée  qu'il  doit  présentera 
Renaud.  Une  vapeur  s'élève  et  se  répand  dans  le  désert  qui 
a  paru  au  troisième  acte.  Des  antres  et  des  abîmes  s'ou- 

'  vrent ,  et  il  en  sort  des  bêtes  farouches  et  des  monstres 
épouvantables.  ) 

UBALDE  ET  LE  CSEYALXEB  DAVOIS  ensemble. 

JN  ous  ne  trouvons  partout  que  des  goufîres  ouverts  ;  ] 
yUmide  a  dans  ces  lieux  transporté  les  enfers. 
Ali  !  que  d'objets  horribles  ! 
,  Que  de  nuHistres  terribles  \ 

(Le  Chevalier*  danois  veut  attaquer  les  monstres;  Ubalde 
le  retient,  et  lui  montre  le  sceptre  d'or  qu'il  porte,  et  qui 
leur  a  été  donné  pour  dissijper  les  enchantemens.  ) 

UBALDE. 

Celui  qui  noua  envoie  a  prévu  ce  danger. 
Et  nous  a  montré  Tart  de  nous  en  dégager  ; 

Ne  craignons  point  Annide  ni  ses  charmes  ; 

Par  ce  secours,  plus  puissant  que  nos  armes» 

Pïous  en  serons  aiscipent  garantis,.. 


su  armide: 

Laissez-Dous  un  libre  passif , 

Monstres,  allez  cacher  voire  inutile  rage 

Pans  l'abîme  profond  dont  vous  êtes  sortis. 

(  L«s  monstres  s*abimeiit ,  la  vapeur  se  dissipe  ,  lé  dë«ert  di»> 
parait,  et  se  change  en  une  campagne  agréable,  horAét 
d'arbres  chargés  de  fruits,  et  arrosée  de  ruisseaux.  ) 

LE   CHEYALTBn  DAVOIS. 

iàUons  cfaerdier  Renaud  ;  le  ciel  noqs  fiivorise 
Dans  notre  pénible  entreprise. 

Ce  qui  peut  flattei;  nos  désirs 
Doit  à  son  tour  tenter  de  nous  surprendre  \ 
C'est  désormais  du  charme  des  plaisirs 
Que  nous  aurons  à  nous  défendre. 
tJBALDE  ET  LB  CQEVÀLiEn  D  A  El  01  S,  ensemble. 
Redoublons  nos  soins  ,  gardons-upus 
Des  périls  agréables  ; 
Les  enchantemens  les  plus  doux 
Sont  les  plus  redoutables. 

UBALDE. 

On  voit  d'ici  le  séjour  enchanté 

D'Armide  et  du  héros  qu'elle  aime.. 
Dans  ce  palais  Renaud  est  arrêté 
Par  un  charme  fatal  dont  la  force  est  extrême. 
C'est-là  que  ce  vainqueur,  si, fier,  si  redouté, 

Oubliant  tout ,  jusqu'à  lui-même , 
Est  réduit  h  languir  avec  indigpi^ 
Dans  une  molle  oisiveté. 

LE    CHEVALIER    DAN.OIS. 

En  vain  tout  l'enfer  s'intéresse 
Dans  l'amour  qui  séduit  un  cœur  si  glorieux  ^ 
Si  sur  ce  bouclier  Renaud  tourne  les  yeux  ^ 


ACTE  ir,  SCèlfE  II.  iil 

Il  rougira  de  sa  faiblesse, 
L  nous  rengagerons  à  partir  de  ces  lieux. 

SCÈNE  i|; 

rBALiDET,  II!  CHEVAiiEa  dabois;  u»  démon,  sons  la- 

-figure    de  Lucinde,  fille  danoise,  aimée  du  cbevaliec 

danois;    tboupe  de  oéMoss,  transformés  en  babitans 

champêtres  de  File  qu'Armide  a  choisie  pour  y  retenir 

Henaud  enchanté, 

I.C  CiKQE ,  à  Ulbalcltt  et  %^.0h0▼ali•r  Danois. 
fVoicx  la  charmante  retraite. 
De  la  félicité  parfaite  ; 
Voici  liieurenx  séjour 
Des  jeux  et  de  l'amour. 

LE   GHOeUB. 

.Voici  la  charoiante  retraite',  etc. 

(Leshabitans  champêtres  dansant.  ) 
^  UBÂLDEy  au  Cheyalierdaoois. 
lÀllons,  qui  vous  retient  encore  ? 
làllons  2  c'est  trop,  nous  arrêter. 

KC   CHEYALIEB   DÂROIS. 

Je  vois  la  beauté  que  j'adore  ; 

C'est  elle ,  je  n'en  puis  douter. 

LUCINDE  ET  LE  Cflœi7ii|  ensemble.    , 
lamais  dans  ces  beaux  lieux  notre  attente  n'est  vaipe  y 
lie  bien  que  nous  cherchons  se  vient  oflQrIr  à  nous  ; 

Et,  pour  l'avoir  trouvé  sans  peine  , 

Noos  ne  l'en  trouvons  pas  moins  doux. 

LE    CHOeVR. 

Voici  la  charmante  retraite,  ete. 


J 


•  i4  ARMIDE. 

IUCIEIDE!  au  CheTalier  danois. 
Enfin  je  vois  TamaDt  pour  qai  moo  coeor  soupire } 
Je  letroave  le  bien  qae  j'ai  tant  sonbaité  ! 

LE   CBEVALIER  DAVOIS. 

Pui§-je  voir  ici  la  beauté 
Qui  m'a  soumis  à  son  empire  2 

UBALDE. 

lïOD  ;  ce  n'est  qu'un  cbanne  trompeqr 
Dont  il  faut  garder  votre  cœur. 

LB  CBEVALlEll  DASOIS,  àLucindc. 
61  loin  des  bords  glacés  où  vous  prîtes  naissance , 
Qui  peut  vous  oflHr  à  mes  yeux  t 

LUCIRDE. 

Par  tme  magique  puissance 
Aonide  m'a  conduite  en  ces  aimables  lieux , 
Et  je  vivais  dans  la  douce  espérance 
D'y  voir  bientôt  ce  que  j'aime  le  mieux. 
Goûtons  les  doux  plaisirs  que  pour  nos  cœurs  fidèles 
pans  cet  heureni  séjour  l'Amour  a  préparés  j 
he  devoir,  par  des  lois  cruelles, 
Ne  nous  a  que  trop  séparés  ! 

vbalde,  au  Chevalier  danois. 
Fuye»,  iaites-vous  violence. 

LE   CfiEVALIEB  DA50I8« 

li' Amour  ne  me  le  peimet  pas  ; 
Contre  de  si  çbarmans  appas 
Mon  cœur  est  sans  dé£ense« 

OBALOE. 

Cs»-oe  U  cette  fenneté 

Pont  vops  vQiiis  êtes  tant  vanté  Jl 


ACTE  IV,  SCÈNE  Ht  ai5 

Z    CHCVALicn  DA1I019  ET  LUCISDB ,  enkeliibU* 
,  3citiSssoiis  d'an  bonheur  extrême. 
lUi  !  quel  aatre  bien  peut  valoir 
lue  plaisir  de  voir  oe  qu'on  aime  ?, 
£h  l  qael  autre  bien  pieut  valoir 
Le  plaisir  de  vous  voir  ? 

ubAlde»  aaCImvaiiex'danoifé 
Malgré  la  puissance  infiemale , 
Malgré  vous-même ,  il  faut  vous  détromper* 
Ce  sceptre  d'or'peut  dissiper 
Une  erreur  si  fatale^ 
LJbalde  touche  Lucinde  avec  le  sceptre  d*or  qa*i1  tient ,  ëi 
Lucinde  disparait  aussitôt  avec  les  autres  démons.) 

SCÈNE  in. 

tJBÂLDE,   LE   CHEVALIEB   DA501S4 
LE   CHEV-ALIElt    DAHOIS. 

3e  tourne  en  vain  mes  yeux  de  toutes  parts  ; 
Je  ne  vois  plus  cette  beauté  si  cbère  : 

Elle  éehappe  à  mes  regards 

ConuBe  une  vapeur  légère^ 

UBALDE. 

Ce  q^e  l'Amour  a  de  charmant 
N'est  qu'une  illusion  qui  ne  laisse  après  elle 
Qu'une  honte  étcrnellr« 
Ce  que  l'Amour  a  de  charmant 
n'est  qu'un  funeste  endiantement^ 

le    CHETALIEB    DASOIS^ 

}e  vois  le  danger  où  s'ex];^os€f  - 


«aiG  ARMJUE. 

Ûd  cœur  qui  ne  fiiit  pas  mi  tharme  si  puissant, 
•Qm  TOUS  ^tes  beureux ,  si  vous  êtes  exempt 
Des  fiûblesses  <^e  TAinour  cause  ! 

17BÀI*DE« 

tïoù ,  )ê  n'ai  pt>int  gardé  m^  coeur  iQ8<|a'à  ce  joor  : 
Près  de  l'objet  qae  j'aime  il  m'était-  doux  de  vivre  ; 
Mais  quand  la  Gloire  ordonne  de  la  saiwe , 
Il  faut  laisser  gémir  TAmouF» 

Des  cbarmes  les  plus  forts  la  nison  me  dégage. 
Bien  ne  nous  doit  ici  retenir  davantage  : 
iProfitans  des  conseils  qœ  l'on  nous  a  donaés. 

SCÈNE  IV. 

UBALDEr^E    CHEVALIER    DASÔIS,tJS  DiLmOÏ  KWJ 

la  (igdre  de  Mélisse,  fille  italienne ,  aimée  dIJbaldc. 
iciLlisse^     • 
D'oto  Tient  que  TOUS  vous  détoaroet 
^  De  ces  eaux  et  de  cet  ombrage? 

TioAtez  un  doux  repos,  étrangers  fortunés; 
•     Délassez-vous  ici  d'un  pénible  voyage  :■ 
Un  favorable  sort  vous  appelle  an  pa  rtage 
Des  biens  qui  nous  sont  destinés, 

tJBALDE. 

Es^-ce  v6us,  cliarmante  Mélisse?. 

MÉLISSE. 

Est-ce  vous?  cber  amant!  est-ce  vous  que  je  voi? 

UBALDE  ET  MELISSE,   ensemble. 
-Au  rapport  de  mes  sens  je  n'ose  ajouter  foi. 


ACtE  IV,  SCÈNE  IV.  .         21. 

I  Se  peut-il  qu'en  ces  lieux  TAmour  nous  réunisse?. 

'  MÉLISSE. 

Est-ce  vous?  cher  amant!  est-ce  vous  que  je  roi  ! 

UBALDE. 

Est-ce  vous  ,  charmante  Mélisse  ! 

lE    CHEVALIER    DABOIS. 

Non ,  ce  n'est  qu'un  charme  trompeur 
Dont  il  faut  garder  votre  cœur. 
Fuyez,  faites-vous  violence. 

MÉLISSE. 

Pourquoi  faut-il  encor  m'arracher  mon  amant  ?; 
Faut-il  ne  nous  voir  qu'un  moment 
Après  une  si  longue  absence  ?... 
(  A  Ubalde.) 
e  ne  puis  consentir  à  votre  éloignement  ; 
Je  n'ai  que  U  op  soufièrt  un  si  cruel  tourment  ; 
Et  je  mourrai  s'il  reccmunence. 

DBALDE   ET   MELISSE,   ensembU. 
Faut-il  ne  vous  voir  qu'un  moipent,etc. 

LE    CHEVALIER    DANOIS. 

Est-ce  là  cette  fermeté 
Dont  vous  vous  êtes  tant  vanté? 
Sortez  de  votre  erreur,  la  raison  vous  appelle. 

UBALDE. 

'Ah  !  que  la  raison  est  cruelle! 
Si  je  suis  abusé,  pourquoi  m'en  avertir  ? 

Que  mon  erreur  me  paraît  belle  ! 
Que  je  serais  heureux  de  n'en  jamais  sortir  ! 

LE    CHEVALIER    DANOIS. 

l'aurai  soin,  ipalgré  vous,  de  vous  en  garantir. 
(Le  Chevalier  danois  ôte  le  sceptre  d'or  des  mains  d'Ubalde  ; 
il  en  tonclte  Mélisse ,  et  la'  fait  xlisparaitre.) 
^Grands  Opéras.  2,  dO 


,i8       AHMIDE.  ACTE  IV,  SCÈUE  V. 

SCÈNE  y. 

TJBÀ.LDE,   I.E   CHEVÀllB»   DAWOI». 

1JBAl.t>E. 
Que  devient  Tobjet  qui  m'enflamme  2 
Mélisse  disparaît  soudain  î.... 
Ciel'.  Êmt-il  qu'un  fantôme  vain 
Cause  tant  de  trouble  â  mon  ame? 

LE   CHEVAtlEB  DASOIS 

te  que  l'Amour  a  de  charmant 
N'est  qu'une  illusion  qui  ne  laisse  après  elle 
Qu'un^  bonté  éternelle. 
Ce  que  l^ Amour  a  de  cbarmant 
N'est  qu'un  funeste  cncbanteiiolht, 

VBALDE  ET   LE    CHEVALIER  DANOIS,    elWemWe. 

Ce  que  l'Amouè  a  de  cbannant,  etc. 

T3BALDE. 

D'une  nouvelle  erreur  songeons  à  nous  défendre  : 

Evitons  de  trompeurs  attraits. 
Ne  nous  détournons  plus  du  chemin  qu'il  faut  prendre 

Pour  arriver  à  ce  palaiS. 

VBALDE    ET  LE   CHEVALIER  DASOIS,  ensemble. 

Fuyons  les  douceurs  daogeieuses 
Des  illunons  amoureuses  : 
On  s'égare  quand  on  les  suit  : 
Keureux  qui  n'en  est  pas  séduit  f 

riSr  DU  qOATRIÈMB  ACTE* 


ACTE  CINQUIÈME. 

T^  théâtre  change ,  et  représente  le  palais  enchante 
d'Ânnide. 


SCÈNE  I. 

ARMIDE,  RENAUD. 
BEVAUD,  sans  armes  «  et  paré  de  guirlandes  de  fleurs. 
xxbiude  ,  TOUS  m'allez  quitter  ! 

ADMIDE. 

l'ai  besoin  des  enfers,  je  vais  les  consulter. 

Mon  art  veut  de  la  solitude. 
I^'amour  que  j'ai  pour  vous  cause  l'inquiétude 

Dont  mon  cceut  se  sent  agiter. 

HEVAnD. 

Annide,  vous  m'allez  quitter  ! 

ABMIDE.     « 

Voyez  en  quels  lieux  je  vous  laisse. 

behauo. 
Puis-je  rien  voir  que  vos  appas? 

ARHIDE. 

Les  Plaisirs  vous  suivront  sans  cesse. 

IIEHAUD. 

En  est-il  où  vous  n'êtes  pas? 

AimiDE. 

Un  noir  pressentiment  me  trouble  et  me  tourmente, 


À 


220  ARMibE. 

Il  m'annonce  un  malheur  que  je  veux  prévenir; 

Et  plus  notre  bonheur  m'enchante , 

Plus  je  crains  de  le  voir  ânir. 

nEKAUD. 

D'une  vaine  terreur  pouvez-vouS  être  atteinte  , 
Vous  qui  faites  trembler  le  ténébreux  séjour? 

ARMIDE.  ^ 

Vous  m'apprenez  â  connaître  rAmour  ; 

L'Amour  m'apprend  â  connaître  la  crainte. 

Vous  brûliez  pour  la  Gloire  avant  que  de  m'aimer  ; 
Vous  la  cherchiez  partout  d'une  ardeur  sans  égale  : 

La  Gloire  est  une  rivale 

Qui  doit  toujours  m'alarmer. 

nSSAUD. 

Que  j'étais  insensé  de  croire 
Qu'un  vain  laurier ,  donné  par  la  Victoire  y 
De  tout  les  biens  fût  le  plus  précieux  ! 

Tout  l'éclat  dont  brille  la  Gloire 

Vaut-il  un  re^rd  de  vos  yeux?. 
Est-il  un  bien  si  charmant  et  si  rare 
Que  celui  dont  l'Amour  veut  combler  mon  espoir?. 

ARMIDE. 

La  sévère  raison  et  le  devoir  barbare 

Sur  les  héros  n'ont  que. trop  de  pouvoir. 

BEIiAtJD. 

Plus  je  suis  amoureux ,  plus  la  raison  m'éclaire. 
Vous  aimer ,  belle  Armide  ;  est  mon  premier  devoir  : 
Je  fais  ma  gloire  de  vous  plaire , 
Et  tout  mon  bonheur  de  vous  voir^ 


ACTE  V,  SéÈNE    I.  aaii 

ABMIDE. 

Que  sous  d'aimables  lois  mon  ame  est  asservie  î 

KEBÂUD. 

Qu'il  m'est  doux  de  vous  voir  partager  ma  langueur  ! 

ABMIDE. 

Qu'il  m'est  doux  d'enchaîner  un. si  fameux  vainqueur! 
henàud. 
Que  mes  fers  sont  dignes  d'envie  ! 

BENAUD  ET  A BidiD E ,  ensemble. 
Aimons-nous ,  tout  nous  y  convie. 
Ah  !  si  vous  aviez  la  rigueur 
De  m'ôter  votre  cœur, 
.Vous  m'ôteriez  la  vie, 

»  BENAUD. 

Non  j  je  perdrai  plutôt  le  jour 
Que  d'éteindre  ma  flamme. 

ABMIDE. 

Non ,  rien  ne  peut  changer  mon  ame. 

BEWAUD. 

Non ,  je  perdrai  plutôt  le  jour 
Que  de  me  dégager  d'un  si  charmant  amour. 

BESAUD   ET   ABMIDE,  ensemble. 
Non ,  je  perdrai  plutôt  le  jour ,  etc. 

ABMIDE. 

Témoins  de  noti-e  amour  extrême, 
Vous  qui  iuivez  mes  lois  dans  ce  séjour  heureux , 
3usqucs  à  mon  retour ,  par  d'agréables  jeux , 
Occupez  le  héros  que  j'aime. 

(Elle  sort.) 
(Les  Plaisirs  et  une  troupe  d'amans  fortunés   et  d'amant ps 
heureuses  viennent  divertir  Kcnaud  par  des  chanls  cl  par 
des  danses.  ) 


A 


aa  'ARMIDE. 

SCÈNE  II. 

BEN  Au  D,    LES   pLAisiBS,    troupe    d'AMASS  n 
d'akahtes  heubeuses. 

[  VV   AHA8T   FOBTUVé  ET  LES  CHOEURS,  ettSemUc. 

Les  Plaisirs  ont  choisi  pour  asile 
Ce  séjour  agréable  et  tranquille. 

Que  ces  lieux  sont  charmans  » 

Pour  les  heureux  amans  ! 

Cest  TAmour  qui  retient  dans  ses  chaînes 
Mille  oiseaux  qu'en  nos  bois  nuit  et  jour  on  entend. 

Si  TAmour  ne  causait  que  des  peines , 
Les  oiseaux  amoureux  ne  chanteraient  pas  tant. 

Jeunes  cœurs ,  tout  vous  est  favorable  ; 

Profitez  d'un  bonheur  peu  durable. 
Dans  l'hiver  de  nos  ans  l'Amour  ne  règne  plus  : 
Les  beaux  jours  que  Ton  perd  sont  pour  jamais  perdus. 

Les  Plaisirs  ont  choisi  pour  asile ,  etc. 

KE9AUD. 

Allez ,  éloignez-vous  de  moi , 
Doux  Plaisirs ,  aittendez  qu'Armide  vous  ramène. 
Sans  la  beauté  qui  me  tient  sous  sa  loi , 
Kien  ne  me  plaît ,  tout  augmente  ma  peine. 
^     Allez ,  éloignez-vous  de  moi , 
Doux  Plaisirs,  attendez  qu'Armide  vous  ramène. 
(  Les  Plaisirs ,  les  amans  forlunés  et  les  amantes  heureuses  se 
retirent.) 


ACTE  V,  SCÈNE  111.'  aaS 

SCÈNE  III. 

[RENAUD,  URALDE,  le  chevalieb  dabois. 

VBAlde,  au  Chevalier  danois. 

II.  est  seul ,  profitons  d'an  tems  si  précieux. 

.(  Ubalde  présente  le  bouclier  de  diamant  aux  yeux  d» 
Renaud.) 

B  E  M  Â  U  D  ,  apercevant  le  bouclier. 
Que  vois-je  ?  quel  écbt  me  vient  frapper  les  yeux  ?. 

UBALDE. 

Le  ciel  veut  vous  faire  connaître 
L'erreur  dont  vos  sens  sont  séduits. 

BESAUD. 

Ciel!  quelle  honte  de  paraître 
Dans  l'indigne  état  où  je  suis  ! 

UBALDE. 

Notre  général  vous  rappelle. 
La  Victoire  vous  garde  une  palme  immortelle  : 

Tout  doit  presser  voire  retour.  ' 

De  cent  divers  climats  chacun  court  h  la  guerre! 

Benaud  seul ,  au  bout  de  la  terre  , 

Caché  dans  un  charmant  $éjour , 

Veut-il  suivre  un  honteux  amour  ?, 

RESAUD. 

Vains  ornemens  d'une  indigne  mollesse , 
Ne  m'ofirez  plus  de  firi voles  attraits  ; 
Restes  honteux  de  ma  faiblesse , 


:ï24  AR>riDE. 

AIIcx ,  quittez-moi  p^our  jamais. 

(  Renaud  arrache  les  guii-I;<n4«i  de  (leurs,  et  les  autres  orne" 
mens  inutiles  dont  il  est  paré-,  il  reroit  le  bouclier  de  dia- 
tiiunt  que  lui  donne  Ubalde  ,  et  une  cpée  que  lui  pré- 
sente le  Chsvulier  dunois.  ) 

LE    CHEVALIER    DANOIS. 

Dérobez-vGus  aux  pleurs  d'Armide  j 
C'est  l'unique  danger  dont  votre  ame  intrépide 

A  besoin  de  se  garantir. 
Dans  ces  lieux  enchantés  la  Volupté  préside  j 

Vous  n'en  sauriez  trop  toi  sortir. 

RESAUD.    . 

AUoiiS ,  bâtons-nous  de  partir. 


SCÈNE  IV. . 


ARMIDE,  RENAUD,  UBALDE,  le  chevaliei 

DAHOIS. 

ABMIDE,  à  Hefiaud. 
Besaud!  ciel!  6  mortelle  peine  ! 
Vous  partez ,  Renaud ,  vous  partez  ! 

rémons,  suivez  ses  pas,  volez  et  l'arrêtez... . 

(A  part.) 
Hélesl  tout  me  trahit,  et  ma  puissance  est  vaine  !... 
(  A  Benaud.  ) 

Renaud  l  ciel  l  ô  mortelle  peine  ! 

Mes  cris  ne  sont  pas  écoutés  î 

Vous  paitez ,  Renaad ,  vous  partez  ! 

(  Renaud  s'arrête  pour  écouter  Armide.  ) 
^  fe  ne  vous  vois  plus ,  croyez-vous  que  je  vive  ? 
Ai-[e  pu  mériter  on  si  cruel  tounnent  t 


ACTE  V,  SCÈNE  IV.  aaS 

tAvL  moins,  comme  emiemi,  si  ce  n'est  comme  amant, 

Emmenez  Annide  captire. 
3'irsà  dans  les  combats,  )'iiai  m'offiir  atu  coups 
Qui  seront  destinés  pour  vous. 
Benaud ,  pourvu  que  je  vous  suive , 
Le  son  le  plus  affireuz  me  paraîtra  trop  doux. 

BEIIAUD. 

•Ârmide ,  il  est  tems  que  j'évite 
Le  péril  trop  charmant  que  je  trouve  i.  vous  voir  : 

La  Gloire  veut  que  je  vous  quitte  ; 
Elle  ordonne  à  l'Amour  de  céder  au  devoir. 
Si  vous  souflrez ,  vous  pouvez  croire 
Que  je  m'éloigne  à  regret  de  vos  yeux  : 
Vous  régnerez  toujours  dans  ma  mémoire  ; 
Vous  serez ,  après  la  Gloire , 
Ce  que  j'aimerai  le  mieux. 

ABMIDte. 

Non ,  jamais  de  l'Amour  tu  n'as  senti  le  channe  ; 
tTu  te  plais  à  causer  de  funestes  malheurs  : 
iTu  m'entends  soupirer ,  tu  vois  couler  mes  pleurs , 
Sans  me  rendre  un  soupir ,  sans  verser  une  larme. 
Par  les  nœuds  les  plus  doux  je  te  conjure  en  vain  i 
Tu  suis  un  fier  devoir ,  tu  veux  qu'il  nous  sépare. 

Non ,  non ,  ton  coeur  n'a  rien  dlmmam  ; 

Le  coeur  d'un  tigre  est  moins  barbare. 
7e  mourrai,  si  tu  pars,  et  tu  n'en  peux  douter... 

Ingrat  !  sans  toi  je  ne  puis  vivre  ; 
Mais,  après  mon  trépas,  ne  crois  pas  éviter 

Mon  ombre  obstinée  à  te  suivre  : 
Tu  la  verras  s'armer  contre  ton  coeur  sans  foi  ; 

Tu  la  trouveras  inflexible , 

Comme  tu  Tas  été  pour  moi  ; 


aiG  AR^IIDE. 

Et  sa  fureur,  s'il  est  possible. 
Egalera  Tamour  dont  j'ai  brâlé.poor  loi.... 
Ah!  la  lumière  m'est  cavi^  i 
Barbare  î  es-tu  cqntent? 
Tu  jouis ,  eu  partant , 
Du  plaisir  de  m'dtec  (a  vie. 

(  Armide  tombe  évanouie.  ) 
BENÀUD,  à  part. 
Trop  malheureuse  Armide ,  hélas  î 
Que  ton  destin  est  déplorîd)le! 

UBÂLDE  ET  lE   CHEVALIEB   DA90IS,    ensomblf. 

U  faut  partir ,  hâtez  vos  pas  ; 
La  Gloire  attend  de  vous  un  coeur  inébranlable. 

BEBADD. 

Non ,  la  Gloire  n'ordoiiiie  pas 
Qu'un  grand  cœur  soit  mçitojrable. 
UBALDB  ET  LE  CHE;VAi.|EIk  dAsois,   ensembl*, 
emmenant  BeQa^d  malgré  loi. 
U  faut  vous  arracher  aux  dangereux  appas 
D'un  objet  trop  aimable. 

BESAyo  }  à  part,  et  s'en  allant. 
Trop  malheureuse  Armide ,  hélas  ! 
Que  ton  destin  est  déplorable  1 

SCÈNE  V. 

ARMIDE,  seule ,  revenant  de  son  évanouissement. 

Le  perfide  Renaud  me  fuit  !.... 
Tout  ()eifide  qu'il  est,  mon  lâche  cœur  le  suit.... 
Il  me  laisse  mourante ,  il  veut  que  je  périsse. 
A  regret  je  revois  la  clarté  qui  me  luit } 


ACTE  V,  SCÈNE  Vt.  227 

L'horreur  de  l'éteraelle  nuit 
Cède  â  rborreur  de  mon  supplice!.... 
Le  perfide  Renaud  me  fuit  ! 
Tout  perfide  qu'il  est ,  mon  lâôhe  cœur  le  suit.... 

Quand  le  barbare  était  en  ma  puissance , 
Que  n'ai-je  cm  la  Haine  et  la  Vengeance  ! 
Qde  n'ai-je  suivi  leurs  transports  ! 
Il  m'écbappe ,  il  s'éloigne  ;  il  va  quitter  ces  bords  : 
Il  brave  Tenfer  et  ma  rage  ; 
Il  est  déjà  près  du  rivage... 
Je  fais  pour  m'y  traîner  d'inutiles  efforts.... 

Traître  !  attends....  je  le  tiens...  je  tiens  son  coeur  perfide.. 

Ab  !  je  l'immole  à  ma  fureur... 
Que  dis-je  ?  où  suis-je  ?  Hélas  !  infortunée  Armide  I 

OÙ  t'emporte  une  aveugle  erreur? 
L'espoir  de  la  vengeance  est  le  seul  qui  me  reste... 
Fuyez,  Plaisirs ,  fuyez  ;  perdez  tous  vos  attraits... 

Démons ,  détruisez  ce  palais... 

SCÈNE  VI. 

ARMIDE,  troupe  de  démo k s. 

ABMIDE. 

Vaxtovs  ,  et ,  s'il  se  peut ,  que  mon  amour  funeste 

Demeure  enseveli  dans  ces  lieux  pour  jamais. 

(  Elle  s'éloigne  dans  nn  char  volant ,  et  les  démons  détruiient 
le  palai«  enchanté.) 

FIN  d'abmide. 


ISSE, 

PASTORALE  HÉROÏQUE, 

EN  CINQ  ACTES, 

PARJJAMOTTE; 

Beprésentée,  pour  la  première  fois ,  en  trois  actes ,  le  1 7  dé- 
cembre 1697  ;  et  en  cinq  actes,  le  i4  octobre  1708. 

Ut  pastor  Macareda 
Luserit  Issen. 

Ex  Met.  lib.  6.    • 


Grands  Opéras.  2. 


J 


AVERTISSEMENT 

SUR  LES  OPÉRAS    DE  LAMOTTE. 


Ijes  personnes  qui  voudraient  lire  une  notice 
sur  Lamotte  n'en  trouveront  point  ici,  c^ttendu 
que  9  dans  Tancien  Répertoire ,  il  y  en  a  une 
qui  précède  la  tragédie  d'Inès;  nous  ajoute- 
rons seulement  quelque  chose  relativement 
à  la  partie  de  son  théâtre  que  nous  donnons. 

Lamotte  a  laissé  des  titres  durables  à  une 
réputation  littéraire  dans  trois  genres  d'opé- 
ras ,  les  seuls  à  peu  près  que  nous  connais- 
sions ;  ce  sont  la  pastorale ,  les  ballets  et  la 
tragédie-lyrique.  Il  a  mérité  d'être  considéré 
commele  successeur  et  l'imitateur  de  Quinault  : 
personne^  après  ce  grand  maître,  n'ayant  porté 
plus  loin  l'intelligence  de  ce  genre  de  compo- 
sition dramatique ,  quoiqu'il  n'ait  rien  ajouté 
aux*  moyens  inventés  par  lui.  Lamotte  ,   de 
même  que,  depuis  lui,  Marmontel,  s'est  montré 
plus  poëte  dans  ses  opéras  que  dans  ses  autres 
poésies.  On   y  trouve  cette  molle  élégance 
d'expressions  pour  lesquelles  Quinault  lui  a 


23i  AVERTISSEMENT. 

servi  de  modèle  ^  et  dont  toutefois  il  n'a  jamais 

sez  approché. 

En  général,  ses  opéras   ont  toujours  été 
repris  avec  succès  et  il  en  est  qui  dureront 
autant  que  la  scène  lyrique  française.    Nous 
ne   partagerons    cependant    pas     TaTls     de 
quelques    critiques    qui    ont    appelé    VEu- 
rope  galante  et  Amadis  de  Grèce  des  chefs- 
d' œuvres  ;  nous  les  regardons   au   contraire 
comme  des  productions  très-faibles  ;  mais  il 
n'en  est  pas  de  même  de  plusieurs  autres. 
«  De  tous  les  grands  opéras  faits  depuis  Qui- 
»  nault,  »   a  dit  La  Harpe,    c  Sémélé  est  à 
»  mon  avis  le  meilleur.»  Ce  jugement  est  un 
peu  absolu  :  Œdipe  à.  Colonne  et  Dardanus 
peuvent  lui  disputer  la  palme.  Mais  exagéra* 
tion  à  part,  La  Harpe  rend  justice  au  mérite 
de  cette  pièce'où  il  y  a,  dit-il,  «  des  beautés  de 
»  toutes  les  sortes  ,  qui  ont  toutes  leur  effet , 
»  parce  que  le  fond  en  est  intéressant.  » 

La  pastorale  d'Issé  marche  pour  le  moins 
sur  la  même  ligne  ;  c'est  la  meilleure  pasto- 
rale-lyrique que  nous  ayons.  On  pourrait  citer 
une  multitude  de  strophes  et  de  morceaux 
qu'elle  renferme  ,  et  qui  sont  remarquables 
par  l'agrément  et  la  douceur  qui  conviennent 
on  ne  peut  mieux  au  genre  et  au  sujet ,  en- 


AVERTISSEMENT.  ,23% 

%re  autres  cette  charmante  cautatUle  qui  eom- 
mence  par  ce  Ters  : 

C'est  Issé  qui  repose  en  ces  lieux  ï  ecc . 

Et  ce  monologue  y 

Heureuse  paix,  tranquille  indîHerence  ,  etc. 

Après  cette  production,  celle  où  Lamottea* 
Te  mieux  réussi,  parce  qu'elle  était  le  plus  dans 
son  genre  de  talent,  c'est  le  Triomphe  des  arts, 
ouvrage  bien  imagfné,  bien  exécuté,  dont 
l'idée  est  ingénieuse,  théâtrale,  et  dont  le  style 
est  éminemment  lyrique.  C'est-là  sans  doute 
que  J.-J.  Rousseau  a  puisé  son  joli  mélodrame 
clcPygmalion,  petit  chef-d'œuvre  de  prose  poé- 
tique. De  toutes  les  pièces  de  Lamotte,  il  n'y 
éti  a  pas  qui  soît  plus  favorable  au  spectacle 
pour  lequel  elle  fut  faite,  puisque  c'est  ie  seul- 
où  se  réunissent  spécialement  la  musique,  la 
peinture  et  la  poésie.  Un  morceau  qu'on  y 
remarquera  c'est  celui  de  l'acte  à'Àmphion 
qui  commence  ainsi  : 

Antres  affreux,  demeures  sombres,  etc. 

Dans  le  dialogue  de  Campas pe^  il  y  a  non-seu  - 
lement  de  la  délicatesse  ,  mais  encore  du  sen- 
timent exprimé  en  beaux  vers.  Y  a-t-il  rien 
au-dessus  de  cette  réponse  spirituelle  de  l'a- 
mante d'Apelle  au  sujet  de  ce  grand  peintre? 

ïi'art  plus'que  la  valeur  est  aimable  i  mes  yeux. 


a34  AVt:RTISSEMENT. 

Par  lui  toat  agit ,  tout  respire  ; 
11  tait  animer  tout,  à  Tetemple  des  Dieux; 

La  valeur  ne  sait  que  détruire ,  etc. 

L'opéra  d'Omphale  est  plein  dHntérêt  ;  et 
SI  a  fait  oublier  tous  ceux  de  Lamotte  qui  sont 
de  la  même  espèce,  et  où  l'on  trouve  toujours, 
comme  dans  celui-là,  deux  couples  de  rivaux 
et  de  rivales  qui  font  partie  carrée. 

En  général  les  opéras  de  cet  auteur  n'ont  clé 
ensevelis  dans  l'oubli  que,  parce  que  la  mu- 
sique avec  laquelle  ils  ont  été  joués  est  tombée; 
mais  on  les  ferait  facilement  revivre  avec  une 
musique  nouvelle;  ils  valent  certainement 
mieux  que  la  plus  grande  partie  de  ceux  qui 
ont  paru  depuis  eux  jusqu'à  présent.  Il  Be 
s'agirait  pour  les  ressusciter  que  de  quelques 
airs  nouveaux,  de  quelques  ballets  9  et  ils  au- 
raient un  grand  succès* 

Nous  justifierons,  l'insertion  de  cpiatre  opé- 
ras, qui  sont  dans  ce  volume  et  dans  le  sui- 
vant, par  l'autorité  de  Voltaire  qui,  pour  faire 
entrer  Lamotte  dans  le  Temple  du  goût ,  ne 
lui  a  demandé  que  quelques-unes  de  ses  fa-. 
bles  eX  quelques-uns  de  ses  opéras;  or,  de  l'ave* 
des  meilleurs  critiques  ,  ainsi  que  de  celui  de- 
Le  Harpe,  Sémélé^  Issé^  le  Triomphe  desyirts^ 
et  Omphale  sont  ce  qu'il  a  fait  de  mieux  dans 
ce  genre  de  littérature. 


AVERTISSEMENT.  a35 

Outre  ceux-là,  Lamotte  a  donné  :  lakVéni- 
-eienne  ,  Marthésie  ,  U  ballet  des  Fées ,  celui 
€ies  Ages  y  et  le  Carnaval  et  laFolie.  On  sait  qu'il 
a  composé  un  Tolume  d'odes ,  dont  plusieurs 
Tie  sont  pas  indignes  de  J.-B.  Rousseau. 

Qui   croirait  après  cela  qu'il  ait  été  Tun 
des  plus  grands  dépréciateurs  de  la  poésie 
française  ?  Mais  on  ne  doit  pas  s'en  étonner 
de  la  part  d'un  homme  qui ,  dans  sa  jeunesse 
voulut  entrer  dans  un  couvent  de  La  Trappe, 
après  avoir  fait  une  pièce  de  théâtre ,  et  qui 
n'y  fut  pas  admis-  parce  qu'il  n'avait  pas  l'es- 
tomac assez  robuste.  Il  a  comparé  nos  plus 
grands  versificateurs  à  ces  charlatans  de  l'an- 
tiquité, qui  fesaient  passer  des  grains  de  millet 
par  le  trou  d'une  aiguille  ,  sans  autre  mérite 
que  celui  de  la  difficulté  vaincue. 

Pour  prouver  son  système  par  des  exem- 
ples ,  il  s'avisa  de  faire  un  Œdipe  en  prose 
qu'il  mit  en  opposition  avec  son  Œdipe  en 
vei*s.  Mais  comme  ce  dernier  n'était  que  de  la 
prose  rimée,  la  différence  ne  put  être  appréciée 
par  les  connaisseurs,  et  cette  comparaison  lui 
attira  une  nuée  d'épigrammes. 

Néanmoins,  ce  ne  sont  pas  les  inconséquen- 
ces de  Lamotte  qui  ont  foit  oublier  les  neuf 
'     dixièmes  de  ses  ouvrages;  c'est  que  chez  lui 
le  sentiment ,  la  chaleur  de  l'ame  et  la  verve 
étaient  loin  d'égaler  l'esprit. 


ACTEURS  DE  LA  PASTORALE. 

(APOLLON,  déguisé  en  berger,  sous  le  nom  de  PhilémoD. 

PAN ,  déguisé  en  berger,  couiident  d'ApoIiou. 

HILAS,  berger. 

ISSE,  nymphe,  fille  de  Macarée. 

DORIS,  sœur  d'Issé. 

Suite  d'HiLAS,  représentant  les  Plaisirs. 

Troupe  de  bergers,  de  bergères,  de  pâtres,    et   de 

paysannes. 
>tJn  berger. 
Deux  bergères. 
.  Le  Ghasd-Phêtiœ  de  la  forêt  de  Dodone. 
Troupe  de  ministies. 
L'OnACLE. 
Troupe  de  Faunes ,  de  Dryades ,  de  Silvaios ,  et  de 

Satyres. 
Une  Dryade. 
Le  Sommeil. 

Troupe  de  zéphirs  et  de  nymphes. 
Troupe  d'Européens  et  d'Européennes. 
Une  Européenne. 

Troupe  d'Américains  et  d'Américaines. 
Troupe  de  Chinois  et  de  Cliinoises. 


ISSE, 

PASTORALE  -HÉROÏQUE. 

ACTE  PREMIER. 

Le  théâtre  représente  an  hameau. 


SCÈNE  I, 

[À^POLLOI^;  dëguisd  en  berger  sous  le  nom  de  Philëmon. 

SxuAND  on  a  Souffert  une  fois 
L'amoureux  esclavage , 
'Ah!  devrait-on  s'exposer  davantage 
A'  gémir  sous  les  mêmes  lois  ? 
La  cruelle  Daphné  dédaigna  ma  tendresse  : 
De  mes  ardens  soupirs ,  de  mes  soins  empressés , 
Mon  cœur  ne  recueillit  qu'une  affreuse  tristesse. 
Faut-il  aimer  encore  ?  Et  n'est-ce  pas  assez 
D'une  malheureuse  faiblesse  ?. 

Quand  on  a  souffert  une  (bis ,  etc. 


a38  ISSÉ. 

SCÈNE  II. 

PAN,  déguise  en  berger",  APOLLON. 

.PAU. 
'A  qui  vous  plaignc^vous  dp  vo$  nouvelles  chaînes  ? 

APOLLOR. 

Pan ,  tu  vois  les  téiooios  de  mes  tendres  tourmens.' 

Les  prés  ,  les  bois  et  les  fonuines , 
Sont  les  favoris  des  aniaus. 

On  passe  ici  d'heureux  iDomens , 
Même  en  s'y  plaignant  de  ses  peines. 

Les  prés ,  etc. 

PAS. 
Ne  seront-ils  témoins  que  de  votre  martyre  ? 
Entendront-ils  toujours  vos  laoguissans  regrets?. 

Apollon  n'aura-t-il  jamais 

De  plus  doux  secrets  à  leur  dire  ?« 

APOLLON. 

J'espère  d'être  plus  heureux , 
Mon  malheur  n'est  pas  invincible. 
Les  yeux  charmans  d'Issé  m'ont  demandé  mes  voeux. 
Ah  !  ne  serai-je  pas  le  plus  content  des  dieux  , 
Si  son  coeur  sensible 
.  Est  d'accord  avec  ses  yeux  ! 

PAN. 

Pourquoi  lui  déguiser  votre  rang  glorieux  ?. 


ACTE  I,  SCENE  III.  a39 

APOLLOV. 

veux  y  sans  le  secours  de  ma  grandeur  ^préme , 
Kssaycr  de  plaire  en  ce  jour. 
Qu'il  est  doux  d'avoir  ce  ^'on  aime 
Par  les  seules  mains  de  TAmour  ! 

Mais  )e  vois  la  nymphe  paraître  ; 
1\  faut  contraindre  encor  mes  tendres  roonvemens. 
Cachons-nous  à  ses  yeux ,  et  tâchons  de  connaître 

Quels  sont  ses  secrets  sentimeos. 

$CÈNE  III. 

isst. 

Heureqsb  paix ,  tranquille  indifférence , 
Faut-il  que  pour  jamais  vous  sortiez  de  mon  cœur  ? 

Je  sens  que  ma  fierté  me  laisse  Sans  défense  ; 

Bien  ne  peut  me  sauver  d'un  trop  charmant  vainqueur; 

L'Amour ,  le  tendre  Amour  force  ma  résistance. 

Heureuse  paix ,  etc. 

le  force  encor  mes  regards  an  silence  ; 
]e  cache  ù  tous  les  yeux  ma  nouvelle  langueur  ; 
Mais ,  que  sert  cette  violence  ! 
L'amour  en  a  plus  de  rigneor, 
Et  n'en  a  pas  moins  de  paisâaace. 

Heureosepaix,  etc. 


240  .  IbSE. 

SCÈNE  IV. 

DORIS,  ISSÉ. 

DOBIS. 

.T'aime  à  vous  voir  en  ce  lieu  solitaire  , 
Il  oflre  mille  attraits  h.  des  cœurs  amoureux  ; 
,Vou8  y  venez  rêver;  c'est  un  présage  heureux 

Qu'enfin  Hilas  a  su  vous  plaire. 
Votre  cœur  dès  long-tems  se  devait  à  ses  feux. 
On  n'a  jamais  brûlé  d'une  ardeur  plus  fidèle  : 

Bientôt  par  d'agréables  jeux 
Il  vous  en  donne  encore  une  preuve  nouvelle. 

ISSÉ. 

Hélas! 

Donis. 
Avant  cet  heureux  jour, 
Votre  insensible  cœur  ignorait  ce  langage  j 
Et  ce  soupir  est  le  premier  hommage 
Que  je  vous  vois  rendre  ù  l'Amour. 

ISSE. 

Que  ne  puis-je  encor  fuir  son  fimeste  esclavage  î 
Mes  jours  coulaient  dans  les  plaisirs! 

Je  goûtais  à-la-fois  la  paix"et  l'innocence  ; 

Et  mon  cœur ,  satisfait  de  son  indiflTérence. 
Vivait  sans  crainte  et  sans  désirs  : 

Mais  depuis  que  l'Amour  l'a  rendu  trop  sensible, 
Les  plaisirs  l'ont  abandonné. 
Quel  changement  î  6  ciel  !  est-il  possible  î 


ACTE  I,  SCÈNE  V.  a4r 

Non"*,  ce  D'est  plus  ce  cœur  si  cootent ,  si  paisible  : 
C'est  un  cœur  tout  nouveau  que  rAmoni  m'a  donné. 

DOBIS. 

Se  peut-il  que  votre  coeur  tremble  , 
Quand  il  ne  tient  qu'à  lui  d'être  heureux  dès  ce  jour?. 
Il  faut  qu'avec  Hilas  un  beau  nœud  vous  assemble  ; 
L'hymen ,  pour  vous  unir ,  n'attendait  que  l'Amour.. 

Quand  un  doux  penchant  nous  entraîne , 
Pourquoi  combattre  nos  désirs  ?i 
Est-il  une  plus  rade  peine 
Que  de  résister  aux  plaisirs  ! 

(  On  entend  une  symphonie.  ) 
issé. 
Mais  qu'annoncent  ces  sons  ?  Quel  spectacle  s'apprête  ? 
noms. 
Pourquoi  feindre  de  l'ignorer?. 
Ces  concerts  sont  pour  vous  ;  c'est  la  nouvelle  fête 
Qullilas  vous  a  fait  préparer. 

SCÈNE  V. 

ISSÉ,  DORIS,  HILAS,  suite  d'HiLAs,  sons  lai 
forme  de  Néréides  et  de  Nymphes  de  Diane,  conduites 
par  les  P  LAI  s  IBS. 

HILAS,  à  Usé. 
Nymphe  ,  jugez  ici  de  ma  flamme  fidèle  ; 
Souffirez  que ,  par  d'aimables  jeux , 
.     Mon  hommage  se  renouvelle  ; 
Et  n'opposez  point  â  mes  feux 
Une_  indifiërence  étemelle.    .    , 
Grands  Opéras.  ^.  211 


24^  ISSÉ. 

issi. 
La  seule  iodiffërence  aSsare  mt  sort  bedrètcr. 

HILAS. 

L'Amour  a  tout  soumis  à  ses  lois  SôdVA^itMs  ; 
Il  fait  sentir  ses  feux  dans  llramide  s^onr  ; 
Il  blesse  de  ses  traits ,  il  charge  de  ses  chaînes 

La  fière  Diane  ot  sa  cour. 
Mais  il  n'est  pas  encor  content  de  sa  yictoire  ; 

Le  ccenr  d'Issé  manque  à  sa  gloire. 
!Âimez,  aimez,  ne  soyez  plus  rebelle 

A  de  tendres  dénirs; 
Suivez  TAmour  qui  vous  appelle 

Par  la  voix  des  Plaisirs. 

CBCEUB. 

Aimez,  aimez,  ne  soyez  plus  rebelle 
A  de  tendres  désirs; 
Suivez  l'Amour  qui  vous  àp^Hë 
Par  la  voix  des  Plaisirs. 

(On  danse.) 
CH<!felfB. 
Au  dieu  d'Amour  daignez  rendre  les  armes  ; 
Bien  n'est  si  doux  que  les  tendres  soupirs. 
Pour  d'autres  cœurs  il  garde  ses  alanones , 
Et  ses  faveurs  suivront  tons  vos  désirs , 
Non ,  non ,  il  faut  se  rendre  ; 
C'est  trop  attendre; 
L'Amour  pour  vous  réserve  ses  plaisirs; 

(  Oa  danse.  ) 

DEUX   HTMPBES. 

Les  doux  Plaisirs  habitent  ce  bocage  ; 

Des  plus  longs  jours  ils  nous  font  des  momeuf. 


ACTE  I,  SCÈNE   Y-  243 

Les  rossignols ,  par  leurs  concerts  cbannans  ; 
Le  bruit  des  eaux^  le  zépfair  et  Tombràge , 
Tout  sert  ici  l'Amour  et  les  amans. 

(  On  danse.  ) 

H  IL  AS. 

Sans  succès,  belle  Issé,  quîtterai-je  ces  lieux? 
Pouvez-Tous  plus  long-tems  résister  &  ma  flamme  ? 
Quoi  !  l'Amour  a-t-il  mis  tons  ses  traits  dans  vos  yeux  ?. 
K'en  a-t-il  pomt  gardé  pour  soumettre  votre  ame?. 

iVoQS  ne  répondez  rien  ?  Hélas  !  quelle  rigueur  ! 
U  semble  qu'avec  ma  langueur 
Totre  injuste  fierté  s'augmente* 
fie  yerrai-je  jamais  la  fin  de  mon  malheur? 
Rendrez-vous  diaque  jour  ma  chaîne  plus  pesante?) 
Itf  ais  c'est  trop  vous  lasser  d'une  vame  douleur , 
Je  vous  laisse,  Nymphe  charmante: 
Songez  du  moins  que  votre  coeur 
,  Ve  peut  être  le  prix  d'une  ardeur  plus  constante. 
188É. 
'Autant  que  je  le  puis ,  je  résiste  aux  Amours  ; 
Pe  leurs  traits  dangereux  je  redoute  l'atteinte  : 
Heureuse  ;  si  ma  crainte 
M'en  défendait  toujours! 

CHSUB. 

'Aimez ,  aimez ,'  ne  soyez  plus  rebelle 
A  de  tendres  désirs  ; 
Suivez  l'Amour  qui  vous  appelle 
Par  la  voix  des  Plaisirs. 

FIN   DU    PfiEMIER   ACTE. 


ACTE  SECOND. 

Le  théâtre  représente  le  palais  d'issé  et  ses  î^dios. 

SCÈNE  I. 

ISSÉ,  DORIS. 

IS8É. 

Amour  ,  laisse  mon  cœur  en  paix  ; 
Mille  antres  se  feront  un  plaisir  de  8e  rendre  { 
Ne  te  plais-tu,  cruel,  â  blesser  de  tes  traits 

Que  ceux  qui  veulent  s'en  défendre  ?. 
Mille  autres  se  feront  un  plaisir  de  se  rendre  3 

iAmour ,  laisse  mon  cœur  en  paix^ 

D0III5. 

7e  vois  Pbilémon  qui  s'avance  ; 
Cet  aimable  étranger  cherche  partout  vos  yeux  ; 
Sans  doute  c'est  TAipour  qui  l'amène  en  ces  lieux. 

ISSÉ. 

Il  faut  éviter  sa  présence. 


ACTE  II,  SCENE  Ili  a45 

SCÈNE  II. 

rSSÉ,  DORXS,  APOLLON,  PAJN,dëguisë$  en     . 

bergers. 

AP^OLLOir. 
Belle  nymphe ,  an-étez.  D'où  vient  cette  rigueur  ? 

Quelle  injuste  fierté  vous  guide  Z 
Hélas  !  par  vos  mépris  n'abattez  point  un  cœur 

Qui  n'est  déjà  que  trop  timide. 

ISSÉ. 

De  quoi  vous  plaignez-vous ,  et  pourquoi  m'arréter  ?< 
Berger ,  qu'avez- vous  à  me  dire  7. 

APOLLOIf. 

Hélas  î  pouvez-vous  en  douter  Z 
Vous  entendez  que  je  soupire. 

Vous  lisez  dans  mes  yeux  le  secret  de  mon  cœur  ; 
Je  ne 'puis  plus  cacher  le  trouble  de  mon  ame  ; 
"    Et  mon  désordre  et  ma  langueur  ; 
Tout  vous  fait  IWea  de  ma  flamme. 
Quel  silence  !  quel  trouble  !  Ah  !  vous  aimez  Hilas- 1 

ISSÉ. 

Quand  mon  cœur  Taimerait,  je  n'en  rotigirais  pas. 

APOLLON.  , 

Vous  l'aimez  donc?  O  ciel!  quel  rigoureux  supplice  î 
En  quels  manx  cet  aveu  vient«il  dé  me  jeter  ! 
Vous  l'aimez  !  c'en  est  fait ,  il  faut  que  je  périsse  ; 
Mes  jours  ne  tenaient  plus  qu'au  plaisir  d'en  douter. 

ISSÉ. 

<Jue  vois-je  î  à  quelle  erreur  vous  laissez-vous  séduire  ?. 

21. 


â 


,^46  ISSÉ. 

JHou ,  non ,  vous  n'avez  point  de  rivaux  satisÊuts, 
Je  n'aime  point  Hilas  ;  c'est  en  vain  ^'il  soupire  : 
Non,  je  ne  Taimerai  jamab. 

Ah!  qœ  ne  pois-je  aussi  bien  me  défendre 
D'un  trait  plus  doux  dont  je  me  sens  frapper  ? 
Mais  que  dis-je  ?  je  crains  de  vous  en  trop  apprendre. 
Mon  fnneste  secret  est  prêt  à  m'échapper. 

APOLLOV, 

Achevez ,  belle  Issé  ;  rendez-vous  â  mes  larmes  ; 
Bannissez  d'un  seul  mot  mes  craelles  alarmes. 

Pour  qpi  sont  ces  tendres  soupirs  ?  ^ 

iAh  !  ne  suspendez  plus  mes  maux  ou  mes  plaisirs, 
issé. 
Cessez ,  cessez  une  ardeur  si  pressante  ; 
Je  ne  veux  plus  vous  écouter. 

APOLLON. 

'Arrêtez ,  nympbe  trop  charmante. 

XSSÉ. 

Non ,  laissez-moi  vous  éviter. 

APOLLON. 

Vous  me  fuyez ,  et  je  vous  aime, 

ISSÉ. 

Je  fuis  l'Amour ,  quand  je  vous  fuis. 

APOLLON. 

Dissipez  le  trouble  où  je  suis. 
issÉ. 
pï'augmentez  pas  celui  qui  m'agite  moi-même, 

APOLLON, 

llendez-vous  4  mea  feux. 

issé. 

Ne  tentez  plus  mon  cœur. 


ACTE  II,  SCÈNE  III.  a47. 

APOLLOK. 

Pourquoi  craindre  d'aimer  ? 

issé. 
On  doit  craindre  un  vainqueur. 

SCÈNE  III, 

PAN,  DORIS.       * 

PAN. 

Ne  songez  point  à  m'éviter , 
Doris  :  que  leur  amour  fasse  naître  le  nôtre  ! 
Si  vous  voulez  les  imiter , 
Mon  cœur  est  prêt ,  et  n'attend  que  le  vôtre, 
Donis. 
Les  bergers  oflQ^nt  leur  cœur 
A  la  première  berbère  ; 
Ce  n'est  pas  pour  eux  une  afiàire 

De  risquer  un  peu  d'ardeut: 
Mais,  pour  nous,  le  choix  d'un  vainqueur 
Est  plus  dangereux  à  faire. 
PAN. 
Avant  de  nous  mieux  engager, 
Essayez  si  mon  cœur  accommode  le  vôtre  : 
S'ils  ne  sont  pas  faits  l'un  pour  l'autre , 
Il  est  bien  aisé  de  changer. 

DOBIS, 

Vous  parlez  déjà  d'mconstance  j 
C'est  le  moyen  de  m'alanner. 

PAN. 

par  ma  sincérité  je  veux  me  faire  aimer  i 


j 


24a  isse: 

Et  je  parle  comme  je  pense. 

Je  ne  réponds  jamais  aux  belles 
De  la  constance  de  ma  foi  : 
5lais  ceux  qui  promettraient  des  ardeurs  ét^nellcs  , 
Seraient  moins  sincères  que  naoi , 
Et  ne  seraient  pas  plus  fidèles. 

DOBIS. 

L'Amour  n*est  point'  cb-^rmant  pour  de  faibles  désirs  ; 
tVous  ignorez  le  poids  de  ses  plus  douces  chaînes. 

PAN. 

Je  me  prive  des  grands  plaisirs 

Pour  m'exempter  des  grandes  peines. 

PAN   ET  DO  RIS,  ensemble. 

PAN.     Il  faut  traiter  Taraour  de  jeu. 

DORis.  Pourquoi  traiter  Tàraour  de  jeu  ? 

PAS.     Autrement  il  est  trop  h  craindre. 

Dows.  Quels  tourmens  ses  nœuds  font-ils  craindre  ?. 

On  ne  doit  point  briilér  d'un  feu 

^  ,,      .     {    difficile    )    j„    .   j 
Quilsoit  <  •       ^    ..  >  detemdrc. 
(  trop  facile  ) 

PAN. 

O  vous  !  qu'on  entend  chaque  jour 

,  Célébrer  en  ces  lieux  quelque  nouvelle  amour , 

Habitans  fortunés  de  ces  prochains  bocages , 

Venez  prendre  parla  mon  choix; 

Et  que  Doris  apprenne,  par  vos  voix, 

Qu'il  n'est  d'heureux  amans  que  les  amans  volages  ! 


ACTE  II,  SCÈHE  IV.  a49 

SCÈNE  IV, 

ATÏ  ,   DORlS,.trotip«  de  bess^rs,  de  bergères,  et  de 
pâtres. 

CHCBUB. 

Chargeons  toajours 
Dans  nos  amours  : 
Heureux  un  cœur  volage  ! 
CHangeons  toujours 
Dans  nos  amours , 
Nous  aurons  de  beaux  jours. 
L'Amour  veut  qu'on  s'engage  : 
Que  faire  du  bel  âge , 
Sans  son  secours  ?< 

.(On,  danse. 
UN  BBBGIEB)  alternativement  avec  le  cbœur. 
Formez  les  plus  doux  noeuds  ^ 

Aimez  sans  peine  ; 
Formez*  les^  plus  doux  nœuds  ^ 
Vivez  heureux. 
Qui  souffre  trop  d'une  inhumaine 
Doit  aussitôt  change^; 
C'est  en  brisant  sa  chaîne 
Qu'il  faut  s'en  venger. 

Formez,  elc. 

iTous,  jeunes  c€ears,  ^' Amour  entraîne^ 
Fuyea  les  pleurs , 
tes  soins  et  les  langueurs  i- 


à 


Allez  oà  le  plaisir  vous  mène. 
Formez,  etc, 

C  On  danse) 
D0BI5. 

Des  oiseanx  de  ces  iienx  channans 
Le  tendre  Écho  redit  les  diants  ; 

L'aimable  Flore, 

y  Ëkit  éclore 

Ses  nouveaux  prééens. 
De  ces  eaux ,  de  ces  bois  naissans , 

Le  doux  murmure 

Et  la  verdure 
Y  charment  nos  sens. 
Tout  nous  plaît,  TAmour  suit  nos  p^  ; 

Ces  lieux  tranquilles , 

Sont  les  asiles 
Des  jeux  pleins  d'apgas. 

Momens  aimables , 

Soyez  durables , 
Ne  finissez  pas. 


rmDU  SECOBD  ACTE, 


ACTE  TROISIÈME; 

Le  théâue  repiéàmt  la  forêt  dé  Dbdùne, 

SCÈNE  I. 

iàPOLLON,  I«AN. 

APOLLON. 

LiA  nymphe  est  sensible  â  mes  vœux  : 
Mais  le  dirai-je?  et  Te  poàrras-tu  croire  2 
Malgré  cette  douce  victoire,  '' 

Je  ne  suis  pas  encor  hèuWox. 

PAN. 

loî!  vous  avez  fléchi  l'objet  qui  sait  vou*  pfein.. 
t  vous  osez  former  d'autres  vœux  en  ce  jota-  î 

Apollon  croit-il  que  l'Amour 

N'ait  que  lui  seul  â  satisfaire?. 

APOLLON^ 

Je  ne  borne  point  mes  désirs 
^imparfait  bwiheur  d'une  flamme  vulgaire, 
.chève,  achève,  Amour,  de  combler  mes  plaisirs: 

Tu  sais  ce  qu'il  te  reste  à  feire. 

Et  toi,  Pan,  regarde  ces  lieux, 
Is  doivent  dissiper  le  crouUe  qui  t'étonne. 

PAN. 

Je  vois  la  &meose  Dodone 


i 


^53  ISSÉ. 

Dont  ks  chénés  mystérieiix 
'Add  oocent  aux  mortels  la  volonté  des  Dieax. 

Quel  fmit  en  poavex  aitendre?* 
apollos. 

Issé  les  cOBSolte  en  ce  joor  : 

Et  par  Toracle  qu'ils  vont  rendre , 
Se  saurai  si  son  cœur  mérite  mou  amour. 
Mais  )'aper£ois  Hilas. 

P^AII. 

n  vient  iot  se  plaindre. 
Laissons  un  libre  cours  à  ses  justes  douleurs  ; 
Cest  assez  de  causer  ses  pleurs , 
Sans  vouloir  encor  les  contrain<fae. 

é 

SCÈNE  II. 

HILAS. 

SoMBitES  déserts ,  témoins  de  mes  tristes  regrets , 
Rien  ne  manque  plus  à  ma  peine. 

Mes  cris  ont  fait  cent  fois  retentir  ces  forêts 

De  la  froideur  d'une  inhumaine. 
Hélas  !  que  n'est-ce  encor  le  sujet  qui  m'amène  ?. 
L'ingrate  de  TAmour  ressent  enfin  les  traits , 

Un  perfide  peucbant  Tenlraine. 

Sombres  déserts ,  etc. 

Dieux!  qui  Tamène  ici?  les  Amours  sont  ses  goides/ 

J'en  sens  croître  mon  désespoir. 
7e  porte  sur  ses  yeux  mille  regards  timides; 


ACTE  ïïi,  SCÈNE  m;  î53 

3  ont  encor  sur  moi  leur  rigoureux  pouvoir  j' 
t  tout  traîtres  qu'ils  sont,  tout  ingrats,  tout  petûdes. 
Je  me  plais  encore  à  les  voir. 

SCÈNE  III. 

HILAS,   IS$^    DORIS. 

HILAS, 

^BUCiXE ,  vous  souflrez  ici  de  ma  présence  ; 
De  mes  tendres  regards  vous  détournez  vos  yeux, 

issé. 
le  ne  m'attendais  pas  à  vous  voir  en  ces  lieux« 

HILAS. 

On  évite  toujours  un  amant  qu'on  oSense. 

ISSÉ* 

Je  viens  ici  poor  consulter  les  dieux  ; 
9e  vous  opposez  point  à  mon  impatience. 

B  IL  A8. 

Inhumaine ,  arrêtez  ;  que  craignez- vous  ?  hélas  I 
Mes  sbnpîis  et  mes  pleurs  3ont.  toute  ma  vengeance* 

ISSÉ; 

Oubliez  une  ingrate ,  et  |ie  la  pleurez  pas, 

HILAS. 

Qui  vous  forçait  de  Tétre  à  ma  persévérance? 

issi. 
Accusez-en  TAmour  ,  qui  m*a  fait  violence.- 

Ht  LAS.  • 

Non  craelle ,  c'est  vous  qui  voulez  mon  trépas }  * 
C'est  votre  Êiible  résist«noe  ; 
Grands  Opéras,  j,  aa 


il 


a54  ISSÈ. 

Vous  brave*  la  Raison,  qui  prenait  ma  défense. 

ISSIÊ. 

Quand  on  suit  Tamoureuse  loi , 
Est-ce  par  raison  qu'on  aime  ?    ' 

Vous  m*âme«  malgi«  vous-même  , 
J'en  aime  «m  entre  ^algré  mot. 
Quand  on  suit ,  etc. 

HILAS. 

CVn  est  donc  fait ,  ingrate  ?  O  sort  infortuné  ! 

A  quels  afireux  malheurs  me  vois-je  condamné  ! 

Dieux  cruels ,  Dieux  impitoyables , 

Que  né  refusez -vous  le  jour 

A  tous  ceux  que  T. Amour 

Doât  rendre  misérables  ? 

ISSÉ. 

Dans  quel  cruel  chagrin  vous  laisse£«vou9  plonger  ? 

HILAS. 

La  pitié  que  vous  voulez  feindre 

Ne  sert  encor  qu'à  m'outrager. 

C'est  une  cruauté  de  plaindre 

Des  maux  que  Ton  peut  soulager, 
isst.   > 
Je  vois  avec  douleur  le  tourment  qui  vous  presse  ; 
Un  autre  sentiment  n'est  pas  en  mon  pouvoir. 

HILAS. 

Ne  me  plaignez  donc  point ,  votre  pitié  me  blesse  ; 
C'est  un  mcpri^  pour  moi ,  puisqu'elles  est  sans  tendresse. 

1SSÉ.\ 

Jq  fais  vou^  épargner  le.  chagrin  de  la  voir. 


ACTE   m,  SCÈNE  IV.  a55 

HILAS. 

Non ,  non ,  ingrate  que  vous  êtes , 

Vous  n'échappcrcîc^  point  h  mes  justes  regrets. 

Ne  croyez  pas  que  je  vous  laisse  en  paix 

Jouir  des  maux  que  vous  me  faites. 
J'aurai  du  moins  ,  malgré  vos  m^ris  odieux , 
Le  funeste  plaisir  de  m'en  plaindre  à  vos  yeax. 

SCÈNE  IV. 

PAN,  DORIS. 

PAW. 

Doms ,  i.c  vous  cherche  en  tous  lieux , 
Sans  cesse  mon  amour  accroît  sa  violence  : 
Mon  cœur  ,  trop  épris  de  vos  yeux , 
N'est  content  qu'en  votre  présence. 

DOnis. 
Il  semblerait  en  ce  moment 
Que  votre  amour  serait  extrféme. 
Il  s'est  augmenté  prompteinent, 
Mais  il  s'aflàiblira  de  m^me. 

PAN. 

'Ab  !  pourquoi  prenez-vous  cet  injuste  délour? 
Faut-it  dans  l'avenir  me  chercher  une  ofîiînse  ? 
Ingrate ,  en  voyant  mon  amour ,  \ 

Pourquoi  prévoir  mon  inconstance  ! 
D*onis. 
Non ,  je  ne  veux  jamais  partager  vos  désirs  ; 
Mon  cœur  craint  trop  de  foire  un  infidèle  : 
La  peme  qui  suit  les  plaisirs 


iSQ  tSSE. 

N'en  est  que  plus  cruelle. 
PAN. 

Vous  vous  consoleriez  dans  une  amour  nouvelle 
De  la  perte  de  mes  soupirs. 

Le  moment  qui  nous  engage 
Est  un  a^^ble  moment  ; 

Mais  eelui  qui  nous  dégage 
Ne  laisse  pas  d'être  charmant. 
Croyez-moi,  bannissez  une  crainte  inquiète  ; 
Doris,  laissez-moi  vivre  heureux  sous  votre  loi. 

DOBIS. 

Voulez-vous  que  j'accepte  une  volage  foi , 
Moi  qui  bri\lai  toujours  d'une  flamme  parfaite  ? 
pAif. 
Eh  bien  !  vous  ferez  avec  moi 
^       L'essai  d'une  douce  amour^e. 

L'Amour  n'aura  pour  nous  que  de  cbarmans^  appas  ; 
Nous  briserons  nos  fers  quand  nous  en  serons  las. 

Donis. 
Eh  bien  !  'à  votre  amour  je  ne  suis  plus  rebelle , 
Et  je  consens  enfin  à  m'eugager. 

Voyons ,  dans  notre  ardeur  nouvelle , 
Si  vous  m'apprendrez  à  changer, 
Ou  si  je  vous  rendrai  fidèle.    . 

BVSEMB^E,       . 

'  Cédons  à  nos  tendres  désli-s  ;  . 
Qu'un  heureux  penchant  nous  entraîne  ; 
Et  que  l'Amour  laisse  aux  Plaisirs 
Le  soin  de  serrer  notre  chaîne  ! 
PAS. 
Mais  on  vient  en  ces  lieux  \  suspendons  nos  soupirs. 


ACTE  111,  SCÈNE' V.  aSy 

SCÈNE  V. 

ISSÉ,  LE  GRÀND-PRÊTRE,  troupe  de  PRÊTBES 
et  de  pnÊTRESSES  de  dodose. 

LE   GBÀND-PBÊTBE.  . 

MisisTBES  révérés  de  ces  lieax  solitaires, 
Vous ,  qu'une  sainte  ardeur  retient  dans  ce  séjour , 
CoiBiDencez  avec  moi  nos  augustes  mystères  ;  ' 

Qu'lssé  sache  le  sort  que  lui  garde  l'Amour  ! 
caeeuB. 
Commençons  nos  mystères  ; 
Qu'lssé  sache  le  sort  que  lui  garde  l'Amour  ! 

LE   GBASD-'PBÊTBE^, 

Arbres  sacrés ,  rameaux  mystérieux , 
Troncs  célèbres ,  par  qui  l'avenir  se  révèle , 
Temple,  que  la  nature  élève  jusqu'aux  cieux, 
A  qui  le  printems  donne  une  beauté  nouvelle  ; 
Chênes  divins ,  parlez  tous  ; 
Dodone ,  répondez-tious. 
cnceuB. 
Chênes  divins ,  parlez  tous  ; 
Dodone ,  répondez-nous. 

LE   GliAND  -  PBÊTRE. 

Mais  déjà  chaque  branche  agite  sa  verdure , 
Les  arbres  Semblent  s'ébranler  : 
Cl^aqpe  feuille  murmure , 
L'ôraclé  va  parler. 

l'ORACLE. 

u  Issé  doit  s'enflammer  ^e  l'ardeur  la  plus  belle  ; 
»  Apollon  veut  être  aimé  d'elle.  » 

22. 


a58  ISSÉ. 

1  s  s  Ê ,  à  pari. 
O  ciel  !  quel  oracle  pour  moi  î 
Que  d'affîreux  malheurs  je  prévoi  l 

LE   GnAUO  '  PRÊTRE. 

Dryades  et  Silvains ,  venez  (ui  rendre  hommage  ; 
Honorez  Apollon  dans  celle  qui  Teogage. 

SCÈNE  VI. 

ISSÉ,  LE  GRAND-PRÊTRE,  troupe  depBÊTSEs 
et  de  PRÊTRESSES  de  Dodone  ,  troupe  de  fa  oses, 
de  SATYRES  et  de  dbxAdes, 

« 

CHOEOB^ 

ÇHAirroKS ,  chantons  Issé  -,  chantons  ses  traits  vainqueurs  ; 
Célébrons  ses  beaux  yeux,  maîtres  de  tous  les  cœurs.    , 
(On  danse.) 

UNE   DRYADE. 

Ici  les  tendres  oiseaux 
Goûtent  cent  douceurs  secrètes, 
Et  Ton  entend  ces  coteaux 
Retentir  des  chansonnettes 
Qu'ils  apprennent  aux  échos. 

Sur  ce  gazon,  les  ruisseaux 
MuVrourent  leurs  amourettes  ; 
Et  Ton  voit  jusqn  aux  ormeaux , 
Pour  embrasser  les  fleurettes, 
'  Pencher  leurs  jeunes  rameaux. 

(Ondaose.) 
UNE  DRYADE,  à  Issé. 

•  Cédez  et  remportez  une  douce  victoire  ;. 


Acte  m,  scène  yi.  aSg 

Joignez  aux  charmes  de  I9  Gloire 
Le  plaisir  touchant  de  T Amour.  • 

Rendez  votre  triomphe  aussi  doux  que  durable, 
Vou9  enchaînez  le  dieu  le  plus  aimable  j 
Qu'il  vous  enchaîne  â  votre  tour  \ 


FIS    DU   TBOISIÈME    ACTE» 


4 

ACTE  QUATRIÈME. 

Le  théâtre  représente  une  grotte. 

SCÈNE  I. 

ISSÊ. 

X  USESTE  amour  ;  ^  tendresse  inhumaine  l 
Pourcpoi  vous  mspirais-je  au  cpeur  d'un  dieu  jaloux  ? 
.  '  J'aurais  mieux  aimé  son  courroux , 

Je  craignais  cent  fois  moins  sa  haine. 

Quel  destin  pour  moi  !  quelle  peine  ! 

(  On  entend  une  espèce  d'ëcho  qui  lui  répond.  ) 
Qu'entends-je ?  Quelle  voix  se  mêle  à  mes  sanglots? 
Qui  me  répond  ici  ?  Seraient-cc  les  échos? 
Hélas  !  ne  cessez  point  de  partager  ma  plainte , 

Plaignez  Tétat  où  je  me  vois  ; 
Soupirez  des  tourmens  dont  je  me  sens  atteinte , 
Et  gémissez  du  sort  tpi  s'oppose  à  mou  choix. 

Vainement ,  Apollon ,  votre  grandeur  suprême 
Fera  luire  à  mes  yeux  ce  qu'elle  a  de-  plus  dons  ; 

Je  ne  changerai  pas  pour  vous 

Le  fidèle  berger  que  j'aime. 

Mais ,  quel  concert  harmonieux 
Vient  troubler  le  silence  et  la  paix  de  ces  lieux  ? 


ACTE  IV,  SCÈNE  11.  a6l 

SCÈNE  II. 

'ISSE,  LE  Sommeil,  accompagné  d^sosGES, 
dezéPHiBs  et  de  BYMPHEs. 

ÇHOEUB. 

Belle  Issé ,  suspendez  vos  plaintes  ; 
Goûtez  les  chànnes  du  repos. 
Le  Sommeil ,  pour  calmer  vos  craintes , 
-  Vons  ofire  ses 'plus  doux  pavots. 

issé. 
Qui  vous  intéresse  â  ma  peine  ? 
Apprenez-moi  du  rnoms  quel  ordre  vous  ataène?. 
Quel  dieu  propice  est  toucbé  de  mes  manx?, 

CBOEUfi. 

Belle  Issé,  etc. 

issÉ. 
C'en  est  fait ,  le  repos  va  suspendre  mes  larmes. 

En  vain  la  douleur  que  je  sens 

Veut  me  défendre  de  ses  charmes  ; 
Le  Sommeil  malgré  moi  s'empare  de  'mes  sens. 

LE    SOMMEIL. 

Songes ,  pour  Apollon ,  signalez  votre  zèle  ; 
Il  veut  de  cette  nymphe  éprouver  tout  Tamour. 
Tracez  à  ses  esprits  une  image  fidèle 
De  la  gloire  du  dieu  do  jour. 


aGa  ISSë. 

SCÈNE  III. 

UILÀS,  ISSÉ,  endormie. 

HILAS. 

Que  vois-)e  ?  C'est  Issé  qui  repose  en  ces  lieux  ! 

J'y  venais  poar  plaindre  ma  peine  : 
Mais  mes  cris  troublemient  son  repos  précieux  ; 
Renf<»mons  dans  mon  cœur  une  tristesse  vaine. 

Vous ,  ruisseaux  amoureux  de  cette  aimable  plaine , 
Coulez  si  lentement ,  et  murmurez  si  bas , 
Qu'Issé  ne  vous  entende  pas. 

Zéphirs,  remplissez  l'air  d'une  fraîcheur  nouvelle; 
Et  vous ,  Échos ,  dormez  comme  elle. 

Que  d'attraits  !  que  d'appas  î  contentez-vous ,  mes  yeux , 
Parcourez  tous  ses  charmes  ; 
Payez-vous ,  s'il  se  peut ,  des  lannes 
Que  vous  répandîtes  pour  eux. 

ISSÉ,  se  révieillant. 
Qu'ai-je  pensé  ?  Quel  songe  est  venu  me  séduire  ? 
J'ai  cru  voir  Apollon  quitter  les  cîcux  pour  moi  ;     v 
Je  me  trouvais  sensible  à  l'ardeur  qui  l'inspire  ; 
Un  mutuel  amour  engageait  notre  foi. 

Hélas  !  cher  Philémon ,  pour  qui  seul  je  soupire , 
Ne  me  reprochez  point  ces  songes  impuissans  ; 
Mon  cœur  n'a  point  de  part  à  l'erreur  de  mes  sens. 

HILÂS. 

Ciel  !  qn'entends-je  ?  et  le  pub-^e  croire  ? 
Quoi?  le  tendre  Apollon  ,  qui' veut  vous  engager, 


ACTE  IV,  SCÈNE  IV.  2G3 

e  peut  à  mon  rival  arracher  la  victoire? 
»oand  vous  charmez  un  dieu ,  vous  aimez  un  berger  ?, 
.t  j'ai  contre  ma  flamme  et  TAmour  et  îa  Gloire  ! 

Ten  est  trop,  il  faut  fuir  vos  funestes  attraits, 
e  vais  traîner  ailleurs  une  mourante  vie  ; 
^'Amour  ne  m'offi%  ici  que  de  cruels  objets, 
^os  feux ,  mon  désespoir ,  ma  constance  trahie , 
[Cruelle ,  tout  m'engage  à  ne  voiis  voir  jamais. 

issi. 
[^ue  je  plains  les  malheurs  dont  sa  flamme  est  suivie  ! 

SCÈNE  IV. 

PAN,  ISSÉ. 

PAN. 

PHniMON ,  belle  ïssé ,  souffre  un  sort  rigoureux  ; 
L'oracle  l'étonné  et  l'alarme  : 
Il  craint  qu'infidèle  à  ses  vœux , 
Ce  qui  l'ai&ige  ne  vous  charme. 

ISSÉ. 

Ou  pourrai-je  le  rencontrer  ? 
Je  brûle  de  détruire  un  soupçon  qui  m'outrage. 
PAU. 
Je  l'ai  laissé  dans  le  prochain  bocage, 

ISSÉ. 

Vole,  Amour ,  suis  mes  pas ,  et  viens  le  rassurer. 

FIW  DU  QUATRIÈME  ACTE.  ' 


ACTE  CINQUIÈME. 

Le  thékre  représente  one  solitade. 

SCÈNE  I. 

DORIS. 

CiHASTEz ,  oiseaux ,  cfaantea  :  que  votre  sort  est  doux  ! 
Vous  ne  brûlez  jamais  que  d'ardeurs  mutuelles  : 
Tous  êtes  amoureux ,  et  n'êtes  point  jaloux. 

Chantez ,  oiseaux ,  chantez ,  que  votre  sort  est  doux  ! 
Le  seul  plabir  vous  rend  fidèles  ; 
On  n'est  heureux  qu'en  aimant  comme  vous. 

Cbantei^,  oiseaux,  chantez;  que  votre  sort  est  douxt 

SCÈNE  II, 

PAN,  DORIS. 

PAN. 

Quel  sujet  a  conduit  Doris  en  ce  bocage? 
Doms* 
J'y  viens  rêver  â  votre  humeur  volage  ; 
Vous  vous  lassez  bientôt  d'être  dans  mes  liens  a 


ACTE    V,  SCÈNE  II.  a65 

Uo  nonvel  objet  voas  engage , 
£t  vous  cherchez  déjà  d'autres  yeux  que  les  mieqs. 

I  '  PAS. 

Sur  quoi  prenez-vous  ces  alarmes  ? 

DOBIS.  « 

Non ,  je  u^en^donte  point,  vous  aim»  d'autres  chamies  ; 
Je  vous  ai  vu  suivre  les  pas 
De  la  jeune  Thémire  : 
Si  vous  la  trouviez  sans  appas>, 
Qu'aviez-vous  à  lui  dire  ? 
PAS. 

Je  lui  disais  que,  pour  nous  aimer  bien.. 
Il  faut  bannir  le  reproche  et  la  crainte. 
Un  CQeur  jaloux  n'est  pas  fait  pour  le  mien. 
El  je  veux  aimer  sans  «contrainte. 
Mais  vous ,  qui  vous  troublez  par  d'injustes  soucis , 
Que  disiez-vous  au  jeune  Iphis? 

DOBIS. 

Je  lui  disais  qu'un  cœur  volage 
Ne  pourra  jamais  m'engager. 
Eh  !  que  ferais-je  d'un  berger 
De  qui  la  flamme  se  partage?.  ' 

PABT. 

Vous  fn'avez  entendu ,  Dorîs  ,  je  vous  entends. 
Eh  bien  !  n'afibctons  point  une  constance  vaine. 
Nos  coeurs  ne  sont  pas  faits  pour  une  même  chaîne  ; 
Choisissons  d'autres  fers  dont  ils  soient  plus  contens. 

ENSEMBLE. 

Nos  coeurs  ne  sont  pas  faits  pour  une  même  dmine  ; 
dx>isi8S0DS  d'autres  fers  dont  ils  soient  pjas  eome&s. 

PAS. 

Heureuse  mille  fois ,  heureuse  l'inconstance  ! 
Grands  Opéras.  3.  23 


i 


266  ÏSSÉ. 

Le  plas  charmant  amour 
Est  cehii  qai  commence 
Et  finit  en  un  jour. 

Heureuse  mille  fois ,  heureuse  rinconstafice  I 

Mais  j'aperçois  la  nymphe,  et  Philémoii'S''aysa)ce. 

SCÈNE  III. 

.   APOLLON,  ISSÉ 

APOLLON. 

Non  ,  je  ne  puis  me  rassurer  : 
Par  vos  sermens  et  par  vos  larmes 
Vous  tâchez  vainement  de  bannir  mes  alarmes  '  : 
^'on ,  je  ne  saurais  espérer 
Que  vous  vouliez  me  préférer 
Au  dieu  puissant  qui  se  rend  à  vos  charmes. 

ISSÉ. 

Croirai-je ,  ingrat ,  que  vous  m'aimez , 
Si  vous  refusez  de  me  croire  ? 

APOLLON. 

Les  nœuds  que  l'Amour  a  formés 
Vont  être  brisés -par  la  Gloire. 

Pardonnez  mes  transports  jaloux  ; 
J'fti  tout  à  redouter ,  puisqu'elle  est  ma  rivale. 

.ISSÉ. 

Je  ne  la  connais  point ,  cette  Gloire  fatale  ; 
Mon  ctieur  ne  reconnaît  que  vous. 

Je  le  di^is  à  cette  solitude  ; 
Elle  sait  mes  tourmens  secrets  : 


ACTE  V,  SCETVE   III.  267 

Que  ne  peut-elle ,  liélas  î  répeter  mes  regrets , 
Pour  vous  tirer  d'inquiétude  ? 

C'est  moi  qui  vous  aime 
Le  plus  teudrement. 

ESSEItlBLE. 

C'est  moi  qui  vous  aime 
Le  plus  tendrement. 

Si  vous  m'aimiez  de  même , 
Mon  sort  serait  cbarmant. 

C'est  moi  qui  vous  aime 
Le  plus  tendremenu 

APOLLON. 

Non ,  non ,  vous  m*oublîres  pour  la  grandeur  suprême. 

ISSÉ 

Que  vos  soupçons  me  font  souflrir  I 
Ciel  !  ne  puis-je  vous  en  guérir  ? 

Apollon ,  en  ces  lieux ,  hâtez-vous  de  paraître  : 
Far  des  attraits  pompeux  tâchez  de  m'attendrir  ; 
Ce  berger  de  mon  cœur  sera  toujours  le  maître  ; 
Et  les  vœux  éclatans  que  vous  viendrez  m'oQrir 

Ne  serviront.,.  Hélas  !  qu'osé  je  dire  ? 
Mes  transports  indiscrets  pressent  votre  malheur. 

Ce  dieu  qu'un  vain  amour  inspire , 
Se  vengera  sur  vous  du  refus  de  mon  cœur. 

Mais ,  que  vois-je  l  Quelle  puissance 
En  un  palais  superbe  a  changé  ce  séjour  ? 
(  Le  théâtre  change  ,  et  représente  un  palais  mof^nififpif  :  on 
voit  les  Heures  qui  descendent  du  ciel  sur  det  nuagcA.) 
APOLLOB. 
Je  vois  les  Heures  ;  leur  présence- 


/ 


270  ISSÉ.   ACTE  V,  SCÈNE  IV. 

SCÈNE   IV. 

APOLLON,    ISSÉ,  LES    HEURES,      tjoc?i 

d'BuBOPÉEITS  ,  D'EunOPéEKSES,  D£   Chiboisi 

d'A  MénicAiBS,  d'Amébicaines. 

C  H  ce  un. 
Que  tes  plaisirs  sont  doux ,  que  ta  gloire  est  extrême  ! 
Que  ta  félicité  dure  autant  que  toi-roâne  ! 

(  On  danse.  ) 
UNE  EUBOPEEIIIIE,  alternativement  avec  le chœuT. 
Ah!  que  d'attraits  suivront  votre* tendresse  1 
Que  de  plaisirs  naîtront  dé  Vos  amours  ! 
Aimez  sans  cesse, 
Tout  vous  en  presse  ; 
Qiie  vos  feux  redoublent  toujours  î 
Aimez  sans  cesse , 
Tout  vous  en  presse  : 

Sans  amours , 
Est-il  de  beaux  jours  ! 

(  On  danse.  ) 
CROBUn. 

Que  tes  plaisirs  sont  doux!  que  ta  gloire  est  extrvme! 
Que  la  félicité  dure  autant  que  toi-même  ! 


FIN    D  ISSE. 


LE 

TRIOMPHE  DES  ARTS, 

BALLET  EN  CINQ  ENTRÉES; 

PAR  LAMOTTE; 

Bep résemé,  pour  la  première  fois,  le  16  mai  1700. 


I 


ec^ 


PERSONNAGES. 

PREMIÈRE  ENTRÉE. 

APOLLON. 

Le  prêtre  d' Apollon.. 

Troape  de  ceux  qui  ont  servi  à  la  constmction  do 

temple. 
VENUS. 
Troupe  de  Grâces  et  de  Plaisirs. 

SECONDE  ENTRÉE. 
SAPHO. 
DORIS. 

La  prêtresse  de  Véhus. 

Troupe  d'anaBS  et  d'amantes  consacrés  à  Véoos. 
PHAON. 
NEPTUNE. 

TROIStÈlIE  ENTftÉB. 
AMPHION. 
EURISTE. 
Troupe  de  sauvages. 
NIOBÉ. 

QUATRIÈME  ENTRÉE. 
CAMPASPE. 
ASTÉÇIIE. 
APELLE. 
ALEXANDRE. 
Troupe  d'élèves  d'ApELîE. 
Troupe  d'étrangers. 

CINQUIÈME  ENTRÉE. 
PYGMALION. 
Une  propétide. 
.VÉNUS. 

La  statue  animée. 
Troape  des  arts  conduits  par  la  danse. 


rmCMPHE  DES  ARTS, 

BALLET.  ♦ 
FKEMIËÏŒ  ENTRÉE. 

L'ARCHITECTURE. 

B  tliéâtre  représente  un  temple   qti'on  vient  d'élever  à 
Apollon,  dien  des  arts. 


,E  GRAND  PRÊTRE,  TROUPE  de  ceux  qui 

OST  SEBVI  a  là  construction    du   TEMPltB. 

s  Gr.A.ND  BRÊTRE  d' APOLLON  qni  a  dédié  te  temple. 

iE  temple  par  vos  soins  est  enfin  achevé  : 
pollon  s'en  ptomet  une  gloire  nouvelle. 

C'est  TOUS  qui  Tavez  élevé  ; 
aites-y  les  premiers  éclater  votre  zèle  ; 
éiébrez  Apollon,  célébrez  sa  paiâsance  ;  ^ 

Le»  Arts  lui  doivent  leur  naissance. 

Célébrez  sa  gloire  à  jamais  ;' 
Que  volrr  zèle  égale  ses  bienfait  î 


j 


a74  LE  TRIOMPHE  DES  AKTS. 

CH«BUn. 

Ccicbrons  Apollon ,  célébrons  sa  puissance  : 
Les  Arts  lui  doivent  leur  naissance. 
Célébrons  sa  gloire  à  jamais  ; 
Que  notre  xèle  égale  ses  bienfaits  î 

VÉNUS,  sur  son  char. 
Cessez ,  mortels ,  cessez  un  vain  hommage. 
Faites  d'uo  autre  nom  retentir  ce  séjour  ; 
Du  dieu  des  Arts  ce  temple  est  le  partage , 
Apollon  l'est  moins  que  TAmour, 
Que  de  nouveaux  objets  annoncent  sa  victoire! 
Mortels ,  reconnaissez  sa  gloire. 

(Les  statues  du  temple  se  changent  en  des  Amours  qui  tien- 
nent les  attributs  des  Arts.) 

(Une  symphonie  annonce  Apollon.) 

VÉSUS. 

Mais  qu'entcnds-je  !  Apollon  vient  lui-même  encesliem! 
Frétend-il  résister  au  plus  puissant  des  dieux  ! 

APOLLON. 

Non,  non ,  ne  croyez  pas  que  je  vienne- défendre 

Le  droit  que  mes  soins  m'ont  acquis. 

Vénus,  je  cède  à  votre  fils 

Tous  les  titres  qu'il  voudra  prendre. 

L'Amour  par  de  funestes  coups 
Né  m'a  que  trop  appris  à  craindre  son  courroux. 
Mais  ^honneur  dont  il  veut  relayer  sa  puissance 
Appartient  comme  à  nous  au  héros  de  la  France. 
Laissons-en  le  partage  h  cet  auguste  roi  : 
Les  Arts  lui  doivent  plus  qa'h  l'Amour  et  qu'à  moi. 

VÉNUS. 

Mon  fils  consent  h  ce  partage. 


ENTRÉE  I.  275 

n'est  point  pour  ce  roi  de  nom  trop  glorieux. 
Il  est  du  ciel  le  plus  parfait  ouvrage , 
"Et  sa  grandeur  fait  la  gloire  dej  dieux: 

''enez  ,  Plaisirs  ;  formez  la  fête  la  plus  belle  ; 
Lttirez ,  s'il  se  peut ,  ses  augustes  regards  ; 
Taîtes  voir  dans  nos  jeux  le  triomphe  des  Arts , 
y  Que  cbaque  jour  il  renouvelle. 

un    HOMME   ET    USE    FEMME   DE    LA    FÊTE. 

Il  est  un  tems  pour  être  sage , 
C'est  noire  dernière  saison  : 
Mais ,  quand  on  est  dans  le  bel  âge  , 
L'Amour  sied  mieux  que  la  Raison. 

Malgré  nos  soins  l'Amour  nous  blesse  , 
On  ne  peut  éviter  ses  ti-aits  : 
Il  a  des  droits  sûr  la  jeunesse 
Dont  il  ne  dispense  jamais. 

VÉNUS. 

A  quoi  sert  de  se  défendre 
De  former  d'aimables  nœuds? 
L'Amour  seul  peut  nous  apprendre 
Le  secret  de  vivrç  heureux.  ' 
Aimons  Iç  poids  de  nos  chaînes. 
L'Amour  compte  nos  soupirs. 
C'est  sur  nos  soins  et  nos  peines 
Qu'il  mesure  nos  plaisirs. 

CHOEUn. 

L'Amour  nous  suit  dans  cet  asile  ; 
Il  n'est  permis  qu'A  ses  ardeurs 
De  troubler  la  paix  tranquille 


f 


2^6     LE  TRIOMPHE  DES  ARTS.  ENTRÉE  L 
Qui  règne  èmas  les  icônes  cœors. 
visu  s. 
Par  de  plus  nobles  jeux  attirez  les  regards. 
Allez  vous  traosfixnie  r  pour  la  gloire  des  Arts. 


FIN    DE   LA  PREMIÈRE   ENTRÉE. 


SECONDE  ENTRÉE. 

LA  POÉSIE. 

Le  théâtre  représente  le  temple  de  Vénus,  d*où  l'on 
découvre  la  mer. 


SCÈNE  I. 

SAPHO. 

.rxiiouii  ;  tu  ne  te  plais  qu'à  tromper  nos  désii-s. 

Non ,  tu  n'as  point  de  douces  chaînes. 

Tu  ne  promets  que  des  plaisirs , 

Et  tu  ne  donnes  que  des  peines. 
Quand  un  iqgrat  pour  moi  se  sentit  enflammer , 
Devois-tu  me  le  peindre  et  fidèk  et  sincère  ? 

Pourquoi  Taider  à  me  diarmer  ? 
OÙ  sont  tons  ces  scnneos  que  ta  lui  fesais  faire  ? 

Qaan4  j'ai  commencé  de  l'aimer 
J'ai  cessé  de  lui  plaire. 

Amour ,  tu  ne  te  plais  qu'à  tromper  nos  désirs, 
Non  ,  tu'  n'as  point  de  douces  chaînes. 
Tu  ne  promets  que  des  plaisirs , 
Et  tu  ne  donnes  que  des  peines. 


Grands  Optfras.  "2.  -24 


A 


a^S  LE  TRIOMPHE   DES  AKTS. 

SCÈNE  II. 

SAPHO,  DORIS. 

DORIS. 

Tai  Eût  ce  que  vous  souhaitez  ; 
Pour  vous  plaire  ici  tout  s'empresse  : 
,    On  va  bientôt  ofirir  h  la  déesse 
L'hommage  ingénieux  que  vous  lui-  présentez. 

Sapho ,  vous  av^  lieu  de  croire 
Que  Vénus  à  vos  vœux  prêtera  son  secours. 
Quand  vous  servez  si  bien  sa  gloire , 
Elle  doit  servir  vos  amours.    . 

SAPHO. 

Tu  me  flattes  en  vain ,  la  douleur  me  surmonte  j 
Je  me  meurs  d'amour  et  de  honte. 

Quelle  fatale  ardeur  a  séduit  mes  esprits  ?. 

Quel  est  l'excès  où  je  m'engage  ? 
Malheureuse  !  ie  cours  après  un  cœur  volage , 

Et  je  viens  chercher  ses  mépris  ! 
Mais ,  hélas  1  je  n'ai  pu  m'empécher  de  le  suivre  ; 
Quelque  sort  que  l'ingrat  me  réserve  en  ces  lieux  , 

Loin  de  lui  je  ne  saurais  vivre  ; 
Il  me  sera  plus  doux  d'expirer  à  ses  yeux. 

DOnis. 
Il  est  tems  que  l'espoir  succède  à  votre  peine. 
De  quel  plaisir  ne  jouircz-vous  pas 
Si  votre  amant  reprend  sa  chaîne  ! 
Ah  !  qu'on  inconstant  a  d'appas , 
Quand  l'Amour  le  ramène  î 


ENTRÉE  ir,  SCÈNE  II,  279. 

SAPHO. 

Ch  I  l'ingrat  deVait*il  porter  ailleurs  sa  foi  ? 
Peut-il  trouver  un  coeur  qui  Taime  comme  moi  ?. 

Tu  connais  ma  tendresse  extrême. 
Mon  cceur  est  tout  rempli  de  ce  perfide  amant  ; 
Le  jour ,  la  nuit ,  le  sommeil  même 
Ve  peut  m'en  distraire  un  moment. 
Tout  m'entretient  de  l'objet  qui  m'enchante  ; 
C'est  la  seule  douceur  qui  flatte  Dion  ennui  : 
Sans  cesse  à  mes  regards  son 'image  est  présente, 
Et  même  en  te  parlant  je  te  vois  moins  que  lui. 
Donis, 
Que  votre  ardeur  est  violente  ! 
Mon  ame  s'attendrit  au  réeit  de  vos  feux. 

Hélas  !  que  voqs  seriez  contente , 
Si  le  plus  tendre  cœur  était  le  plus  heureux  ! 

SAPHQ,   Donis.  f 

«M    t        (     je  serais     ) 
Hélas! que <  >  contente, 

^     (  vous  seriez  ) 

Si  le  plus  tendre  cœur  était  le  plus  heureux  ! 

noms 

Mais  votre  sort  va  prendre  une  fece  nouvelle. 

On  s'avance  en  ces  lieux  ,  prenez  un  doux  espoir. 

La  déesse  va  recevoir 

L'hommage  qu'Apollon  vous  a  dicté  pour  elle. 


29o        LE  thioaiphë;  des  arts. 

SCÈNE  III. 

SAPHO,  DORIS,  LA  PRÊTRESSE  DE  TÉNUS, 
troap«  d'akars  et  d'ahautes  consacrés  à  la  déesse, 
et  portant  les  attributs  des  dieux ,  dont  ils  élèvent  an  tro- 
phée à  Vénus.  Us  chantent  i*hymne  que  îjSapho  a  compose 
à  Thonneur  de  Vén\is,  pour  se  la  rendre  favorable. 

liE    CBCBUB. 

RioNEz,  VflDiUi  régnes,  ftyocable  déesse; 

Charmez  les  cceurs  que  l'Amour  Uesse^ 

Enchantez  la  terre  et  les  cieux , 
Triomphez  A  jamais  des  mortels  et  des  Dieux. 

LA  PBiTBESSE. 

Exercez  dans  le  monde  un  empire  suprême  ; 
Faites  sentir  partout  vos  charmantes  langueurs. 
On  jouit  -sous  vos  lois  d'une  douceur  extrême , 
Et  vous  répandez  dans  les  coeurs 
Tous  les  plaisirs  que  vous  goûtez  voQS-mêtne, 

la  ÇBCEUB. 

Régnez:  Vénus,  etc. 

.UN  AMABT  ET  USE  AMA8TE. 

Tendres  coeurs,  sur  ces  rivages 
GoAtez  le  sort  le  plus  doux  : 
Vos  plaisirs  sont  las  hommages 
Que  Véinu  attend  de  vous. 

Quelle  est  Tame 
Qui  ne  s'enflamme  ? 
Sans  amour 
A-t-on  un  beau  jour  ? 

Tendres  cœurs,  etc. 


ENTRÉE  I,  SCÈNE  III.  ajBt 

Elle  aime  à  servir  nos  feux  ; 
Ses  plus  doux  Tceux 
Sont  de  nous  rendre  heureux. 

Tendres  cœurs ,  etc. 

9£UX  AUTBES  AHABS. 

ieunes  coeurs,  si  vous  vouiez  charmer, 

Laissez-vous  enjQammer  j 

Le  secret  de  plaire 

Est  de  bien  aimer. 

L'Amour  fuit  la  beauté  sévère  : 
Sans  ses  feux ,  les  pliifi  doux  appas 
Ne  toudient  pas. 

Jeunes  coeurs,  etc. 

Aimons  tous  ;  notre  cœur  en  dpit  &ite 

Son  unique  aJQkire.  ^ 

Qui  sent  Tamout 
L'inspire  à  son  tour. 

Jeunes  coeurs ,  etc. 

LA  PnÊTBESSE. 

Quel  transport  me  saisît?  et  quelle  ardeur  m'enflamme? 
La  Duit  de  l'avenir  se  dévoile  à  mes  yeux. 
Tremblez ,  mortels  ;  le  ciel  vient  d'éclairer  mon  ame  : 
Que  tout  tcspecte  en  moi  la  présence  des  Dieux  f 

âtfpho ,  c'est  trop  verser  de  lanaes  ; 
Le  repos  désormais  va  réf^oer  dans  loa  coonr. 

Je  vois  la  fin  de  tes  alarmes , 
Et  je  ne  saurais  voir  la  fio«de  t«a  bodbenr. 


a8a  LE  TRIOMPHE  DES  ARTS. 

SCÈNE  IV. 

SAPHO,. 

Reveiœz  ,  doux  plaisir ,  revenez  dans  mon  cœur  j 
L'espérance  vous  y  rappelle. 

L'Amour ,  touché  de  ma  langueur , 
Va  renouer  pour  moi  les  noeuds  d'un  iuUdèle, 

Revenez ,  doux  plaisirs ,  etc. 

Rien  ne  troublera  plus  une  flamme  si  belle  : 

Ce  qu'elle  eut  pour  moi  de  rigueur 
M'y  fera  retrouver  une  douceur  nouvelle^ 

Revenez ,  doux  plaisirs ,  etc« 

Mais  ciel  !  c'est  mon  amant  qui  paraît  dans  ces  iiemu 
Pour  connaître  son  cœur ,  cachons-nous  à  ses  yeax^ 

SCÈNE  V, 

PHAON,  SAPHO. 

P  U  A  O  K ,  S3QS  voir  Sapho. 

O  YÉnus'  sois  sensible  au  trouble  où  tu  me  vois« 

L'Amour  t'implore  par  ma  voix. 
le  cherche  dans  ces  lieux  une  nymphe  chamuàite; 

Et  pour  me  ranger  sous  sa  loi , 
}e  me  dérobe  aux  vçeux  de  la  plus  tendre  aisante, 
fais  ^e  toute  l'ardcuv  qu'elle  sentait  poui  omù 


:   .£ï  ENTRÉE  II,  SCÈNE  V.  283 

isse  dans  Tobjet  qui  m'enchante. 
^  is  \  sois  sensible  au  trouble  où  tu  me  vois  ! 
-^-1^  /Amour  t'implore  par  ma  voix. 

•   SAPHO. 

3 ,  c'est  donc  là  le  sujet  qui  t'amène  ? 
>iis  prier  Vénus  pour  de  nouveaux  liens  ? 
la  presse  en  vain  de  renouer  ta  chaîne  : 
:œiir  lai  ùât  des  vœux  qui  détruisent  les  miens. 

.  »m    '  PHAOS. 

^u^  m'avez  entendu ,  je  n'ai  rien  à  répondre  ; 
Mon  changement  est  éclairci. 
Mais  pourquoi  chercher  jusqu'ici 
Le  vain  plaisir  de  me  confondre  ? 

^  SAPBO. 

jr^ùài ,  c'est  donc  le  seul  dont  je  dois  me  flatter  ?, 

PHAOV. 

Amour  sous  d'autres  lois  a  voulu  m'arréter. 

.    .  SAPHO. 

i  '  O  ciel  !  faut-il  qu'un  ingrat  me  déclare 
^u'à  sortir  ."de  mes  fers  il  a  pu  consentir  1 
*   3e  n'en  veux  point  l'aveu  ,  barbare  ; 
Je  n'en  veux  que  le  repentir. 

Heureuse  qu'à  mon  gré  ton  amour  pût  renaître! 

PBAON. 

Un  cœur  suit  toujours  son  penchant  ; 
Il  ne  connaît  point  diantre  maître  : 
Rien  ne  peut  le  rendre  constant , 
Que  le  plaisir  qu'il  sent  à  l'être, 

SAPHO. 

Quoi!  rien  ne  peut  pour  moi  rallumer  v^  ni^deura 


^  J 


a84  l'Ë  TRIOMPHE  DES  ARTS. 

PBAOS. 

AcGUsez-en  le  diea  qui  dispose  des  cœacs. 

SAPHO. 

Toi ,  qi^e  pour  mon  amant  ma  mose  a  &it  connaître  y 
Ingrat ,  tu  trahis  nos  amours  ! 
fvos  noms  sont  unis  pour  toujours  » 
Et  nos  cœurs  ne  le  peuvent  être  ! 

Grands  Dieux!  pourquoi  donc  ce  présage 
Dont  vous  me 'flattiez  aujourd'hui  ? 

Vous  devlei  soas  mea  lois  rarafiner  un  volage  , 
Mais  vous  me  trompez  comme  lui. 

Ah  !  c'en  est  trop ,  suivons  le  fureur  qui  me  gmd« , 
Terminons  un  funeste  sort. 

Je  n'ai  pu  t'arràcher  un  seul  soupir ,  peifide  ! 
Il  iiiQt  TobleDJr  'par  ma  moru 
(  Elle  court  se  précipiter  dans  la  mer.  ) 
PHAOtf. 

Arrêtez ,  arrêtez  ;  où  courtz-vons ,  cruelle  7 

O  ciel  !  elle  périt  !  cpielle  douleur  mortelle  ! 

SCÈNE  VI.. 

NEPTUNE,  PHAON. 

(On  entend  une  symphonie  agréable.) 

9  VAOU. 

Quels  sons  de  mes  regrets  interrompeM:  le  boon? 
Cessez,  charmans  concerts ,  Iftis9ec-aiot  ma  ttisteue. 
C'est  pour  moi  que  Sapho  vient  de  finir  Ses  jours. 
Du  mosns  fe  k  plaindrai  êans  cesse , 


iC 


ENTRÉE  II,  SCÈNE  VI.       .     285 
Si  je  a'at  pli  l'aimer  toH}ouTS. 

HEP  TU  HE,  paraît  sur  la  mer 
Gesse  de  plaindre  une  déesse. 

Sapho  prend  sa  place  en  ce  jour 
Entre  les  filles  de  mémoire. 
Le  ciel,  qui  prend  soin  de  sa  gloire , 
Veut  l'égaler  à  son  amour. 


Fin   D£   LA   SfiCOBDE   ESTBEE. 


rmoiSŒMx. 
LA  MUSIQUE. 

SCÊSE  I. 

AMPBIOF,  MÊSAXE. 

Xx^LM  !  avrc  on  coeot  si  gèr^c 

Qœ  n'«Tai»-je  do  troœ  à  àonaa  ! 
Pour  Fo^et  de  ma  flanuce  on  m'c 

Ma  main  procUpte  à  le  coaroooer 
Se  chargerait  d'un  soin  que  les  Dieax  deraient  poct 

Kélas  !  avec  no  coeur ,  etc. 

MÉ9ALE, 

Espérez  lout  de  voire  voix  : 
Baisetnblez  les  bamains ,  obtenez  leurs  hommages. 
Vons  savez  attirer  les  rochers  et  les  bois; 

Les  mortels  sont-ib  plus  sauvages? 

AMPBIOll. 

Je  vais  enfin  tehler  cp  dessein  glorieuse  ; 

Que  ne  peut  point  mon  art  seconde  par  les  Dieux  ! 


QUATRIÈME  ENT.B,âB^ 

%  LA  PEINTURE. 

'  ^e  théâtre  ^eprés(^9te  le  cabinet  d'Ap^llQ  d»as  W  palai< 
d'Alexandre,  où  soi^  bistoirte •  est  peiote  d&  U  mai» 
d'ApelU»  

^^  SCÈNE  I. 

CAMPASFE. 

j   Qu*v3  corar  est  préveoa  (iaaDd.sa  flamrae  est  extrême  ! 
•n^Qu'il  troaTA'de  raisons  pouc  aimer  ce.qn'ibaime! 
Contre  mes  vcrax  la  gloire  a  beaa  se  d^clatcK, 
lia  raison  vainement  s'aitne  pour  les  détraire  ; 
L'Amour,  sait  bien-  mieusnoas-  sddaire 
Qae  la.nûsoO'ae.saitDoiu  éclairée. 

Qu'un  coeur  .e^t  pr^T^a.  quand,  sa  flainip<î.  c9,i  extréfqçj 
Qu'il  trouve  dé  raisons  pour  aimer  ce  qu'il,  aime.  I 

SCÈNE  U. 

CAMPASPE,  A3.TÇBXE, 

CAMPASPE. 
'Apelle  eu  ces  ireux  va  se  rendre  ; 
C'est  ici  que  sa  msin  doit  achever  mes  traits  î 
Mais  je  crains  que  son  art  n'ajoute  à  mes  attraits  , 
Kt  M  redouble  encor  la  fl^mmt^  d'AleMndre« 


268  LE  TRIOMPHB  DES  ARTS. 

▲  KPBI09. 

Poorcpoi  TOUS  en  étonnex-TOiis? 
C'est  vous  qui  les  avez  fait  nahre. 
Ces  mortels  à  ma  Toix  rafisemblés.daDS  ces  Heas, 
Ces  lemparts ,  ces  palais ,  romement  de  la  Gr^ , 
Sont  les  eflfcts  de  l'ardeur  qui  me  presse  , 
Et  cette  ardeur  est  l'effet  de  vos  yeux. 
A  suivre  vos  lois  tout  a^re* 
Régnez,  et  jouissez  d'un  destin  plein  (fattrails  r 

Commencez  ici  votre  empire , 
Qu'il  s'étende  paitont ,  et  qd'il  dure  à  jamus. 

X  Le  chœur  répète  ces  quatre  derniers  ver».  ) 
AHPBlon. 
Les  yeux  de  tous  les  cœurs 'vous  attirent  l'bommagr. 
Avise  mQÎ  totu  embrasse  un  empire  si  doux  : 
Non ,  il  n'est  point  de  cceur  assez  sauvage 
Poor  l'être  encore  auprès  de  vous. 

NIOBÉ, 

Hélas!  tout  ce  pouvoir  ne  touche  point  mon  ame; 
)e  bais  ces  nouveaux  soins  dont  vous  m'embarrassez. 

Avez-vous  cru  que  ma  flamme 

Ne  m'occupait  pas  assez?. 

Jamais  pour  la  grandeur  Suprême 
Ai-je  formé  les  moindr^  vieux? 
'Ah!  vous  savez  trop  bien  que  mon'cœnr  amooreui 
Ne  cherchait  en  vous  que  vous  même. 

AMPBXOS. 

Pour  gage  éclatant  de  m&  foi  ^ 

Je  vous  devab  une  couronne  : 
Le  pouvoir  que  mon  art  vous  donne 
Devait  prouver  celui  que  vous  avez  sur  moi. 


ENTRÉE  III,SC4NE  It,  ^^ 

«lOBÉ. 

e  voulais  sur  vous  seul  étendre  ma  victoirt, 

>e  quoi  me  sert  le  rang  où  je  monte  ep  ce  jour?. 

Retranchez  plptôt  de  ni^  gloire 

Pour  ajouter  à  votre  amour. 

AMPHIOV. 

Rien  n'est  si  Ç)rt  que  l'amour  qqî  m'eûgage. 
amais  on  n'a  brûlé  d'une  si  vive  ardeur. 
Il  faudrait  avoir  plus  d'tfn  cœur 
Pour  en  ressentir  davantog[e* 

AMPliloil   ET   «iOBB* 
Qu'à  vos  voeux  ici  tout  réponde  ! 
2'e8t  de  vos  seuU  plaisiis  que  je  fais  mon  bonbeuf, 
Vivez  heureux ,    à 

Vivez  heureuse,  f  ®*  ^^^^  ^°^  ^«  màuà^, 
Aussi  long^ems  que  dans  siqq  açexu^ 

A  suivtc  VOS  lois  tout  aspire  | 
tlégnez,  et  jouissez  d'un  destin  pîeili  d^alta* 

Gottimeuèez  sur  nous  votre  âiiipirè  , 
Çu'il  s'étende  partout,  et  qu'il  dure  k  jamais! 
(  Les  Sauvages  élèvent  uil  trôrte  à  Amphion  et  à  Nièbé    $i 
leur  rendeul  leurs  lidoiiiiages^  ) 
CM   SÀCYAGr. 
Quel  est  le  cosur  qu'un  tertdre  aiti6ur  n'entraîne? 
Qui  peut  dompter  ses  aimables  langueurs? 
De  tous  nos  traits  sbùveilt  l'attaque  est  vainc  j 
Bt  nos  efforts  ne  sont  pas  tous  vainqueurs^ 

Mais  l'Amour  porte  Une  atteinte  certaine  ;  ^^flj 

Ses  injits  cbarmans  ne  manquent  point  lei  cçEttrs.  ^^M 

KiOBé»  ^^1 

Amour,  c'est  i  toi  seill  ^c  je  doi^  mes  plaisirs. 

Grandi  Opéras.  9«  ^^  JE 


4194  ^^  TJkKHHVniS  DC^  JLSLTS. 

APELLE. 

Vënos  est  la  beauté  q^e  VuoiveT»  adwe  ; 
<  Tout  cède  à  ses  chiwrBes  Tainqueurs  : 
Mais  «ïui  tous  voit  est,  plus  épris  encore  , 
fit  «es  yeux  n'ont  jamai»  allaoïé  dans  les  cceurs. 
Le  feu  qni  pour  vous  me  dévore^ 

C  AMP^ASPC. 

Que  vcneï-voua  m'apprendre?  ApcUe,  vous  m'ay 

AP^ELLB. 

J'en  fais  un  aveu  téméraire: 

Mais ,  malgré  moi ,  vous  me  cfaàrmcfz , 

Et  i*al  trop  d'taïbur  pour  le  taire* 

Mou  amour  à  la  gloire  est  venu  ra-animcf, 
te  monde  «st  embelli  àe  ce  qu'il  m'a  fait  faire; 
ïc  voulais  être  an  moins  digne  de  vou  aimes. 
Si  je  ne  l'étais  de.  vous. p)dive. 

€AttPASPE. 

Uélasl 

APÉtlB. 

Que  ce  soupir  trouble  mon'  cœur  jalocn^ 
Il  s'écbappe  popr  Alexandre  y 
Et  m'annonce  votre  courroux. 
(A  ce  partage,  bêlas I  je  devais  bien  m'attendt.e^ 

CAM.PASPE. 

Que  vous  êtes  cruel  de  ne  le  pas  comprendre! 

APELE.E. 

Que  croire?  et  que  me  dites-vou*? 
iAurais-je  quelque  part  à  ce  soupir  sf  tendre  ? 

CAJUPASPE. 

W«  yeux  osent  le  dite,  et  vous  n'osez  Tenteàdte. 

APELLE. 

Abl  c'est  trop  de  plaisirs  j  mon  ccjQut  les  ressent  tous: 


l#cVaM  de  leur  excès  mourir  â  vos  geooux. 

(  Il  «•  j«U«,  aui^ genoux. de  Cam^^aspe  ,  et  il  y  est  surpris  par 

Alexandre.)  "< 

sçÈm  IV. 

ALEXANDRE,  CAMPASPE,  APELLE. 

alexAbdbk. 
Que  vois-je?  on  me  trahit!  ô.  Pic^ia!  Iç  puis-jç  crçire? 

Quel  malheur  m^'açcable  ep  ce  jour! 
Ciel!  me. fais-tu  payer  les  faveurs  de  la  Gloirç 

Par  les  outrages  (}e  l'Amour?. 
(  A  Apellç.) 
Perfidrî  c'ef t  sor  toi  qu'il,  fwt  vengçç  ma|  pf.ipt  : 
J'éteindrai  dans,  ton  sang  ta  téméraire  afdeur  : 
Biep  ne  peut  t'arracber  au  courroux  qui  m'entraîne. 

Jusqu'à  la  vengeance  et  la  haine , 

Tout  est  extrême  dans  mon  cœur. 

CAMPASPE. 

Ak!^  faites  gpPBoè  à  6^  tepdr«4«f . 
Son  eœip*  pou?  moi  s^'etH  laissé  prévenir  : 

Vous  avex  la  mépie  ^iblçASft; 

Pourquoi  voiilez-voiiis  l'es  punir? 
AlEXASOtC,  . 
Cruelle,  c*cn  est  trop,  son  nrrîeur  vous  eii  chère î 
C'est  ce  ^i  eOMre  lui  doii  enror  m^tmuner  : 
Son  crime  est  d'être  heureux  pluiôt  que  téméraire.  ' 
H  ne  périra  pas  pour  oser  tous  armer. 

Mais  pour  savoir  vous  pJiiIre, 


ipc^d  rklOMPHE  DES  kiitS. 

CÂUPASPE. 

^h!  Seigneur,  gardez-vous  d'attenter  à  son  sort! 
|¥ 'allez  point  vous  couvrir  d'une  tache  éternelle: 
Qpand  son  art  vous  assure  une  vie  immortelle, 
Pourriez-viDUS  lui  donner  la  mort? 

APELLÇ. 

Non,  non  ;  suivez  les  transports  de  votre  ame. 
Faites-moi  tomber  sous  vos  coups. 
Je  ne  puis  surmonter  ma  flamme. 
Ni  soutenir  vptre  cpurr69<w 

ALEXAKDItÉ. 

$h  bien  !  cW  donc  à  moi  de  mç  vaincre  moi-même; 

Mon  cœur  doit  être  le  plus  fort. 

Mais  quoi!  céder  ce  que  Ton  aime! 
^r  quel  tœur  l'est  fisses  pour  un  si  grand  «(Ibrc2 

APELLE   E^  tAMPAiPE. 

^or  vbus-mAme  aujourdliui  remportez  la  victoire  ^ 
CoorofUiez  nocre  apoour,  et  comblez  votre  gloire. 

ALEXAUDltE  à  Êampaspe. 
9e  d)am{>te  enBn  pour  vous  Taroour  le  plus  ardeirt  ; 
Jnmaii  je  n'ai  soufiKirt  une  iri  rude  guerre  : 
)q  suivais  mon  t>eDchai)t  ftn  sonlnettant  la  «ei?e, 
fx  j'y  f ésis^  en  vens  cédant 

t:A|IPABPE«  1 

iSei^^r,  èei  efibrt  nous  engage.., 

AVEXASDBE, 

le  \r,w  laisse.  À  vas  rorax  je  viens  de  eeafelHic  > 
Mniis,  en  vous  voyant  davantage , 
Je  craindrais  de  m'en  repentir^ 


ENTBÉE  IV,  SCÈNE  V.     319^ 

SCÈNE  V 
Apelle,  campaspe. 

\ 
APELLE. 

Vous  qa'noe  noble  ardeur  a  rangés  sons  mes  lois, 
Qaî  cherchez  par  mon  art  une  illustre  mémoire , 

Venez,  accoure:^  à  ma  voix  : 
Célébrez  mon  amour,  célébrez  ma  victoire  ; 

Chantez  mon  bonheur  et  ma  gloire. 

Par  des  jeux  qouveaux  et  charmons 

Secondez  les  trailsports  de  deux  heureux  amans. 

(  Des  élèves  d*Apelle  lui  amènent  des  étrangers  attirés  pat 
sa  réputation ,  qui  se  {oignent  avec  eux  ,pour  célébrer  soft 
bonheur.) 

UB  iudiev. 
Partout  la  renommée  a  pris  soin  de  répandre 
De  ton  art  enchanteur  les  prodiges  divers  ', 
Ton  nom  vole  aussi  loin,  que  le  nom  d'Alexandre, 
lïous  venons  t'admirer  du  bout  de  Unnivers« 

CHCEUn. 

Célébrons  son  amour,  célébrons  sa  victoire; 
Chantons  son  bonheur  et  sa  gloire, 

fTS  ÉLÈVE   d'aPELLE, 

Nos  beaux  ans 

Sont  le  bon  tems 

Pour  la  tendresse. 
Que  les  coups  d'Amour  sont  doos 

Dans  la  jeunesse  ! 
D  li'est  point  de  bien  potac  no«M, 


i 


ttçfi  LE  TK.  DES  ABXS.  UT^TRÉJS,  IV«  SGKAfi  ▼. 

S'il  oe  ooas  blesse. 
Quand  ua  cœur , 
Fuit  fiQu  9niear, 
Qu'il  est  à  plaindre! 

Ce  ▼atD<jHeiir 
Four  son  bonheur 
Veut  le  contraindre. 
,  Cédons  tous,  ^ 

D»  DM  vœux  il  est  jaloBT  v 
C'est  son  courroux 
Qo  on  coeur  doit  craionip. 

VUE  IVDrEVVE  A   APEXLE  ET  A  CAMVAiPB. 

.Vous  attachez  tous  deux  led  grâces  sur  vos  pas, 
Vous  gagnez  tous  les  cœurs  par  d'invincibles  amies; 
L'art  fait  briller  par  vous  ses  plus  puissans  appas , 
Kl.UMtWft  «0..VOWI  fait  bùUes  tQOS^jBeft  chacsae&, 


riU'Ui^  &4  ^«aTB»«*.  «*v«i>e« 


CINQUIÈME  ENTRÉE. 

LA  SCULPTURE. 

L«  théâtre  i«pré8eirt«  l'atelfer  de  P^gmaliôn ,  '  au' «liliHi 
duqael  psïéît  la  Statue  dent  il«st  dnnné. 

SCÈNE  I. 

r. 

'  PYGMALION. 

t 

t  r  ATAL  Amour!  cruel  vainqueur! 

i  Quels  traits  as-tu  choisis  pour  me  percer  le  coeur? 
Je  goûtais  une  paix  profonde  ; 
li'estime  des  mortels  avait  comblé  mes  vœux. 
Pourquoi  viens-tu ,  par  de  bizarres  feux , 
Me  rendre  la  fable  du  monde? 

Fatal  AMcnr!  cruel  vunqœur! 
jQnels  traits  as-tu  choies  pour  me  percer  le  ettor  ? 
Je  tremblais  de  t'avoir  pour  maître , 
J'ai  craint  d'être  Sensible;  il  fallait  m'en  punir: 
Mais  devais-)e  le  devenir 
Pour  un  iofa^et  qui  ne  peut  l'^rè?. 

Fatal  .Amour!  crael  vainqueur! 
4^9la  traits  as^n  choisis  pour  -ne  percer  le  ccear2 

^     Cjtte  beauté- ique  rien  n'-^alc^... 


3oo  LE  TRIOMF^BE  DES  ABTS. 

SCÈNE  II. 

^YGMALION,  une  pbopêtipe. 

LA  PBOPÊTIDE. 

IiiGiÀT ,  c'est  donc  ici  que  tn  portais  tes  pas? 
Où  t'entnîoé  sans  cesse  une  flamme  fatale? 
Xq  me  fuis  pour  cbercber  d'insensibles  8|ipa8, 
Et  cet  ouvrage  est  ma  rivale  \ 

PTOMAL109* 

'AccosM-en  le  céleste  coarrouz  \ 
Je  bràle  d'ane  ardeur  que  je  ne  puis  éteindre  ; 
Mon  cœur  se  la  reproche  encore  plus  que  vous  ; 
Mais  il  n'en  est  que  plus  2i  plaindre. 

Cessez  d'aimer  l'objet  de  la  baine  des  Dieux  ; 
Étouffez  votre  amour  ;  que  la^  raison  le  dompte  ; 

Fuyez ,  fuyez  loin  de  Ces  lieiix , 
Et  cachez  à  jamais  vos  sbupirs  et  ma  hoûte4 

LA   PBOPÉTIDE. 

Que  je  foie  !  ah  !  cruel ,  est-il  en  mon  pouvoir? 

En  vain  tu  braves  qui  t'adore  ; 
Par  tes  mépris  mon  feu  s'irrita  encore  ^ 
Ma  vie  est  attachée  au  plaisir  de  te  voir. 
Koo ,  tu  n'es  pas  lobjet  de  la  haine  céleste | 
C'est  sur  moi  qu^.  le  ciel  épuise  sa  rigueur  ; 

Et  Vénus  poursuit  dans  mon  cceur , 
Le  reste  malheureux  d'un  sang  c^'eUo  déteste. 
Ciel  !  tu  ne  daignes  pas  écouter  mes  regrets! 
Tes  regards  sont  sans,  cesse  attachés  sur  ces  traits< 


KNTHÉE  V,  SCÈNE  UL  30» 

Pourqnot  ton  art  fit-il  ane  image  si  belle  ? 
Hélas  I  que  n*ai-je  ses  attraits , 
Ou  que  ne  suis-je  insensible  comme  elle  ? 

PTGMALIOR,  regardant  la  cUlu«. 
Ah  I  s'il  était  une  mortelle.... 

tA   PROPÉTIDE. 

Ingrat  !  n'acbère  pas  tes  barbares  souhaits. 

PTGMAtlOS. 

fïon  je  De  puis  le  taire  davautige  : 
Mou  cœur  cbercbe  partout  les  tialts  de  cet  objet. 

Et  si  c'est  vous  (aire  un  outrage , 
Je  vous  ofirc  à  percer  le  cœur  qui  vous  le  ùlu 

LA   PnOPÉTIDE. 

Je  punirai  mieux  ton  caprice  ; 
C'est  en  t'aimaot  toujours  qu'il  faut  venger  ma  foi. 
Je  ne  puis  inventer  pour  toi 
Un  plus  cruel  supplice. 

.     PYGMALIOS< 

O  Vénus ,  mère  des  Plaisirs , 
Daigne  enfin  calmer  ta  colère  ; 
Étouffe  dans  nos  coeurs  de  malheureux  désirs  ^ 
Ou  consens  d  les  satisfaire. 

Qu'entends-je  ?  et  quel  éclat  se  répand  dans  ces  lieux  ? 
C'est  Vénus  qui  s'oflre  à  mes  yeux. 

SCÈNE  III. 

VÉÎHUS,tA  pnopÉTiDE,  PYGMALlOîV^ 

viésus. 
jn  viens  finir  les  maux  où  U  flamme  t'engage  ; 
Gr.iijtis  Opéras.  2,  26 


3o«  lE TRIOMPHE  DES  ARTS. 

Mon  fils  pour  ton  bonheur  veut  s'unir  avec  moi  ; 

Je  vais'&aiiner  cette  image, 
F.t  r Amour  aussitôt  doit  renflammei  pour  toi. 
C'est  ainsi  que  ton  art  reçoit  la  recompense. 

LA- pnopéTiDB. 
Cruelle,  à  quel  excès. portes-tu  ta  vcog^oce  ? 

Non,  barbare  divinité , 

Je  ne  redoute  plus  ta  haine  ; 
3c  te  défie  avec  ta  cruauté 

De  rien  ajouter  à  ma  peine. 

Sonfixe  â  Ion  tour  les  maux  que  tu  fais  aux  mortels  : 
^ue  ton  Bis  te  déclare  une  implacable  guerre  : 

£t  qu'avec  moi  toute  la  terre 
Ose  outrager  ton  nom ,  et  briser  tes  autels  ! 

Vain  transpoit  !  inutile  plainte  ! 
Le  secours  de  ce  fer  servira  mieux  mou  cœur  ; 

Mais  il  m'échappe ,  et  la  douleur 

M'accable ,  et  prévient  son  atteinte, 

VÉBU8. 

J'ai  pitié  de  sa  peine-;  et  par  son  changement 
le  veux  venger  ma  gloire  et  finir  son  tourment. 

(  £11«  est  chaogce  en  rochsr.  ) 
(À  Pymalion.  ) 

Toi,  reconnais  ta  nouvelle  conqu^e. 

L'Amour  veut  servir  .t^s  désirs  : 

Bientôt,  par  une  aimable  fihe. 

Les  Arts  vont  en  ces  lieux  célébrer  tes  plaisirs. 

(Véniupart,  et  l'Amour  vole  avec  un  flambeau  devint  I» 
iitatue ,  qui  devient  animée.  ) 


EUTKÉE  T,  SCÉIf  E.  IT.  io^ 

SCÈNE  IV. 

PYGMALION,  Là,  9^ATD£« 

LA  STAT^JC; 

Que  voîs-je?  où  snis-je?  et  qo'csL-ce  que  je  pense? 
D'où  me  vieoiieDt  ces  mouvemeiu? 
Que  dols-je  croire?  et  par  quelle  poissance 
Puis-je  exprimer  mes  sentimeo»? 
Mais  quel  est  cet  objet  !  mon  aire  en  est  ravif  ; 
Je  goûte  en  le  voyant  le  plaisic  le  plus  doux. 
Ab  l  je  sens  que  les  Dieux ,  qui  me  donnent  la  vie , 
Ke-  me  k  donuem  que  pour  votis. 

WYGUAhlOVU 

De  mes  maux  2i  jamais  cet  aveu  me  délivre. 
Vous  seule ,  aimable  objet,  pouviez  me  secourir  : 

Si  le  ciel  ne  vous  eût  fait  vivre, 

11  me  condamuait  à  mourir. 

lA   STATUte. 

Quel  lieoreux  sort  pour  moi  !  vous  partagez  ma  fitonme. 
Ce  n'est  pas  votre  voix  qui  m'en  instruit  le  mieux  : 

Mais  je  reconnais  dans  vos  yeux 

Ce  que  je  ressens  dans  mon  ame. 

PTGMALlOir. 

Pour  un  cœur  tout  h  moi  puis-je  trop  m'efiftammei 

Que  -votre  ardieur  doit  m'élre  chère  ! 
iTos  premiers  mouveroens  ont  été  de  m'aimer. 

tA  STATUE. 

Et  mes  premiers  soins  de  vous  plaire. 
il  loivni  toujourt  votre  loi  ^ 


M  LE  TRIOMPHE  DES  ARTS. 

Preuei  le  soin  du  destio  que  )ignor«. 
Toat  ce  que  je  connais  de  moi , 
C'est  que  je  vous  adore. 

pyGMALIOS  ET  LA   STATUE» 

!A.imons-nous,  aimons-nous  toujoars  ; 
Kotre  bonheur  dépend  de  nos  amoors, 

pYGUALIOITt 

Ce  concert  nous  annonce  une  agréable  fête  ; 
Les  Aiis  viennent  ici  célébrer  ma  conquête, 

SCÈNE  y. 

PYGMALIOK,  LA  STAT^UE,  ghcbiib  dss  AiTl 
conduit  par  la  danse. 

GBOeuB, 

Jouissez  d'un  bonbeur  extrémer 
Que  de  vos  feux  rien  n'aixête  le  cours; 
Et  que  TAmour  vous  apprenne  lui-même 
LVt.de  plaire  et  d'aimer  toujours. 

Cfl  MATELOT,  pour  la  navigation^ 
Embarquez-vous ,  jeunesse  trop  timide  ; 

Prdiitez  d'un  heureux  loisir  : 
•Aimez ,  aimez  ;  l'Amour  est  le  S2nl  guide 
Qui  mène  les  cœurs  au  plaisir. 

UHE  PATsABJflE,  pour  l'Aipicultttra^ 
lie  plaisir  est  dans  nos  bocages 

L'Amour  nous  y  suit  toujours  : 
l^ous  voyons  tomber  nos  feuillages 
£ans  voir  finir  pos  beaux  jours. 
Q«4Qd  U  bciJe  saison  cesse, 


KNTRÈE  V,  SCÈNE  T.  3o5 

Il  t^os,  cœurs  ne  lom  pas  mo'ms  conteas, 

£t  la  jeunesse  et  ta  tendresse 
ICous  tiennent  lieu  de  printems. 
VUE    ACTBICE,  '.représentant  la  musique  «  citante  l*air 
italien. 
«(  Un  doice  caoto  di  vaga  beltà, 
>y  Puol  dar  si  vento  diu  cantar  la  liberta  ï 
»  £^1  rende  immota  la  dea  v«gante , 
»  £1  crin  vokate  porger  le  fa. 

L'A8TB<^LOâIE« 

'Amans  que  Pavenir  alamie , 
Cd  vain  .sur  votre  sort  vous  consultez  les  cieiix , 
Vous  en  apprendrez  plus  de  l'objet  ifûà  vous  charm»: 
Le  sort  qui  vous  attend  est  écrit  dans  ses  yeux. 

LE   CHXftun. 
Du  doux  bruit  de  nos  chants  que  ces  beaux  lieux  résonncut! 
Que  THymen,  que  l'Amour  vous  couronnent  l 
Que  ces  diewc  comblent  vos  désic&l 
Jouissez  de  tous  leurs  plaisirs. 


ris    DU    TRZOUPBE    DES   AKT»^ 


îff. 


OMPBTALE, 

TRAGÉDIE-LYRIQUE  EN  CINQ  ACTES  ; 

PAR  LAMOTTEi 

R^|témtl«,  pottr  b  prdnièr»  foif,  le  ta  8o- 
jenibre  1701. 


lït^n? 


PERSONNAGES. 

ALCIDE. 

OMPHALE,  reîue  àe  Lydie. 

IPHIS,  fils  du  roi  d'JEcalie. 

MANTO,  fiik  de  Tibésie,  sons  le  nom  d\ 

L'OMBRE  de  Tibésie. 

eÉPHiSE,)       ^3 

DORIS       (CoDbdestes  d'OmnàiLE», 

Le  gdako  pbêtbe  de  jupiteb. 

Un   TBÉBAI19. 

Une  Thébaihe. 

Choenrs  et  troupes  de  Lydiens  et  Lydiennes. 
Prêtres  et  prétresses,  captift,  béros»  m^ideas,  pcéties  et 
prétresses  de  TAmoub. 

DIVERTISSEMENS  PE  LA  TRAGÉDIE. 
PtlEMikR  ACTE. 
Ltdiess  et  LraiEiiBnES. 

DEUXIEME   AGTS. 
MOBES  ET  MOBESSES. 

TROISIEME  i.GTE. 
Cbecs  et  Gbecques. 

QUÀTElkME   AOTS. 
}tfA6iaE5S. 

CINQUIEME   ACTE. 
P.êtbesses  de l'Amoub. 

La  scène  est  à  Sardis ,  eapiule  de  Lydie. 


OMPHALE, 

TRAGl^DIE-LYRIQUE. 

ACTE  PREMIER, 

Uc    diéâtre  représente  des  arcs  de  triomphe,  élevés  k  la 
gloire  d'Alcide,  devant  le  temple  de  Japiter. 


SCÈNE  !• 

IPHIS. 

i^ALBiE  bearem,  agréable  paix, 
Cest  en  vain  que  je  vous  rappeUe  ; 
Calme  beaitXlX ,  agréable  paix , 
19  on  ce  n'est  plus  pour  moi  que  vos  plaisirs  sont  Êûts. 

I^angnissant  sous  le  poids  d'une  chaîne  cruelle , 
Je  ne  me  plains  qu'à  moi  de  mes  tourmens  secrets; 
Mais,  malgré  ma  oonivamte  et  ma  douleur  mortelle, 
Hon  amour  prend  sans  cesse  une  force  nauvclle  , 
Il  se  noufril  de  mes  regrets. 

Calme  heoreux,  etc. 

„  (On  entend  ici  tm  bruit  de  trompettes.) 

lyAlcide,  on  va  cbaoter  la  nouvelle  victoire, 
Ce  faillit^  tlfB  s*|i  triMoplie,  t«t  l'édaUMit  signal. 


âio  OMPHALE. 

Tout  retentit,  tout  parle  de  ss  gloire i 
■Tuidis  que,  p<fur  la^reine,  épris  d'iin  fèa- fatal  « 

Je  perds  le  soin  de  ma  mémoire  : 
Lâcbe,  rai«-ie  suhri  pour  l^imiter  si  mai? 

SCÈNE  II, 

À.LCIDE    ET   8A   SUITE,    IPHIS. 
AI.CIDE   A   SA   SUITE. 

-Les  rebelles  soumis,  gémissent  dans  les  fers; 
Mais  c'est  assez  des  maux  (Qu'ils  ont  soui&rts. 
Rassemblez-les,  pour  voir  briser  leur  cbaîne. 

Vous,  allez;  que  vos  soins  répondent.â  mes  vceax: 
Que  ceux  qui  m'ont  suivi,  8e  préparent  aux  jeux. 
Que  je  dois  oflrir  â  la  Reine. 

SCÈNE  m: 

ALCÏDB,  IPHISI 

ALGIDE. 

Que  servent  les  bonneurs  qu'on  rend  à^  mes-  expio:ts; 
Malheureux  !  tout  mon  cœur  s'ouvre  ail' mit  qui  ]e<l»kwi 
Mille  cruels  transports  m'agitent- a  la- fois  : 
O  barbire  ennemie!  implacable  déesse^ 
lunon,  tu  t'applaudis  du  troublé  où  tu  me  vois. 
iMfrt. 
An  MÎô  de  hr' victoire , 
.^9tre  ccnir  laisse  cociov  éciiai^ier  ém  fMipttCç 


ACTE  1,  SCÈNE  HT.  3iW 

Vous  ne  sauriez  désirer  plus  de  gloire  ; 
Ouel  autre  bien  fait  naîtrevoft  désks? 

ALCIX»C. 

^  Apprends ,  cher  Prince,  apprends  ma  faiblesse  secrète, 
On  vanie  mon  triomphe,  et  je. sens  ma- défaite. 

II>BiS. 

C^uoi,  Seigneur  î 

ALCIOE. 

^^  îJ'ai^seevilaroiiie  de  ccslieaxî 

J 'ai  pani .les  notiflis >  qni  troubLaientuSon  :einiâTe  ; . 
J'ai  sauvé,  par  la  mort  d'un  njoostre  furieux, 

^,  Tout  ce  que  sa  finenr  ^it  prête  à  détroire  : 

^  Que  servant ,  à  mon  cœur,  ces  expWJs-  glouienx? 

^  Il  se  trouble,  iUanguit,to  Tentends  qui  soupire; 
L'Amour  aibien^secvi  la  colère  des  Dieux. 

^.^  ip-nis, 

'    j^ous  aimez!  Eh î  quelle  est  1»  beauté  qui  tous  blesse K 

▲  ICIDE. 

I^  Heine.... 

IPBIS. 

.    Ociel! 

ALCIDE. 

La  Beine  a  surpris  ma  tendresse. 
Des  le  premier  moment  que  je  vis  ses  attraits, 
5e  sentis  que  mon  coeur  les  aimerait  sans  cesse  ; 
^c  t«ichai  vainement  d'en  repousser  les  traits, 

IPHIS. 

Ah!  vous  aimez  votre  faiblesse. 

Si  V4)us  défendiez  votre  fioeur, 
L'AmoiUi^  na-v'eu  cu%d¥i9)t;  1^  .«(fltftff 


El  roiis  fn  seriez  le  Tahx]ilair, 
Si  TOUS  ne  cnôgDies  p»  de  i'éiie. 

M«is,  redoKtcz  du  moins,  les  tnnqiorts  foricfix 

De  la  fille  de  Tirésie  ; 
EUe  tient  k  Ses  lois  la  nature  asservie. 
Ses  charmes  Ibot  pâlir  la  kraiière  des  cieax: 
Vous  n'avez  pa  Tanner  :  son  art,  sa  jalousie 
Peuvent  en  on  instant,  la  condoire  en  ces  liem  r 
Pïévenez  ses  fmears;...  mais  rieo  ne  voas  alame , 
Et  vous  nfécootez  plos  qa'im  anuNir  qui  voos  thLmt, 

ALCIDE. 

Quoi  ?  je  me  pbicab  dans  mes  îenl 
Tu  croU  que  mes  soupirs,  que  mes  maux  me  som  dw  » 
Non,  aide-moi,  toi-nvÊme,  à  sortir  d'esclavage; 
Bcprocbe^oi  les  feux  dont  je  me  sens  br&ler  • 
D'Ar^,  au  désespoir,  peins-moi  tonte  la  lage. 
Et  l'enfer,  contre  Ompbale,  aimé  pour  Taocabler. 

Fais-moi  voir  le  péril  extrême. 
Où  mon  nom....  mais  de  quoi  serviraient  ces  discooi»? 
Ah!  je  roc  les  suis  6its,  mUle  fois  à  moi-même. 

Et  je  sens  que  j'aime  toujours. 

L'Amour  est  sfir  de  la  victoire. 
C'est  en  vain  qu'un  grand  cœur  résiste  à  ses  attRuts: 

Les  vains  murmures  de  la  gloire. 
Donnent  encor  plus  de  force  à  ses  ttaiis. 

IPBIS. 

La  Reine  vient,  et  nous  voyons  paraître 
Les  ministres  sacrés  du  dieu  qui  vous  fit  naître: 
Voyez  tous  ces  drapeaux,  ornés  de  vos  exploits. 

ALCIBE. 

Omplulc ,  clïer  ^is,  «st  tout  ee  ^ô  je  vois. 


ACTE  1,  SCENE  IV.    '  3i3 

SCÈNE  IV. 

Aï^CIDE,  OMPHALE,  LE  GRAND  PBÉTRE, 
1 P H I S ,  troupes  de  Lydiehs  portant  des  drapeaux , 
oà  sont  représentés  les  travaux  d'ALCiDB,  et  la  dé- 
pouille du  monstre,  dont  il  vient  de  délivrer  les  états 
d'OMPHALE;  troupes  de  RPÊTOEset  de  pnÊTnEsscs 
de  JupzTLii. 

ALCIDE. 

BeU£  reine,  votre  présence. 
Payait  tous  aies  travaux  d'un  assez  grand  bonbeor  : 
Fallait-il  à  ce  bien  ajouter  tant  d'honneur! 

OVPHALZ. 

Vous  avez  dans  ces  Heiix;  rétabli  ma  paissance  j: 
Un  monstre ,  sur  mon  peuple,  exerçait  sa  fnreor, 
Votre  bras  redoutable  en  a  pris  U  vengeance  ; 
Je  vous  demande  eucor,  pour  dernière  faveur, 
De  sonfirir  ma  reconnaissance. 

On  célèbre  anjourdliai  le  jour  de  ma  naissance; 
Je  veux  que  tous  les  ans,  au  milieu  de  ma  cour, 

Mon  peuple  ehante  au  même  jour 

Votre  gloire  et  sa  délivrance. 
CBantez  lejdigne  fils  du  plvw  puissant  des  Dieux; 
Chantez,  portez  vos  roix  et  son  nom  jusqu'aux  :c:cut, 

LE    GBASitf   PRÊTBC  DE    lUPtriB. 

Sa  voix,  en  se  formant  i  appeh  la  victoire  ; 

Son  premier  pas  fut  pour  la  gloire  : 
L'univers  vit  briller  sa  fcroe  et  ses  vertus  î 

Presqu'au  momei/t  de  sa  naisscace: 
Les  setpeni  cioulTéj,  les  monstres  abattus 

ÉtAtent.ks  jeux  de  son  cnfaacc«.   * 


3t4  OMPHALa 

XE   CHOEUS. 

Chantons  le  digne  ^U  dn  plus  pinsi;»Bt  des  Dieux; 
OlidDtoQS,  portons  dos  voix  et  son  nom  jasqaaax  de 

LE  gbAhb  pr£tbe. 
O  voQsl  qoi  dans  vos  mains  soutenez  le  tonneiTe, 
^e  lancez  plus  ici  ses  terribles  éclats; 
Aux  coupables  mortels  Alcide  fait  la  gœrre  ^ 
Dans  le  sein  des  tyrans  il  porte  le  trépas  , 

Et  poar  en  délivrer  la  terre. 
Votre  foudre  vengeur  est  moins  fort  que  9an  Jbns, 

LE, caiEBU&  reprend. 
(Cantons ,  etc.     v 

LE   6BA.IID    ^.bItBE. 

Il  arrache  Cerbère  -au  ténébreux  rivage , 
De  llly(i«e>  renaissante  il  étoofi^iia  rage^ 
^1  a  fait ,  de,  la  terre,  et  des  eafors.soipàs. 

Les  ibéâtccs  de  son  courage , 

Et  le  ciel  en  sera,  le  prix. 

(Les  Lydiens  rendent  leur  l^onimage  à  AlcVde.) 
LE    GBABD  PnÊTBE    ET    OMiPHALE» 

Chaque  instant  redouble  sa.  glo.irc, 
U  est  digne  de  nos  autels. 

LE   GBA.ND  PBÊTBE. 

U  ne  veut^çur,  sps.pas,  enchaîner  la  ^ç!U>irey 
Que  pour  Je  rpposfies  mo|-tçK 

I^E  CH^H^B. 

Cha<|ue  insu^t.  redouble.  ^  ^)pir(« 

Il  est  digne  de  nos.  «u^ls. 

ALÇiÇEvà  Oinpjinle. 
Vous  pouvez  ro}<«x  répondre  au. zèle  /cpim'tslSaaipD', 
Ces  honneurs  n'ont  piwujsiQi  que  de  foib}es  jpfw; 


ACTE  I,  SCÈNE  !V.  ZiS 

PoviT  prix  de  ce  qn*a  fait  mon  bras , 
Permettez'^noi  l'aveu  de  ce  qae  sent  mon  ame. 

T>é]ik  vous  m'entende!^,  vous  pénétrez  mon  feu; 
Mes  soupirs  ont  cent  fois  prévenu  cet  aveu. 

OHPHALE. 

Qaol!  Sei«p)enr,  lorsqu'en  vaiii  Argine  vous  adore. 
De  si  fiàibles  attraits  vous  auraient  enflammé? 

Aire  IDE. 
Mon  rœtir,  contre  l'Amour,  se  défendrait  encore, 
Si  vos  regards  ne  l'avaient  désanné. 

OHPHALE. 

Sondons  â  terminer  cette  ftte  éclatante  ; 
Sor  les  autels  des  Dieux,  auteurs  de  nos  destins, 
iAJloDS  tons  consacrer  les  armes  des  nmtinfs. 
Et  du  monstre  vaincu  la  dépouille  sanglante; 

(Les  pf^re's  elles  Lydiens  entrent  avec  Alcide  et  Omphale^ 
dans  le  temple  de  Japlter,  et  répètent.) 

Chantons.  le  digne  fils  duplni  puissant  des  Dieux) 

Chantons,  pdreoos  noâ'voix  et  son  nom  jusqu'acte  ciéSf^ 


PIS   DU   PBEMIIB  AGtS. 


ACTE  SECOND. 

!■«  diéàtre  représente  le  palais  d'Ompbale; 

SCÈNE  I. 

OMPHALB,  CEPHISE,  DORIS. 

CKPHISE. 

AiODZ  vous  a  ùk  l'avea  de  son  ardeur. 

Bien  ne  manque  â  votre  victoire  ; 
Qu'il  doit  vous  être  doux  de  régner  dans  un  cœur. 

Qui  n'a  rien  aimé  t|uc  la  gloire  ! 

DOBIS. 

Bépondez  à  l'ardcnr  dont  son  cœur  est  épris  ^^ 

Qu'il  partage  votre  couronne; 
Les  chaînes  de  THymen  doivent  être  le  prix 

De  celles  que  l'Amour  lui  donne. 

CEPHISE   ET  DOBlS. 

ïauîsâea  du  bonheur  de  l'avoir  enflamme. 

OMPHALE, 

Le  plos  grand  de  mes  maux  est  de  l'avoir  charmé. 

CéPHISE   ET   DOBIS. 

Que  dites-vous  ?  Pourquoi  vous  en  faire  lua  si:^Iice? 

OMPHALE. 

Qat  de  raisons  pour  m'alamer  \ . 


-\ 


ACTE  II,  SCfeiffi  II.  lij 

f  «  lui  dois  tout  ;  il  m'aime  ,  et  je  ne  puia  l'auner». 
l'éprottve  de  l'Amour  le  plus  crael  caprice. 
CéPHISE  E-T  Doaifl.     / 
Eh  !  quel  autre  mortel  a  sa  plaire-  Â  vos  jeux  t 

OMPBALE.^ 

De  tous  les  héros  qu'en  ces  lieux 
A.ttira  la  fureur  d'un  monstre  redoutable , 
Vous  savez  trop  qu'AIcide  est  le  plus  glorieBZ  ; 
Savez-Yous  moins  quel  est  le  plus  aimable  ?. 

CÉPOISE. 

Est>ce  Iphis  que  vous  aimeriez  ?. 

OMPHALE. 

En  pénétrant  mon  choix  vous  le  justifiez^ 
11  fut  de  ma  fierté  Técueil  inévitable  ; 
Mon  cœur  trop  afiSûbli  se  laissa  désarmer , 
Et  sans  prévoir  qu'AIcide  dût  m'aiiifier, 
2e  sentis  seulement  qu -iphis,  était  aimable.. 

Iphis  ignoré  encor  Tamocff  qu'il  a  fàk  nattre  ;. 

Mais  c'est  lui  ^e  je  vois  paraître  : 

Avant  qu'il  sache  mon  ardeur^  , 

Pénétrons ,  s'il  se  peut ,  le  secret  de  ses  cœor..  ' 

SCÈNE  II. 

OMPHAImE,  1PH15., 

ipiris.. 
louisSEZ  de  votre  conquête,. 
Tous  allez  recevoir  Thommage  le  plus  doux  ; 
BeNe^  Reine ,  je  vien»  vous  aanooeer  U-fihc: 

»7. 


Infin/i ,  «'est  ênns  Ion  ctrur,  trop  faible  et  trop  i 
^^1  finit  cbciclje^  cet  dieux  dont  ta  te  plains, 
îàh  !  si  rÂinoar  devait  toucher  ton  ame , 
Que  ne  ptijltgeais-ta  la  flamme 
Dent  mon  corar  était  embrasé  ? 
Ta  croyais  que  Tamour  était'Une  faiblesse  ; 
Mais,  du  moins  mes  soupirs,  mes'laimes,  msi  tendras, 
Ne  t'auraient  «pie  liop  excusé. 

A&C40B. 

l«es  Amowrs  par  vos^nains  m'ofli-aient  de  éoaces  tbaÎDa, 
l«s  Plaisirs  n^'appelaient  sons  votre  aimable  lot  ; 
Mais  le  sort  me  oondamoe  à  d'étemelles  peines; 
Les  jours  heureux  ne  soilt  pas  iahs  ponr^moi , 
On  fimeste  feu  tue  dérore.. 
Malgré  ooi-tnéme ,  Omphale^. 

^nornE. 

Inutiles  diseonr«. 
t^e  fie  dis  lo^  cruel ,  sans  tous  ces  vains  détours, 
'Qat  ton  eceur  me  hait,  et  Tadore  !  ^ 

Ces  est  STOp ,  et  je  ^eux  te'inir  â  mon  tour. 

Cédons  au  transport  qui  m'entraîne.... 
Mais,  liéias!  ce-tian^Mut  est  un  transport  d'aoïour; 
C'est  en  vain  qu'à  tes  yeux  j'^pellerais  U  haine. 
Faut-il  (pie  notre  cceur  ne  nous^misse  ^béir? 
Ke  saurais-tu  m'aimer  ?  4ie  ^is^e  te  haïr  ? 

AXCIDE   ET   ABGISE. 

ilmeiirl  quelle  ftirie  empoisonne  tes  flammes.^ 
Et  quel  démon  forge  tes  traits  ? 
Dieu  barbare,  ^u  ce 'te  |}lais    '    ' 
<^'i  peiter  avec  toi  le  tiettble  dans  nda  ames^ 

ALCfDE. 

Quittes,  quittez  «eslicax, %t  cdimn  vos  tnnsperti; 


ACTE  M,  ^CÈNE  V.  325 

^crin  de  me  repiother  l'amour  qui  me  déchire, 
Plaignez  un  ccwjr,  qui  malgré  jnille  efîbr^ii^^ 
^e  saurait  s'afirauthir  de  son  cruel  empire, 

ARGISE. 

Il  me  fuit,  et'pouriuitnon  lâche  coeuir  soupire. 

:SC]ÈNE    y^ 

A^lGINE. 

jO  RAGE  !«  désespoir  î  6  barbare  fureur  î 
^Yenez  ^venger  l'Amoiir  qui  gémit  çlâns  mon  coeur. 

.On  fait  servir  mes  feux  m  triomphe  d'une  autre, 
Éteignez  mou  ardeur,  allumez  mon  courroux. 
Armez  mon  bras ,  et  connuisez  mes  coups  ; 
.Sur  la  rigiieur  d'Alcide  il  faut  régler  la  yôtie. 

.O  lage!  à  désespoir!  ô  barbare  fureur î* 
Venez  venger  l'Amour  qui  gémit  daius  mpn  cœur. 

Mais  Alcide  se  plaint  de  la  fierté  d'Omphale  : 
^e  hait-elle?....  ^e. veux  pénétrer  >dans  soR.cœur 
Et  si  je  reconnais  qu' Alcide  est  son  vainqueur, 
«Frapppns,  n'épargnons  pas  ^ane  heureuse  rivale. 


«Ul    DU    SECOJID^AeTC 


,Çsandi  Opéras.  '4.  .28 


ACTE  TROISIÈME. 

L«  tliéàtre  représente  les  jardins  d'Ona^bale. 


SCÈNE  I. 

OMPHALE. 

UiGiife  ob)et  d'nne  flaronie  éternene^ 
Viens  suspendre  mes  mnnx,  viens  calmer  mes  dooleas, 

C'est  ma  voix  qui  t'appelle  ; 
En  t't>fllBnt  à  mes  yeux,  viens-en  lanr  les  plears. 

Hélas!  ^  contrainte  ^ueHei 
J'ai  cacbé  mes  soupirs  aux  yeux  de  mon  vaiixjaenr; 
Hélas!  ^ne  n'»4-il  va  mon  €orar4 

SCÈNE  II, 

OMt^HALÏ,  1R<îlirE. 

C'est  elle  :  suspendons  le  courroux  <pM  m'enflamme. 

Sachons  le  secret  de  son  ane. 

OMPHALE,  sans  voir  Argine, 
Je  n'ai  pa,  dier  amant,  le  -décewrir  mes  feux; 

Ton  péril  m'a  fait  violence  ; 
L'aven  de  mon  amour  allait  combler  tes  vnenx , 


ACTE  III,  SCÈ5Ê  III.  327 

Jn  spectacle  fatal  m'a  contrainte  au  silence. 
^urdonne-moi  Veneur  xjpi  nous  rend  tuallieuteux, 

De  toD  destin  je  craignais  de  t'instiuire  ; 
Elf  OD  aven  t'exposait  i  des^  maiu^  (igoanxuL* 
Je  t'aimais  trop  pour  te  le  dire. 

Mais  je  dois  voir  les  jeux  qu'en  ees  lieux  ou  m'appvStt  ; 
Ucureose  si  l'Amour  y  conduit  raou  béros! 

Mais,  hélas!  quelle  triste  fête, 
Si  )e  u'y  puiâi  liuir  son  eneui  et  mes  tnaax! 

SCÈNE  III. 

AR61KE. 

Nos,  )e  n'en  doute  plus,  c'est  Aloide  qu'elle  aime. 

Elle  me  l'apprend  elle-même  ; 
'Au  moment  que  mou  a^l  a  fmt  cesser  burs  )«ux, 

Elle  allait  déclarer  ses  Ibua:. 
Pour  l'ingrat  qui  me  iUit,  bon  amour  rmtimide, 
Elle  aime,  elle  est  aimée,  o  ciel!  quçl  désespoir! 
Qu'elle  meure,  il  est  tems  que  nioo  courroni^  décide» 

Elle  ne  verra  plus  Aicide, 
Que  ne  péiissait-^Uâ  avant  que  de  le  voir  I 

Démons ,  volez  pour  ma  vengeance  ; 
Contre  Akide  mon  art  a  trop  peu  de  puissance, 
Que  j'immole  du  moins  Omphale  A  mon  transport. 

On  vient,  on  va  chanter  le  four  de  sa  naissance  ;     . 
Que  ce  soit  celui  de  sa  mort. 

Trempez  les  yeux',  servez  le  oourroax  qui  m'aaine , 
Enchiiutez-la  pour  être  a»  vidime. 


328  OMPHALE. 

SCÈNE  IV: 

•OMPHALE,  CÉPHISE, 

TitooPE  DE  GnECs  ET  DE  GRECQUES  choisî^  pour  'djnutrr  b 
naissance  cI'Oaipiiale.  OxphA'LE  se'  .place  sur  ov 
trône  lie  fleurs,  pour  voir  la  fête. 

CÉPHI^. 

Célébrez  le  jonr  mémorable , 
OÙ  le  dcstiu  d'Omptiale  à  commencé  son  cours  ;- 
C'est  de  ce  moment  favorable , 
Que  dépendaient  vos  plus  beaux  joiirr. 

tE   CHOEUR. 

Célébrons ,  etc. 

CEPâlSE. 

Vos  plaisirs  sont  nés  avec  elle  ; 

Ùnissei  vo^  cœurs  et  vos  voix. 
Que  VOS"  jeux,  que  vos  chants  signalem  vottre  lèlc. 
Puissiez-vous  aux  regards  d'une  reine  si  belle , 

Les  ofitir  encor  mille  fois! 

CÉPHTSE  ET    LE   CBOBÛR. 

ilkiil  qo'h  est  doux  de  vivre  sokk  ses  lois! 

CÉPHISE. 

Dans  on  si  bfeau  jour,  toàt  doit  s'eoflanuner. 
Le  tems  bcureux  des  jeux  est  le  tems  d'aimer/ 

Le  plus  Ber  doit  être 

Sensible  à  son  tour  ; 

L** Amour  nous  Êiir  naître, 

\hfoia  pocNrJ'Amoar/ 


AtTE  ïlî,  SCÈIÎE   It.  i^ 

I>ans  un  si  beau  jour,  tout  doit  s'enflammer, 
l^e  ttms  heureux  des  jeux  est  le  tems  d'aimer. 

Que  l'Amotir  notiS  lie 
De  ses  plus  beaux  noeuds  ; 
De  quoi  sert  la  vie 
Sans  SCS  tendres  feux? 
Sans  eux  tout  ennuie, 
Tout  plaît  avec  eux/ 

t)and  nb  si  beau  jour,  tout  doit  s'eiiflammef, 
Le  tems  heureux  des  jeux  est  le  tems  d'aimer^ 

CÉPHISE^ 

Inventons  dé  nouveaux  concerts  ^ 
Que  nos  tendres  accords  inspirent  la  ten^esse  ; 

Fesons-en  retentir  les  airs, 
Et  que  l'écho  charmé  les  répète  sans  cesse. 
LE  CHoeun. 

Inventons  etc. 

OMPHALE. 

fcVst  aàsez ,  votre  zèle  a  brillé  dans  ces  jeux  j 
Mais  j'ai  besbin  dWpeu  de  solitude. 
Le  ciel  seconde  mal  vos  vœux; 

Laissez-rboi  m'occùper  de  mon  inquiétude/ 

f  Céphise ,  et  le  Peuple  se  retirent ,  et  des  démons  sortent  dé* 
enfers,  qui  secouent  letirs  tiambeaux  sur  Omphale,  «t 
peochantent  sur  le  trône  de  fleurs ,  où  elle  est  assise.) 


28. 


33o  OMPHILE. 

SCÈNE  V. 

OMPUALB  enchatat^e.ÂRGINE. 

ABOlSBi  le  poignard  à  la  main.f 
$▲  mort  va  me  venger  an  pouvoir  de  ses  yens  ; 
Je  vois  jouir  enfin  de  la  douceur  extrême 
De  verser  ce  sang  odieux, 
Qui  brûlé  pour  l'ingrat  (]ne  j'aime. 

Frappons  ;  rieo  ne  peut  plus  retenir  mon  courroux  : 
Quel  plaisir!...  mais,  hélas!  mon  amour  rempoisonne  ; 
J'euvie,  en  la  frappant,  la  mort  que  je  lui  donne  : 
Que  ne  puis-je  être  aimée,  et  mouiir  sous  ses  coups? 

Mais,  on  me  méprise;  ou  l'adore; 
Quelle  rage  pour  moil  je  fitémis  d'y  penser. 
Ne  tardons  plus,  ficappons;  que  ne  peut-elle  eocort 
Offrir  â  ma  fureur  pins  de  sang  à  verser  ?. 

SCÈNE  yi. 

'ÂR61NE,  OMPHALE,  ÂLCIDE. 

ALCiDEj  en  arrachant  le  poignard  des  mains  d*Argiae. 
Oel!  que  vois-je! 

ABGias. 
'Ah!  cruel!  c'est  toi  qui  me  désarmes, 
Tu  m'armcbes  ce  fer  vengeur  ! 
'AcYiève  qu'il  te  serve  à  venger  tes  alarmes, 
Puisqa'il  est  dans  tes  moins ,.  plonge-lc  dans  non  cov. 


)  ACTE  m,  SCÈNE  VI.  »l 

ALCIDC. 

> Dieux!  en  vous  cheichaiity  qju  j^  cnôit  peur  la  viel 

Cioeliel  quelle  barbarie! 
^est  contre  mot  qu'il  faut  armer  votre  courrouic; 
}ue  ecut  monstres  afi&eui,  évoqués  par  yos  charmes, 

Contre  mes  jours  se  réunissent  tous  ; 
fe  verrai  sans  eflroi  tons  les  enfers  en  armes, 
Et  je  les  combattrai  sans  me  pliundre  de  vous. 

Mais  respectes  l'objet  «qui  m'a  n  plaire, 
Épuifiez  9ar  moi  tm  ngneurt. 

▲  BGXflE« 

Est-ce  en  me  fesant  voir,  combien  elle  fest  cièie, 

Que  tu  prétends  désarmer  mes  fureurs? 
Il  faudrait  la  bsôr,  pour  calmer  ma  «elèn  s 
Mais ,  baiba««,  VAmom  te  ûîit  «ne  antre  lai. 

Ma  rivale  t'inspire  imo  ardenr  trpp  £dàle; 
Je  ne  puis  t'in^irer  que  lliocrenr  et  Teffibi* 
Va,  tu  m'a  trop  appris  à  devenir  cmeUet  ' 
Vengeons-nous ,.  venf^ns-nous  de  ta  hÛQS  poqr  ^oi 

Et  de  ta  tendresse  ponr  elle. 
ALcups. 

Quelle  est  l'errenr  où  je  Yons  ?oi3 
I^on,je  ne  vous  bais  point. 

ABOI  SB. 

Que  &i»-tD  donc?  tu  l'aimes ^ 

ALCIOE. 

L'Ameor  sonmet  nos  c^prs  xpalgr^  neus-mâmes» 

ABAlil^. 

Le  tien  brÀle  pour  ses  appM , 
Basbare  l  e%  c'«H  ce  qpi  m'mla^i 


Hi  OMPHALË. 

Quand  to  nie  tairais  mille  fois  davantage,^ 
Mon  sott  serait  trop  4oiix,  si  tdt  ne  l'aimais  pm.  ' 
Mais,  tu  fais  gloire,  ingrat,  de  l'ànooiir  qai  t'en^ige: 
iVoilâ  mon  dé^ftspoîr,  ton  crkne,  et  son  arrêt. 

(Elle  veift  reprendre  le  poîgnard  àta  mains  d'Alcide.  )  | 

▲ICIDE. 

Ciel  !  f]ùel  est  votre  rage  ! 

A  KG  I  HE. 

^n  frémis  l  c'est  T  Amour  qai  t'apprend  à  trembler. 
Eh  bien!  cruel,  c'est  mol  <{ué  tu  dois  immoler. 
iTant  que  ce  cœur  vivca,  crains  qa^eUe  ne  pérhflSe  :  • 

Frappe,  préviens  par  mon  supplice 

tJne  main  prête  il  Teccabler  ; 

Frappe,  que  la  mort  me  déàuthe^ 
Offre  mon  cœur  sanglant  à  l'objet  qui  te  cbarme, 
iteiiis  pour  h  sauver,  ma  flaunne  et  mo'A  côorrom: 

Frappe,  le  coup  me  serat  doux, 
S'il  te  coûte  une  larme. 

,  ÀLcinE; 

Calmez  cet  aflreux  déseispoir  ; 
Viver,  Tivet,  Argine  ;  et  laissez  vivre  OmpWe. 

ÀRGiiirE. 
C'est  donc  trop  peu  pour  toi  d'ddorer  ma  rivale, 
Tu  veux  me  eondàmner  à  l^orreùr  de  te  voir. 

NoU)  c'est  trop  Li  laisset  triompher  de  mes  charmes  y 
Enlevez-b ,  démons ,  et  vengez  mes  alarmes. 
ÀnnoUcez-liii  la  mort  pour  prix  de  son  ardeur. 
(  On  efilève  Ompbale.  j 
ÂLCIDE. 
Ah!  tant  dé  barbarie  irrite  mbn  èoùrage. 
ALciÉE  ET  Ânci^E: 
Je  sens  triotnp^r  dans  ihon  cobut 


Acte  m,  scÈiîE  ti.  333f 

Le  dépit ,  la  liakie,  et  1»  rage;- 
TrcmWez  ;  dans  un  cœur  qu'on  outrage, 

/Amour  au  desespoir  fait  naître  la  fureur, 
Xbgise. 

les  yeux  vont ,'  malgré  toi ,  jouir  de  son  supplice^ 

ALCIDE. 

e  ne  vous  quitte  point;  8*ît  faut  qu'elle  périsse  , 
'eus  voyez  son  amant,  vous  verrez  son  vengeur^ 

AfcélDE    ET    ARGIBE. 

Je  sens  triompher  dans  mon  cœur 
Le  dépit ,  la  liair.-î ,  et  là  rage  ; 
Tremblez  ;  dans  un  cœur  qu.on  outrage  ^ 
/AmoBran  désespoir  fait. naître  la-  furcut.' 


^IS   DU    TBOlSlisttE    AÊTÉ. 


ACTE  QUATRIÈME. 

Le  théâtre  représente  urie  soiitode. 

SCÈNE  I. 

IPHIS. 

ixcoi]  je  vis  mallioureiix!  Ehl  qo'est-ce  qae  j'espët? 
Va  autre  a  su  channer  Tobjet  qui  m'a  sa  plaire. 

Pourquoi  traîner  ici  de  misérables  jours? 
Ce  fer  devait  éteindre  une  ardeur  téméraire  ; 
Faut-il  que  ma  douleur  me  soit  eucor  si  chère  , 
Que  je  n'ose,  en  mourant,  en  terminer  le  couis! 

Que  nos  jours  sont  .dignes  d'envie  ,. 
Quand  l'Amour  répond  à  nos  vœux  l 
L'Amour  même  le  moins  heureux, 
Nous  attache  encore  â  la  vie. 

SCÈNE  II. 

IPHIS,  ALCIDE. 

IPBIS. 

QtJE  vois-je  î  où  courez- vous  Alcide? 


^        ACTE  IV,  SCENE  m.  335 

ALCIDE. 

1  vois  un  malbeareux  que  le  désespoir  guide. 

La  Reme ,  en  ce  momeïit  fatal , 
IX  yeux  d'Argîne ,  prête  à  terminer  sa  vie , 
ient  de  me  déclarer  le  bonleur  d'un  rival  j 

Ce  root ,  d'Argine  ,  a  calm  é  la  furie, 
ais  en  des  maux  aflreux,  il  vient  de  me  plonger. 

Et  mon  amour  a  fait  place  â  la  rage. 

IPHIS. 

j  !  nommez  le  mortel  dont  Tardeur  vous  outrage , 
Et  laissez-moi  llionneur  de  vous  venger. 

ALCIDE. 

}at  trompe ,  cber  Ipbis ,  ma  fureur  et  ton  zèle  ; 
>ntre  un  rival  cacbé,  que  sert  tout  ce  courroux? 
I  m'en  informe  en  vain;  rien  ne  me  le  révèle  : 
Et  j'ignore  ou  |)0tter  mes  coups  : 

V!ms  je  saurai  percer  la  nuit  obscure , 
Qui  le  dérobe  à  mon  ressentiment  ; 
Et  je  veux  voir  couler,  pour  laver  mon  mjure  , 
L  les  plents  de  l'amante  et  le  sang  de  Tamant. 

SCÈNE   III. 

ALCIDE,  ÂRGINE  et  IPHIS. 

A11GI9E. 

Som  tes  pas ,  mon  amour  m'amène , 
bffi'irai-]e  toujours  une  tendresse  vainc? 
i  viens  de  voir  le  fruit  d'un  odieux  amour  ; 

Ompbale.... 


536  OMPHAî-E. 

ALCIDE. 

Yods  savez  sa  haine , 

Je  b  bais  moi-même  à  mon  tonr. 
fui  colère  siiccè<i|e  à  ma  ^ndresse  extrême, 

Secondex  mes  saoglans  projets  : 
Vq^s  pouvez  par  votre  Qit  décoi^vrir  ce  qu'elle  aime.. 

ABGIJIE. 

C'est  donc  ainsi,  cruel ,  que  ta  la  hais  i 
Ah  !  qae  ne  me  hais-tu  de  même  ! 

ALCIOE. 

Vous  prenez  ma  fureur  jpour  un  amour  ialoux  j 
J4on ,  non  ;  !a  Gloire  seule  anime  mon  courroux  ; 
Je  vfsfax  venger  un  jour  l'injure  qu'on  m'a  faite. 
Il  faut  que  mon  rival  y  meure  sous  mes  coups. 

ARG.i?E. 

sC'est  Om{^ile,  et  non  pas  ton  rival,  qui  t'arrête. 

ALCIDE. 

Nommez-le,  je  me  venge,  et  je  pars  avec  vous. 

^âtez-vo\is  4e  répondre.^  paon  impaiience, 

)e  sens,  k  çb^ue  iostant,  mou  xouitoux  s'alluin^. 

ABGISE. 

Va ,  oe  prends  point  d'autre  vc,ogeaoce  j 
Que  de  partir  et  de  m'aimer. 

ALCIDE. 

Non ,  si  je  vous  suis  cher,  contentez  mou  eov!«. 

ABG-IKE. 

Jist-ce  Â  moi  de  servir  ton  amoureux  transpoit?. 

A  I^C  IDE. 

A  la  seule  fureur  mon  ame  est  asservie, 
jÇon^ltcz  le  destin ,  faites-vous  <;eitc  effort  i 


ACTE    IV,  SCÈNE  IV.  337 

4^e  mon  rival  perde  la  vie. 
Mon  coeur  est  libre  après  sa  mort.... 

2ra-t-il  lihi;e,  békis  !  quand  Ihnphale  iplorée.^ 

AtCIDE. 

Ji!  puisse-t-eile  aussi  rocurir  désespérée! 

ARGIRE. 

e  cède  j  c'est  pour  moi  que  je  fais  cet  efîbrt  : 
'apprendrai  mon  destin ,  en  apprenant  ton  sort.. 


SCÊNË  IV. 


'AUGINE,   ALCIDE,    IPHIS,    troupe  de  mar 
giciens. 

AnGlSE. 

Que  le  jpnr  pûfissant  fasse  place  aax  ténèbres  : 
Et  vous  qui,  sons  mes  lois,  commandez  aux  enfeis, 

Hâtez- vous ,  traversez  les  airs  ! 
Et  venez  célébrer  nos  mystères  funèbres. 

CHCE-nB  DE  ]||IAGICIE9S,  qui  viennent  sut  des 
,  monstres ,  et  sur  des  nuages  enflammés. 

Nous  obéissons  ti  la  vdix  ! 

Ordonne  -^  nous  stfivrons  tes  1o*s. 
augine. 
.Que  tout  serve,  en  <îes  lieux ,  le  transport  qui  m'inspire^ 
jQu'f)n  élève  un  autel  au  dieu  du  noir  empire  ; 

£t  vous ,  rendez  ^Plotou  propice  ^  mes  ^f!brt9. 
Grands  Opéras.  .2,  29 


338  OMPHAL£. 

(On  amène  deax  béliers  noirs  «  pour  lec  sacrifier  à  PJolafi  d 
à  Proserpine.  ) 

Que  vos  clamears  toacheot  les  mocts  ; 

Que  la  terre  onvre  ses  abîmes  ; 

Qu'ils  laissent  parvenir,  jasqaes  aox  sombres  bords , 

Les  cris  et  le  saog  des  victimes. 

LE    CBCeUD, 

Que  nos  clameurs ,  etc. 

(On  fait  ici  Aei  cérémonies  magiques.  ) 

ABGIHE. 
Ploton  répond  à  oos  souhaits 
Un  mouvement  secret  m'en  apprend  le  sncc^. 

(  Les  magiciens  témoignent  lear  io;e. } 
Pour  savoir  les  secrets  que  le  sort  veut  nous  taire , 
Evoquons  l'ombre  de  mon  père. 

Mânes  de  Tirésias  à  qui  je  dois  le  jour, 

Sortez  de  vos  demeures  sombres , 
Répondez  &  naes  cris ,  marquez-moi  votre  imoitr, 

S'il  en  est  encor  chez  les  ombres. 

C/&H  à  VOUS  que  le  sort  révélait  ses  secrets. 
Tandis  qu'un  sang  moi  tel  a  coulé  dans  vos  vebes  ; 
Vous  voyez  chez  les  moits  ses  ordres  de  plus  près. 
Venez  ,  et  pnissiez-vous  prononcer  des  arrêts 
Qui  calment  son  trouble  et  mes  peines  ! 

MJnes,  etc. 

(  On  égorge  les  victimes.  ) 

X.  £  C  H  OE  V  B. 

L'air  s'ohscurrjt ,  la  terre  s'ouvre. 
L'Ombre  â  nos  regnrds  se  découvre. 


ACTE  IV,  SCÈNE  V.  339 

(  L*oinbre  de  Tirésiat  paraît ,  avec  les  habits  d«  prêtre  , 
et  le  sceptre  d'or  à  la  main. .  ),     ^ 

l'ombdE,  à  Argine.  i 
En  vaÎD,  tes  magiques  efforts 
Ont  troublé  le  silence  et  le  repos  des  morts. 

Pour  toi  l'Amour  est  implacable. 
U  n'est  point  de  remède  au  tourment  qui  t'accable , 
Que  l'étemel  oubli  qui  règne]  aux  sombres  bords! 

AnoisE. 
O  ciel  !  cruel  Amour  !  destin  impitoyable  ! 

(  Elle  son.  )     ' 
l'ohbbe,  àAlcide. 
Alcide,  ce  jour  voit  malgré  ta  colère 
Ton  rival  triomphant  an  temple  de  l'Amour. 

C'est  trop  soutenir  la  lumière , 
Et  la  Mort  me  rappelle  au  ténébreux  séjour. 

IPHIS,  à  part. 
'Ah!  l'espoir  de  la  mort  est  le  seul  qui  me  reste! 
lé  pers  Omphale  ',  allons  expirer  à  ses  yrax. 

SCÈNE  y.. 

ALCIDE. 

Qu'ai- JE  entendu ,  grands  Dieux  !  quel  funeste  présage  ! 
tl'est  donc  le  prix  fatal  que  me  gardait  l'Amour! 
La  Reine  et  son  amant,  malgré  toute  ma  rage. 

Doivent  être  Unis  dès  ce  Jour  ! 

Pour  leur  bonheur,  tout  se  prépare  ,  ^ 

Les  flambeaux  de  l'Hymen  sont  prêts  : 

Won,  Sort  crael ,  Destin  barbare. 


34^     OMPfiALE,  ACTE  IV,  SCÈN  È^  V. 
Jfl  vais  eu  me  vengeant  démentir  tes  arrêts. 

I^onstre ,  qae  j'tti  ckvnpté ,  renais,  sors  de  ta  cendre. 
Ramène  dans  ces  lieux  le  carnage  et  lliotf  edr. 
Embrase  de  ies  feux  robjet  de  ma  foreur. 
Et  couvre-toi  du  sang  qile  je  cherche  4  répandre. 

Toi ,  mon  père ,  finis  le  trouble  où  )e  me  vois  ; 
Que  mon  rival  fetppé   tombe  rédnit*en  poudre  f 

Qu'il  meure  accablé  de  ta  foudre  , 

Ou  par  pitié  fais-la  tomber  sur  moi. 

40  Dieux!  (pic  je  me  fais  une  image  cruelle 
tHx  triomphe  prochain  de  ces  heureux  amans  ! 
Tous  deux  voient  au  temple  où  l^tjrmei)  les  appelle , 
Je  vois  tous  leurs  transports  ^  j'entends  tous  leurs  sermctf^ 

Q^:(e^eitrs  âmes  sont  attendries  ï 
Le  flambrfiu  de  l'Amour  brille  devant  leurs  pas , 

Taudis  qtie  celui  des  Furies 
l*ortc  au  fond  de  mon  cœur   la  rage  et  le  trépas. 
'Ah  !  périsse  avec  moi  l'ingrate  et  ce  qtl'elle  aime  f 
Allons  à  leur  hymen  Oppo^r  mon  transport  y 
Que  Tautel  renversé ,  le  dieu  In-isé  lui-même , 
Que  le  temple  détruit  dans  ma  fureur  extrême 
Kous  réunisse  tous  par  une  seule  mort» 


Fin    DU    QUATRIÈME   ACTE. 


ACTE  CINQUIÈME. 

Le  tliéjtre  représente  le  temple  de  TAmour. 


SCÈNE  I. 

OMPHALE. 

2x1101711 ,  je  viens  ici  t'oflrir  tio  sacriiice  ; 
Datgaë  tenniner  mon  supplice. 

Iphts,  ignore  mon  ardeur; 
Malgré  le  penchant  qui  m'entraîne , 
De  son  rival,  la  présence  inhumaine 
M'a  contrainte  moi-même  à  nouiiir  son  erreur, 

Kloi£;ne  ce  rival ,  qui  brûle  pour  une  autre  ; 
Qu'Ârgine  puisse  enfin  triompher  de  son  cœur, 
<^'ils  aillent  loin  d'ici  jouir  d'un  plein  bonheur, 
Et  qu'ils  ne  troublent  plus  le  néuc. 

Mais  on  vient;  â  l'Amour  j'ai  |iréparé  ces  jeux, 
£t  je  lui  vais  offirir  mon  hommage  et  mes  vœux. 


29- 


34i  V  OMPHALE. 

SCÈNE  II. 

OMPHALE  ,  troupe  de  prétresses  de  TAMOini,  porta» 
des  corbeilles  de  flems  qu'elles  mettent  mu  l'aiiteL 

OXPBALB  ET  LE   CHCBVB. 

CoAJiTEz  l'Amoar,  chantez  sa  flamme. 

Chantez  le  maître  de  Totre  ame  ; 

Faites  retentir  ce  séjour 
Des  doux  plaisirs  qui  vous  cfochantent  : 
Qui  pourrait  mieux  chanter  l'Amou  r, 

Que  ceux  qû  le  ressentent. 

OMPHALE, 

Amour,  sois  favorable  aux  vœux  que  je  te  fais; 

Réponds  au  transport  qui  m'anime, 

Je  te  présente  pour  victime , 

Mon  cœur,  tout  percé  de  tes  traits, 
(En  sacrifiant.) 
A  me  favoriser  que  mon  zèle  t'engage  ; 
Reçois  ce  vin  sacré,  vois  fumer  cet  encens; 
Mais  regarde'eocor  plus  la  flamme  que  je  sens» 
Je  ne  saurais  t'ofirir  un  plus  pai&it  houmiage. 

LE   CH€EUB. 

Que  r Amour  ronge  tout  sous  ses  lois  sonteraioes, 
Qu'il  lance  ses  traits  juiqu-aux  cieux  ; 
Qu'il  étende  partout  ses  chaînes, 
Qu'il  triomphe  à  jamais,  des  mortels  et  des  Dieux. 


ACTE  V,  SCÈNE  III.  3^3 

SCÈNE  m- 

OMPHALE,  IPHIS,  LES  CHO^iURS. 

f    OMVHAIE. 

Que  Yois-jè!  c'est  Ipbisqni  s'avance^ 
Mon  hommage  a  touché  les  Dieux. 

^  IPHlS. 

Omphale,  pardonnez,  si  je  m'ofire  à  vos  yeux; 
.Vous  ne  soofirirez  pas  loog-tems  de  ma  présence. 

OMPHALE. 

Cessez  cet  injuste  discours, 
Iphis,  il  n'est  plus  tems  de  feindre; 
Votre  absence   est  pour  moi  le  seul  malheur  h  craindre. 

IPHIS.  ^ 

Quel  discours!  justes  Dieux!  est-ce  à  moi  qu'il  s'adresse^ 

OMPHALE. 

Connaissez  enfin  ma  faiblesse, 
J'ai  caché ^  malgré  moi,' mes  feux  jusqu'à  ce  jour. 
C'est  pour  tous  seul  que  je  soupire  :  r 
Je  sens  croître  encor  mon  imour^ 
Par  le  plaisir  de  vous  le  dire. 

fPHXS. 

Qnel  est  l'excès  de  mon  bonheur  l 
Quel  plaisir  enchante  mon  ame  ! 

L'aveu  de  TOtre  ardeur 

Bed|Ouble  encor  ma  flamme. 

OMPHALE   ET    IPHIS. 

^i^h!  répétez  cent  fois  un  aveu  si  charmant. 

IPHIS. 

Ce  peut-il  que  l'Amour  m'accordi:  tant  de  gloire  t 


i 


^44  OMPHALE. 

Quand  voas  cessez  de  le  dire  un  moment , 
Je  cesse  de  le  croire. 

OMPBALE. 

L'Amoar  a  daoi  mes  yeux  marijaé  votre  victokc.  ^ 

XPHIS. 

.Vous  ne  pouviez  aimer  un  plus  fidèle  amant. 

OMPHALE    ET    IPHIS* 

'Ah  !  répétez  cent  fois  un  aveu  si  charmant  l 

OMPHALE. 

Que  l'Hymen ,  de  ses  nœuds ,  nous  unisse  lui-même  : 
l^rompons  les  yeux  d'Alcide,  et  maigre  ses  eâortâ... 

ipnis. 
Quel  nom  prononcez-vôus?  Dieux  !  mon  trouble  est  extrême^ 
En  goûtant  mon  bonheur,  j'oubliais  qu'il  vous  aime  : 
Que  ce  nom  dans  mon  cœur,  a  jeté  de  remords  ! 

OMPHALE* 

On  vient,  c'est  hii;  qiie  je  crains  ses  transports  ! 
'    (Iphis troublé,  s'appuie  d'un  côte  sur  une  colonne  c( 
Omphale  de  l'autre.) 

SCÈNE    IV 

OMPHALE,  IPHIS,  ALCIDE, 

ALCIDE. 

Quels  fimestes  apprêts  !  mon  trouble  s'en  augmente , 

Ijb  rage  déchire  mou  cœur  ! 
Munissons  mon  rival,  et  sa  petiide  amante; 
Qu'ils  rencontrent  la  mort,  la  Tengeaiice  el  lliorrectt, 
Au  lieu  du  doux  hymen  qui  flattait  leur  attente  : 
De  leur  saug,  de  leurs- cris,  repaissons  ma  fuieurf 
OÙ  sont-ils!  mais,  que  vois-jcl  Ah!  c'est  vous  iuhtimai'ijc! 

Barbare,  c'est  uop  m  outrager I 


ACTE  V,  SCÈNE  IV.  345 

Mais  quel  cbanne  suspend  la  fiireur  qui  m'aïaèoe? 
Ciel  !  je  soupire  encore  eu  voulant  nae  venger  ; 
Que  je  sens  à  la  ibis,  et  d'amour  et  de  Iiaioel 
Vous  pleurez;  vous  gardez  ïm  silence  confus  j 

Vous  soupirez,  Dieux!  quel  trouble  est  le  vôtre! 
Mais  tes  pleurs,  ces  soupirs,  ce  trouble  est  pour  un  autre, 
Vous  m'en  haïssez  encqr  plus. 

OMPBALE. 

Pardonnez  k'deu3£  cœurs... 

ALCIDE. 

Vous  attendiez,  cruelle, 
Ce  mortel  trop  heureux  j  qui  vous  a  sa  toucher  ; 

(  Il  voit  IphU.^ 
Mais,  sa  mort..«  Ciel!  Iphis,  eh!  que  viens-tn  cheàcherTi 
te  le  vois;  Tamitié,  dans  ce  temple  t'appelle; 
Tu  venais  m'immoler  deux  odieux  amans. 
Mil  reçois  en  le  prix  dans  mes  embrassemens. 

XPHIS. 

^irrête... 

Que  faîs-tu? 


ALCIDE. 


IPHIS. 

Kon,  c'est  trop  me  confondre. 

ALCIDE. 

Ciel  !  qu^  vîens-tu  de  me  répondre  \ 

fphis  d'entre  mes  bras  cherche  h  se  dégager? 

.1  me  fuit,  le  croirai-je,  et  n'est-ce  iK)int  un  songe?, 

>erais-tu  ce  rival,  dont  je  dois  me  venger? 

"iel  !  est-ce  dans  ton  sang  qu'il  faut  que  je  me  plonge  t 

IPHIS. 

^uand  l'Àmour  m'a  blessé,  j'ignorais  ton  ardeur, 


346  OMPHALE. 

L'wiiitié  qaï  nous  lie  eût  vaincu  ma  Caiblcsse , 
3  e  ne  puis  même  encor  soutenir  la  douleur, 
Pardoune-nioi  ma  flamme  et  sa  tendresse , 
3«  vais  par  mon  trépas ,  expier  mon  bonheur. 

A'LCIDE. 

non,  tu  m'es  cher  encor,  quoique  traître,  et  perfide, 
K'ajoute  point  ta  perte  aux  rigueurs  de  mofe  «Ht, 

OMPHALfi. 

Ah  î  cher  Iphis,  quelle  rage  vous  guide? 
Songez-vous,  que  ce  coup  m'allait  donner  la  mort, 

ALCIDE. 

Que  dites-vous?  vos  jorars  dépendent  de  sa  vie  t 
Ah!  cruelle ,  ce  mot  rappelle  mes  fureurs  ; 

Vengeons  ma  tendresse  trahie. 
Mourez,  ingrats,  mourez,  partagez  mes  dodeuis. 

Que  fids-jc?  arrête ,  Alcide ,  arrête  ;  ' 
Quoi  !  veux-tu  devenir  l'horreur  de  runîvftrs  ! 
*  Quel  trouble!  quels  objets  à  mes  yeux  sont  €^st\sl 
Le  tonnerre  en  grondant  s'allume  sur  ma  tête  i 
Je  crois  voir  Jupiter  au  milieu  des  éclairs... 

Tremble,  la  foudre  est  toute  prêle  : 
Moi  trembler!  non,  bravons  le^  Dieux  et  la  tempête:. 
Mais  je  trouve  partout  les  remords  que  je  fuis  ; 
Ciel  !  que  veux-tu  de  moi,  dans  le  trouble  ou  je  sois! 

Je  t'entends,   dieu  puissant,  j'allais  céder  au  cdme, 
Ta  voix  vient  dans  mon  cœur  rappeler  la  vertu: 
Uélas!  faut-il  calmer  la  fureur  qui  m'anime2 

Quel  sacrifice  exigcs-tu? 
Dieu  barbare,  mon  cœur  en  sera  la  victime. 

(A  Omphale.) 
Quoi,  je  vivrais  sans  vous!  Dieux!  quel  serait  moo  sort! 


(  A  Iphis.) 
3n  ,  perfide...  ou  m'enaporle  un  indigne  transport  : 
fi  instant  pour  jamais ,  ra  flétrir  ma  mémoire  : 
vcz  plutôt  heureux....  mais ,  quel  funeste  efibrti 
inour,  barbare  Amour,  iippitoyable  Gloire  ! 
'en  est  trop,  la  raison  vient  en&n  mëclairer^  1 
lie  éteint  à  la  fois  mon  amour  et  ma  haine. 

liez,  ani$sez-vons  d'une  étemelle  chaise, 

Je  ne  yeax  plus  vous  séparer  : 
imez-vous ,  oubliez  ma  honte  et  votre  peine , 

3  e  ne  vis  plus ,  que  pour  les  réparer. 

OMPHALE,   tPHiS,    ET   LE    CBCEUB. 

Quel  triomphé  !  quelle  victoire! 

Qu'il  est  beau  de  vaincre  l'Amour, 

Célébrons  à  jamais  le  jour 

De  nos  plaisirs  et  dé  sa  gloire. 
AteiDE. 
eine,  venez  Aïontrer  aux  peuples  de  ces  Ueax, 
3  digne  souverain,  que  votre  amour  leur  donne, 
UoDS,  qu'avec  éclat  il  reçoive  à  leurs  yeux 

Votre  main  et  votre  couronne. 
MPHALC  ET  XPHIS,  sortent  arec  ÂLCIDE  aux   accra* 
mations  du  GBOBUI. 

Quel  triomphe,  etc. 

(On  fiait  ici  dans  la  représentation  d«  Popéra.) 

SCÊNE^  V, 

LES   PIIÉCÉDESIS,    ARGINE. 
ABGIHE. 

iTéte  ,  Alcide  ,  et  ne  suis  point  leurs  pas , 


SonViois-toi  qo  avec  moi  ta  dois  fuir  ces  climats,} 

ALCIOE.  ^ 

A)i  !  lie  iroublez  point  ma  victoire  : 
Je  vais,  loin  Je  vos  yeux,  et  loin  de  ce  séjour, 

A  foicc  d'exploits  et  de  gloire. 
Faire  à  tons  les  niortcls  oublier  mon  amour. 

SCÈNE  VI, 

ABGINE. 

Dieux  \  quels  nouveaux  mépris  I  et  «piel  adieo  i)arfa«rq 

Le  cruel  me  fuit  sans  retour  ; 
C'en  est  trop;  tout  mon  cœur  contre  lui  se  déclare , 
lia  Haine  et  la  Vengeance  en  bannirent  rAmoor; 

Va,  que  bientôt  les  Enménides, 
Vomissent,  dans  ton  sein,  leurs  poisons  et  leurs  fenx; 
^Que  leurs  setpens,  que  leurs  mains  homicides 
Te  plongent  dans  des  maux  et  des  crimes  aflreiix> 

Que  le  courroux  des  Dieux  t'accable  , 
4Jue  bientôt  en  mourant  tes  cris  troublent  les  ^irs^ 
Puisse-tu  terminer  ton  destin  dj^plorable,  ' 

Dans  des  tourmens  inconnus  aux  enfecs^ 

Toi ,  dieu  barbare ,  toi  qu'en  ces  lieux  on  révère , 
Devais-tu  m'cnflammer  -si  je  ne  pouvais  plaire? 
Cesse,  ciucl  Amour,  de  troubler  les  mortels 
J'ureurs,  venez  $^rvir  un  caur  qu'il  désespère, 
Délruisez  à  mes  yeux  son  temple  et  ses  aatels. 

(Des  furies  brisent  Iç  temple  de  PAmuar.j 

•Fin  d'omp^ale. 


TABLE 

kÈGES   GORTËMUES    DA^'S  Cfi  VOtUME. 


,  tr!igédi&-lynqiic  en  ôiiq  actes^  de  Qoinault.  t 
Il ,  tragédie-Iyriqae  en  cinq  actes ,  da  même.  .  Sq 
O,  tragédie-Iyriqae  eo  cinq  actes,  da  méms.  .   m 

ites  de  Roland.  , ^  .   i53 

)E,  tragédie-lyrique. en  cinq  aetes,  du  reéme.  .  i83 

tisseinent  sur  les  opéras  de  Lamotte t3i 

I  pa^itorale- lyrique  en  cbq  actes,  de  Lamotte.  .  a 37 
BÀ]X,tiagédie-lyriqueen  cinq  actes,  de  Qninauk.  3  09 


Gfandt  Opéras.  2.  3q 


\ 


11 


tEB  3-  1961 


fEB  3-  196!